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09/02/2009

la tête de ses os épars pillés

Dans la ville à front ridé,

Dans la ville des fumées,

 

Veillent de sourds marteaux-piqueurs,

Des hies tremblantes,

Dures d’oreilles,

 

Entre les mains dures de cals

De potentats déchus de leur trône de paille,

 

Rois en exil des sables,

Des vents,

Grands manitous qui ne manient plus rien

 

Que la défonce à front de bitume,

Aux vertèbres de papier.

 

 

(…)

Barbelés, miradors, camps de tôle,

Des ventres affamés, des noyés,

Un océan de noyés,

Des électrocutés,

Des cadavres,

Des montagnes de cadavres

Occultés.

 

Des portes, des cadenas, des serrures.

 

Pas de clé, pas de clé, pas de clé.

 

 

(…)

Grands nuages de la faim, morcelés,

Souffrant nuages de la douleur sans nom,

Passants d’un autre monde sitôt oubliés,

 

Si riches d’espérances, de lendemains

Qui hantent,

 

Nuages fracassés.

 

 

(…)

La piste comme au cirque. Un grand rond plein d’accessoires.

Des bêtes féroces, des jongleurs, des clowns, des illusionnistes.

Des néons éblouissants jour et nuit. La piste mais sans sciure,

Sans bravos. Déguisements blancs, bleus, noirs, gris, verts,

Uniformes de flic, de matons, de trouffions, de pompiers,

Complets, gris, noirs, bleus, cols blancs des servitudes

 

 

 

(…)

Hommes-lierre, hommes-galets, sans angles, sans arrêtes,

Dévorés par les rouilles fugaces de la modernité,

Roulant avec le flot jusqu’à votre embouchure inexorable.

 

Hommes-galets,

Dans les murs de la peur journalière,

Hommes-lierre, accrochés à vos rêves effilochés,

Nourris par les écrans de la réalité virtuelle,

 

Vous acceptez l’abominable, parce que les images,

Les voix qui sont censées savoir vous ont affirmé,

(et vous les croyez), que l’inacceptable doit être accepté

Comme l’hiver succède à l’automne, l’automne à l’été.

 

Hommes de peur, de sang, consommateurs conditionnés,

Sommés chaque jour de consommer plus de dérisoire,

Vous avez trop longtemps accepté avec naïve confiance,

De confier vos pauvres vies à la cupidité, au mensonge.

 

 

(…)

Ensemble vide

Pris aux mots des faiseurs de miracles,

 

Collé aux murs de leurs phrases lisses,

Au dérisoire bancal du sens abâtardi, 

 

Avenir inexistant,

Entre-deux virtuel,

 

Passerelle d’ondes multicolores

Sur laquelle vous boitez en aveugle,

 

Sanglés dans les reflets,

Dormant les yeux ouverts.

 

 

(…)

Et dans son lit de vénalité,

L’instantanée putain détourne

La tête de ses os épars pillés.

 

 

 

Jean Gédéon in La ville, le peuple du désastre

 

 

Lieu du larcin : Crispations (Encres Vives, coll. Encres Blanches n° 357, février 2009)

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