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26/10/2019

Lobbytomie de Stéphane Horel

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Des choses qu'on n'imagine même pas dans ce bouquin, à lire !!

Lobby des pesticides. Lobby du tabac. Lobbies de la chimie, de l’amiante, du sucre ou du soda. On évoque souvent les « lobbies » de façon abstraite, créatures fantastiques venues du mystérieux pays du Marché, douées de superpouvoirs corrupteurs et capables de modifier la loi à leur avantage. Pourtant, les firmes qui constituent ces lobbies ne sont pas anonymes et leur influence n’a rien de magique. Leurs dirigeants prennent en toute conscience des décisions qui vont à l’encontre de la santé publique et de la sauvegarde de l’environnement.
C’est cet univers méconnu que Stéphane Horel, grâce à des années d’enquête, nous fait découvrir dans ce livre complet et accessible. Depuis des décennies, Monsanto, Philip Morris, Exxon, Coca-Cola et des centaines d’autres firmes usent de stratégies pernicieuses afin de continuer à diffuser leurs produits nocifs, parfois mortels, et de bloquer toute réglementation. Leurs responsables mènent ainsi une entreprise de destruction de la connaissance et de l’intelligence collective, instrumentalisant la science, créant des conflits d’intérêts, entretenant le doute, disséminant leur propagande.
Dans les cercles du pouvoir, on fait peu de cas de ce détournement des politiques publiques. Mais les citoyens n’ont pas choisi d’être soumis aux projets politiques et économiques de multinationales du pétrole, du désherbant ou du biscuit. Une enquête au long cours, à lire impérativement pour savoir comment les lobbies ont capturé la démocratie et ont fait basculer notre système en « lobbytomie ».

 

Stéphane Horel, journaliste indépendante et collaboratrice du Monde, explore de longue date l’impact du lobbying et des conflits d’intérêts sur les décisions politiques. En 2017, son travail sur les perturbateurs endocriniens - qui a donné lieu au livre Intoxication, La Découverte, 2015 - a été récompensé par le prix Louise Weiss du journalisme européenn. En 2018, elle a reçu, avec Stéphane Foucart, le European Press Prize de l'investigation pour leur série sur les Monsanto Papers publiée dans Le Monde.

 

https://www.editionsladecouverte.fr/catalogue/index-Lobby...

 

du même auteur :

 

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C’est l’histoire d’une lutte d’influence qui a un impact sur votre vie, votre petit déjeuner, les testicules de votre fils, le cerveau de votre nièce. En 2009, l’Europe a lancé un compte à rebours : elle a décidé de réglementer les perturbateurs endocriniens et même d’en interdire certains. Omniprésents, ces produits chimiques se nichent dans les pesticides ou les peintures, les tongs ou le shampoing, les lasagnes et votre organisme. Suspectés de participer à l’augmentation des maladies « modernes » comme l’infertilité, les cancers du sein et de la prostate, le diabète ou l’obésité, ils font partie des plus grands défis de santé publique aujourd’hui. Mais les enjeux économiques sont colossaux et les industriels toujours aux aguets. À Bruxelles, leurs puissants lobbies s’activent dans les coulisses des institutions européennes pour influencer cette décision qui menace leurs affaires.
Après trois ans d’enquête et le dépouillement de milliers de pages de documents confidentiels, Stéphane Horel lève le voile dans ce livre sur ces stratégies employées par les lobbies de la chimie, des pesticides et du plastique et leurs alliés pour court-circuiter la réglementation. Ces documents permettent une incroyable plongée dans l’intimité de la correspondance entre lobbyistes et fonctionnaires de la Commission européenne. En direct de la « bulle bruxelloise » où la complaisance à l’égard de l’industrie semble la norme, cette enquête en forme de thriller raconte aussi le combat de ceux qui résistent à l’influence pour défendre une certaine idée de l’intérêt général et de la démocratie.

 

https://www.editionsladecouverte.fr/catalogue/index-Intox...

 

 

 

23/10/2019

Résistances poétiques, par Aurélien Barrau

Par Aurélien Barrau, professeur à l’université Grenoble-Alpes, astrophysicien au laboratoire de physique subatomique et de cosmologie — 20 octobre 2019 à 20:56

Source : Libération

La poésie n’a rien à voir avec la beauté et encore moins avec la mièvrerie. Intransigeante, elle est surtout un moyen politique d’être contre, contre le repliement identitaire, la folie consumériste et technocratique.

Résistances poétiques, c’est le débat qui réunira Edgar Morin, Isabelle Autissier et Erri de Luca, mercredi 6 novembre à Paris, dans le cadre du Forum Libération «Finance solidaire : des idées et des actions pour changer la société».

 

Tribune. Nous n’avons jamais été heureux.

Le monde n’a jamais été doux, harmonieux et apaisé. Les passés idylliques sont de purs fantasmes. La nostalgie du jardin d’Eden est un leurre naïf et presque dangereux.

Pourtant, la violence froide et insidieuse de notre temps ne peut pas ne pas frapper. Violences aux réfugiés, violences aux précaires, violences aux femmes, violences aux minorités, violences aux manifestants, violences à l’espoir, violences à chaque ébauche de différence… Et, bien évidemment : violence à la vie, à la nature, à l’avenir. Désastre écologique avéré, désastre éthique suspecté, désastre esthétique consommé.

Face à l’extinction massive en cours - plus de la moitié de la vie sauvage a déjà été éradiquée en quelques décennies - il serait vital de nouer de nouvelles alliances, d’inventer des solidarités impromptues, de voir émerger d’inévidentes connivences, de travailler aux modes de partage. Le temps devrait être au déploiement d’un activisme «fractal» qui affronte l’immensité disséminée de la métacrise en cours. Tout au contraire, fleurissent partout le repliement identitaire, la crainte de l’étranger et de l’étrangeté, la peur de l’altérité, la folie consumériste et technocratique, le désir simultané de soutenir les libertés prédatrices et d’endiguer les libertés émancipatrices.

Reste le choix d’être poète.

La poésie n’a rien à voir avec la beauté. Moins encore avec le charme mièvre de quelques douces métaphores ou de tendres allégories. Elle n’est ni un divertissement ni une distraction. La poésie, c’est la précision. La poésie, c’est à la fois la maîtrise souveraine de la grammaire, l’humble soumission à la syntaxe, et le droit - presque le devoir - de pourtant réinventer la langue à chaque strophe. La poésie, c’est l’implacable nécessité d’un agencement qui déconstruit en respectant. C’est le choix d’une immense cohérence locale conjuguée avec une espiègle errance globale.

Se faire poète, ici, ça ne signifierait évidemment pas nécessairement écrire des vers. Cela engagerait avant tout à travailler la matrice sémantique et sémiotique pour ouvrir au questionnement tous les construits que nous avons confondus avec des donnés.

La résistance poétique est intransigeante. Elle se dessine au scalpel. Elle est rigoureuse et pointilleuse. Elle cherche à connaître et à comprendre. Elle n’ignore rien des règles ni des codes. Elle débute par une exploration patiente et savante du réel.

Mais elle s’autorise aussi à tout interroger. Elle n’a pas peur de l’ailleurs. Elle n’est pas contrainte par les carcans d’une pensée héritée. Elle tente d’exister, c’est-à-dire de s’extraire, de se désarrimer. Elle ose remettre en cause ce qui n’était jusqu’alors pas même questionable. Elle jubile face à l’incroyable.

Tenter aujourd’hui «d’infléchir» notre fonctionnement systémique pour entamer une «transition» n’a aucune chance de fonctionner et ne présente aucun intérêt fondamental.

C’est l’entièreté de notre manière d’habiter l’espace, de hiérarchiser nos priorités, d’envisager nos réjouissances, de condamner nos agressions, de considérer nos alter ego humains et non humains qu’il faut revoir. C’est d’une révolution qu’il est question. Comment cesser de voir la nature comme une simple ressource ? Comment penser au-delà de nos intérêts à court terme ? Comment outrepasser notre propension à confondre des choix contingents avec un ordre nécessaire ? Et plus profondément encore : comment renverser le sens même de ce qui est indûment ressenti comme mélioratif ? Le défi est immense, incommensurable à tout autre.

Le poétique s’invite dans le jeu non pas au titre de décoration ou de raffinement mais en tant qu’élément essentiel : sans redéfinition des attentes et des possibles, les évolutions demeureront dérisoires. Les violences les plus insidieuses et les plus dangereuses sont presque toujours celles qui n’ont pas encore été identifiées comme telles. Il faut être poète pour penser hors de l’ordre et déceler l’arbitraire de ce qu’une tradition pluriséculaire fait nécessairement apparaître comme inéluctable.

 Si nous restons prisonniers de nos vieux critères, il n’y aura aucune issue. Remettre en cause la croissance illimitée, la prédation décomplexée, la xénophobie revendiquée, l’indifférence assumée, l’arrogance affichée, demande bien plus qu’une évolution : il s’agit de changer de paradigme. C’est toute notre image du monde qui est ici en jeu. Il ne saurait être suffisant, ni même signifiant, d’inventer de nouvelles manières de satisfaire nos vieux démons : il est vital de réenchanter un tout autre «habiter l’espace». Qui ne renie ni les savoirs ancestraux ni les découvertes scientifiques. Mais qui s’autorise - à titre expérimental - toutes les ruptures, toutes les fractures. La langue n’est pas neutre : renommer la croissance du PIB en «taux de divergence suicidaire» aurait sans doute quelques conséquences sur nos ressentis, nommer «autoterrorisme intérieur» notre décision implicite de n’offrir aucun avenir vivable à nos enfants pourrait éveiller quelques consciences. Les mots comptent.

Le poète ne se laisse pas intimider par la dictature malveillante d’une pensée oppressive qui tue chaque possible alternative avant même son éclosion. Comprendre et clamer que le réel pourrait être autre, esquisser l’inchoatif des ramifications avortées, exhiber les modes des mondes manqués constitue le cœur dur de la poésie en acte.

Le poète refuse l’unicité du prisme. Même s’il est révolutionnaire, même s’il est solidaire, même s’il est salutaire. User d’une seule grille de lecture relève nécessairement d’une atrophie radicale. Le subtil démissionne dès que le pullulement est réfuté. Le monde est «plus d’un» de dedans et la pensée échoue tout autant quand elle gomme la multiplicité que quand elle omet la déconstructibilité.

Les résistances poétiques doivent maintenant se disséminer, se déterritorialiser, se chaotiser, se diffracter et s’infecter mutuellement. Il est question d’écriture mais aussi de pensée, de regard, de ressenti, de geste, d’engagement, de désir, de plaisir. Le vivre poétique est tout sauf triste, étriqué et nostalgique. Il est transgressif, précis et aventureux, par essence. Il peut aussi devenir enchanteur, libérateur et salvateur. Par choix.

 

Aurélien Barrau professeur à l’université Grenoble-Alpes, astrophysicien au laboratoire de physique subatomique et de cosmologie

 

 

 

22/10/2019

Aujourd'hui est habitable lu par Alain Lacouchie

 

note parue dans le 130ième numéro de la revue Friches

http://www.friches.org/

 

 

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Je précise que j'adore les chatons dans les corbeilles :-) !

 

 

 

 

 

21/10/2019

Walt Whitman

 

« Je crois qu’une feuille d’herbe n’est en rien inférieure au labeur des étoiles

Et que la fourmi est également parfaite, et un grain de sable, et l’œuf du roitelet,

Et que la rainette est un chef-d’œuvre digne du plus haut des cieux,

Et que la ronce grimpante pourrait orner les salons du ciel,

Et que la plus infime jointure de ma main l’emporte sur toute mécanique,

Et que la vache qui broute tête baissée surpasse n’importe quelle stature,

Et qu’une souris est un miracle capable de confondre des milliards d’incroyants. »

 

 

 

La démocratie des modestes contre la République des immodestes

 

Par ALBIN WAGENER - article du 14 janvier 2019

 

Face à l’une des crises politiques les plus importantes de son histoire récente, la France doit choisir un modèle politique basé sur une démocratie réinventée, loin d’un logiciel dépassé et boursouflé par un système inégalitaire. La population n'en veut plus et veut renouer avec la politique – la vraie, pas celle des petites phrases ou de la langue de bois convenue qui cache mal l'injustice.

 

La République française va mal, non pas parce qu’elle soit fondamentalement mauvaise dans son ambition séculaire et ses envolées humanistes historiques, mais parce qu’elle a été dévoyée, petit à petit, par la création et la structuration d’élites – à savoir, pour le définir, des individus qui ont les moyens de pouvoir exercer la circulation de l’information et l’exercice du pouvoir. Ce pouvoir ne s’est pas structuré de manière nécessairement consciente : il ne faut y voir ni machiavélisme, ni complotisme. Simplement, sociologiquement, il est tout à fait usuel que ceux qui exercent une forme de pouvoir et récoltent les fruits d’un système souhaitent conserver le premier et les seconds, et mettent en place des stratégies pour ce faire. Il s’agit là d’une déviance humaine qui s’observe dans plusieurs domaines.

Mais ce qu’inspirent les faits de ces dernières semaines, et particulièrement de ce mois de janvier 2019, plongent les citoyens dans la sidération. Une sidération devant les mots totalement inconsidérés d’un Emmanuel Macron aux abois sur le « sens de l’effort ». Une sidération devant un Christophe Castaner qui assimile désormais tout à fait officiellement manifestants lambda et casseurs. Une sidération, encore, devant une Marlène Schiappa qui n’hésite plus à prendre quelques libertés avec le droit le plus élémentaire lorsqu’il s’agit de juger les récoltes de dons pour les frais de justice d’un prévenu, avant sa condamnation – je ne vais pas réexpliquer ici ce que plusieurs juristes ont déjà brillamment commenté par ailleurs.

Puisque désormais, la guerre du pouvoir se fait à grands coups de cagnottes Leetchi et de Facebook live, comme pour tenter de courir désespérément avec les moyens numériques d’interaction utilisés par les gilets jaunes, il convient de se pencher sur quelques chiffres fondamentaux. D’abord, l’ampleur : le nombre de policiers et gendarmes déployés, le nombre de gilets jaunes interpellés, le nombre de mois de prison qui commencent à tomber de manière relativement ahurissante, le nombre de blessés par tir de flashball à la tête ou grenade de désencerclement. On pourrait continuer, mais toutes ces données nous indiquent que nous avons affaire à quelque chose d’inédit depuis longtemps : il ne s’agit pas simplement d’un mouvement populaire, mais aussi des réflexes sécuritaires et « borderline » d’un pouvoir qui se protège.

Et c’est d’abord un pouvoir qui se protège contre sa population, contre ses citoyens – j’allais dire : contre ses électeurs. Barricadé dans les institutions, criant à l’agression de la « maison France », amalgamant ministres et institutions de la République, ce pouvoir, dans un dernier sursaut, manie avec véhémence ses mots creux en tentant vainement d’agiter les symboles dont il pense être les gardiens. Mais les élites au pouvoir ne sont pas les gardiennes de nos institutions : elles en sont les locataires temporaires, ce qui est très différent. Benjamin Griveaux, par exemple, n’a jamais été et ne sera jamais un gardien des institutions, et son ministère ne sera jamais la maison France, comme l’a par ailleurs déjà souligné Frédéric Lordon.

Car le voici, le vrai problème : les dépositaires actuels des mandats que nous leur avons confiés, tout simplement, souhaitent rester là où ils sont, jusqu’au bout. Pourquoi ? Parce que notre système de démocratie représentative, en tout cas le système que nous avons mis en place dans ce pays, est basé non pas sur la participation du peuple aux délibérations, mais une confiscation du pouvoir. Pour faire court : le peuple est appelé, tous les cinq à six ans par exemple, à choisir des élus qui vont le représenter. Ces élections, ce sont les seuls moments de respiration démocratique. Entre les élections, les mandats sont des longues phases de confiscation du pouvoir. Pendant ces phases, les élus peuvent littéralement prendre les décisions qu’ils veulent, sans jamais avoir de compte à rendre devant les électeurs – si ce n’est en imaginant, un an avant la prochaine échéance, comment trouver la bonne communication pour valoriser leur bilan et envisager une ré-élection, pour une nouvelle confiscation de la démocratie.

Ainsi avance donc notre République. Elle n’est pas une démocratie pleine et entière, au sens où le peuple serait invité à participer à sa vie même ; elle est un état de fait politique ponctué de respirations démocratiques, au cours desquelles notre droit est de choisir ceux qui vont parler et agir à notre place. En quelque sorte, nous nous achetons la quiétude et la tranquillité : nous n’avons pas à nous occuper de politique, puisque d’autres le font pour nous – fort mal pour certains, en ne prenant pas les décisions politiques élémentaires qui sont urgentes pour la planète, pour la répartition des richesses ou pour la dynamisation de notre économie, mais trop tard : ils s’en occupent.

Mais voilà, les citoyens ont maintenant envie de politique. Ils s’en réapproprient d’ailleurs matériellement les symboles ou les émanations : car n’importe quel chercheur en sociologie ou en sémiotique le dira, tagger un arc de triomphe ou défoncer la porte d’un ministère au transpalette, c’est d’abord et avant tout, symboliquement, une forme de réappropriation des lieux symboliques de la République. Mais en face de la Démocratie des Modestes, en face de ceux qui souhaitent simplement reprendre leur destin en main sans avoir à passer maintenant par des grandes sessions de confiscation périodique du pouvoir, il y a la République des Immodestes. Et chez les modestes, je compte d’ailleurs aussi les petits élus locaux trop peu rémunérés pour le travail qu’ils font (notamment les maires des petites communes rurales), ou encore les journalistes pigistes payés au lance-pierre qui se retrouvent obligés de travailler chez BFM TV pour pouvoir simplement vivre.

J’utilise cette terminologie à dessein : car j’entends à la fois une immodestie de rémunération - là où les modestes ne peuvent décemment pas en dire autant, eux qui se demandent pourquoi leur pouvoir d’achat n’augmente pas, et pourquoi leur fiscalité toujours plus lourde sert à financer des services publics qui disparaissent, s’appauvrissent ou croulent sous le manque de moyen. Mais les immodestes ne s’arrêtent pas là : comme certains d’entre eux tiennent ou trustent les plateaux de télévision, ils expliquent aux modestes ce qu’ils doivent penser, quelles images ils doivent retenir, et quelles interprétations ils doivent faire de la réalité. Une interprétation qui leur permet à eux, les immodestes, de pouvoir très simplement poursuivre leur vie. Ainsi, éditorialistes au verbe creux, femmes et hommes politiques qui se gargarisent de symbolisme républicain sali et volé, ou encore analystes économiques en pleine fièvre néolibérale dépassée s’imaginent en tenant de la vérité et de l’ordre juste.

Beaucoup de choses ont été écrites sur le concept de violence ou sa perception. C’est heureux, car cela permet de redécouvrir de nombreux auteurs sur la question, mais cela permet également de voir à quel point le gouvernement que nous avons aujourd’hui, et qui pense représenter l’Etat et la République, est prompt à utiliser violence, surenchère et fermeté – tout en faisant semblant d’écouter les citoyens à travers l’organisation d’un débat qui n’aurait jamais vu le jour sans les gilets jaunes (c’est dire le cynisme), et en sélectionnant les sujets en fonction de l’attachement du Président ou non à telle ou telle marotte (l’ISF, pour ne citer que ce sujet).

Mais les signes du changement sont là, puisqu’il n’est pas plus fébrile et incertain qu’une petite élite politique qui se sent obligée de jouer du bruit des bottes pour conserver son rôle totalement usurpé de « défenseur de la République ». Comme si les citoyens et électeurs qui défilent chaque samedi étaient des terroristes qui menacent l’ordre public, tout simplement parce qu’ils souhaitent qu’on les entende, eux et eux seuls, sans devoir passer par des formations syndicales ou des élections intermédiaires. Parce que la parole d’un citoyen n’a pas moins de valeur si son expression n’est pas encadrée par une manifestation déclarée ou non relayée par une corporation comme la CGT.

Source : https://blogs.mediapart.fr/albin-wagener/blog/140119/la-democratie-des-modestes-contre-la-republique-des-immodestes?fbclid=IwAR09habl9i-YwN9eWyvUMIqgNK_Db4JcBKCrLw10dFfL3uPWJ8aigi9nS4k

 

 

 

 

 

 

13/10/2019

Dictature et Surpopulation - Interview d'Aldous Huxley

 

La dictature parfaite serait une dictature
 qui a les apparences de la démocratie,
 une prison sans murs dont les prisonniers
 ne songeraient pas à s'évader.
 Un système d'esclavage où,
 grâce à la consommation et au divertissement,
 les esclaves auraient
 l'amour de leur servitude

Aldous Huxley, 1932

 

 

 

 

09/10/2019

Dé-camper de Florentine Rey

 

 

Gros Textes éd.2018

 

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50 pages, 9 €.

 

 

 

Avant que ne meure le temps d’aimer, comme le chante Barbara, avant de repeindre ou de redécorer, elle s’est désencombrée de tout ce qu’elle savait ne pas être elle pour tenter d’aller se trouver ailleurs. Seule.

 

« Elle se croit sans colère.

Rupture facile, pardon, grandeur d’âme ; elle flaire le mensonge, les bobards de la marchande de chimères, le cœur protégé par des ruses de sioux.

Sa colère c’est à elle qu’elle l’adresse.

Son cerveau cède le contrôle à des forces anciennes.

 

(…)

 

Son projet : mettre l’essentiel dans une valise et partir le plus loin de la ville, du béton, du plastique, des corps à la mode. »

 

Elle décampe donc pour aller camper seule dans le sud de la France. Une grande voiture, une tente, un carnet, un crayon. « Une assiette, un bol et trois couverts suffiront. » Une nouvelle tête :

 

« La crête c’est marrant, typé, mais pas joli. » Dixit sa mère.

« Toute la violence qu’elle essaie de contenir, elle la porte sur sa tête.

La coupe WOODY : une coupe de piqueuse de bois vert. »

 

WOODY à qui le PIVORE viendra tenir compagnie, le pic-vert vorace qui dévore les mots bavards, Maître PIVORE, le juge qui rendra son verdict : coupable de rien du tout, on remballe, on retourne sur la plage, écrivez, circulez.

 

Trouver ce qu’elle est hors des clichés. Femme ?

 

« Elle a une jupe dans la tête et les réflexes qui vont avec. Dans ses plis logent des chuchotements de nonnes, des histoires de sorcières, de la rage, de l’enfoui qui fait gonfler les jambes. »

 

Nomade.

Le mot la réconforte : perspective d’une identité la moins définie possible. »

 

Avec Dé-camper, Florentine Rey nous entraîne dans un inner-trip, avec des images, des mots bien à elle, une autodérision qui ne cache pas l’émotion à vif, la névrose, jouer avec les mots jusqu’à trouver la clé de l’énigme de soi, du mal-être. La quête d’une identité qui ne trahirait pas l’être dans sa réalité profonde, abyssale, mais comment émerger de cette mer en soi et affronter le large au-dehors peuplé d’Autres avec qui le contact s’avère difficile, compliqué. Malaise de l’incommunicabilité. Ne pas se noyer : ni hors de soi, ni en soi, sans pour autant chercher à se gaver pour contrer la peur, masquer la faim. Mâcher du chewing-gum, avaler du vide, mais mâcher quand même, mâcher jusqu’à plus de mâchoire, mâcher jusqu’à disparition. Jusqu’à l’apparition de Madame COUJOU, qui boursoufle, grosses joues, gros cou, qui gonfle.

 

« Elle élève la mâche au rang de drogue » mais « La mâche est toxique, ça devient dangereux. »

 

« Si elle reste bouche vide ?

Boucherie dans la bouche ? »

 

Camper, écrit-elle, c’est rétrécir l’habitation et retrouver de l’espace à l’intérieur de soi pour penser, créer.

 

« Ce qu’elle veut ?

Une vraie place dans le monde. »

 

Assumer la sensibilité et la déployer, la dire, se dire sans retenue, faire une force de ce que le monde lui renvoie comme étant un handicap : elle veut être encore plus sensible, sentir plus fort, en faire quelque chose.

 

« Elle dévoilera la planque du chasseur au chevreuil et fera témoigner les poules qui vivent à quinze sur un mètre carré de paille. Elle rencontrera des cochons qui souhaitent qu’on ferme leurs yeux avant qu’ils ne meurent. Les asticots lui montreront comment manger les morts. »

 

Décamper est le journal d’un accouchement d’un soi intégral, l’écriture sert de balancier entre le dehors et le dedans, le trop et le pas assez, tenter le pont de mots pour toucher l’autre sans se mettre en danger, sans creuser plus encore les blessures, celles qui lui donnent envie de se dissoudre, « de débarrasser son corps de tous ses organes, le remplir de sel et l’offrir à la mer ». L’écriture permet de toucher du mot les plaies, leur donner des coups de langue.

 

Femme-poisson, elle habite un château de sable. (…) Personne ne sait qu’elle creuse au centre du château. Un jour, elle coupera sa queue en deux pour se fabriquer des jambes et fuira par le fond du puits.

 

Dé-camper un recueil qui dit le pas pareil, la non-évidence de l’être au monde, la quête, la peur, le courage d’aller à sa propre source. Ce n’est pas un recueil de poésie, c’est de la poésie qui sourd d’un recueil au fur et à mesure où la source est désobstruée, c’est fort, c’est fragile, intime et bouleversant.

 

Cathy Garcia

 

 

 

 

rey 2.jpgFlorentine Rey est écrivain, poète et performeuse. Elle est née à Saint-Étienne en 1975. Des études de piano intensives affinent sa sensibilité, lui apprennent l’exigence mais l’isolent. Une année d’hypokhâgne lui fait rencontrer la philosophie. Elle entre ensuite à l’École Nationale Supérieure d’Arts de Paris-Cergy. À la fin de ses études, elle crée une structure de production artistique où se croisent l’art et la technologie. Six ans plus tard, la nécessité d’écrire et de créer la rattrape. Elle se consacre aujourd’hui à l’écriture et à la performance. Son travail interroge notamment le corps et le féminin. Son site :  https://florentine-rey.fr/

 

 

 

07/10/2019

à paraître : Atlas du business des espèces menacées

Braconnage, cruauté, contrebande...

Par l'association Robin des Bois

 

  • à paraître le 09/10/2019 :

https://www.arthaud.fr/Catalogue/hors-collection/recits-e...

9782081480186.jpg

    • Cartographie : Julien Perreaut
  •  
  • Éléphants, rhinocéros, tigres, faucons, concombres de mer, totoabas ou tortues étoilées de l’Inde… le business de l’extinction animale étend sa toile sur la terre entière avec un chiffre d’affaires annuel évalué à au moins 14 milliards d’euros et des profits qui augmentent de 4 à 5 % par an. Le marché des animaux de compagnie, la course à l’exotisme et la recherche de prétendues vertus curatives et aphrodisiaques emballent le moteur de cette apocalypse.
    L’ONG Robin des Bois traque dans le monde entier les actes de braconnage et de contrebande tels qu’ils sont rapportés par les rangers, les douanes, la presse internationale et locale et les institutions judiciaires pour dénoncer la cruauté, la violence, la corruption et l’inventivité des modus operandi de chaque filière.
    Les textes et cartes présentées dans cet Atlas démontrent sans équivoque la mondialisation et la diversification de la contrebande du vivant. Trente-deux espèces y sont examinées, ambassadrices de toutes les autres espèces, victimes de la guerre que l’humanité livre à l’animalité.
    Hors collection - Récits et témoignages

  • Genre : Documents
    152 pages - 182 x 240 mm
     Broché
     EAN : 9782081480186
     ISBN : 9782081480186