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14/01/2016

L’histoire oubliée des Tsiganes internés par Vichy en Camargue

 Par Stéphane Hilarion @Culturebox

Mis à jour le 05/01/2016 à 17H20, publié le 05/01/2016 à 16H56

Mur d'images réalisé à partir des carnets anthropométriques qui servaient de papiers d'identité aux Tsiganes français

Mur d'images réalisé à partir des carnets anthropométriques qui servaient de papiers d'identité aux Tsiganes français

© Culturebox / Capture d'écran
 
 

C’est un pan méconnu de notre histoire. L’internement des Tsiganes par le régime de Vichy durant la Seconde guerre mondiale. Une histoire qu'a découvert il y a près de 20 ans le photographe Mathieu Pernot grâce à des archives du camp de Saliers en Camargue. Depuis il a exhumé l’histoire de ce camp et retrouvé des survivants. Une exposition leur rend hommage à Grenoble jusqu'au 23 mai 2016.

Reportage : D.Borrely, B.Le Vaillant

L’histoire commence en 1997 quand Mathieu Pernot alors étudiant en photographie à Arles découvre par hasard l’existence du camp de Saliers près d’Arles.

Aux Archives départementales il tombe sur des centaines de carnets anthropométriques, pièces d’identité des "nomades" mises en place dès 1912, appartenant aux centaines d’enfants, de femmes et d’hommes internés de 1942 à 1944 au camp de Saliers construit par le régime vichyste sur la commune d’Arles en Camargue.
 
Mathieu Pernot va alors se livrer à un véritable travail d’enquête pour exhumer l’histoire de ce camp de concentration et de ses occupants longtemps oubliés par l’Histoire. Et c’est pour combler ce vide que le photographe décide d’aller encore plus loin en tentant de retrouver des survivants de cette période sombre.
 
Des survivants qui contre toute attente ont accueilli à bras ouverts le photographe, contents qu’enfin quelqu’un s’intéresse à leur histoire, à leur témoignage, et leur dise que cet épisode faisait aussi partie de notre histoire collective.  

Photos de survivants du camp de Saliers retrouvés par Mathieu Pernot

Photos de survivants du camp de Saliers retrouvés par Mathieu Pernot

© Culturebox / Capture d'écran

Un camp modèle pour Pétain

Saliers fut avec Lannemezan dans les Hautes-Pyrénées, l’un des deux camps de la zone sud exclusivement réservés aux "nomades". 700 personnes furent internées en Camargue dans des conditions déplorables.
 
Aujourd’hui aucune traces du camp ne subsistent, seules quelques photos sont parvenues jusqu’à nous et les seules images tournées à Saliers le furent en 1952 quand Henri-Georges Clouzot y tourna des scènes de son film  "Le Salaire de la Peur" avec Yves Montand et Charles Vanel. Le camp sera ensuite dynamité et entièrement rasé.

Le camp de Saliers (Bouches-du-Rhône) en 1942

Le camp de Saliers (Bouches-du-Rhône) en 1942

© wikimedia commons

 
En 2006 un mémorial en hommage aux internés de Saliers a été inauguré en Arles grâce à la mobilisation d’associations qui œuvrent pour la reconnaissance du génocide des Tsiganes qui a fait plus de 250 000 morts pour la plupart exterminés dans les camps nazis. C'est le seul mémorial de ce type en France.
 
Il faudra attendre 2010 pour que le gouvernement reconnaisse enfin le rôle des autorités françaises dans l’internement des Tsiganes, sans pour autant envisager une indemnisation des populations concernées. 

L’exposition "Un camp pour les Tsiganes" de Mathieu Pernot complète une autre exposition intitulée "Tsiganes, la vie de bohème ?", témoignage passionnant sur l'épopée des Tsiganes présentée jusqu’au 9 janvier 2017 au Musée dauphinois toujours à Grenoble.

Un des carnets anthropométriques découvert par Mathieu Pernot aux archives des Bouches-du-Rhône à Marseille

Un des carnets anthropométriques découvert par Mathieu Pernot aux archives des Bouches-du-Rhône à Marseille

© Culturebox / Capture d'écran


Exposition "Un camp pour les Tsiganes - Saliers, 1942-1944", au Musée de la Résistance et de la Déportation de l'Isère - Maison des Droits de l'Homme
Du 27 novembre 2015 au 23 mai 2016
14 rue Hébert 38 000 Grenoble
Tel : 04 76 42 38 53
  
Exposition "Tsiganes la vie de bohème" au Musée dauphinois
Jusqu'au 9 janvier 2017
30 rue Maurice Gignoux, 38000 Grenoble.
Tel : 04 57 58 89 01 - entrée gratuite - ouvert tous les jours sauf le mardi de 10h à 19h. 
 

 

 

 

Commentaires

Trés interessant. Une reflexion complementaire dans:
http://paradojas.hypotheses.org/1008

Écrit par : Maria Sierra | 09/03/2016

Deux commentaires:
Primo: la foto des baraques c'est à Rivesaltes pas à Saliers.
Deuxio: la France n'a rien reconnu du tout! L'Europe a instauré en 2015 une journée européenne de la reconnaissance du génocide des tsiganes fixée au 2 août.

Une cérémonie du souvenir a lieu tous les ans à Saliers au mémorial de l'ancien camp RD37, le 23 mai. Elle aura lieu cette année 2016 à 15 heures.

Écrit par : GIGI | 09/03/2016

merci pour ces compléments, l'article n'est pas de moi, je sais que la France n'a jamais reconnu officiellement le samudaripen et qu'elle continue, hélas, d'éluder la question, par contre pour la photo du camp, là je ne sais pas, car elle est associée de très nombreuses fois à Saliers.

Écrit par : Cathy | 09/03/2016

Bravo de faire connaître cette histoire ! Dans leur malheur, les Tziganes eurent un peu de chance : les autorités de la collaboration ne les ont pas livrés aux Allemands qui les massacraient. A la même époque (1942, j'avais tout juste 7 ans. J'étais à Mérignac,après le Fort du Hâ et avant Drancy). Il y avait des républicains espagnols qui qui me donnaient à manger car je les comprenais , parlant le Ladino (Judéo-Espagnol). Prisonniers politiques, en principe protégés, ils ont été livrés à Franco par Maurice Papon. Torturés, ils furent garrottés. Il y eut pas mal d'excès de ce genre à l'époque. Le frère cadet de mon père, Turc de naissance, n'aurait pas dû être arrêté. (Les Turcs, alliés de l'Allemagne avaient obtenu que leurs Juifs ne soient pas inquiétés. Mon oncle, sa femme et mon jeune cousin m'ont rejoint à Drancy et moururent à Auschwitz, avec toute notre famille grecque. A partir de la mi- 1942, René Bousquet décida de faire déporter les Juifs-Turcs aussi ... Ces Gitans ont connu un meilleur sort, tant mieux ...

Écrit par : Claude Mercutio | 10/03/2016

Merci pour votre terrible témoignage, je ne crois pas qu'on puisse cependant parler de meilleur sort, un très très grand nombre de gens du voyage ont péri dans les camps, entre 250 000 et 500 000 Tsiganes, sur les 700 000 qui vivaient en Europe, ont été exterminés et ce fut ignoble pour tout le monde, et une honte pour tous ceux qui ont collaboré à cette horreur

Écrit par : Cathy | 11/03/2016

Les commentaires sont fermés.