Depuis le premier « plan de sauvetage » de la Grèce en mai 2010, plusieurs pays de la zone euro – l’Irlande (2010), le Portugal (2011), l’Espagne (2012) et Chypre (2013) – ont été contraints de passer sous les fourches caudines de la Banque centrale européenne (BCE), du Fonds monétaire international (FMI) et de la Commission européenne – la « Troïka », en charge de superviser ces « aides ».
A chaque fois, la « potion amère » est la même : l’aide prend la forme de prêts de plusieurs dizaines de milliards d’euros, pour lesquels les pays contributeurs se portent garantie via le Mécanisme européen de stabilité (MES). Cette aide est conditionnée à des « réformes structurelles », censées permettre aux « patients » de retrouver un équilibre des finances publiques et la compétitivité : privatisations, coupes budgétaires, remises en cause du droit du travail… Selon les promoteurs de ces plans d’aide, ces sacrifices douloureux mais nécessaires sont le prix à payer pour sauver les pays – et leur population – guettés par la faillite. Deux études publiées par Attac Autriche prennent pourtant le contre-pied de ce discours : il s’agit en fait moins de sauver les peuples – qui paient le prix fort des mesures drastiques de la Troïka – que de sauver les banques…
Dans une première étude, Lisa Mittendrein étudie les 23 tranches de financement des différents « plans de sauvetage » de la Grèce, pour un total de 206,9 milliards d’euros. Ses conclusions sont sans appel :
- 58,2 milliards ont servi à recapitaliser les banques grecques, au lieu de restructurer ce secteur et de mettre à contribution les actionnaires des banques pour éponger les pertes ;
- 101,33 milliards ont servi à payer les créanciers de la Grèce. Ce qui signifie que ceux qui ont spéculé sur la dette grecque – dont les grandes banques françaises – n’ont pas eu à assumer les risques qu’ils ont pris : ils ont été remboursés aux frais des contribuables européens. En tout, près de 77 % des sommes débloquées pour le « plan de sauvetage » de la Grèce ont bénéficié directement ou indirectement au secteur de la finance… et certainement pas à la population grecque, écrasée par les mesures d’austérité.
La seconde étude montre qu’il en est de même pour le « plan de sauvetage » de l’Irlande, pourtant présenté comme un « succès ». L’Irlande a reçu 67,5 milliards d’euros de prêts pour son renflouement depuis la fin de 2010, et elle a transféré un montant total de 89,5 milliards au secteur financier, dont 55,8 milliards pour les seuls créanciers du pays – parmi lesquels les grandes banques françaises. La situation économique et sociale de l’Irlande demeure désastreuse : stagnation économique, chômage…
Ces deux exemples illustrent le scandale des politiques de la Troïka, qui sacrifient les populations pour mieux servir les intérêts des grandes banques européennes. Il est désormais plus que jamais urgent d’imposer une véritable alternative écologique et sociale en Europe ; et pour ce faire, de s’attaquer au pouvoir démesuré de la finance.
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