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31/03/2018

Qu'est ce que le soufisme? INTRODUCTION AU SOUFISME: RÉALITÉ ET CARICATURES

par Slimane Rezki

 

 

 

 

 

 

LE SHÎ’ISME ET LE SOUFISME. Leurs relations principielles et historiques.

 

par SEYYED HOSSEIN NASR.


L’étude des rapports existant entre le shiisme et le soufisme est assez complexe, aussi bien au point de vue de leur réalité métahistorique que sous l’angle de leur manifestation dans l’histoire. Dans une telle étude, nous n’avons pas à nous occuper de la critique de certains orientalistes qui mettent en question le caractère islamique et coranique du shiisme et du soufisme. Ces critiques se basent sur l’hypothèse a priori qui veut que l’Islam ne soit pas une religion révélée et même que s’il est une religion, il est simplement celle de « l’épée » pour les bédouins du désert, et du coup renient complètement que le côté gnostique et ésotérique de la religion musulmane soit dérivé de la révélation islamique.
Beaucoup d’orientalistes pensent que l’absence des documents historiques, se rapportant aux premiers siècles de l’hégire, corrobore leur thèse comme si la non-existence en soi-même pouvait infirmer l’existence de quelque chose qui aurait pu exister sans avoir laissé des traces écrites que nous pourrions étudier et analyser aujourd’hui. La réalité du shiisme et du soufisme, comme étant des aspects essentiels de la révélation islamique, est trop évidente pour être niée par n’importe quel argument historique. L’arbre étant jugé suivant ses fruits, la spiritualité ne peut être que le fruit d’un arbre dont les racines sont plongées dans une vérité révélée. Renier cette évidente vérité serait comme si nous doutions de la sainteté chrétienne d’un saint François d’Assise, parce que l’on ne dispose pas de documents historiques témoignant clairement des premières années de la succession apostolique. En effet, ce que la présence d’un saint François prouve est le fait opposé, c’est-à-dire que la succession apostolique doit être vraie, même s’il n’existe pas de documents historiques. On pourrait affirmer mutatis mutandis la même chose à propos du shiisme et du soufisme.
En tout cas, cette étude se base sur le fait que le soufisme et le shiisme sont de caractère islamique ; en effet, le shiisme et le soufisme constituent des aspects intrinsèques de l’orthodoxie islamique, compris non pas seulement sous le sens théologique, mais dans toutes les formes révélées.
Le rapport entre le shiisme et le soufisme est compliqué par le fait que ces deux réalités spirituelles et religieuses ne se situent pas sur le même plan de l’Islam. L’Islam a un aspect exotérique (zâhir) et un aspect ésotérique (bâtin), qui constituent avec toutes leurs divisions intérieures la structure verticale de cette révélation. Mais l’Islam se divisant aussi en sunnisme et en shiisme, on peut dire que ces deux constituent la structure « horizontale » de cette tradition.
Mais si ce n’était que cela, la question serait relativement simple en effet, la dimension ésotérique de l’Islam, qui, dans le milieu sunnite, s’identifie presque complètement avec le soufisme, se répercute sur tous les aspects du shiisme, non seulement sur l’aspect ésotérique, mais encore sur l’aspect exotérique.
On pourrait dire que l’ésotérisme ou la gnose islamique s’est cristallisée dans la forme du soufisme dans le monde sunnite tandis qu’il a fécondé toute la structure du shiisme, surtout pendant les premiers siècles de l’ère islamique.

Du point de vue sunnite, le soufisme présente des similitudes avec le shiisme, et il a même assimilé des aspects du shiisme. Le grand historien Ibn Khaldûn écrit : « Donc les soufis furent imprégnés des théories shiites. Les théories shiites ont pénétré si profondément dans les idées religieuses des soufis qu’ils fondaient leur pratique de l’utilisation du manteau (khirqah) surle fait que ‘Alî habilla Hasan al-Basrî d’un tel manteau, et l’obligea solennellement de consentir à suivre la voie mystique. (Donc la tradition commencée par ‘Alî était suivie selon les soufis par al-Junayd, un des maîtres soufiques).
Du point de vue shiite, le shiisme est à l’origine de ce qu’on appellera plus tard le soufisme. Mais ici, par le shiisme, on veut dire les enseignements ésotériques du Prophète, c’est-à-dire les (asrâr) que plusieurs autorités shiites identifient avec la taqîyah des shiites.
Chacun de ces deux points de vue présente un aspect de la même réalité, mais considéré à travers deux mondes qui appartiennent à l’orthodoxie totale de l’Islam. Cette réalité est l’ésotérisme ou la gnose islamique. Si l’on considère le soufisme et le shiisme dans leur manifestation historique, durant les périodes ultérieures, ni le shiisme, ni le sunnisme ni le soufisme sunnite ne dérivent l’un de l’autre. Chacun tient son autorité du Prophète lui-même et de la source de la révélation islamique. Mais si l’on entend par le shiisme l’ésotérisme islamique comme tel, il sera naturel qu’il soit inséparable du soufisme. Par exemple, les Imams shiites jouent un rôle fondamental dans le soufisme, mais en tant que représentants de l’ésotérisme islamique et non pas comme Imam shiite.
Il y a en effet une tendance parmi les historiens musulmans tardifs, aussi bien que chez les savants modernes, à appliquer d’une manière régressive les claires distinctions qui paraitront plus tard aux deux premiers siècles de l’hégire. Il est vrai qu’on peut discerner un élément « shiite », même pendant la vie du Prophète, et que le shiisme et le sunnisme ont leur origine dans la révélation islamique et qu’ils existent providentiellement pour que l’Islam puisse intégrer des éléments ethniques et psychologiques divers dans la communauté islamique. Mais dans les premiers siècles, on ne peut pas discerner les mêmes divisions claires et distinctes que l’on trouvera plus tard. Il y avait des éléments sunnites avec des tendances définitivement shiites. Il y avait aussi des contacts intellectuels et sociaux, établis par les shiites avec des éléments sunnites. En fait, dans certains cas, il est difficile de dire si un auteur particulier était shiite ou sunnite, surtout avant, le IVe-Xe siècle, bien que dans cette période la vie spirituelle et religieuse du shiisme et du sunnisme possède déjà un parfum distinct. Dans ce milieu moins cristallisé et plus fluide, les éléments d’ésotérisme islamique qui, du point de vue shiite, sont particulièrement shiites, paraissent dans le monde sunnite en tant que l’ésotérisme islamique comme tel.
On trouve le meilleur exemple de ce principe dans la position de ‘Ali ibn Abî Tâlib. Le shiisme est essentiellement « l’Islam de ‘Ali », lequel représente pour les shiites l’autorité « spirituelle » et «temporelle» après le Prophète. Dans le sunnisme aussi, ‘Ali est à l’origine de presque tous les ordres soufiques, et il est l’autorité spirituelle par excellence après le Prophète. Le célèbre hadîth, «Je suis la cité de la connaissance et ‘Ali en est la porte », qui est une référence directe au rôle initiatique de ‘Alî dans l’ésotérisme islamique, est accepté par les shiites aussi bien que par les sunnites. Mais «  la régence spirituelle » (khilâfah rûhânîyah) de ‘Ali paraît au soufisme dans le monde sunnite non pas comme quelque chose de shiite, mais comme reliée directement à l’ésotérisme islamique, en soi-même.
Cependant, le cas de ‘Ali et la vénération que lui témoignent
les shiites et les sunnites montrent que des rapports très intimes les rattachent l’un à l’autre. Le soufisme ne possède pas une sharî’ah, il n’est qu’une voie spirituelle (tarîqah) attachée à un rite particulier shari’ite comme le rite malékite ou shâféite. Le shiisme possède une sharî’ah et une tarîqah. Dans son aspect de tariqah pur, le shiisme est presque identique au soufisme tel qu’il existe chez les sunnites. Il y a même certaines confréries soufiques, telles que celle des Ni’matulâhîs, qui ont existé dans les deux mondes des sunnites et des shiites. Outre cela, le shiisme possède, dans son aspect shari’ite et théologique, des éléments ésotériques qui sont apparentés au soufisme. On pourrait même dire que le shiisme, même dans son aspect extérieur, est orienté vers les stations spirituelles (maqâmât-i rûhânî) du Prophète et des Imams, qui sont aussi le but de la vie spirituelle dans le soufisme.
Quelques exemples de ces rapports vastes et complexes entre le shiisme et le soufisme peuvent éclairer les principes que nous avons déjà considérés. En Islam en général et dans le soufisme en particulier, le saint s’appelle wali (waliallâh, ami de Dieu) et la sainteté (wilâyah). Dans le shiisme, toute la fonction de l’Imam est associée avec le pouvoir et la fonction de ce qu’en persan on appelle walâyat et qui dérive de la même racine que wilâyah et a un rapport intime avec elle. Même quelques autorités ont considéré ces deux notions comme étant identiques. En tout cas, selon le shiisme, le Prophète de l’Islam, comme tous les grands prophètes avant lui, a eu en outre la fonction prophétique d’avoir été le messager d’une nouvelle législation divine (nubawwah) et (risâlah), a eu aussi la fonction du guide spirituel et le pouvoir initiatique (walâyat) qu’il a transmis par l’intermédiaire de Fâtimah à ‘Alî, et de ‘Alî à tous les Imams. Etant donné la présence perpétuelle de l’Imam, cette fonction et ce pouvoir sont toujours présents et peuvent guider les hommes dans la vie spirituelle. « Le cycle d’initiation » (dâ’iart al-wilâyah), qui suit «  le cycle de la prophétie » (dâ’irat al-nubuwwah), continue donc jusqu’à nos jours et garantit la présence perpétuelle d’une voie ésotérique en Islam. On peut dire la même chose à propos de wilâyah, parce qu’elle aussi implique une présence spirituelle permanente en Islam, qui donne la possibilité aux hommes de pratiquer une vie spirituelle et d’atteindre à la sainteté. C’est pourquoi certains soufis comme Hakim al-Tirmidhî, se sont particulièrement occupés de cet aspect fondamental du soufisme. Naturellement, il y ades différences entre le soufisme et le shiisme en ce qui concerne la manière dont fonctionne ce pouvoir et la personne qui la représente, aussi bien que celui qui est considéré comme « le sceau de la sainteté ». Mais la similitude entre les doctrines shiites et soufiques est assez remarquable et elle résulte directement du fait que les deux interprétations de la doctrine de wilâyah ou wilâyat sont deux aspects de la même réalité, c’est-à-dire l’ésotérisme islamique qui est lui-même appelé
walâyat.
Parmi les pratiques des soufis, il y en a une qui est intimement reliée, dans le sens symbolique, à la notion de la wilâyah et dans son origine à la notion shiite de walâyat. Cette pratique, le port du manteau et sa transmission par le maître au disciple, symbolise la transmission des enseignements spirituels et la grâce (barakah) particulière associée à l’acte d’initiation. Chaque état de l’Etre est comme un manteau ou un voile qui « couvre » l’état plus élevé, parce que symboliquement le « plus haut » s’associe toujours avec «l’intérieur ». Le manteau soufique symbolise la transmission d’une influence spirituelle qui permet au disciple de pénétrer l’état de conscience « profane » pour atteindre un nouvel état de conscience. Symboliquement, c’est par la vertu de ce manteau ou le voile transmis par le maître au disciple, que celui-ci peut déchirer son propre voile intérieur qui le sépare de Dieu.
Le port et la transmission du manteau et le symbolisme de cet acte et son rapport avec le shiisme sont confirmés par Ibn Khaldûn dans un passage déjà cité. Dans le Hadith-i kisâ’ (la tradition du vêtement) qui est célèbre dans le shiisme, le Prophète appelle sa fille, Fâtimah, aussi bien que ‘Ali et ses fils Hasan et Husayn, et leur demande de se mettre tous autour de lui.
Puis, il prend un manteau et il le place de manière telle qu’il les couvre complètement.
Le manteau et sa transmission symbolisent la transmission de la walâyat universelle du prophète à la forme de la walâyat partielle (walâyat-i fâtimiyah) à Fâtimah et par celle-ci aux Imams.
Il y a une référence directe au symbolisme ésotérique du manteau dans une tradition shiite bien connue, qu’en raison de son importance et de sa beauté, nous citons complètement :
« On a rapporté du Prophète
la paix soit sur lui et sur sa famille ce dit : « Quand je fus ravi au ciel en l’ascension nocturne et que j’entrai au paradis, je vis au milieu de celui-ci un palais fait de rubis rouge. Gabriel m’en ouvrit la porte et j’y vis une demeure faite de perles blanches. J’entrai dans la demeure et vis en son centre un coffre fait de lumière et fermé par une serrure faite de lumière. Je dis : « Ô Gabriel ! Qu’est ce coffre et qu’y a-t-il en lui ? » Gabriel dit : « Ô, Ami de Dieu (habiballâh) ! En elle est le secret de Dieu (sirrallâh), que Dieu ne révèle à personne, sauf à celui qu’Il aime. » Je dis : « Ouvre-m’en le couvercle ? » Il dit : « Je suis un esclave qui suit le commandement divin. Prie ton Seigneur jusqu’à ce qu’Il accorde la permission de l’ouvrir. » J’implorai donc la permission de Dieu. Une voix vint du Trône divin disant : « Ô Gabriel ! Ouvre-la ! » Il l’ouvrit. Je vis en elle la pauvreté spirituelle (faqr) et le manteau (muraqqa’ah). Je dis :
« Qu’est-ce que ce faqr et ce muraqqa’ah ? »
La voix du ciel dit : «  Ô Muhammad, ce sont deux choses que j’ai choisies pour toi et ton peuple (ummah) depuis le moment où Je vous ai créés tous deux. Ces deux choses, Je ne les donne à personne sauf à ceux que J’aime. Et Je n’ai rien créé de plus précieux qu’elles. » Alors le saint Prophète dit : «  Dieu que son Nom soit exalté a choisi le faqr et le muraqqa’ah pour moi, et tous deux sont pour lui les choses les plus précieuses. » Le Prophète tourna son attention vers Dieu et quand il revint de son ascension nocturne (mi’raj), il fit revêtir à ‘Alî le manteau avec la permission de Dieu et sur son commandement. ‘Alî le revêtit et il y cousit des pièces jusqu’à ce qu’il dise : « J’ai cousu tant de pièces sur ce manteau que je suis embarrassé devant celui qui coud. » ‘Ali le fit revêtir à son fils Hasan après lui, puis ce fut Husayn et ensuite les descendants de Husayn l’un après l’autre jusqu’au Mahdi. Le manteau reste avec celui-ci maintenant. »
Ibn Ahi Jumhûr, aussi bien que les commentateurs shiites plus tardifs de ce hadith, ajoute que le manteau revêtu et transmis par les soufis n’est pas le même manteau que celui dont il est question dans le hadîth. Ce que, plutôt, les soufis cherchent à faire, c’est d’arriver à imiter les circonstances de la vêture du manteau telle que le Prophète la fit et, par cet acte, de devenir conscients des mystères divins (asrâr) que symbolise le manteau, dans la mesure de leur capacité.
Toute la question de la wilâyah et du manteau qui la symbolise met en évidence l’élément commun le plus important entre le soufisme et le shiisme, qui est la présence d’une forme ésotérique et cachée de connaissance et d’instruction. L’usage de la méthode du ta’wil, ou herméneutique spirituelle, pour comprendre le saint Qur’ân aussi bien que le « texte cosmique », et la croyance en des degrés de signification à l’intérieur de la révélation, qui sont communs au soufisme et au shiisme, résultent de la présence de cette forme ésotérique de connaissance. La présence de la wilâyah, ou walâyat
, est le garant, dans le shiisme comme dans le soufisme, d’un caractère gnostique et ésotérique dont le ta’wil et le mode caractéristique d’instruction présent en tous deux sont les expressions naturelles.
Etroitement associé à la walâyat est le concept de l’Imam dans le shiisme, car l’Imam est celui qui possède le pouvoir et la fonction de la walâyat. Le rôle de l’Imam est central pour le shiisme, et nous ne pouvons nous occuper ici de toutes ses ramifications. Mais, du point de vue spirituel, il est important de mettre en valeur sa fonction de guide spirituel, une fonction qui ressemble beaucoup à celle du maître soufi. Le shiite cherche à rencontrer son Imam, qui n’est autre que son guide spirituel intérieur, si bien que certains soufis shiites parlent de l’Imam de l’existence de chaque personne (imâm wujûdika). Si on laisse de côté les fonctions shari’ites et aussi les fonctions cosmiques de l’Imam, sa fonction initiatique et son rôle de guide spirituel sont semblables à ceux des maîtres soufis.
De fait, tout comme dans le soufisme où chaque maître est en contact avec le pôle (qutb) de son époque, dans le shiisme toutes les fonctions spirituelles à chaque époque sont intérieurement reliées à l’Imam. L’idée de l’Imam comme pôle de l’univers et celle de qutb en soufisme sont presque identiques, comme c’est affirmé si clairement par Sayyid Haydar Âmulî quand il dit : « Le qutb et l’Imam sont deux expressions ayant la même signification et se référant à la même personne ». La doctrine de l’homme universel (al-insân al-kâmil), exposée par Ibn ‘Arabi, est très semblable à la doctrine shiite du qutb et de l’Imam, comme l’est la doctrine du mahdî développée par les maîtres soufis postérieurs. Toutes ces doctrines se réfèrent essentiellement à la même réalité ésotérique, à la haqîqat al-muhammadîyah, telle qu’elle se présente à la fois en shiisme et en soufisme. Et en ce cas, en tant qu’il s’agisse de la formulation de cette doctrine, il a pu y avoir des influences shiites directes sur les formulations soufies postérieures.
Une autre doctrine, qui est commune aux shiites et aux soufis, bien que sous certaines formes différentes, est la « lumière muhammadienne » (al-nûr al-muhammadî) et la chaîne initiatique (silsilah). Le shiisme croit qu’il y a une « lumière primordiale » passée d’un prophète à l’autre et, après le Prophète de l’Islam, aux Imams. Cette lumière préserve les prophètes et les Imams du péché, en les rendant impeccables (ma’sûm), et leur accorde la connaissance des mystères divins. Pour acquérir cette connaissance, l’homme doit être relié à cette lumière à travers l’Imam qui, suivant le Prophète, agit comme l’intermédiaire de l’homme à l’égard de Dieu dans la quête de la connaissance divine. De la même manière, dans le soufisme, pour obtenir l’accès aux méthodes qui, seules, rendent possible la réalisation spirituelle, l’homme doit être relié à une chaîne initiatique, ou silsilah, qui remonte au Prophète et par laquelle une barakah
coule de la source de la révélation jusqu’à l’être de l’initié. La chaîne s’appuie donc sur la continuité d’une présence spirituelle qui ressemble fort à la « lumière muhammadienne » du shiisme. De fait, les soufis plus tardifs parlent eux-mêmes de la « lumière muhammadienne ». Dans la période primitive, spécialement dans les enseignements de l’Imam Ja’far al-Sâdiq, la doctrine shiite de la « lumière muhammadienne » et la doctrine soufie de la chaîne spirituelle se rejoignent et, comme dans les autres cas, ont leur source dans les mêmes enseignements ésotériques de l’Islam.
Nous voulons finalement, dans cette comparaison entre doctrine shiite et doctrine soufie, mentionner les stations spirituelles et gnostiques (maqâmât-i ‘irfânî). Si nous nous tournons vers une étude de la vie du Prophète et des Imams comme on la trouve par exemple dans la compilation de Majlisi dans le Biâhr al-anwâr, nous découvrons que ces récits sont fondés, plus que tout autre chose, sur les états intérieurs spirituels des personnages considérés. Le but de la vie religieuse dans le shiisme est, en réalité, d’arriver à imiter la vie du Prophète et des Imams et d’atteindre leur état. Bien que pour la majorité des shiites, ceci reste seulement comme une possibilité latente, l’élite (khawâss) y a toujours été pleinement attentive. Les stations spirituelles du Prophète et des Imams, conduisant à l’union avec Dieu, peuvent être considérées comme le but final vers lequel tend la piété shiite et sur lequel est fondée toute la structure spirituelle du shiisme.
Dans le soufisme aussi, le but qui est d’atteindre Dieu ne peut être réalisé qu’en passant par les états (ahwâl) et stations (maqâmat) qui occupent une place si éminente dans les traités classiques du soufisme. La vie soufie aussi est une vie axée sur l’accomplissement de ces états, bien que le soufi ne recherche pas ces états en eux-mêmes, mais cherche Dieu en sa sublime Essence. Il est vrai qu’en soufisme chacun est attentif aux états et aux stations, tandis qu’en shiisme l’élite seule y est éveillée, mais ceci est assez naturel dans la mesure où le soufisme est lui-même le chemin de l’élite spirituelle, tandis que le shiisme concerne une communauté entière, possédant sa propre dimension exotérique et ayant sa propre élite aussi bien que ses croyants ordinaires (‘awâmm). Mais dans la signification spéciale donnée aux stations spirituelles dans les récits shiites de la vie du Prophète et des Imams, il y a une similitude frappante avec ce qu’on trouve en soufisme. Ici encore tous deux se réfèrent à la même réalité, l’ésotérisme islamique, àl’aspect pratique et « réalisé » auquel se rapportent les stations spirituelles.

Article de Seyyed Hossein NASR tiré de « Le shî’isme imamite » aux PUF, 1970.

 

 

Entre sunnites et chiites, quelle différence ?

 

 

 

 

Comprendre le conflit au Yémen en 5 minutes

 

Une vidéo de 2015 comme l'article ci-dessous

 

 

 

 

 

 

Comment s’est construite la « rébellion houthiste » au Yémen ?


Article publié le 05/03/2015

Par Clément Pellegrin

Gouvernement yéménite et partisans houthistes sont engagés depuis 2004 dans une guerre qui a tué environ 10 000 personnes et fait 200 000 déplacés. Celle-ci a connu plusieurs développements, « rounds » ou « hûrûb » (guerres en arabe), avec des déclencheurs à chaque fois différents et des médiations incertaines. La prise du palais présidentiel en janvier 2015 correspond à un nouveau cycle de cet affrontement. La « rébellion houthiste » est actuellement portée par le groupe armé Ansar Allah, que dirige Muhammad al-Houthi, cousin des frères Abd al-Malik et Husayn al-Houthi, deux leaders historiques de la contestation zaydite.

Le Yémen est souvent présenté comme un pays au bord de la scission, entre le nord et le sud, entre zaydites chiites et sunnites chaféites, entre houthistes et wahhabites, en proie à un affrontement par procuration entre l’Iran et l’Arabie saoudite. Ce sont ici davantage des fractures, qui peuvent servir chacune de point d’entrée dans une compréhension des crises yéménites contemporaines. Ainsi, on compare le Yémen à la Syrie ou à l’Irak qui ont subit de violents processus de confessionnalisation, avec l’apparition de milices. Selon cette grille de lecture, largement véhiculée par l’État yéménite et reprise par bon nombre de médias occidentaux, les « rebelles houthistes », de confession chiite, auraient pris Sanaa dans l’intention de rétablir l’ancien imamat zaydite, avec le soutien de l’Iran [1].

Toutefois, les origines du mouvement zaydite étaient bien loin d’un tel mot d’ordre : anti-impérialiste, anti-américaniste, anti-sionniste, sa ligne politique ne détonnait nullement du discours politique ambiant au Yémen. En outre, elle se voulait porter une revivification culturelle davantage qu’un programme politique. A partir de ce moment, le gouvernement yéménite n’a eu de cesse de confessionnaliser la contestation, notamment par le biais d’une stigmatisation de plus en plus forte des zaydites. La réaction d’Husayn al-Houthi, qui dirigeait le mouvement jusqu’en 2004, a été de présenter sa lutte comme une nécessaire défense face à l’agression de l’État. En outre, le régime prétendait lutter contre l’irrédentisme de la région. C’était réécrire l’histoire en essentialisant le mouvement zaydite, c’est-à-dire en ramenant ses militants à une identité supposée d’autant plus facile à stigmatiser. La seconde stratégie du gouvernement a eu une composante régionale, dans le but d’ancrer le conflit dans la guerre contre le terrorisme. Le troisième facteur ayant entretenu le conflit est l’émergence d’une véritable économie de guerre, appuyée sur de solides réseaux de contrebande. Enfin, la dernière actualité du mouvement houthiste semble démontrer une fois de plus son attachement à des enjeux politiques yéménites plutôt qu’à sa supposée participation au terrorisme international.

De la revivification culturelle à l’entrée en politique

En 1990, dans le contexte politique pluraliste qui a accompagné la réunification du Yémen, les élites zaydites se sont dotées d’un parti, le Hizb al-Haqq (Parti du droit ou de la vérité). Dans leur manifeste de la même année, les oulémas réformateurs du parti déclarent l’abandon de l’imamat. Samy Dorlian y voit « le dépassement concentrique des appartenances primordiales [2] », c’est-à-dire non pas tant une dissolution de l’identité zaydite mais l’affirmation de sa compatibilité avec le régime républicain. Dès sa création, le parti al-Haqq a institué un forum de réflexion visant à revitaliser la culture zaydite par l’édition et la diffusion de manuscrits historiques, la Jeunesse Croyante.

Mais il fait scission en 1997, emmené par Husayn al-Houthi, ancien député du Hizb al-Haqq. Ce dernier est alors entré en contestation politique : au niveau local il entendait contrer l’influence salafiste en plein essor, dont le centre était situé à Dammaj (en banlieue de Sa’da) ; au niveau national, il s’est montré en désaccord avec le choix du Président Saleh de se ranger du côté des États-Unis après les attentats du 11 septembre. En 2002, Husayn al-Houthi prononce un discours dans lequel il fustige l’ordre géopolitique mondial, incarné selon lui par l’impérialisme américain et le projet sioniste, deux facteurs menaçant la souveraineté du Yémen. Le slogan illustre bien la perception de la menace dont parle al-Houthi :
Dieu est grand
mort à l’Amérique
mort à Israël
la malédiction sur les juifs
l’islam vaincra

Il interpelle alors le gouvernement yéménite, en l’enjoignant d’orienter sa politique étrangère dans le sens de la résistance. Avec l’intervention américaine en l’Irak en 2003, les partisans de ce slogan se font de plus en plus nombreux. Le gouvernement yéménite, sentant le danger d’une détérioration de ses relations avec les États-Unis, répond par l’arrestation de centaines d’opposants. Bien que l’ancien député et le Président Saleh aient cherché dans un premier temps à discuter, la situation atteint rapidement un point de non-retour.
L’affrontement armé débute le 18 juin 2004, lorsque Husayn al-Houthi est tué lors d’une opération de police visant à le capturer. Son frère, Abd al-Malik al-Houthi, prend alors sa suite. Toutefois, le politologue Laurent Bonnefoy rappelle l’absence d’agenda politique clairement défini chez les houthistes : jusqu’à maintenant, la motivation déclarée d’Husayn et d’Abd al-Malik d’entrer en confrontation armée était la nécessité de se défendre.

Confessionnalisation et stigmatisation

L’équation que propose alors le Président Ali Abdallah Saleh, via la propagande et les intellectuels organiques du régime, est la suivante : le mouvement houthiste est une rébellion d’un groupe de chiites radicaux, emmenée par les sayyid-s, les descendants du prophète et anciens dirigeants du Yémen. Frustrés d’avoir été écartés du pouvoir en 1962, ils mènent une lutte sécessionniste pour rétablir l’imamat zaydite chiite, appuyés par l’Iran dont ils admirent la révolution islamique de 1979.
Dans la guerre contre les houthistes, le président Saleh n’hésite pas à aller à contre courant des évolutions historiques que connaissait la région de Sa’da (au nord du Yémen, région frontalière avec l’Arabie saoudite). Laurent Bonnefoy a mis en évidence que durant les années 1990 et jusqu’à 2004, le mouvement allait dans le sens d’une atténuation de la stigmatisation des zaydites. Le renouveau était vu comme culturel et non politique. Les controverses qui existaient entre salafis et partisans du renouveau zaydite auraient été davantage intellectuelles qu’armées. Or, en stigmatisant les zaydites via la dénonciation des sayyid-s, le président Saleh espérait trouver des alliés sunnites dans les qabili-s, les hommes des tribus. Le régime a considéré en effet que l’opposition confessionnelle salafistes/zaydites [était] déterminée par la fracture sociale qabili-s/sayyid-s. La stratégie n’a fonctionné qu’imparfaitement, puisque la moitié des partisans des al-Houthi demeurent des hommes de tribu. L’un des proches lieutenants (Abdallah Ayda al Rizami) des leaders durant les quatre premières phases de la guerre de Sa’da était lui-même un homme de tribu.

La stratégie de stigmatisation des zaydites a pris plusieurs formes au cours de la guerre de Sa’da : fermetures de librairies, arrestations de personnes à Sanaa en raison de leur provenance de la région de Sa’da, nomination par le ministère des biens de maimorte (Waqf-s) de prédicateurs salafis dans les mosquées zaydites de Sa’da, et réécriture de l’histoire du zaydisme dans la presse [3]. Toutefois, cette communication politique s’appuie sur un retournement des faits : la « rébellion houthistes » aurait un programme politique clair inspiré par l’Iran. Mais celle-ci n’a jamais fait mention de la wilayat al faqih, n’a pas prêté allégeance au guide de la révolution iranienne à l’instar du Hezbollah libanais.

Pour Samy Dorlian, professeur à l’Institut d’Études Politiques d’Aix-En-Provence et spécialiste du Yémen, le facteur discrimination a joué un rôle primordial dans le développement de la guerre de Sa’da puisqu’il a « provoqué des recompositions identitaires chez les citoyens d’origine zaydite [4]. » Ainsi, les houthistes ont été d’abord qualifiés comme tels par la propagande de l’État : « Un des principaux intellectuels et juristes zaydites de Sanaa, al-Murtadâ al-Muhatwarâ, qui dirige le centre d’enseignement al-Badr, mentionne le mécanisme : « C’est parce que l’État désigne sans cesse certaines personnes sous le nom de “houthistes” que ces gens deviennent effectivement “houthistes”. » [5] »

La régionalisation du conflit

La seconde stratégie du régime a été une stigmatisation en externe du mouvement zaydite, en le présentant comme proche de l’Iran et soutenu par le régime des Mollahs. Les houthistes seraient donc une menace globale par leur appartenance au mouvement chiite transnational. Laurent Bonnefoy analyse cette communication politique comme « une volonté manifeste du régime d’intégrer les tensions locales que connaît le Yémen dans un cadre cognitif fixé par l’agenda international et régional [6]. » S’il est vrai que le slogan des houthistes rappelle singulièrement certains mots d’ordre du Hezbollah libanais, et que l’on trouve des portraits de son secrétaire général Hassan Nasrallah un peu partout dans la région de Sa’da, il semblerait que la réciproque ne s’observe pas. Les griefs que cherche à faire reconnaître les houthistes sont yéménites, leur lutte est locale, qu’il s’agisse de leur combat contre les groupes salafis (membres d’al-Islah) ou djihadistes Al Qaïda dans la Péninsule Arabique (AQPA). Le sens de leur slogan, nous l’avons vu plus haut, concerne avant tout la souveraineté du Yémen. En outre, aucun portrait d’al-Houthi n’est présent dans le sud-Liban. Toutefois, la communication politique du régime a porté ses fruits, notamment auprès de certains états du Conseil de Coopération du Golfe, dont le Yémen est candidat à l’adhésion depuis 2006. En 2007-2008, le Qatar a tenté de jouer un rôle de médiation entre les deux partis, en obtenant un éphémère cessez-le-feu. En 2009, le Président Saleh s’est rétracté en déclarant que cette médiation avait finalement contribué à renforcer la rébellion « en lui laissant croire qu’elle était l’égale d’un État [7] ». En août de la même année, la tension monte encore d’un cran et le Président Saleh applique un objectif de la « terre brûlée ». En novembre 2009, l’armée saoudienne entre au Yémen sous prétexte de poursuivre des combattants houthistes qui avaient passé la frontière. Les rares infrastructures (hôpitaux, écoles) présentes à Sa’da sont détruites et le Président impose un cessez-le-feu et le respect par les rebelles de six points (abandon des armes prises aux militaires, réouverture des routes, abandon des positions dans les montagnes, libération des prisonniers civils et militaires, yéménites ou saoudiens, abandon des bâtiments officiels et promesse de ne pas attaquer l’Arabie saoudite).

Les tenants d’une économie de guerre

Le mouvement zaydite a vu le jour dans la ville et la région de Sa’da, au nord du Yémen, frontalière avec l’Arabie saoudite. Il s’agit principalement d’une zone de hauts-plateaux, et qui a été la dernière à rentrer dans la République Yéménite en 1970 : pas par conquête mais par un accord de réconciliation. Par la suite, Sa’da fut écartée des plans de politiques de développement, en infrastructures notamment. Laurent Bonnefoy rappelle que le conflit concerne une zone où les réseaux de contrebande ont pu proliférer en raison du délaissement de l’État. A une vingtaine de kilomètres de Sa’da, dans la ville de al Talh, se tient l’un des plus grands marchés d’armes du Moyen-Orient. La porosité de la frontière avec l’Arabie saoudite ainsi que la proximité de la mer rouge ont facilité l’expansion des trafics. Une économie de guerre s’est rapidement mise en place dans la région, qui a pu susciter l’envie d’une grande part des hommes d’affaires, politiques et militaires yéménites : « la captation des ressources de l’économie de guerre est progressivement devenue un enjeu politique dans la mesure où elle satisfaisait certains intérêts et précipitait une recomposition des équilibres entre groupes concurrents [8] ». La guerre trouve son intérêt également dans la compétition pour l’attribution de l’aide. Au début de l’année 2009, le gouvernement annonce la création d’un fonds de reconstruction de 55 millions de dollars. Les comités qui se sont succédés pour gérer ce fonds étaient composés d’hommes issus des élites tribales locales, de figures politiques nationales et de technocrates. Pour Laurent Bonnefoy, les programmes d’aides ont « favorisé les tensions entre les belligérants, et donc la reprise des combats [9] ».

Le « round » de 2014 : vers un agenda politique plus affirmé ?

Le président Saleh tombe en 2011 à la suite de la pression populaire. Les combats entre le nouveau gouvernement et les houthistes ne tardent pas à reprendre. Dernièrement, les partisans d’Ansar Allah, groupe combattant dirigé par Muhammad al-Houthi, cousin d’Abd al-Malik, sont allés plus loin que la simple défense en se montrant capables d’exercer un certain pouvoir sur l’État.
En septembre 2014, ils rentrent dans la capitale Sanaa pour exiger l’abandon du redécoupage des régions. Selon eux, ce plan de fédéralisation du Yémen allait permettre l’accaparation des régions riches en hydrocarbures par les proches du président Abd Rabbo Mansour Hadi et la division électorale des zaydites, les rendant minoritaires dans leurs régions d’origine. Dans ce nouveau cycle d’affrontement, qui a vu le président partir en exil fin février 2015 à Aden, les houthistes font montre d’un agenda politique plus précis qu’auparavant : ils ont installé un comité révolutionnaire à Sanaa qui concentre les pouvoirs exécutif et législatif, et ont émis une alternative au plan de régionalisation proposé par le Président Hadi : le Yémen devrait être séparé en deux régions administratives. Pour le Président et l’ensemble des observateurs occidentaux, il s’agit là d’un appel à la partition du pays sur fond de coup d’État.

Lire sur Les clés du Moyen-Orient :
- Le Yémen, prochain champ de bataille du Moyen-Orient ? Entretien avec Benjamin Wiacek, rédacteur en chef de La Voix du Yémen
- République Arabe du Yémen (Yémen du Nord), 1970-1990
- Le Yémen de l’imam Yahya (1918-1948) : la difficile création d’un Etat moderne
- Fin de l’imamat zaydite au Yémen (1948-1962)
- Guerre civile au Yémen du Nord (1962-1970)
- Yémen : des fractures toujours ouvertes
- Pour comprendre l’actualité du Yémen : Yémen, une histoire longue de la diversité régionale (de l’Antiquité au XIXe siècle)
- Rébellion chiite au Yémen
- Qu’est-ce qu’Al-Qaïda dans la Péninsule Arabique ?
- Le protectorat d’Aden dans les années 1950

Bibliographie :
- Aymeric Janier, « Les houthistes, révoltés insoumis du Yémen  », Le Monde, 15/12/2013. URL : http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2011/12/15/le...
- François-Xavier Trégan, « Au Yémen, les houthistes parachèvent leur coup d’Etat », Le Monde, 09/02/2015, URL : http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2015/02/09/au...
parachevent-leur-coup-d-etat_4572691_3218.html
- Laurent Bonnefoy, « La guerre de Sa‘da : des singularités yéménites à l’agenda international », Critique internationale 3/ 2010 (n° 48), p. 137-159.
- Laurent Bonnefoy, Frank Mermier, Marine Poirier (dir.), Yémen, le tournant révolutionnaire, Paris, Karthala, 367 p.

Notes :

[1« Le zaydisme est une branche du chiisme née en 740 en Mésopotamie et en Asie centrale autour de Zayd bin ‘Alî al-Husayn, puis institutionnalisée au Yémen par al-Hâdî Ilâ al-Haqq Yahya bin al-Husayn (mort en 911). Cette secte majoritaire dans certaines des hautes terres yéménites est au fondement du régime de l’imamat qui a régné sur tout ou partie du Yémen jusqu’en 1962, soit pendant plus d’un millénaire. Le zaydisme connaît aujourd’hui d’importantes évolutions sur le plan de la doctrine et de son application politique. Elle s’est notamment structurée autour de la réaffirmation du rôle des hachémites (sayyids), « aristocratie » régnante jusqu’en 1962 dont la position politique, religieuse et sociale avait été mise à mal par la révolution républicaine ainsi que par un mouvement historique profond d’égalisation formelle des citoyens (la prétention des hachémites à détenir le pouvoir religieux et temporel s’est vue niée par le système républicain du Nord qui s’appuyait pour l’essentiel sur les tribus, tandis que les hiérarchies traditionnelles étaient mises à mal par l’idéologie socialiste au Yémen du Sud). » Selon Laurent Bonnefoy, « La guerre de Sa‘da : des singularités yéménites à l’agenda international », Critique internationale 3/ 2010 (n° 48), p. 137-159.

[2Samy Dorlian, « L’enjeu identitaire de la guerre de Saada », "confessionnalisation", stigmatisation, recomposition. » in Laurent Bonnefoy, Frank Mermier, Marine Poirier (dir.), Yémen, le tournant révolutionnaire , Paris, Karthala, p 72.

[3Samy Dorlian, L’enjeu identitaire de la guerre de Saada, p. 80 .

[4Ibid p 72.

[5Laurent Bonnefoy, « La guerre de Sa‘da : des singularités yéménites à l’agenda international » p. 140.

[6Ibid p 164.

[7Cité par Laurent Bonnefoy, « La guerre de Sa‘da : des singularités yéménites à l’agenda international », p 154.

[8Laurent Bonnefoy, « La guerre de Sa‘da : des singularités yéménites à l’agenda international », p 159.

[9Ibid, p. 154.

 

 

29/03/2018

Yémen, le chaos et le silence, un documentaire de François-Xavier Trégan (2018)

visible jusqu'au 25 avril sur Arte +7

 

 

 

 

 

 

23/03/2018

Revue Nouveaux Délits n°60

 

 

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Avril 2018

 

Eh bien, voilà un numéro qui n’a pas été simple à réaliser, il a fallu que je m’adapte aux circonstances assez pénibles et aux données qui m’étaient accessibles. Aussi Je profite de cet édito pour remercier infiniment celles et ceux d’entre vous qui ont pu répondre présent(e)s à mon appel à soutien pour le rachat d’un nouvel ordinateur, indispensable, le mien ayant pris définitivement congé après une dizaine d’années de pas trop mauvais services. Merci donc, d’ici quelque temps, une nouvelle machine devrait permettre de poursuivre l’aventure dans de bonnes, voire de meilleures conditions et aussi de stocker à l’abri, entre autres, 15 années de Nouveaux Délits !

 

 Ce n’est pas quelque chose sur quoi j’aime m’étaler mais il faut savoir peut-être que si cette revue existe, c’est par une sorte de passion entêtée de ma part, car elle est réalisée (volontairement) sans subvention et bénévolement, dans un contexte de précarité permanente, qui a d’ailleurs tendance à s’accroître d’année en année et ce numéro 60 a eu un accouchement particulièrement difficile. Cependant, je crois bien qu’au final, c’est un beau bébé ! Un peu étrange, douloureux même, mais riche de toute sa complexité humaine et de cette énergie qui passe dans les mots, qui les traverse et parfois nous transperce, cet appel d’air, ce désir indéfinissable de saisir, en nous et hors de nous par les filets de la parole, ce qui le plus souvent demeure insaisissable.

 

CG

 

 

Je pense donc j’écris. J’écris ce que je ne sais pas dire. Le gouffre entre le semblant et le réel. Réel morcelé, multiplié par un coefficient inconnu, un prisme, un miroir à mille facettes. Toute parole est attaquable, transformable, critiquable. Toute parole pourrait être vaine et pourtant nous avons besoin de ce moyen imparfait de communication, nous sommes des êtres communiquant, nous sommes même des vases communicants. La réalité est absurde. Parler de réalité est absurde. Alors, se raccrocher à quoi ?

À une fleur, à la graine qui va peut-être germer, au nuage qui passe. À un rayon de lune ou de soleil. C’est ça la poésie et pas autre chose, c’est trouver une réalité à laquelle s’accrocher. La nature, la douleur, l’amour, la haine. La possibilité d’échapper à sa propre carcasse.

 

Cathy Garcia in Journal 2001

 

 

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AU SOMMAIRE

 

 

Délit de poésie :

 

፠  Valère Kaletka

፠  Pierre Rosin

፠  Daniel Birnbaum

፠  Joseph Pommier

፠  Florent Chamard

፠  Vincent Duhamel

፠  Antonella Eye Pocelluzi

 

Résonance :

 

Des abribus pour l’exode, Marc Tison, Le Citron Gare éd.

Double fond, Elsa Orroyo (Argentine), Métailié éd.

 

 

Délits d’(in)citations percent la brume des coins de page.

Vous verrez le bulletin de complicité au fond en sortant qui vous fait de gros appels de phares, tout en résistant une fois de plus à la hausse des tarifs postaux (et du reste).

 

 

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Illustrateur : Jean-Louis Millet

jlmillet@free.fr

 

Grand spécialiste en rien mais curieux de tout : dessin, peinture, sculpture, photo, écriture, édition virtuelle, chasse aux connivences & alternatives… ensemble de  ‘’propos’’  mis en actes dans l'animation de blogs et de sites dont "Zen-évasion", site cave-grenier aux malles ego-mystérieuses ; http://www.zen-evasion.com/. Il a déjà maintes fois illustré la revue ainsi que d’autres publications Nouveaux Délits.

 

 

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Soir de printemps -
de bougie en bougie
la flamme se transmet
Yosa Buso

 

 

 

La simplicité joyeuse et volontaire, comme je la vis et l’ai vécue avant même de l’avoir nommée, c’est de savoir apprécier ce qu’on a, quels que soient nos moyens, et ceci sur tous les plans. Pas dans l’idée d’une discipline qu’on s’impose, d’une vertu à cultiver, non, pas d’efforts qui finiront par nous dégoûter, nous révolter et nous faire retomber plus bas qu’au départ, c’est vraiment autre chose. C’est une sorte d’initiation à l’essence du plaisir. C’est d’abord apprendre à regarder les choses à la loupe et à amplifier nos sensations. Lorsqu’on passe près d’une plante à toutes petites fleurs, souvent elle est tellement insignifiante qu’on ne la remarque pas ou à peine, mais si on prend le temps de se pencher et de la regarder de près, alors se révèlent des trésors de nuances, de finesse, de beauté. C’est pourquoi j’aime faire de la macro en photo. En macro une punaise devient un joyau, mais la macro, c’est aussi une façon de voir que l’on peut appliquer à tous les domaines de notre vie. Pas seulement pour aller remuer ce qui ne va pas, ce qui manque, ce qui fait mal, ça en général on sait tous le faire et il faut parfois le faire, mais il faudrait aussi le faire pour aller arroser les minuscules graines de joie inconditionnelle qui n’attendent que notre attention pour s’épanouir. Alors, ça ne veut pas dire se forcer à être d’un optimiste béat ou se voiler la face, bien au contraire, plus on sait apprécier le minuscule, plus on voit aussi la moindre petite ombre triste de ne pas être prise en compte elle aussi, car la vie est faite d’ombres et de lumière et nous avons à apprendre des deux. Les deux sont nécessaires pour prendre conscience, terme emprunté au latin classique « conscientia », la « connaissance en commun », donc quelque chose qui va au-delà de l’individu, quelque chose que nous partageons et que nous devons chacun alimenter autant que possible, afin que l’humanité dans son ensemble puisse évoluer. Ainsi la simplicité joyeuse et volontaire pourrait s’apparenter à une sorte de travail d’alchimiste : en plongeant dans l’infiniment petit, on dégage les éléments les plus élémentaires du réel et il nous est alors possible de transformer le plomb en or. (…)

La simplicité ce n'est pas seulement faire des choses mais c'est aussi et surtout ÊTRE. Faire autant que possible des choix qui nous permettent d’être plutôt que de paraître et/ou d'avoir (deux redoutables diktats), donc que ce soit sur le plan pratique et matériel ou moral, toujours se poser la question de l'utilité, du sens de ce qu'on l'on fait, de ce que l'on achète, de ce que l'on possède, de ce que l'on pense, de ce que l'on dit. L'utilité d'une façon très vaste et le sens et l'impact des choix que nous faisons, comment nous utilisons notre temps et quelle place nous laissons dans notre vie pour l'essentiel. Ce qui veut dire déterminer déjà qu'est-ce qui est réellement essentiel pour nous et là nous trouverons ce qui est essentiel communément à la plupart des êtres humains et puis ce qui nous est essentiel à nous tout personnellement et particulièrement, et pour déterminer cela il faut se connaître, au-delà de ce que nous avons appris, au-delà de ce que nous pensons devoir être ou faire, au-delà de ce que nous pensons devoir prouver et au-delà des attentes que nous pensons être les nôtres ou celles des autres qui nous entourent et de la société elle-même.

 

Cathy Garcia

 

Vous pouvez lire l’intégralité du texte ici http://conscienceauquotidienaccompagnementpersonnalisepourconsommeraut.hautetfort.com/

 

 

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Nouveaux Délits  -  avril 2018  -  ISSN : 1761-6530  -  Dépôt légal : à parution  -  Imprimée sur papier recyclé et diffusée par l’Association Nouveaux Délits Coupable responsable : Cathy Garcia Illustrateur : Jean-Louis Millet Correcteur : Élisée Bec  http://larevuenouveauxdelits.hautetfort.com

 

22/03/2018

Duos, une anthologie de poésie par Lydia Padellec

 

 

 

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dans laquelle je figure donc

 

Le Printemps des poètes a choisi pour son édition 2018 (du 3 au 19 mars) le thème de l’ardeur. A cette occasion la Maison de la poésie Rhône-Alpes publie l’anthologie DUOS préparée par Lydia Padellec (choix des textes, biographies, préface).
Cet ouvrage est le 59e numéro de la revue de création Bacchanales. Il réunit 118 poètes, 59 femmes et 59 hommes en regard, ensemble. Leurs langues inventives, rebelles ou en symbiose avec le paysage, dans l’espace d’une page, se confrontent à la nature, au vivant, à l’environnement, au travail, à la civilisation numérique, à la violence, aux ravages de la guerre et des dominations.

Accompagné par les œuvres d'Anne-Laure Héritier-Blanc.

Avec : Sophie LOIZEAU / Jean-Philippe RAÎCHE, Marie-Clotilde ROOSE / Fredric GARY COMEAU, Cathy GARCIA/François-Xavier FARINE, Séverine DAUCOURT-FRIDRIKSON / Gwen GARNIER DUGUY, Marlène TISSOT / Pierre SOLETTI, Albane GELLÉ / Olivier COUSIN, Murièle MODÉLY / Arnaud BOURVEN, Sandrine CNUDDE / Rhissa RHOSSEY, Murièle CAMAC / Moëz MAJED, Hélène LECLERC / Vincent HOARAU, Myriam ECK / Gilles CHEVAL, Magali THUILLIER / Jean-Marc FLAHAUT, Laure MORALI / Denis POURAWA, Sabine HUYNH / Philippe PAÏNI, Marie-Noëlle AGNIAU / Sylvain THÉVOZ, Jasmine VIGUIER / Morgan RIET, Mérédith LE DEZ / Kouam TAWA, Armelle LECLERCQ / Stéphane BATAILLON, Laurine ROUSSELET /David BESSCHOPS, Sonia COTTEN / Julien SOULIER, Frédérique COSNIER / Pascal LECLERCQ, Anne MULPAS / David CHRISTOFFEL, Cécile A. HOLDBAN / Martin LAQUET, Valérie CANAT DE CHIZY / Emmanuel FLORY, Stéphane MARTELLY / James NOËL, Milady RENOIR / Mathieu BROSSEAU, Natacha DE BRAUWER / Vincent MOTARD-AVARGUES, Samantha BARENDSON / Jean-Marc UNDRIENER, Nathalie YOT / Cédric LERIBLE, Lydia PADELLEC / Simon MARTIN, Maïa BRAMI / Alexis BERNAUT, Cécile GUIVARCH / Étienne PAULIN, Nolwenn EUZEN / Thomas VINAU, Amandine MAREMBERT / Romain FUSTIER, Lucie TAIEB / Jean-Philippe BERGERON, Cécile GLASMAN / Mathieu HILFIGER, Kim DORÉ / Thomas DURANTEAU, Eugénie PAULTRE / Armand DUPUY, Emmanuelle FAVIER / YEKTA, Anne KAWALA / Philippe CLOES, Siham ISSAMI / Cédric LE PENVEN, Samira NEGROUCHE / Vincent CALVET, Mélanie LEBLANC / Guillaume SIAUDEAU, Linda Maria BAROS / Stéphane KORVIN, Adeline BALDACCHINO / Antoine MOUTON, Anne-Emmanuelle FOURNIER / Matthias VINCENOT, Pauline CATHERINOT / Paul WAMO, Catherine HARTON / Yann MIRALLES, Aurélia LASSAQUE / Éric PIETTE, Marie DE QUATREBARBES / Maël GUESDON, Irène GAYRAUD / Jean-Baptiste PEDINI, Geneviève BOUDREAU / Nicolas GRÉGOIRE, Ouanessa YOUNSI / François GUERRETTE, Anne-Cécile CAUSSE / Guillaume DECOURT, Florence VALÉRO / Maxime COTON, Laura VAZQUEZ / Yannick TORLINI, Lysiane RAKOTOSON / Émilien CHESNOT, Virginie FRANCOEUR / Pierre CAUSSE, Natasha KANAPÉ FONTAINE / Martin WABLE

 

20/03/2018

Scalp de Cyril Herry

 

Seuil, coll. Cadre noir, 1er février 2018

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224 pages, 18 €.

 

 

Hans a neuf ans, il a grandi avec sa mère, Teresa et celui qu’il pensait être son père, Stan, bien qu’il aurait préféré que ce soit Jean-Loïc, son père, le compagnon de Léa. Ils ont tous vécu ensemble, dans une région de vastes plaines qui pourrait être la Beauce, sans relief, sans forêt, à huit en colocation plus ou moins joyeuse, adultes, enfants, animaux, potager. «Avant que Stan, le faux père de Hans se fasse la malle en douce avec Léa, et que  Jean-Loïc  (…), quitte la colocation dix jours plus tard pour aller se jeter d’un des plus hauts viaducs de France. »

Alors Teresa a pensé que c’était le moment de parler à Hans de son vrai père et de l’emmener le voir, dans la forêt, là où il vivait, retiré du monde. Une adresse et une photo avait permis de situer le lieu sur google map : Layenne. Étang des Froids. Un campement avec une yourte au bord de l’étang. Une adresse d’où Alex avait envoyé des lettres auxquelles Teresa n’avait jamais répondu

Alex ne sait pas qu’il a un fils, quand il est parti, Teresa ignorait encore qu’elle était enceinte et elle lui en voulait d’avoir choisi entre elle et la nature, entre elle et son combat pour la nature.

«    Il est parti où

  • Défendre la nature avait répondu sa mère. Essayer d’empêcher que des hommes la détruisent pour la recouvrir de béton.»

Quand Teresa et Hans parvienne après une longue route en 4l blanche au campement, la végétation a poussé tout autour de la yourte et il semblerait que personne ne soit venu depuis un moment, mais Hans refuse de partir et c’est avec une détermination sans faille qu’il compte attendre son père.

Dans une ambiance où s’entremêle habilement le calme des lieux et une angoisse diffuse, Scalp est une sorte de roman initiatique, une ode à la fois sombre et lumineuse à la nature et à l’enfance, celle de Hans et celle de l’homme, au lien originel qui les unit étroitement, lui et la forêt. L’histoire en elle-même est très simple, elle se déroule sur quelques jours et quelques nuits et plus la tension monte et plus chacun se rapproche de sa part sauvage, instinctive, le fils, la mère et les hommes du coin.

La toile de fond sociale et politique évoque ce profond fossé, pour ne pas dire un gouffre, entre ruraux de souche et néo-ruraux, entre l’entre-soi des usagers-propriétaires de la nature et les militants écologistes, entre les cow-boys et les Indiens…. 

Il est question ici de sauvagerie, mais de différentes sortes de sauvagerie.

Scalp est un roman noir et envoûtant, original, difficile à décrire car il a quelque chose de vraiment très viscéral, l’auteur fait corps avec cet enfant de neuf ans qui retrouve au contact de la forêt quelque chose de profondément enfoui en lui et que pour rien au monde il ne veut lâcher. C’est un roman bouleversant aussi qui touche à notre essence même, à notre humanité ou notre absence d’humanité.

Cathy Garcia

 

06-ACTU_1523-HERRY_CME-01.jpgCyril Herry est né en 1970 à Limoges et vit à La Croisille-sur-Briance, en Haute-Vienne. Il découvre la photographie aux arts décoratifs de Limoges et continue de la pratiquer, en particulier quand il découvre des lieux abandonnés. Son premier roman, Lille aux mortes, est publié en 2008. Il a dirigé les éditions Écorce depuis 2009, puis est devenu directeur de la collection "Territori" au sein de La manufacture de livres. Découvreur de talent comme entre autres Séverine Chevalier, Franck Bouysse, ou encore Patrick K. Dewdney, Laurence Biberfield et Éric Maneval.

 

 

10/03/2018

El gran dragon, un documentaire de Gildas Nivet et Tristan Guerlotté (2012)

 

 

 

 

06/03/2018

Votation citoyenne pour la sortie du nucléaire

La votation citoyenne aura lieu du 11 au 18 mars.

Cette votation se fera sur Internet et avec des milliers de bureaux de vote physique dans tout le pays.

 

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https://nucleaire.vote/

 

 

 

10:25 Publié dans AGIR | Lien permanent | Commentaires (0)