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04/08/2015

Union Européenne : Face au désastre, que peut-on faire ?

 

mardi 4 août 2015, par Jean-Marie Harribey *, Jean Tosti *

L’Union européenne est un désastre total. En son sein, l’Union économique et monétaire est un désastre au carré. La 21e Conférence des parties (COP 21) de l’ONU qui aura lieu à Paris en décembre prochain pour trouver un accord sur le climat s’annonce comme un désastre programmé. Depuis huit ans, la crise ouverte aux États-Unis et qui s’est répandue partout a engendré une somme de désastres sociaux qu’on croyait ne plus jamais revoir. Tout cela parce que les classes dominantes, d’un bout du monde à l’autre, ont fait le choix de renforcer leur modèle financier plutôt que de le corriger, ne serait-ce que modérément. Ainsi, la crise écologique et le réchauffement climatique sont vus comme des occasions de donner une envergure encore plus grande à la privatisation et à la marchandisation des biens naturels, en les transformant en nouveaux actifs financiers. Et, comme si cela ne pouvait aller sans un corollaire, dans le même temps, les peuples se voient présenter la facture de cette crise capitaliste. Comment interpréter autrement la violence de la pression exercée contre le peuple grec depuis qu’il a osé élire un gouvernement promettant de rompre avec l’austérité et d’engager un programme de réformes structurelles positives et non pas négatives ?

Tels sont les événements dont nous sommes les témoins, et dont le caractère dramatique tient bien sûr au délabrement économique et social qui est imposé à la Grèce, mais aussi à la négation du principe même de la démocratie. Un peu comme si cette démocratie, inventée en Grèce il y a 2500 ans, devait être éradiquée parce que son existence était un obstacle à la poursuite d’une accumulation financière infinie. Les peuples votent contre l’austérité, eh bien, on va leur en administrer une dose supplémentaire, histoire de leur apprendre qui commande. La reddition du gouvernement Syriza, obtenue le couteau sous la gorge, a beau être parée du terme « accord », elle n’en rappelle pas moins les accords de Munich qui, en 1938, ouvrirent la période la plus tragique du XXe siècle [1], laquelle avait suivi le traité de Versailles de 1919, aussi funeste qu’imbécile.

La fenêtre qui avait été entrouverte en Grèce en janvier dernier a été brutalement refermée par dix-huit chefs d’État ou de gouvernement et les responsables de ladite « troïka », représentants zélés d’une oligarchie financière, qu’on croyait sans visage, mais qui apparaît de plus en plus nettement : Draghi, ex-responsable de Goldman Sachs en Europe qui avait maquillé les comptes publics de la Grèce pour faire entrer celle-ci dans l’euro ; Juncker, ex-évadeur fiscal diplômé ; Lagarde, appelant à alléger la dette de la Grèce sauf celle envers le FMI ; Schäuble, chrétien-démocrate exécuteur en chef, etc.

Face à un tel désastre, le pire serait sans doute de baisser les bras, même si la tentation en est parfois forte. Telles des fourmis, il nous faut continuer à travailler pour préparer le retour de conditions plus favorables à l’inversion des rapports de force. La modeste contribution d’une revue comme Les Possibles se situe là. Nous poursuivons ainsi dans ce numéro l’exploration des thématiques qui sont, à notre avis, porteuses des enjeux principaux pour l’avenir : après, notamment, la protection sociale, l’écologie, les biens communs et la monnaie, nous abordons ici le thème de la connaissance en tant que construction typiquement humaine, potentiellement apanage de l’humanité entière, mais très menacée par la marchandisation généralisée. Deux textes théoriques ouvrent le dossier : celui de Carlo Vercellone, qui relie l’appropriation de la connaissance à l’évolution du rapport entre capital et travail ; celui de Gérard Duménil et Dominique Lévy, qui explique que le capitalisme managérial est fondé sur le rapport entre savoir et pouvoir.

Le rapport de classes est encore au centre de l’article d’Hervé Le Crosnier qui pose la question « à qui appartient la connaissance ? », pour montrer que de nouvelles formes de domination apparaissent dans la production et l’usage de la connaissance, ouvrant la voie à une seconde phase de la mondialisation qui instaure un ordre mondial de l’usage des savoirs.

Gérard Collet montre l’incidence de l’introduction des techniques d’information et de communication dans l’éducation. Évelyne Perrin examine les luttes qui ont été menées en France autour de l’accès à l’éducation dans un environnement marqué par la pénétration des entreprises dans ce secteur. Martine Boudet prend la crise de l’enseignement des lettres comme exemple de la pression exercée dans le domaine culturel par le néolibéralisme. Michel Thomas et Jean-Claude Salomon étudient le processus de création/destruction des connaissances médicales. Nous publions aussi le Manifeste contre la marchandisation de l’éducation de la Fédération internationale des Centres d’entraînement aux méthodes d’éducation active. Claude Calame se demande comment l’anthropologie peut aider à poser un regard critique sur les sciences sociales et donc sur l’objet de ces sciences, la société. Enfin, Gilles Rotillon dissèque les prétendus préceptes moraux de Jean Tirole, porte-parole d’un discours économique très libéral.

La partie « Débats » de la revue est composée de trois ensembles. Le premier fait écho à un débat ouvert par Edwin Le Héron dans le précédent numéro, concernant le concept d’illégitimité de la dette. Lui répondent ici Éric Toussaint qui rapporte un extrait de la Commission pour la vérité sur la dette grecque, Pascal Franchet et Catherine Samary. Il ressort de ce débat, on ne peut plus actuel et sensible, qu’il ne peut en rester au plan de l’abstraction. Il est d’emblée très politique, car il traduit un état du rapport de force entre créanciers et débiteurs et il oblige à porter un regard historique sur la genèse de l’engrenage de la dette publique. C’est un préalable pour que soit vu comment les financiers s’organisent afin de rendre perpétuel le versement de la rente, et aussi pour que soit compris que, malgré cela, le principe de l’endettement est consubstantiel aux sociétés et à l’action publique. Ce qui renvoie à notre précédent dossier sur la monnaie.

Un deuxième ensemble de textes porte sur les BRICS et l’Amérique latine. Tour à tour, Peter Wahl, Pierre Salama et Pierre-Luc Abramson proposent des éléments analytiques de sociétés en pleine évolution, traversées par les contradictions du capitalisme mondialisé, mais dans lesquelles des potentialités de transformation sociale existent : Chine, Argentine, Brésil, Mexique. Le tout n’excluant pas des formes de violence extrême comme dans ce dernier pays.

Un troisième ensemble de textes clôture cette partie en revenant à une perspective à la fois historique et théorique. Michael Burawoy fait le point sur les différentes vagues de la théorie du mouvement social. Après celles fondées sur la rationalité (de Durkheim à Weber) et sur les rapports sociaux (Marx), il faut envisager une troisième vague dans la période du néolibéralisme. Aux trois marchandises fictives analysées par Polanyi (travail, terre et monnaie) s’ajoute une quatrième, la connaissance, thème précisément de notre dossier. C’est dans ce contexte que la social-démocratie a abandonné toute idée de transformation sociale pour se ranger derrière la bannière du néolibéralisme. Michel Cabannes, résumant son dernier livre [2], raconte cette dérive qui, aujourd’hui, aboutit à un Hollande défenseur non de la Grèce, mais de la purge qui lui est imposée. Peut-on alors se référer encore à l’idée de progrès ? Oui, répond Alain Accardo, ancien collègue de Pierre Bourdieu, car le progrès est, nous dit-il, un « invariant anthropologique », tout en étant un enjeu entre les classes sociales. Voilà de quoi nourrir un débat autant crucial que controversé.

Ce numéro s’achève bien sûr par la revue des revues préparée par Jacques Cossart. On y trouvera, en lien avec le dossier ci-dessus, un aperçu de la façon dont les institutions (OCDE, Banque mondiale, Agence française du développement, Conseil d’analyse économique) traitent la connaissance. Ce n’est pas sans lien avec la crise écologique, car la préoccupation de décarboniser le développement économique et celle de la préservation versus l’accaparement des matières premières deviennent centrales. L’économie renvoie au politique et au social parce que la corruption et le renforcement des inégalités sont une atteinte à la démocratie. Enfin, les perspectives publiées par le FMI pourraient constituer un signal d’alarme si la croyance en l’éternité de la croissance économique n’était pas profondément enracinée. Et, pour que celle-ci dure encore un peu, quoi de mieux que de poursuivre le pillage de l’Afrique ?

Face au désastre, que peut-on faire, disions-nous en commençant ? À notre niveau, dans cette revue, nous pouvons contribuer à trois choses. Premièrement, donner la parole à des contributeurs dont les points de vue différents peuvent s’avérer utiles. Car, et c’est la deuxième direction, la gravité de la situation – l’expérience subie par la Grèce l’atteste cruellement – montre que la théorie est impuissante si elle ne se traduit pas en perspective stratégique. Or, le renouvellement de la réflexion stratégique des mouvements sociaux et politiques, à un moment où les forces néolibérales viennent de frapper un grand coup en Europe, est une impérieuse nécessité. Troisièmement, peut-être avons-nous aussi besoin d’approfondir concrètement ce que serait un programme de rupture avec les politiques menant aux désastres sociaux et écologiques. Par exemple, que signifie précisément récupérer la maîtrise d’une banque centrale pour qu’elle ne ferme pas le robinet du refinancement monétaire ? Comment fonder, dans une phase de transition, une monnaie parallèle pour desserrer l’étau de la monnaie unique ? À combien chiffrer le besoin d’investissements de transition énergétique et écologique ? S’il faut donner la priorité aux énergies renouvelables, le financement de ces investissements doit-il être privé ou public ? Et on ne quitte pas notre souci actuel : comment peut-on imaginer que la Grèce puisse préparer le renouveau de son appareil productif sur le champ de ruines dans lequel la désastreuse Union européenne va la laisser, pour la plus grande satisfaction des « marchés » et dans le silence assourdissant des syndicats européens ?

La revue Les Possibles va bientôt achever ses deux années d’existence. La quantité de chantiers à ouvrir ou à approfondir nous laisse de belles perspectives de réflexion et d’action. Face au désastre, la résignation ne fait pas partie des options. Il paraît que Donald Tusk, président du Conseil européen « s’inquiète des remises en cause idéologiques nées de la crise grecque » [3]. Il n’a pas tort, et c’est bien pour cela que nous gardons espoir.

Notes

[1Voir J.-M. Harribey, «  1938, Munich – 2015, Berlin   », 14 juillet 2015.

[2M. Cabannes, La gauche à l’épreuve du néolibéralisme, Lormont, Le Bord de l’eau, 2015.

[3Le Monde, 18 juillet 2015.

À propos des auteurs

Jean Tosti est professeur de lettres et membre du Conseil scientifique d’Attac et membre de l’équipe Les Possibles.

Jean-Marie Harribey, économiste, ancien co-président d’Attac France, co-président du Conseil scientifique d’Attac, auteur notamment de La richesse, la valeur et l’inestimable, Fondements d’une critique socio-écologique de l’économie capitaliste (Les Liens qui libèrent, 2013) et de Les feuilles mortes du capitalisme, Chroniques de fin de cycle (Le Bord de l’eau, 2014)

https://france.attac.org/nos-publications/les-possibles/n...

 

 

 

La crise des Lettres en régime néolibéral. Quelles remédiations ?

 mardi 4 août 2015, par Martine Boudet

« Nous sommes aujourd’hui confrontés à une crise des études littéraires, qui s’exprime par les interrogations suivantes : à quoi sert l’enseignement des Lettres ? Faut-il le maintenir ? Et si oui, que faut-il y faire ? » [1] « La crise actuelle des études littéraires est d’abord une remise en cause de leur légitimité. À quoi peuvent-elles servir ? Comment envisager leur avenir ?  » [2] Ces interrogations, mises en exergue dans des essais récents, posent une problématique devenue incontournable : « Aujourd’hui la question porte non sur le comment de la production littéraire et de son étude, mais sur l’existence même de la littérature et l’intérêt de son étude. Au-delà, ce qui est sous-jacent, c’est une crise de civilisation qui embrasse à la fois les nouvelles technologies de la communication et l’identité européenne. » [3]

I- Crise de légitimité des études littéraires

A- Prégnance du capitalisme cognitif et de ses avatars

Cette situation s’intensifie au fur et à mesure du développement d’une économie fondée sur la mise en concurrence et la rentabilisation des biens immatériels. Jusqu’alors, prévalait la conception d’un service public de recherche et d’enseignement qui gérait, de manière certes imparfaite mais relativement équilibrée, les différents champs disciplinaires et leurs relations : cette politique résultait d’un pacte culturel tacite et reconduit de génération en génération. Les carences de la professionnalisation des études littéraires, avérées ou dramatisées, ont constitué un premier symptôme de reflux, qui a entraîné la baisse d’orientation des publics vers les filières correspondantes. Les réformes néolibérales dans l’ESR – l’application de la LRU (loi relative aux libertés et responsabilités des universités), qui a suscité des mobilisations particulièrement fortes dans les départements de Lettres et de sciences humaines, la création de pôles de compétitivité et d‘excellence, dont ceux-ci sont globalement exclus… – ont accéléré le processus, certains secteurs en difficulté devant réorganiser et réduire leurs programmes de recherche et d’enseignement [4].

« Témoigne (de cette crise des études littéraires), entre autres, la perte de crédit social de la filière littéraire dans les lycées. (…) Elle n’est que la traduction mécanique de son déphasage avec la société, que ce soit en termes de compétences professionnelles ou d’attractivité culturelle. » [5]

Un rapport de l’Inspection générale de l’Éducation nationale (IGEN) [6], qui en préconisait la réhabilitation, par l’élargissement du choix de ses spécialités en relation avec l’Université, a été ignoré. À noter aussi qu’au niveau du recrutement des professeurs, Lettres modernes et classiques font paradoxalement partie des disciplines déficitaires. Dans une logique de cercle vicieux, s’ajoute donc à des faits socio-économiques et gestionnaires, dont la démarche est implacable en période d’austérité budgétaire, un reflux d’ordre moral et idéologique, qui gagne la discipline elle-même. Une sourde démobilisation résulte notamment de l’instrumentalisation des technologies d’information et de communication (TIC). Des agences et industries culturelles, dont le fonctionnement est opaque, car peu contrôlé par les pouvoirs publics – à la différence de l’Université et de l’Éducation nationale –, formatent des programmes médiatiques dont le développement spectaculaire et la vitesse de renouvellement captent l’attention des publics juvéniles. Selon l’analyste Bernard Stiegler [7], l’importance acquise par les médias de masse et les industries culturelles résulte directement de l’essor du capitalisme financier ou capitalisme spéculatif : en l’absence de contrepoids idéologiques et législatifs suffisants, ce dernier nuit à l’investissement, à la création et à la production, ne s’inscrivant plus dans une projection à long terme de type développementiste, mais dans une volonté de puissance démultipliée par les outils d’information et de communication.

En résulte l’imposition d’une culture de surface, fondée sur la gestion de l’actualité immédiate (hic et nunc) et sur la consommation de biens immatériels « de première nécessité », en fait souvent frelatés. Entre autres signes des temps, est notable ce brouillage démagogique de la différence entre création et production littéraire, le culte de la quantité que l’on observe dans les « foires aux livres », faisant de ceux-ci des produits éphémères et périssables. En fin de course, une partie conséquente du capital cognitif dont hérite la discipline Lettres est mise en danger, par défaut de transmission et de renouvellement aux plans institutionnel, médiatique, familial, citoyen. Un épisode révélateur de la période fut, lors de la mise en place de la LRU, la référence ironique faite par le président Sarkozy à La Princesse de Clèves [8], comme exemple d’œuvre dont l’utilité à la fois culturelle et commerciale serait contestable. Quand les déterminismes sociaux vouent trop souvent des étudiantes de Lettres à devenir des caissières de supermarchés, quel intérêt y aurait-il, en effet, à étudier ce roman du XVIIe siècle ?

B- Passifs républicains et disciplinaires

Face aux menaces et avancées de ce système de sélection et d’exploitation des biens cognitifs, il devient urgent d’opérer un « brainstorming » inter et intra-disciplinaire. Cela de manière à ressourcer la discipline, à la réenraciner dans les forces vives culturelles, les Lettres étant par leur nature même adaptables et compatibles avec la nouvelle donne, à la fois communicationnelle et cognitive. Le défi de la rationalisation et de l’évaluation lancé par la gouvernance technocratique peut être relevé, en prenant appui sur une plus grande rigueur stratégique et méthodologique en interne. Il y a nécessité d’établir la part des responsabilités des différents protagonistes dans les passifs existants.

Les Lettres apparaissent comme une discipline arrimée à l’État-nation, la « République des Lettres », fleuron national, ayant été un miroir de sa trajectoire au cours des deux siècles passés. Le constat actuel est celui d’une sclérose grandissante de l’institution littéraire – et au-delà de l’Université et de l’École –, du fait d’un enfermement dans un cadre égo-ethnocentré, assimilable à la fois à un cocon et à un carcan. En témoigne le débat non abouti en 2009 sur l’identité nationale, avec ses avatars populistes et xénophobes, accentués en période de crise systémique. Ce débat a coïncidé avec une grève universitaire qui, malgré une forte mobilisation de la corporation, s’est cantonnée à la défense du système existant. Du fait, d’une manière générale, de la minoration des mouvements d’idées et des courants esthétiques depuis la chute du mur de Berlin et de la perte d’influence du marxisme, l’enfermement fréquent des créateurs dans un minimalisme intimiste et psychologisant est un fait notable. Le déficit esthétique est à évaluer aussi au niveau des genres littéraires, mythe et poésie étant mis en sommeil au profit de genres considérés comme mineurs, souvent innovants au demeurant sur un plan technologique ou associés à un art de l’image ou du multimédia : polar, BD… En contrepoint, la critique littéraire est en danger d’atonie. D’où les dérivatifs et les divisions alimentés entre certaines composantes du champ, SHS et Lettres à l’Université, sciences du langage et Lettres dans l’espace scolaire. En résulte une tendance à la déconstruction théorique, au relativisme philosophique, à une certaine extraversion dans l’océan des œuvres, à une certaine impasse subjectiviste de la critique de la réception, à la fuite dans l’univers sécurisant des œuvres patrimoniales, spécialement dans le secondaire. Enfin, si la grande féminisation du champ est un facteur de renouvellement des ressources humaines, elle est aussi actuellement synonyme de fragilisation en l’absence d’une réflexion sur les cultures de genre. Cela au fur et à mesure de l’essor de la technoscience et des TIC, champ quant à lui majoritairement masculin.

II- Un nouveau contexte géo-socio-culturel

A- Rétrospective de l’institution littéraire : mouvements d’idées et courants esthétiques

Les humanités littéraires constituent une instance de médiation symbolique qui doit composer, pour son existence même, avec un double paramètre situationnel, celui de la mondialisation et de la médiatisation des échanges. Pour mémoire, le romantisme a valorisé l’expression des cultures à travers le « printemps des peuples » et l’unification européenne sur ces bases. Le discours de Victor Hugo au Congrès de la Paix de 1849, à Paris, résume bien les termes de cette cause  :

« Désormais, le but de la politique grande, de la politique vraie, le voici : faire reconnaître toutes les nationalités, restaurer l’unité historique des peuples et rallier cette unité à la civilisation par la paix, (…) substituer les arbitrages aux batailles ; enfin, et ceci résume tout, faire prononcer par la justice le dernier mot que l’ancien monde faisait prononcer par la force. »

Les courants les plus créateurs du XXe siècle étaient engagés dans les luttes émancipatrices : le surréalisme animé par André Breton et Louis Aragon est contemporain de la révolution bolchévique et de la résistance aux fascismes, l’existentialisme s’est illustré dans le combat de Jean-Paul Sartre et de Simone de Beauvoir pour l’indépendance des pays colonisés (dont l’Algérie) et l’émancipation des femmes…

Depuis un demi-siècle, combien d’écrivains issus des humanités, peuvent prétendre en France au double statut de créateurs et d’intellectuels au service du progrès social et humain ? À l’image des Voltaire, Hugo, Zola, Breton, Aragon, Éluard, Gide, Malraux, Sartre, Beauvoir, Genet, Duras… Les écrivains précités étaient des leaders d’opinion qui représentaient des écoles et mouvements artistiques – réalisme, surréalisme, existentialisme… – ou qui animaient d’une manière ou d’une autre le débat des idées de leur époque. Achille Mbembe met en garde contre le danger de « provincialisation de la pensée française, de type métropolitain » [9]. D. Maingueneau déplore « l’absence de ces monstres sacrés de la création littéraire si nombreux aux XIXe et XXe siècles, alors même que le monde contemporain devrait appeler des écrivains qui soient à la hauteur de ses bouleversements. » [10] C’est dans les DOM-TOM et dans le monde francophone qu’est maintenue cette conception du créateur engagé dans la république des Lettres et de la cité : Césaire et Senghor sont les pères de la négritude, Glissant et Chamoiseau les porte-parole de la créolité…

B– Francophonie, créolité, littérature-monde en français : quelles perspectives ?

L’institution littéraire – et les secteurs académiques et didactiques correspondants –doit assumer en actes la multiculturalité de la société française, issue d’une longue histoire de découvertes, de conquêtes et de migrations. Aux États-Unis, pays de standard multiculturel, les post colonial studies et les cultural studies s’avèrent un moteur de dynamique interdisciplinaire, de par l’intégration de forces émergentes, d’ordre géo-culturel, anthropologique et sémiologique. Une avant-garde constituée dans les périphéries et marges de la métropole – DOM-TOM, banlieues, anciens pays colonisés –, se construit sur des objectifs dialogiques de dialogue et émancipateurs, car se situant à l’échelle inter-collective et dépassant les clivages culturels et conflits historiques, notamment sur l’axe Nord-Sud. La même dynamique est à cultiver au niveau des relations intra-européennes et inter-régionales : ainsi mise en débat, la conception néolibérale qui prévaut en matière de création et de développement – sur un mode techniciste et individualiste – en serait largement amoindrie.

Le risque de l’hégémonie de la culture anglo-saxonne ne peut par ailleurs être résorbé par le seul apport de la langue-culture française contemporaine, affaiblie, comme expliqué précédemment. Le dialogue interculturel ne peut se contenter non plus de choix éclectiques, sources d’un cosmopolitisme vague, à la différence de démarches ciblées et d’envergure qui assumeraient les compagnonnages nécessaires, avec les cousins romans et francophones –européens, québécois, africains et asiatiques… Un facteur favorisant, les publics juvéniles sont immergés de facto dans une société multiculturelle et mettent en œuvre des stratégies fraternitaires, ancrées dans des modes d’expression largement médiatisés : musiques du monde, poésie chantée… Le film Entre les murs [11], qui porte sur la vie d’une classe de banlieue, pose des questions pertinentes, celles des différences et des relations à cultiver entre individualité (à l’occidentale) et collectivité (propre aux cultures du Sud), entre laïcité à la française et patrimoines religieux, en particulier musulman, entre parité et sexo-séparatisme, entre moi et altérité, entre hétérosexualité et homosexualité… Concernant La journée de la jupe [12], autre film portant sur l’enseignement du français à un public multi-ethnique, son caractère dramatique résulte du dialogue de sourds entre les élèves et la professeure sur la question des humanités à partager et le cruel sentiment d’inadaptation professionnelle expérimenté à ce propos.

Les Lettres classiques peuvent contribuer au dialogue des cultures dans le temps et à travers l’histoire du pays : par comparaison avec nos actuels référentiels, une initiation plus méthodique aux étymologies gréco-latines, aux patrimoines et littératures antiques ne peut que favoriser la réinculturation des publics, le réenracinement dans les origines de la langue-culture française [13]. Malgré leur marginalisation, les langues-cultures régionales et des DOM-TOM ont maintenu de leur côté leur vitalité symbolique ; des travaux interdisciplinaires permettraient de mieux comprendre leur apport au patrimoine national et européen, leur inscription en arrière-plan en faisant des dépositaires de cosmogonies et de sagesses ancestrales et populaires. Il incombe par ailleurs aux Lettres modernes d’assurer la projection dans l’avenir interculturel de l’École. Les personnels anciennement détachés en coopération pourraient réinvestir leur expérience et travailler à la réalisation de cet objectif, face à des publics ciblés, dans les banlieues ou dans les DOM-TOM.

La reconfiguration de l’espace géoculturel apparaît donc comme un enjeu stratégique, comme un facteur d’accompagnement de la démocratisation des relations tant géopolitiques qu’internes à l’espace national, métropolitain. Entre autres moteurs à même de revivifier les études littéraires, il reste à promouvoir le comparatisme littéraire et anthropologique, par exemple à travers l’étude des schémas dialogiques propres à de nombreuses œuvres de la littérature francophone, Le Passé-simple de Driss Chraïbi (1954), Nedjma de Kateb Yacine (1956), L’aventure ambiguë de Cheik Hamidou Kane (1961), Le soleil des indépendances d’Ahmadou Kourouma (1968)…, l’ethno-linguistique, à travers l’étude des systèmes d’interférences linguistiques et culturelles…

Les paramètres de « modèles culturels » et d’« interculturel » font partie d’un logiciel anthropologique intéressant à mettre en œuvre, sur l’exemple réussi de la didactique de la langue-culture en FLE-FLS (français langue étrangère-français langue seconde) ou du cadre européen de l’enseignement des langues vivantes. Le concept de « littérature-monde en français », repris par une quarantaine d’écrivains dans un manifeste [14], suivi d’un essai collectif en 2007 [15], est prometteur, quoique passé inaperçu du grand public à l’époque.

« Oui, la littérature dite “francophone” est vaste, diverse, mondiale, entre en dialogue avec la littérature-monde anglophone – c’est à la France de savoir si elle veut s’insérer ou non dans ce vaste ensemble. La fin de la francophonie ? Oui, si l’on entend par là un espace sur lequel la France mère des arts, dépositaire de l’universel, dispenserait ses lumières. Fin de cette francophonie-là, et naissance possible d’une littérature-monde en français.

Fin aussi d’une conception impérialiste de la langue. Ou bien en effet l’on postule un lien « charnel » entre la nation et la langue qui en exprimerait le génie singulier et, dans ce cas, en toute rigueur, la francophonie s’avoue comme le dernier avatar du colonialisme, ou bien l’on délie le pacte langue-nation, de sorte que la langue, libérée, devienne l’affaire de tous, en tous lieux. »

Telles sont quelques-unes des conditions de la reconduction de l’enseignement littéraire comme activité de transposition des repères et valeurs civilisationnels, notamment à visée éthique. À la légitime conservation du patrimoine linguistico-littéraire, doit s’agréger une démarche transformatrice qui fasse de l’altérité, de l’intersubjectivité, tant au plan collectif qu’individuel, le moteur d’une dynamique humaniste à la hauteur des contextes géo-socio-culturels existants. Une démarche apte à conjurer, ce faisant, les démons tant du relativisme, des racismes que du radicalisme réactionnel, et à faire vivre l’aspiration à une inter-citoyenneté responsable, à un mieux vivre ensemble.

III- Pour une politique cognitive inclusive

A- Un discours de la méthode à actualiser

« Le principal problème des études littéraires n’est pas la rareté de travaux scientifiques de première qualité, mais l’absence de constitution d’une tradition scientifique partagée, ayant une mémoire épistémique explicite. Leur destin dépend donc directement de leur capacité (ou incapacité) à s’engager dans une dynamique cognitive à la fois accumulative et intégrative. (…) Il faut construire de véritables programmes de recherche, identifiables empiriquement, et développer des méthodologies pertinentes eu égard à ces programmes. » [16]

De la nécessité en effet d’un discours de la méthode intégrateur, qui mette en musique la complémentarité des différentes composantes disciplinaires : un plus large consensus méthodologique et critériologique permettrait de fédérer une corporation tentée par les forces centrifuges. L’ère du numérique favorise cette reconfiguration des savoirs, l’informatique étant avant tout une technologie de catégorisation. Réamorcer la pompe de la catégorisation et de la référentialité (au plan cognitif) et des valeurs (au plan idéologique) nécessite de renouveler l’alliance entre humanités littéraires et sciences humaines et sociales (SHS), au premier rang desquelles l’anthropologie culturelle (comme science des appartenances), la sémiologie (en tant qu’étude des représentations médiatisées), les sciences du langage et de l’éducation.

C’est dans cette perspective d’édification du sujet-citoyen que l’enseignement doit être résolument inclusif :

« Le défi auquel nous sommes confrontés, pour que l’enseignement du français, mais aussi plus largement l’idée même de formation littéraire, aient toute leur place dans l’évolution actuelle du système éducatif, c’est au contraire d’ouvrir au besoin la discipline à de nouveaux domaines, c’est de réussir à articuler entre elles ses différentes composantes, pour les mettre au service d’un projet cohérent et attractif. (…) Ce projet ne peut réussir que s’il est intégrateur, s’il fédère et met en cohérence différentes représentations possibles – et légitimes – de la discipline. » [17]

Une instance de médiation à privilégier dans cet ordre d’idées est la didactique disciplinaire, à l’interface de l’académique et du scolaire. Cela dans un champ dont de nombreuses sous-disciplines ne sont quasiment pas enseignées pour l’instant dans le secondaire : la littérature comparée, les sciences du langage et de l’homme notamment… C’est le rôle que devrait jouer la formation initiale et continuée des enseignants, d’autant plus dans les ESPE récemment mis en place et dont la fonction est de former à une « culture professionnelle commune ». Aux côtés d’un enseignement de morale laïque et citoyenne qui convoquerait les valeurs anthropologiques portées par les disciplines dont les Lettres, il reste à réédifier une didactique qui accroisse la scientificité des enseignements-apprentissages.

B- La refondation de l’École au service d’une politique de développement altermondialiste

Le débat sur la réforme des collèges est symptomatique de la période-carrefour qui est la nôtre : ou bien l’École maintient, en s’adaptant aux évolutions socio-culturelles, un service de transmission des savoirs, ou bien elle se referme sur un système cognitif light, adapté aux besoins de l’ingénierie socio-économique dominante et aux normes des industries de programmes. Ce débat s’est concentré sur l’enseignement des langues et de l’histoire, autant de disciplines porteuses de repères et de valeurs à caractère culturel et patrimonial : quelle place accorder aux langues anciennes (latin et grec), régionales (occitan, breton…), européennes (allemand…) dans notre système éducatif ? Le sort des Lettres, et au-delà des SHS, est engagé dans l’alternative précitée : la première version de la réforme préconisait la suppression du latin et du grec comme disciplines à part entière [18]. La demande de leur maintien par l’intersyndicale et les associations disciplinaires [19] ne participe pas foncièrement d’un élitisme de classe (d’une conception bourgeoise de l’École, alimentée pour le maintien de privilèges et d’un capital symbolique exclusif comme dirait Bourdieu), mais principalement de la tradition méritocratique républicaine : par cet ascenseur scolaro-social, des générations d’élèves des quartiers populaires ont pu s’élever, par-delà leur condition d’origine.

« (C’est) une réforme plus bureaucratique que pédagogique qui (…) mettra profondément en cause l’égalité d’accès aux savoirs » : extrait de la pétition à l’initiative de l’intersyndicale dont fait partie le SNES, membre fondateur d’Attac. [20]

Les arbitrages que le ministère a dû conduire pour la réhabilitation des enseignements linguistiques de manière générale, ceux des langues anciennes et régionales, de l’allemand… montre que la sauvegarde des humanités est possible en fonction du principe de diversité culturelle, auquel ne peut être opposé celui de l’égalité républicaine. [21] Entre autres exemples d’interventions pour des rééquilibrages nécessaires, l’on peut citer l’appel, à l’initiative de Barbara Cassin et d’autres, « pour une refondation de l’enseignement des Humanités » [22].

Dans cet ordre d’idées, la création d’une option « français langue étrangère » au CAPES de Lettres modernes (2013), est à saluer [23], elle participe d’une réflexion didactique d’avenir, qui articule les apprentissages linguistiques et culturels. L’expérience pilote du lycée d’Aubervilliers (colloque « Anthropologie pour tous  ») va dans le sens d’une meilleure prise en compte des quartiers populaires et multi-ethniques, dans leur spécificité. In fine, pédagogie, anthropologie et géopolitique ont à construire un référentiel commun, de manière à ce qu’éducateurs, parents, jeunes appréhendent leur environnement sous un angle citoyen, selon le cas moins individualiste, euro-nationaliste, ou communautariste. À l’égard d’une gouvernance qui tend à réduire recherche et enseignement à la gestion d’un socle de compétences et de savoirs sources d’employabilité et de rentabilité immédiates, il importe d’élaborer des outils conceptuels et méthodologiques de cet ordre. D’une législation qui défendrait les humanités et sciences sociales comme « biens immatériels de l’humanité », dépend aussi l’avenir d’autres modes de développement.

Pour en revenir aux Lettres, il serait intéressant de promouvoir les démarches suivantes (la liste n’est pas exhaustive) :

  • l’organisation d’États généraux disciplinaires, qui recensent les lignes de force refondatrices, fédératrices et, à ce titre, les problématiques transversales dans le domaine des didactiques linguistique, littéraire et (inter)culturelle ;
  • l’investissement de la recherche-formation dans les secteurs actuellement minorés, qui constituent des ressources en réserve, et la didactisation de leurs fondamentaux : FLE-FLS à corréler à l’enseignement de la littérature francophone, étymologie et lexicologie, grammaire sémantique, pragmatique et analyse conversationnelle, ethno et socio-linguistique, archétypologie, composante intéressante notamment pour la réhabilitation de la lecture des textes poétiques et mythologiques, de même que la sémiotique – sémiologie des œuvres d’art, des médias et du numérique –, littérature comparée, francophone (« littérature-monde en français ») et européenne, féminine (dans le cadre de l’étude des cultures de genre) et juvénile (dans celle des cultures générationnelles), épistémologie auto-réflexive et critique… ;
  • la pérennisation d’un réseau inter-associatif de militants et de correspondants ;
  • le lobbying auprès des décideurs (Conseil supérieur des programmes/CSP, ministère, parlementaires, inspections…), à l’image d’autres mobilisations disciplinaires (en économie par exemple [24]) ;
  • l’investissement des formations initiale et continue en ESPE sur des bases alternatives ou d’expérimentation ;
  • la prospective concernant l’avenir de la filière littéraire auprès du CSP à l’occasion de la réforme des programmes du lycée ;
  • une campagne pour la promotion des spécialités des professeurs de Lettres modernes (linguistique, FLE-FLS, littérature comparée…) et le maintien de la trivalence des Lettres classiques. Et pour la création d’IREF (Instituts de recherche sur l’enseignement en français), sur le modèle des IREM en mathématiques, autre discipline dite fondamentale [25] ;
  • la publication de manuels scolaires et de documents d’accompagnement qui mettent en perspective et optimisent les nouveaux programmes (négociés au préalable), à la faveur d’avancées didactiques qui font consensus ou qui sont largement reconnus.

Notes

[1Vincent Jouve (2010), Pourquoi étudier la littérature  ? P. 7 Avant-propos, Armand Colin.

[2Jean-Marie Schaeffer (2011), Petite écologie des études littéraires. Pourquoi et comment étudier la littérature  ? 4e page de couverture, Éditions Thierry Marchaisse.

[3Dominique Maingueneau (2011), «  À quoi servent les études littéraires   ?  ». Site de Fabula.

[4Marc Conesa, Pierre-Yves Lacour, Frédéric Rousseau, Jean-François Thomas (coord), Faut-il brûler les humanités et les sciences humaines et sociales  ? Michel Houdiard Éditeur, 2013.

[5Jean-Marie Schaeffer (2011), Petite écologie des études littéraires. Pourquoi et comment étudier la littérature  ?, Éditions Thierry Marchaisse, p. 14.

[6Rapport de l’Inspection générale de l’Éducation nationale (2006), «  Évaluation des mesures prises pour réévaluer la filière littéraire en lycée  », p. 7. Trois des cinq dominantes préconisées intéressent directement ou pas l’enseignement des Lettres : littératures et civilisations, arts et culture, communication et maîtrise des langages.

[7À propos de Prendre soin de la jeunesse et des générations de Bernard Stiegler, Flammarion (2008), Julien Gautier, Schole.

[8La Princesse de Clèves de Marie-Madeleine de La Fayette (1678).

[9Achille Mbembe (2013), Sortir de la grande nuit, Essai sur l’Afrique décolonisée, La Découverte Poche.

[10Dominique Maingueneau, Contre Saint Proust ou la fin de la Littérature, Belin, 2006, p 152.

[11Subventionné par un programme de France 2 et par l’Acsé (Agence nationale pour la cohésion nationale et l’égalité des chances), le film Entre les murs de Laurent Cantet, adapté du livre de François Bégaudeau est un produit de la «  diversité  » et obtint la palme d’or au festival de Cannes 2008.

[12Jean-Paul Lilienfeld est l’auteur de La journée de la jupe (2009), primé aux César 2010 (prix d’interprétation féminine pour l’actrice Isabelle Adjani). Là encore, il s’agit d’un travail d’équipe au départ marginal et reconnu pour sa créativité citoyenne.

[13Tel est l’objectif de l’Enseignement pratique interdisciplinaire/EPI (Langues et cultures de l’Antiquité), programmé par la réforme des collèges (2015).

[14«  Pour une ’littérature-monde’ en français  », Le Monde des livres, 15 mars 2007.

[15Jean Rouaud et Michel Le Bris (coord), Pour une littérature-monde, Gallimard, 2007.

[16 Jean-Marie Schaeffer (2011), Petite écologie des études littéraires. Pourquoi et comment étudier la littérature  ? Éditions Thierry Marchaisse, p. 122-123.

[17Boissinot Alain, Présentation des Perspectives actuelles de l’enseignement du français, p. 7 et 35.

[18Fédération internationale des associations d’études classiques (FIEC), «  Lettre ouverte à la ministre sur les conséquences en matière de recherche, de la suppression du latin et du grec comme disciplines  ».

[19«  Enseignement du latin et du grec ancien pour tous les élèves, dans tous les établissements  » (pétition à l’initiative des associations APFLA-CPL (Association des professeurs de français et langues anciennes en classes préparatoires littéraires), APLAES (Association des professeurs de langues anciennes de l’enseignement supérieur), APLettres (Association des professeurs de lettres), CNARELA (Coordination nationale des associations régionales des enseignants de langues anciennes), SEL (Sauvegarde des enseignements littéraires), SLL (Sauver les Lettres)

«  Réforme du collège : non à la fin des langues anciennes    » (pétition).

[20Intersyndicale de l’Éducation nationale (SNES, SNEP, SNETAA, SNALC, SUD, CGT, FO, SIES, SNCL), «  Un autre collège 2016    ».

[21Martine Boudet, «  La place des langues-cultures au collège et dans le système éducatif   », Mediapart, juin 2015.

[22Barbara Cassin et Florence Dupont, «  Appel pour une refondation de l’enseignement des Humanités   », Libération, 15 juin 2015. Pétition.

[23Isabelle Gruca, «  Les enjeux de la création d’une option FLE au Capes de Lettres   », site de l’AFEF.

«  Pour les disciplines FLE/Lettres : cette création, et les implications qui la sous-tendent, initie un rapprochement logique et attendu. La didactique du FLE porte sur l’enseignement d’une langue-culture et, de ce fait, elle entretient des liens privilégiés avec les sciences du langage et les sciences de l’éducation, mais aussi avec la sociologie, l’anthropologie, et les… lettres. Il est vrai que la dimension linguistique prédomine, mais elle ne définit pas à elle seule le FLE : les enseignements de culture et de littérature sont depuis toujours au centre de nombreux programmes dans les institutions en France comme à l’étranger. Le rattachement d’une option FLE au Capes de Lettres permettra un rééquilibrage des interactions avec les disciplines, notamment au niveau de la recherche. Il devrait également susciter l’intérêt des enseignants-chercheurs de lettres afin d’établir une collaboration plus étroite avec le FLE. (…) La création d’une option FLE au Capes de lettres marque bien une ouverture à l’interdisciplinarité, aussi bien au niveau de l’enseignement que de la recherche, et met en exergue la liaison des didactiques professionnelles.  »