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28/03/2008

collage intégral

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01/03/2008

Une critique de Patrice Maltaverne

« OMBROMANIE », de Cathy GARCIA 
 
Comme c’est à la mode en ce moment, parlons-en, de la poésie féminine ! Le problème est que celle-ci manque de tranquillité. Alors, comme ce sont surtout eux, les discours empesés d’égalitarisme pieux et de lâcheté inimitable qui détonnent dans le paysage actuel, on sera d’autant plus tenté de passer sous silence les quelques textes composant « Ombromanie », pour ne pas déranger le sommeil des injustes.
Eh bien moi, je n’ai pas envie d’obéir à cette injonction facile, même si ma chronique, je le sais, se perdra à coup sûr dans le néant des écritures undergrund.
Cathy Garcia, par ailleurs créatrice de la revue « Nouveaux délits »[1] réussit, tout au long de ces dix sept poèmes en vers libres, à faire parler la vraie révolte, celle qui hélas, faute de pouvoir s’exprimer avec suffisamment de force pour être entendue, faute d’avoir pu identifier clairement le cœur de sa cible, se retourne contre elle-même : « appelez-moi donc stupide », « pathétique est mon nom ».
Les titres des textes composant « Ombromanie » sont déjà tout un poème, qu’ils soient caractérisés par la présence de néologismes, de jeux de mots : « Nasarde », « Aéropère », « Gallimafrée », « Pan urge !», par des énoncés lapidaires « Je n’irai même pas cracher sur vos tombes », « La collection automne-hiver sera terrible », ou encore par des titres d’albums du genre techno metal : « Last call / Before K-O », « Last rung / Burn the ladders ».
La description des violences, réelles ou imaginées, est continuelle dans cette apocalypse, comme s’il fallait conjurer le silence, bien plus effroyable, par de la folle agressivité qui s’exprime à travers une série d’images sans cesse renouvelées : « crever les temples ennemis / sortir leurs viscères / la bile le sang / produire toujours plus / de matière fécale / pour les étouffer ».
Les instruments de torture pleuvent de partout : seringues, serre-gorge, flèches, coups de poings, de couteaux, de ciseaux, poison etc.
C’est que, plus le temps passe, plus, en revanche, les armes de résistance paraissent élimées, face au raffinement de l’automutilation planétaire. Ainsi, l’âge des désillusions arrive tout naturellement : « et moi la ravie du ravi / je broute / au petit malheur / je cueille glane / plume effeuille / dans les champs utopiques / du sursis volé / à ceux qui croient / maîtriser ».
A la fin du recueil, l’ennemi, « ce besoin compulsif de faire d’avoir toujours plus toujours mieux », se montre en plein jour, même s’il demeure intouchable, car bien sûr, les pouvoirs en place et le monde du travail inculquent avec sadisme aux esprits fantasme de la réussite matérielle et culte de la performance auxquels ne peut s’opposer qu’une soif de justice, bien oubliée aujourd’hui.
Face à ce constat implacable, certains pisse-froid de service, qui n’aiment pas à être pris en flagrant délit d’absence de raison, ne manqueront pas de qualifier la poésie de Cathy Garcia d’exagérément noire, comme tend à le suggérer le titre du recueil.
Tout d’abord, je répondrai à ceux là que ces poèmes exagèrent surtout la vie, à travers leurs vers souvent courts, vite découpés, leurs fréquents passages en énumérations exclamatives : « chimique / métabolique / lunaison / feu ! ».
Enfin je leur ferai remarquer, à ces (trop) sages, qu’il n’y a pas dans ces mots là de manque de cœur. Voilà pourquoi la femme finit par devenir chienne, « animal / est le cœur / seule la raison / est froide », tout simplement pour transformer son impuissance à changer les choses en débordement d’énergie pure.
Après de telles preuves d’amour, pourquoi irait-on lui jeter la pierre de l’indifférence ?
 
Patrice MALTAVERNE

OMBROMANIE Editions ENCRES VIVES, Collection Encres blanches, 2 allée des Allobroges 31770 COLOMIERS, 6,10 €
 

[1] Revue Nouveaux délits, http://larevuenouveauxdelits.hautetfort.com/
 

22/12/2007

Vient de paraître chez Encres Vives

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16 poèmes dont :

02/10/2006

COMME UNE CHIENNE

 comme une chienne
qui marche sous la pluie
une légère fièvre
et le poil qui luit
 
comme une chienne
que seul le vent siffle
sans instinct de meute
ni collier à ronger
 
comme une chienne
errante dans une ville grise
sous les ombres dominantes
qui ont liquidé le ciel
 
cette chienne
à talon cassé
qui verse
sur les trottoirs
sa menstruation
quotidienne
 
cette chienne
qui a trop vu de combats
qui ne flaire plus rien
que l’odeur de tes pas
 
tes enjambées de nuit dans la tiédeur de l’absence
la périphérie humide de nos ombres en souffrance
 
et j’aboie
et j’aboie
et les hommes frappent

29/09/2006

ANIMA(L)

je suis un animal
qui s’est trompé d’enveloppe
une bonne bête sauvage
roulure d’humus de vent
d’épines et de lune
 
un animal
qui ne souffre l’humain
que contre tout contre
lové roulé entremêlé 
 
un animal
qui tient entre ses pattes
une tête pensante
qui lui cause
grave tourment
 
des blessures empuanties
dites existentielles
 
animal
est le cœur
seule la raison
est froide
 
je suis un animal à deux griffes
de s’en retourner
sauvage
 
folle dira t-on mais que m’importe le dit
 
je suis juste un animal.
 

27/09/2006

GALIMAFRÉE

excentricités du ver
pour échapper au compresseur
éclater la trame des jours
conventionnés
 
aiguille toxine camisole
chimique spectre cataleptique
affaissement confirmé
 
des poulpes noirs
collent des ventouses
sur les bouches
étouffent
brûlent
 
des insectes
à carapaces molles
escaladent les vertèbres
mordent la nuque
mastiquent les yeux
 
ordures
insanités
et ça grouille ça rampe
ça s’amuse d’un rien
 
les pendules dépressives
se pendent
mais le temps impassible
nous fait en souriant
 
un gros doigt
de pourceau

15/09/2006

NASARDE

Le fiel gicle
des goules trop avides
l’appétit d’illusions
cagoule la rancœur
jusqu’à ce que gorge
crache cendre
 
quand le désir se fait
marionnettiste
qu’il décervelle
rend docile
jusqu’à la nausée
ne reste alors que le rire
pour diluer de vains tourments
 
rire de soi
de se voir
tourner comme fauve
vexé mais affamé
autour d’un butin
déjà faisandé
 
rire de cette absolue naïveté
 
courir après la queue
d’un bébé de chimère
tourner en rond
se la mordre
jusqu’au sang
plus loin encore
et ficher l’orgueil
plus bas que terre
il repoussera
 
appelez-moi donc stupide
 
savoir lâcher
ce que l’on ne tient pas
ne tiendra jamais
 
nous partageons
de toute façon            
le même air
plus ou moins vicié
le même cercle
plus ou moins vicieux
 
le vent se joue du vent
j’ai joué bien avant
 
c’est ce qu’on appelle
une leçon

PAN URGE !

le mouton trans-génique
égayé en troupeaux
sur les plages
ne fond
ni dans les mains
ni dans la bouche
seulement il éjacule
et le sable avale
le sable avale tout

je viendrais moi aussi
me pointer à ton large
girouette maquée au vent
je viendrai la nuit
nue comme l’épice
sous ton pilon

manger le sable
le sable qui avale tout
manger le monde
ton sperme avec

et je recracherai
de tous mes orifices
trahison mensonge
vérités de papier

l’Histoire

et je me viderai
du monde
me viderai de toi
vomirai des larmes
strychnine
juste
pour rire

juste
quelques éclats
en miettes
dans ma paume

on en fera des baumes
on en fera des hommes

DÉBARRASSEZ-MOI!

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grains de beauté
sur le voûté
de l’occident
je dessine des signaux
sur le gravier
 
évadée des grands déclins pâles
dessous les noirceurs
fléchées de boues
je me remorque

CO-AGITATION

Le mal d’être là où l’on ne veut pas
Celui d’être et de n’y être pas
 
Mon cœur s’accoutume au poison
sans cela il y aurait rejet
d’organe
refus de vivre
 
l’esprit enjugué à la pensée
tourne continûment
comme mulet à la noria
mais le puits est sec
 
la pensée pénitentielle
condamne encore
et encore
enchaîne les mains
entrave l’espoir
 
contorsion
constriction
le nœud coulant
la pensée pythone
s’empoisonne
à son propre fumet
 
dans la pénombre
elle touille
touille encore
chaudronnée de lavure
crachats porracés
 
La pensée malgré ses airs
de chattemite
reste une marchande d’orviétan
coupé de chagrin
 
du plaisir
nous laisse à peine
une lèche
à tremper dans le rêche
de la déveine
 
l’amour a beau s’agriffer
il va comme le temps
qui nous est alloué
 
diminuendo
sempre diminuendo
 
et les mouches s’agglutinent
dansent comme devadâsî             
sur nos cadavres en sursis

AUTODAFÉ

la glace des miroirs fond sous mon regard
devient grand fleuve noir
j’ai cru m’y voir
me suis haïe
 
perfection comme cible
je dévore mes flèches l’une après l’autre
recrache les pointes que d’autres
sniffent ou s’implantent
 
pathétique est mon nom
 
toute identité ne peut être qu’usurpée
une prétention un fantasme
parfois fanatique
 
j’ai vu les œufs couvés sous la cendre
d’où naissent lucioles létales papillons sans ailes
ou peut-être juste des chenilles
rouges
 
j’ai jeté il y a longtemps veste par dessus épaule
marché sur les routes devenus sentiers
obscurs
 
j’ai bu il y a longtemps
à la dernière source la dernière goutte
et je crois bien qu’elle avait un goût
de sel
 
et si aujourd’hui porte un nom
on ne m’en a rien dit
 
les reflets sont sans issue
seulement l’écho de l’écho
du silence qui m’a précédée.

14/09/2006

SERRE GORGE

La pluie laisse des copeaux
au creux des abreuvoirs
Les yeux des oiseaux le disent
le ciel devient trop noir
 
octobre enragé
déchire les arbres
cochés de rouge
les crapauds pleurent
sur la vieille margelle
 
tu le sais
jamais tu ne retourneras
sur tes pas
ou ceux d’un autre
et ta main lasse  s’entrouvre
pour laisser couler
la miellée
 
les regrets se laissent compter
un par un
à ton serre-gorge
 
tu sais
le sang
l’aube
la fêlure du regard
où s’engouffre
la lumière
 
et sur le trou sur le
manque
tu poses la première syllabe
d’un nouveau cycle
de sable
 
tu sais
tu sais la roue qui
éparpille
dissout
tu sais l’alternance
la vanité
 
puis tu oublies
et courbée sur l’enclume
commences à forger
ton prochain
serre-gorge