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12/03/2013

Greek crisis : la rage - par Panagiotis Grigoriou

 

Le Pirée 28/02
Nos analystes globaux… estiment que la « crise » se propage alors comme une maladie, d’un pays à l’autre. Depuis la France, des amis et lecteurs du blog décrivent une situation qui à leurs yeux paraît de plus en plus alarmante : les nouveaux mendiants parisiens qui s’exprimeraient à la manière des cadres moyens, le parlé vrai de certaines statistiques récentes sur la criminalité qui repartirait en hausse, les appartements de certains amis franciliens qui se font cambriolés comme les nôtres ici et j’en passe. Et surtout, ce chômage, devenu incontournable. Chez nous, cela relève déjà du fait accompli, le coup est comme on dit « acquis » et « encaissé », y compris, pour ce qui est des mutations dans les représentations politiques.



"Notre télévision du petit matin" - 01/03
 
Tandis qu’au parti communiste grec (KKE) on estime que la menace aubedorienne peut-être encore être combattue (déclarations de Aleka Papariga chef du KKE, 28/02), notre télévision du petit matin, préféra débattre de « l’événementialité posthume » du congrès du Pasok, et de l'heure de « gloire » de son chef Venizélos, tout va bien alors. Pourtant récemment, c’est sur une petite pancarte informative athénienne : « Entrée interdite – Attention immeuble dangereux », que la main invisible… de la société a rajouté : « Venizélos salopard ». Les pasokiens imperturbables, prétendent urbi et orbi que plus de cent mille citoyens auraient pris part au vote (de désignation des délégués), « c’est dire combien le mouvement demeure important », car d’après les intéressés eux-mêmes : « le Pasok est increvable » comme titrait de concert une certaine presse mémorandaire la semaine dernière (Ta Nea par exemple – 25/02). La méta-démocratie serait alors autant le règne des cadavres au royaume des vampires que celui des Fonds «Vautour» [vulture funds]. Nous voilà alors rassurés !
 
 
"Devant une église rue Éole avant-hier" (28/02)
 
Devant une église rue Éole avant-hier (28/02), un mendiant assis sur les escaliers de l’entrée, attendait « paisiblement », et sur un mur de cette même église, c’est sans doute la même main… invisible et potentiellement vengeresse de la société qui aurait dessiné des cercueils, sauf que parmi les passants, plus personne n’y prête attention. Par contre, c’était dans une rame du métro athénien (28/01) qu’un autre mendiant, un retraité, a fini par enfin provoquer de l’émotion chez les voyageurs : « Aidez-moi, ma retraite c’est 240 euros par mois, j’ai faim ». Une femme d’un âge apparemment proche de celui de la retraite, (d’ailleurs plus théorique que jamais), a donné deux euros, et elle soupira : « L’année prochaine ce sera notre tour, on y passera tous… ». Il n’y a que la presse gratuite… (et) d’un endoctrinement indéniablement « payant », qui soutient mordicus « que la Grèce n’est pas un pays si pauvre et si malheureux, [puisque] le pays a tout simplement dégringolé de la 24ème place parmi les pays les plus riches de la planète, à la 35ème place» (Athens-Voice, no 425, 28/02). Je dois supposer que ce même argument doit comporter une variante… italienne, sauf qu’au grand dam de Bruxelles et de Berlin, les Italiens ne l’auraient pas alors suffisamment compris la «pédagogie» de la crise.
 
« Jusqu’à présent – écrit l’hebdomadaire politique et satyrique To Pontiki (28/02) – la réaction des peuples aux petits pays de la zone euro, contre l’austérité imposée par l’Europe, l’Allemagne, la Commission, la BCI et le FMI, avec ou sans mémorandum, était jugée insignifiante. D’autant plus, que ces pays ne disposent pas les capacités suffisantes pour s’immiscer dans le destin de la zone euro, sauf s’ils se décident à devenir « ses kamikazes », mais aux conséquences alors incalculables. Il est évident que l’expression de la colère traduite par les résultats des urnes en Italie, au même titre que le rejet de l’austérité et du système politique en Italie, alors troisième économie de la zone euro et septième au monde, c’est déjà autre chose qu’une action « kamikaze ». D’où cette une première asymétrie flagrante entre la situation en Grèce et celle de l’Italie. Pourtant, certains analystes de portée mondiale, grands financiers comme on dit ou même journalistes, se sont empressés à etablir un parallélisme qui à leurs yeux s’imposerait de fait, entre le mouvement de Beppe Grillo et le parti de la Gauche radicale (Syriza) en Grèce. Or, et au-delà des résultats électoraux respectifs en Grèce et en Italie, il n’est en rien : on ne peut pas comparer un mouvement né depuis la sphère de l’Internet, et un parti politique traditionnel de la gauche (…)
 
« Venizélos salopard » - Athènes 28/02
 
Notons tout de même, que la principale asymétrie entre les deux cas, réside dans la manière suivant laquelle, le banquier technocrate et élu d’Angela Merkel a géré son action politique, pour finalement, subir une cuisante défaite électorale. Il n’y a pourtant pas de commune mesure entre Mario Monti et son confrère Papadémos, et encore moins, entre Monti et le funestes gestionnaires politiques de la crise en Grèce. On peut néanmoins penser que cette asymétrie peut s’amoindrir, dans la mesure où une alliance possible entre pays du Sud deviendrait un jour possible. Sur la base bien entendu du refus de la politique d’austérité sauvage, et ce pari est certes difficile mais pas illusoire (…) C’est une véritable baffe que le Merkelisme a reçu (…) désormais, à Bruxelles, à Francfort ou à Berlin, on craint que l’austérité des dernières années risque de dynamiter l’ensemble de la zone euro, ce qui indiqueraient au moins certains indicateurs moins visibles que les résultats électoraux (…) Et au même moment, la France insiste auprès de la BCI, pour que cette dernière rachète une partie de la dette italienne pour ainsi « sécuriser » ce grand pays en avant poste, en prévention d’un éventuel « pilonnage » des titres français de la part des « marchés ». Il n’est rien, les Allemands s’y refusent et n’admettent aucune concession (…) ».
 
 
"Chiens «adespotes »… ayant élu domicile devant les boutiques closes" - Le Pirée 28/02
"Nos sans abri des environs devenus quasi-invisibles" - Le Pirée 28/02
 
En attendant, on peut toujours savourer le calme plat au Pirée, l’air marin à proximité du port, nous, mais d’abord nos sans abri des environs devenus quasi-invisibles, les chats et autres chiens animaux «adespotes »… ayant élu domicile devant les boutiques définitivement closes. La « crise » qui nous change fatalement tant et si peu temps, ne laissera d’ailleurs plus nos bêtes indifférentes… au mémorandum. Il y a à peine deux mois, C., un ami vétérinaire exerçant dans la région de Trikala (Grèce Centrale – Thessalie), me disait que depuis peu, la rage a fait… triomphalement son retour en Grèce « [car] de nombreux cas ont été détectés chez certains animaux, essentiellement renards et chiens, et ceci bien entendu, depuis l’effondrement du système de prévention active mis en place par les services vétérinaires départementaux.
 
"Adespote" - Trikala 02/2013
 
Leurs crédits ont été supprimés, et par conséquent, nous ne pouvons plus recourir au dispositif de distribution des appâts-vaccinants dans les conditions de terrain, d’abord destinés aux animaux vivant dans les zones forestières du Nord du pays, pour ensuite agir de la manière similaire en ville pour ce qui est des populations d’animaux errants [«adespotes»]. Les cas de rage détectés ne sont plus considérés comme étant isolés, donc, on peut craindre un début d’épizootie, et surtout, la transmission de la maladie à l’homme, ce qui s’est déjà traduit sur le terrain, d’une part par l’augmentation du nombre de foyers et de cas de rage animale et d’autre part, par l’aggravation de l’impact du risque rabique sur la santé humaine. Je crois savoir par contre, que nous ne devrions pas disposer de plus de 400 doses de sérum antirabique, d’ailleurs en partie périmées, et ceci pour l’ensemble de la Grèce. Il s’agit de ces piqures que nous administrerons à tout sujet humain contaminé par la maladie, de préférence dans les 24 heures qui suivent la morsure, surtout lorsque l’animal est déjà contaminé. Il me semble alors que dans pas longtemps, nous devrions alors faire face à une première contamination chez l’homme ».
 
Eh bien, c’est fait. Vendredi matin, c’est en découvrant le kaléidoscope du jour et de la crise sous le prisme du quotidien Elefterotypia que j’ai retenu la… grande nouvelle : « C’est l’inquiétude qui règne à propos de la rage, suite à la contamination avérée d’une femme, désormais hospitalisée à Trikala. Ce cas, le premier du genre en Grèce depuis plus de quarante ans, vient de s’ajouter aux quinze autres contaminations récentes, détectées chez des animaux. La maladie a été donc transmise à l’homme, ce qui tente à prouver qu’il s’agirait malheureusement déjà d’une épizootie. Plus précisément, cette femme, habitant la bourgade de Palaiokastro à Trikala, a été mordue par un chat errant qu’elle nourrissait régulièrement chez elle. L’animal a été retrouvé mort par la suite dans une grange à proximité, ce qui a alerté cette personne.
 
"Elefterotypia 01/03 la… grande nouvelle"
 
Elle s’est rendue aussitôt à l’hôpital de la ville et depuis, elle reste sous observation (…) deux test différents ont détecté sa contamination par la rage (…) Le premier cas animal de la maladie a été détecté en Grèce il y a seulement quelques mois, et depuis, quinze animaux au moins en sont morts d’après les autopsies, douze renards, deux chiens-bergers et récemment, ce chat à Trikala. Ce qui inquiète le plus les médecins et les vétérinaires, est que la maladie a été d’abord propagée depuis les animaux sauvages aux populations d’animaux domestiqués et ensuite à l’homme. Le virus de la rage n’est pas détectable aussitôt après la contamination, mais parfois, des semaines, voire des mois après, et cette maladie est mortelle. Selon nos informations, les proches de la patiente, suivent également un protocole de thérapie préventive » (Elefterotypia , 01/03, p. 38).
 
On dira alors que l’austérité c’est la Troïka… plus la rage, (et) les naissances en moins. Le reportage du jour (01/03) nous apprend également (Elefterotypia ) que les naissances en Grèce subissent une baisse de 30%. On y ajoutera la condamnation de l’ancien maire de Thessalonique, Papageorgopoulos pour corruption (une bonne nouvelle enfin), mais hélas et surtout, nos cinq victimes de vendredi dernier (28/02) à Larissa en Thessalie… victimes de l’austérité et du chauffage en bois. Deux étudiants sont morts et trois autres ont été hospitalisés dans un état critique en raison des émanations toxiques d’un chauffage en bois. L’Ordre des Médecins d’Athènes s’adressant le lendemain par communiqué au ministre des finances (et des créanciers) Yannis Stournaras, n’y va pas par quatre chemins : «Vous devriez réaliser que c'est avant tout la vie des Grecs qui doit vous préoccuper, et non pas les objectifs imposés par nos créanciers.
 
"Les naissances en Grèce subissent une baisse de 30%" - Elefterotypia 01/03
 
Le changement de la politique fiscale concernant le fioul domestique, ainsi que l’incapacité des mécanismes de contrôle de l'Etat sur la fraude fiscale dans la distribution des produits pétroliers, a transformé cette pratique jadis courante [se chauffer au fioul] en un véritable luxe, désormais inatteignable. Le ministère doit changer de politique en la matière, pour enfin permettre aux gens d'acheter du pétrole à un prix correct, et pour ne plus recourir à d'autres «solutions», moins onéreuses mais finalement mettant en danger la vie des usagers. C’est malheureusement cette incapacité des mécanismes de contrôle de l'Etat concernant la fraude, que nous payons par le sang des victimes innocentes (sic) car il faut enfin comprendre que le droit au chauffage sûr et abordable doit être évident, au même titre que le droit à la vie, le droit à l'accès à un service de santé de qualité » (Elefterotypia 01/03). Décidément, il y a de quoi avoir la rage dans ce pays…
 
"Adespote" - Athènes 28/02

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