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09/02/2015

La faillite du sens commun européen

 

Martin Wolf, FT - Le peuple de Grèce a parlé lors des élections. Le minimum est que les pouvoirs en place écoutent. Mais ils n'écouteront pas. 

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Alexis Tsiprasn, Premier ministre Grec

Parfois, faire ce qui est bien revient à faire ce qui est sage. C’est ce qui arrive en Grèce actuellement. Effectué dans les formes, un allégement de la dette grecque bénéficierait tant à la Grèce qu’au reste de la zone euro.

Cela va créer des problèmes. Mais il seront moindres que ceux créés en jetant la Grèce aux loups. Malheureusement, parvenir à cet accord pourrait bien se révéler impossible.

Pour cette raison, croire que la crise de la zone euro est terminée est une illusion.

Personne ne peut être surpris de la victoire du parti de gauche grec Syriza. Durant la “convalescence”, le chômage grec a grimpé à 26 % de la main-d’œuvre, et le chômage des jeunes Grecs à plus de 50 %. Le PIB est de 26 % inférieur à son plus haut niveau avant la crise.

Mais le PIB est une mesure particulièrement peu appropriée de la dégradation de la santé économique dans ce cas. Le solde des paiements courants actuel est inférieur de 15 % au PIB du troisième trimestre 2008, mais est en excédent depuis le deuxième semestre 2013. Les dépenses en biens et services des Grecs ont donc diminué d’au moins 40 %.

Face à cette catastrophe, il est peu surprenant que les électeurs aient rejeté le précédent gouvernement et les politiques qui ont été appliquées à la demande des gouvernements créanciers, même si à contrecœur.

“L’Europe est fondée sur le principe de la démocratie. Le peuple de Grèce a parlé. Le minimum est que les pouvoirs en place écoutent”

Comme Alexis Tsipras, le nouveau Premier ministre, le dit, l’Europe est fondée sur le principe de la démocratie. Le peuple de Grèce a parlé. Le minimum est que les pouvoirs en place écoutent. Et pourtant, tout ce que nous entendons laisse augurer que la demande d’un new deal sur la dette et l’austérité sera une fois de plus rejetée, plus ou moins sans contrôle.
Un nombre conséquent de bêtises pseudo-vertueuses nourrit cette réaction. Deux positions moralistes, en particulier, se dressent sur le chemin d’une réponse sensée aux demandes de la Grèce.

La première position est que la Grèce a emprunté l’argent, et doit donc le rembourser, quel qu’en soit le coût pour elle.

Par beaucoup d’aspects, c’est le raisonnement qui a conduit à prévoir des peines de prison pour les débiteurs insolvables.

La vérité, cependant, est que les créanciers ont la responsabilité morale de prêter de l’argent sagement. S’ils n’effectuent pas les vérifications d’usage sur leurs créditeurs, ils méritent ce qui leur arrive. Dans le cas de la Grèce, l’ampleur des déficits extérieurs, en particulier, était évidente. Comment l’était la façon dont l’État grec était géré.

Seconde position : depuis le début de la crise, le reste de la zone euro s’est montré extraordinairement généreux envers la Grèce.

Ceci est également faux. Il est vrai que les prêts consentis par la zone euro et le FMI s’élèvent à la somme énorme de 226,7 milliards d’euros (environ 125 % du PIB), ce qui représente globalement les deux tiers du total de la dette souveraine grecque, avoisinant 175 % du PIB.

Mais ces versements ont été effectués pour la plus grande partie, non pas au profit des Grecs, mais pour éviter que les emprunts toxiques du gouvernement grec et des banques grecques ne deviennent des créances irrécupérables. 11 % des sommes prêtées seulement ont directement financé les activités du gouvernement grec. Un autre 16 % a servi à régler des intérêts. Le reste a financé différents types d’opérations sur capitaux. L’argent entrait en Grèce, puis ressortait à nouveau.

Une politique plus honnête eut été de rembourser directement les créanciers. Mais cela aurait été beaucoup trop embarrassant.

Comme les Grecs le soulignent, un allégement de la dette serait normal. L’Allemagne, qui a fait défaut à de multiples reprises sur sa dette nationale et extérieure au cours du XXe siècle, en a bien bénéficié. Ce qui ne peut pas être payé ne sera pas payé. L’idée que les Grecs produiront d’importants excédents budgétaires pendant une génération, pour rembourser l’argent prêté par des gouvernements afin de sauver des créanciers privés de leurs folies, est pur aveuglement. Alors, que faudrait-il faire ? Il faut choisir entre le juste, le commode et le dangereux.

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