Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

02/01/2016

La sauvage des Pyrénées

Histoire. Ils l'avaient surnommée la folle des Pyrénées

 

Cette incroyable histoire a inspiré de nombreux écrivains et des cinéastes. Michel Jourdain a réalisé «La sauvage des Pyrénées», un film diffusé sur France 3./photo © Les films figures libres.
Cette incroyable histoire a inspiré de nombreux écrivains et des cinéastes. Michel Jourdain a réalisé «La sauvage des Pyrénées», un film diffusé sur France 3./photo © Les films figures libres.
 

Elle aurait vécu dans les Pyrénées ariégeoises de 1801 à 1808. Entièrement nue. Cette sauvageonne âgée d’une trentaine d’années, qui au fil des années a vu son visage s’émacier, sa chevelure s’allonger, sa peau se matifier, ses ongles se transformer en longues griffes n’a jamais dévoilé son identité. Même lorsqu’elle fut arrêtée et enfermée à trois reprises. Victime de son mutisme, elle sera surnommée, à tort, la folle des Pyrénées.

 

L’Ariégeois René-Jean Pagès consacre un ouvrage fort documenté à l’histoire de l’énigmatique ermite du Vicdessos (lire ci-contre). «Cette femme aurait immigré en Espagne, en 1793, au moment de la Terreur. Elle aurait fui la France avec son mari», annonce l’auteur. Le couple aurait décidé au printemps 1801 de mettre un terme à leur séjour hispanique forcé et de rentrer en France en passant par l’Andorre. «Ils auraient franchi l’ancien Port d’Aula (actuel port de Rat)», poursuit René-Jean Pagès. «Au cours de ce périple, le couple aurait fait une mauvaise rencontre avec des brigands espagnols. Suite à ce malheureux incident, le mari aurait perdu la vie. La femme aurait été violée».

Elle vivait nue

Esseulée, dépouillée de ses vêtements et choquée, la pauvre malheureuse aurait décidé dans un premier temps de trouver refuge dans les montagnes de l’Est andorran. «Ce n’est qu’au printemps 1801, après la fonte des neiges, qu’elle décide de franchir le col pour se retrouver sans le savoir en France, dans la région du Vicdessos», ajoute l’auteur.

Au milieu de cette nature à l’état brut, elle vivait nue. Eté comme hiver. De quoi se nourrissait-elle ? De noix, noisettes, châtaignes, faines, glands… dont elle fait provision. De mûres, myrtilles, airelles, framboises, nèfles et prunelles. Du miel que dénichaient les animaux, de la sève sucrée des arbres, des poissons qu’elle pêchait, des lièvres, écureuils, insectes, oiseaux, marcassins qu’elle capturait… La sauvageonne aurait même fraternisé avec les ours qu’elle considérerait comme ses congénères. L’hiver, elle se réchauffait auprès d’eux dans leur antre d’hibernation. Elle mena cette vie sauvage et solitaire en toute quiétude pendant plusieurs années jusqu’à ce que des chasseurs de Suc la remarquent.

Repérée par des chasseurs

Nous sommes alors en 1807. Intrigués par cet animal farouche, ils signaleront sa présence à la communauté villageoise. «La nouvelle mit celle-ci en effervescence car elle alimenta toutes les conversations. Dès le lendemain, une véritable escouade de pâtres part à ses trousses dans la haute vallée de Suc», relate l’auteur. Ils eurent tôt fait de la repérer, de la capturer, de la ligoter et de la ramener au village où elle fut hébergée dans une chambre du presbytère de Suc. Interrogé par le curé du village, un certain Joseph Dandine, celui-ci remarqua «des restes de prestances et d’éloquence de sa haute hérédité». La sauvageonne avait «un esprit cultivé» et un «accent pur». Autrement dit, elle s’exprimait en langue française et non en occitan. Autrement dit, elle était tout, sauf folle.

Mise au cachot

Agile comme un isard, elle s’évade du presbytère en sautant par la fenêtre. Elle sera capturée à nouveau en juin 1808 sur ordre du juge de paix et envoyée dans la prison du château de Foix. Au bout de quelques semaines, la sauvageonne tombe malade. Elle sera soignée à l’Hospice de Foix par les Sœurs de Nevers à qui elle mena la vie dure car elle ne voulait pas se vêtir. Elle s’évada de l’hospice. Recapturée une dizaine de jours après, dans les environs de Foix, elle finira dans un des cachots de la tour ronde. La Belle s’éteignit dans ce lieu humide et ténébreux le 29 octobre 1808, à 1 heure du matin. Sans que personne ne s’en émeuve.


Incroyable mais vrai !

René-Jean Pagès s’est pris de passion pour l’incroyable histoire de «La folle des Pyrénées » et il en fait un livre au titre éponyme. «Je suis originaire de Saint-Girons. Ma famille est de Massat, situé derrière la vallée du Vicdessos. J’avais des ancêtres qui vivaient là au moment des faits.» René-Jean Pagès a mené l’enquête pendant 25 ans. «Je me suis référé principalement aux écrits de Bascle de Lagrèze, sous-préfet de l’Ariège en ce temps-là. J’ai trouvé des documents inédits qui sont publiés dans mon ouvrage.» Le résultat est passionnant !

«La folle des Pyrénées», par René-Jean Pagès, éditions Empreinte, 237 pages, 19, 50 €.

 

 

Les commentaires sont fermés.