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31/05/2013

HYDROCARBURES NON CONVENTIONNELS : «UN CRIME CONTRE L'HUMANITÉ»

Hydrocarbures non conventionnels : «Un crime contre l'humanité»

James Hansen, à la NASA

 

Interview Sables bitumineux, pétroles et gaz de schiste... Le climatologue James Hansen dénonce l'impact désastreux de leur exploitation.

Le climatologue américain James Hansen a été un des premiers, en 1988, à mettre en garde contre l'influence des activités humaines sur le climat, et donc sur la civilisation.

A 72 ans, il a quitté en avril la direction de l'Institut Goddard des études spatiales de la Nasa, mais continue à sonner l'alarme. Il vient de passer dans cinq capitales du Vieux Continent pour réveiller nos politiques, à l'heure où l'Union européenne (UE) est tentée de céder aux pressions des industriels et se lancer tête baissée dans l'exploitation des gaz et pétroles de schiste ou importer le brut des sables bitumineux de l'Alberta, à l'ouest du Canada (dénoncé notamment par l'ONG Les Amis de la Terre). Quitte à tenir des propos provocants.

Pourquoi venir en Europe ?

Pour dire combien il est immoral d'exploiter les hydrocarbures non conventionnels comme les sables bitumineux, les gaz et pétroles de schiste ou les hydrates de méthane. Car nous ne pouvons pas prétendre ignorer les conséquences.

Les scientifiques ont établi une limite à la quantité de gaz carbonique que nous pouvons émettre dans l'atmosphère, au-delà de laquelle le climat deviendra incontrôlable. Si nous décidons de brûler tous les combustibles fossiles présents dans le sous-sol en se lançant massivement dans ces hydrocarbures, qui émettent environ 25% de carbone de plus par unité d'énergie que le pétrole conventionnel, la situation sera insoluble.

 

 

Une grande partie de la planète deviendra inhabitable, car en été la «température humide» y atteindra parfois 34 degrés, ce qui est bien trop pour le corps humain.

Le 9 mai, à Hawaï, la quantité de CO2 dans l'atmosphère a passé un seuil historique : 400 ppm. Qu'est-ce que cela veut dire ?

Ce n'est pas une surprise. Les concentrations augmentent de 2 ppm (parties par million de molécules d'air) par an ces dernières années. Cela montre que nous ne nous occupons pas du problème. Nous devons réduire fortement nos émissions, le plus tôt possible, sans quoi les jeunes d'aujourd'hui seront incapables de faire face. Les changements sont déjà visibles.

Les températures moyennes du globe sont au plus haut depuis onze mille ans, le niveau des océans monte.

Bien sûr, les conséquences seront pires dans une ou deux générations. Les gens sont accaparés par le quotidien et ne se rendent pas compte de ce qui nous attend.

 

 

Nous, les scientifiques, n'avons pas réussi à communiquer auprès du public. Mais nos gouvernements ne peuvent pas dire qu'ils ne savent pas. C'est à eux de penser le long terme. Je suis choqué de les voir faire mine d'ignorer ce à quoi mène l'exploitation des hydrocarbures non conventionnels.

La plupart de vos calculs se sont hélas avérés justes. Reste-t-il des incertitudes ?

Oui. Celles liées aux réactions en chaîne dues au réchauffement et qui pourraient en amplifier les effets. Beaucoup de méthane est piégé dans le pergélisol des zones arctiques. Mais nous ignorons à quel rythme ce puissant gaz à effet de serre (GES) sera émis dans l'atmosphère, et à quelle vitesse les calottes glaciaires fondront.

La plupart des modèles prévoient une hausse d'un mètre du niveau de la mer d'ici 2100. C'est trop optimiste. Si nous restons sur la trajectoire actuelle des émissions de GES, ce sera plusieurs mètres.

Il faudra abandonner les zones côtières et des villes comme New York. Nous ne savons pas non plus combien il reste d'hydrocarbures sous terre. Mais, c'est sûr, il y en a bien trop pour que nous puissions tout brûler sans altérer le climat de façon irréversible.

 

 

Pourtant, c'est la ruée vers les hydrocarbures non conventionnels...

Les gouvernements encouragent l'extraction de la moindre goutte de combustible fossile. C'est insensé ! En plus, produire ces hydrocarbures coûte très cher. Les industriels n'en tirent des bénéfices que parce qu'ils sont subventionnés. L'humanité doit se réveiller, et vite. Il y a vingt-cinq ans, je pensais que d'ici 2010, nous aurions compris. Mais c'est l'inverse et nos émissions grimpent de plus en plus vite.

Que préconisez-vous ?

La seule solution, c'est de reconnaître que les hydrocarbures non conventionnels sont plus émetteurs de GES que les autres et de les taxer en conséquence. Une sorte de taxe carbone, prélevée à la source sur l'industrie des combustibles fossiles, et qui augmenterait avec le temps. (...)

 


 

Les Européens ont tenté de le faire via un marché du carbone. Mais le prix du quota de CO2 chute, cela ne marche pas. Pas plus que le processus onusien. Le plus rapide, simple et efficace serait un accord entre les États-Unis, la Chine et l'UE instaurant une taxe carbone. Les autres pays suivraient. Pétroliers et gaziers disent que cela nuirait à l'économie. Au contraire ! Muer vers les énergies propres et l'efficacité énergétique créerait des millions d'emplois, contre des milliers pour les hydrocarbures de schiste ou les sables.

Qu'attendez-vous des dirigeants européens ?

Qu'ils adressent un message au monde. La directive de l'UE sur la qualité des carburants, en cours d'examen, doit reconnaître, comme prévu, le caractère plus polluant des hydrocarbures non conventionnels. Cela pourrait inciter le président Obama à refuser l'extension du pipeline Keystone XL, qui doit acheminer le pétrole des sables albertains vers le Texas. A défaut, cela encouragerait Obama à l'approuver. Or, une fois construit, une grande partie des sables sera exploitée. Avec les conséquences que j'ai décrites.

Hélas, l'UE se heurte aux pressions du Canada et des pétroliers. Les gouvernements européens font eux aussi semblant d'ignorer le tort qu'ils font à nos enfants.

 

 

La technologie peut-elle nous aider ?

Seulement si nous donnons un prix au carbone. Quant à la géo-ingénierie, aucune des solutions proposées ne me paraît pouvoir réussir. Envoyer des aérosols dans la stratosphère pour réfléchir la lumière du soleil afin de refroidir la Terre aura probablement des effets pervers. Et cela ne résoudra pas l'acidification des océans due au surplus de CO2. Il faudra de toute façon retirer celui-ci de l'atmosphère. Difficile et terriblement cher.

Pronucléaire, vous décevez certains écolos.

Le nucléaire n'est pas adapté à tous les pays. Mais je ne vois pas comment la Chine pourra s'en passer sans recourir au charbon. L'atome est bien plus sûr que toute autre source d'énergie. J'ai publié un article montrant combien il a sauvé de vies.

Et Tchernobyl, Fukushima, les déchets ?

Certes. C'est pourquoi nous devons nous orienter vers le nucléaire de quatrième génération, qui peut résoudre le problème des déchets. La génération actuelle brûle 1% du combustible nucléaire, laissant le reste à l'état de déchet, avec une demi-vie [temps pour perdre la moitié de la radioactivité, ndlr] de plus de dix mille ans. La suivante, elle, brûle plus de 99% du combustible et la demi-vie des déchets se mesure en décennies.

 

 

Pourquoi reste-il tant de climatosceptiques ?

Le public a été conditionné pour croire que le réchauffement est un canular : un tiers des Américains en sont persuadés. C'est incroyable. J'ai été choqué d'apprendre que c'est comparable en Europe, je vous pensais plus rationnels. Le rôle de l'argent, l'influence de l'industrie sur les politiques, est aussi immense ailleurs qu'aux Etats-Unis.

Vous avez subi des pressions politiques...

C'était flagrant sous George W. Bush. Et rien n'a changé avec Obama. Avant de témoigner devant le Congrès, les scientifiques gouvernementaux doivent soumettre leur texte à la Maison Blanche, qui peut le modifier. Et ce n'est pas mieux ailleurs. En Australie, en Nouvelle-Zélande, au Canada, certains ont été licenciés pour avoir révélé des travaux sur les causes humaines du réchauffement.

Certains de vos pairs ont jugé votre activisme contre-productif. Ne faut-il pas rester neutre ?

Tenter de combler le fossé entre ce que la science comprend et ce que sait le public a un sens. C'est même une obligation morale.

Regrettez-vous d'avoir comparé le fret de charbon aux «trains de la mort» nazis ?

Non. Je discutais de l'immoralité consistant à faire mine de ne pas comprendre les conséquences d'une exploitation des hydrocarbures non conventionnels. Nous pouvons garantir que nos enfants en subiront les lourdes conséquences. Je maintiens qu'il s'agit d'un crime contre l'humanité et la nature.

Reste-t-il des raisons d'être optimiste ?

Oui. Les conservateurs réfléchis réalisent désormais que le réchauffement n'est pas un canular. L'ancien secrétaire d'Etat républicain George Shultz a publié un article dans le Wall Street Journal pour défendre la taxe carbone que je prône depuis cinq ans.

En Europe, nous frissonnons, de quoi confondre météo et climat. Que se passe-t-il ?

C'est peut-être lié à la diminution des glaces de mer dans l'Arctique. Certains articles récents suggèrent que cela joue sur la circulation des masses d'air : ces derniers hivers, des vents du Sud ont soufflé vers le Groenland, qui a été inhabituellement chaud, et des vents du Nord ont soufflé sur l'Europe. Savoir si c'est l'effet du hasard ou celui de la fonte des glaces arctiques est un sujet de recherche compliqué. Ceci dit, la réalité du réchauffement est déjà suffisante pour que les dés climatiques soient désormais pipés.

 

Un article de CORALIE SCHAUB, publié par liberation.fr

30/05/2013

Agir vite, abeilles en danger : Une gigantesque escroquerie est en train de se mettre en place à Bruxelles

Madame, Monsieur,

Une gigantesque escroquerie est en train de se mettre en place à Bruxelles, aux dépens des abeilles, de la biodiversité... et de tous les citoyens qui se battent depuis des années pour faire interdire les pesticides « tueurs d'abeilles » en Europe et dans le monde !

Nous devons la stopper net, avant qu'elle n'ait des conséquences dramatiques sur nos cultures et notre alimentation à l'avenir. Je vous demande de signer de toute urgence la pétition européenne ci-jointe et de la faire circuler autour de vous autant que vous le pourrez.

Il n'y a pas un instant à perdre.

Après des années de lutte acharnée des citoyens et des apiculteurs, la Commission européenne s'est officiellement décidé à interdire 3 pesticides néonicotinoïdes extrêmement dangereux pour les abeilles (1).

Les associations ont crié victoire et baissé la garde. Pourtant...

Le compromis que devrait adopter Bruxelles est en réalité un plan désastreux imposé par les multinationales agrochimiques comme Bayer, Syngenta et compagnie, qui mènent depuis des mois un lobbying effrené et extrêmement agressif pour arriver à ce résultat (2).

Objectif : Contrer la volonté des citoyens européens et empêcher l'interdiction REELLE des pesticides tueurs-d'abeilles – malgré les recommandations expresses des autorités sanitaires françaises et européennes (3)... Pour sécuriser les centaines de millions d'euros de profit annuel que ces produits rapportent aux grosses firmes qui les produisent !

Officiellement, les 3 pesticides les plus dangereux seront interdits pour une durée-test de deux ans à l'issue de laquelle les autorités sanitaires contrôleront si l'interdiction a mis un terme au massacre des abeilles, et s'il faut ou non interdire définitivement les néonicotinoides.

Or, cette soi-disant interdiction n'aura aucun effet sur la santé des abeilles !

En fait, les 3 pesticides tueurs-d'abeilles seront interdits seulement quelques mois par an... et largement utilisés tout le reste de l'année – sur près de 85% des céréales, et sur une grande partie des cultures de fruits, légumes et herbes aromatiques – empoisonnant largement les sols et l'eau absorbés ensuite par les cultures soi-disant « non-traitées ».

De nombreuses études ont montré que ces substances ultra-toxiques peuvent rester présentes dans le sol jusqu'à trois ans après le traitement (4), et que les cultures non-traitées replantées sur le même terrain révèlent des traces de néonicotinoïdes jusque dans leur pollen... que viennent ensuite butiner les abeilles ! (5)

A la fin de la période-test de deux ans, les multinationales pourront prouver que les abeilles continuent d'être décimées malgré la soi-disant interdiction de leurs produits, et qu'ils n'y sont pour rien. Ils auront réussi à blanchir leurs pesticides et à maintenir leurs profits – et pour longtemps !

C'est un plan diabolique, qui nous promet un désastre environnemental sans précédent.

Nous pouvons encore empêcher ça. MAIS IL FAUT AGIR VITE : d'ici quelques jours, la Commission européenne se prononcera sur sa version définitive du règlement européen concernant ces 3 pesticides tueurs d'abeilles.

Nous devons agir avant, pour exiger l'interdiction REELLE de ces pesticides ! Signez dès maintenant la pétition européenne pour contrer les lobbys en cliquant ici !

Si nous ne faisons rien, voici ce qui va se passer dans les 2 prochaines années :

- les pesticides néonicotinoïdes continueront à être utilisés pour les cultures d'hiver, imprégnant ainsi durablement les sols et l'eau...

- les cultures de printemps et d'été "non traitées" seront infectées par les résidus de ces pesticides, et empoisonneront les abeilles...

- la mortalité massive des abeilles ne déclinera pas, malgré la soi-disant "interdiction" des néonicotinoïdes

- Syngenta, Monsanto, Bayer et tous les laboratoires agrochimiques pourront à loisir clamer que leurs produits n'ont rien à voir avec la mortalité des abeilles, et obtenir leur réhabilitation totale sur le marché.

Et là, il ne nous restera plus que nos yeux pour pleurer…

Il faut tuer dans l'œuf ce plan démoniaque, et exiger de la Commission européenne qu'elle interdise purement et simplement ces pesticides tueurs d'abeilles, comme elle prétend le faire d'ailleurs !

Pas de compromissions, pas de petits arrangements... Si l'on doit faire un test de 2 ans pour évaluer réellement l'impact de ces pesticides sur les pollinisateurs, alors allons-y franchement !

Les agriculteurs eux-mêmes n'auraient pas à y perdre :

d'après l'INRA, on pourrait réduire rapidement la consommation de pesticides en France de 30 à 40 % – sans aucune perte de revenus pour les agriculteurs – en revenant simplement à un système de rotation des cultures qui permettrait de combattre efficacement les parasites en réduisant durablement l'usage des traitements chimiques (6).

Ca représente tout de même, pour la France uniquement, plus de 20 000 tonnes de substances ultra-toxiques déversés chaque année en pure perte dans nos campagnes !

En fait, les seuls qui seraient ébranlés, ce seraient les chiffres d'affaires des géants de l'agrochimie... Mais la Nature n'a que faire de leurs profits !

Alors s'il vous plaît, aidez Pollinis à créer une véritable onde de choc à travers le pays et l'Europe toute entière, pour que notre pression sur la Commission européenne soit plus forte que celle des lobbys agrochimistes qui sacrifieraient sans vergogne votre santé, votre alimentation et l'avenir même de la Nature pour satisfaire à leurs profits immédiats.

Signez la pétition, et transmettez cet email à un maximum de personnes autour de vous.

D'avance, merci !

 

Nicolas Laarman
Délégué général Pollinis
Conservatoire des Fermes et de la Nature

10:14 Publié dans AGIR | Lien permanent | Commentaires (0)

29/05/2013

Terre de liens : un convertisseur alimentaire

Combien de paysans et paysannes devriez-vous avoir dans votre commune (ou dans une commune proche), si vous relocalisiez progressivement votre consommation alimentaire?

Combien d'hectares de terres agricoles pourrions-nous protéger grâce à cette relocalisation alimentaire si nous installions de nouveaux agriculteurs en bio et/ou nous passions des « contrats de transition vers la bio » avec les agriculteurs conventionnels qui pourraient profiter de notre décision de relocaliser notre consommation ?

La vocation de l'outil de projection que nous vous proposons ici est de donner des éléments de réponses à ces questions.
A vous de vous en saisir, de le relayer autour de vous (famille, voisins, collègues, etc.) et de décider, nous l'espérons, de rejoindre Terre de Liens pour, ensemble, redessiner le visage de nos campagnes.


 

« Nous sommes le vent d'un autre changement qui se lève... »

 

 

Un convertisseur alimentaire ?

Depuis 2003, Terre de Liens a accompagné (ou est en cours de finaliser) l'installation ou la consolidation de l'activité de 140 fermiers au travers de 87 fermes acquises (ou en voie de l'être) représentant 2 744 ha de terres protégées par un Bail Rural Environnemental, avec 52 maisons et 189 bâtiments grâce à l'utilisation de 20,1 M € d'investissements solidaires.

C'est la preuve que des citoyens et citoyennes solidaires peuvent contribuer à la création d'emplois agricoles de proximité. C'est la preuve que nous pouvons faire de ce que certains appellent « des contraintes environnementales », un atout à l'origine d'une richesse protectrice des terres agricoles grâce à la généralisation de l'agriculture biologique et paysanne.

 

Méthodologie

Le Convertisseur Alimentaire « Basique » est un outil de calcul fondé sur notre consommation alimentaire actuelle : il ne tient pas compte du colossal gaspillage alimentaire que notre société produit!... Le Convertisseur Alimentaire « Avancé » intègre la saisonnalité des productions et une certaine diminution de notre consommation de viande bovine (cf. Dossier Technique du Convertisseur).


 

Les deux outils permettent une estimation du nombre d'hectares que nous pouvons protéger en relocalisant notre consommation alimentaire, donc en installant un nombre conséquent de paysans et paysannes. Les clefs de calcul, côté producteurs, sont basées sur des références de production (moyennes régionales ou nationales), ainsi que sur les performances technico-économiques avérées de paysans bas-normands et mayennais.

 

 

POUR EN SAVOIR PLUS  : http://convertisseur.terredeliensnormandie.org/

Utérus artéficiel : expériences interdites, témoignages de victime

 

Des femmes ont été victimes d'essais médicaux illégaux d'utérus artificiel.

Ces femmes ont subi une césarienne abusive sans connaitre les risques qu'elle encouraient. Leur enfant a été placé dans un utérus artificiel permettant une gestation extra-corporelle. Leur enfant est décédé. Il s'agit d'une technique qui n'est pas au point. Ces expériences médicales sont interdites.

 

 

27/05/2013

Etre adulte en amour de David Richo

 

    

9782228909143.jpg

traduit de l’anglais (USA) par Clémence Ma

Petite bibliothèque Payot 2013

382 pages, 9,65 € 

 

Il existe une infinité d’ouvrages sur le sujet, mais celui-ci est plutôt exceptionnel. Centré sur une approche à la fois psychologique et spirituelle, il offre des outils très concrets pour ceux qui souhaitent les mettre en application, mais il propose surtout un grand voyage holistique introspectif, très fouillé, pointu et cependant à la portée de tout le monde. Cela en fait un livre remarquable, lumineux, où l’amour est à la fois la voie, la destination et le moyen de transport. Un ouvrage qui peut être d’un grand secours à tous les couples qui cherchent à se comprendre, à avancer ensemble, à affronter et dépasser les conflits, les problématiques inhérentes à leur relation, mais c’est aussi un manuel pratique de guérison et de sagesse pour tous, car il ouvre des perspectives d’équilibre et de force personnelle et d’amour inconditionnel applicable partout et pour toutes les situations, qu’elles soient amoureuses, familiales mais aussi sociales et professionnelles.

Il y est question d’attention, d’acceptation, d’appréciation, d’affection et d’autorisation, une base sur laquelle peut se construire ou se réparer chacun d’entre nous, qui s’appuie aussi sur des références poétiques et la pratique de la connaissance de soi des philosophies bouddhiste et zen, entre autres. On apprend ainsi à distinguer un égo sain et fonctionnel, d’un ego névrotique qui nous coupe de toutes possibilités de recevoir et de donner de l’amour. Un livre construit comme un voyage héroïque plein d’aventures et d’étapes, un voyage que chacun se doit d’accomplir, à son rythme et selon ses propres particularités, celles qui font de lui un être entier et unique, pour accéder à l’autonomie et la pleine conscience et être capable d’entretenir des relations saines avec lui-même et donc avec les autres. Ainsi le terme « adulte » prend toute sa dimension, en ouvrant sur de vastes horizons vers lesquels nous pouvons nous diriger, confiants, libérés de notre passé, des croyances et des blessures que chacun d’entre nous porte en lui, souvent sans même en avoir conscience, qui nous contrôlent et peuvent nous empêcher d’accéder à la joie de vivre pleinement l’amour. Rares et précieux sont les ouvrages qui montrent le chemin, avec autant de clarté et de pertinence.

A lire aussi du même auteur : Être adulte : les clés, qui donne une bonne introduction au livre proposé ci-dessus.

 

Cathy Garcia

 

 

dave-richo-pic-med2009.jpgDavid Richo, psychothérapeute, enseigne au célèbre Institut Esalen en Californie. Il est l’auteur également de Pouvoir des coïncidences et des Cinq choses qu’on ne peut pas changer dans la vie.

 

Note parue sur http://www.lacauselitteraire.fr/etre-adulte-en-amour-davi...

26/05/2013

Chômologie portative, ou Dictionnaire du cynisme social

Parfois il faut ranger, et ranger parfois s'apparente à un travail d'archéologie, avec maintes (re)découvertes plus ou moins réjouissantes, comme des photos olé olé de périodes olé olé, des photos de grossesse où la nudité là, se nimbe d'un voile de dignité et de beauté quasi, je dis bien quasi, virginal, un journal intime égaré depuis plus de un an (ouf !) et des livres comme celui-ci :

 couverture-chomologie1-426x600.jpg

Il y a des livres qui vieillissent mal et d'autres qui sont de plus en plus d'actualité, ou en tout cas pas moins que lorsqu'il ont été écrits. Celui-là en fait partie, il m'avait été généreusement envoyé par son auteur, Stéphan Pascau, qui l'avait alors signé sous le nom d'Esteban Capusa. Il est dédié " A tous ceux qui n'ont pas la parole  et qui hésitent encore à en rire" avec en exergue, cette phrase " Chers prétendants au pouvoir, vous n'avez pas le monopole du cynisme." Edité en 2005, chez Les points sur les I tant qu'à faire, en collaboration avec Le Défouloir des précaires, http://precaires.free.fr/, site que je suivais alors, ce livre est jubilatoirement intelligent et je suis absolument ravie que le rangement, car oui parfois il faut ranger, me l'ait replacé entre les mains et donc que je puisse en parler de nouveau.

 

Stéphan Pascau

Stéphan Pascau est aujourd’hui docteur ès Lettres. Son parcours en dents-de-scie pourrait lui valoir la désignation d’“atypique” si la linéarité, de nos jours, était encore de règle. Il formulera pudiquement qu’en raison d’un contexte social particulier, ainsi que d’un tempérament sans doute enclin à la découverte, sa préférence s’est portée naturellement sur les chemins de traverses… Après un arrêt scolaire à l’âge de 16 ans, l’essentiel de sa vie professionnelle très aléatoire s’est déroulé sans qualification dans l’industrie et les travaux publics. Il reprend les livres en autodidacte dès l’âge de trente ans à partir du niveau des classes de collège, obtient son bac en candidat libre quelques années plus tard, suivi d’un BTS en électrotechnique, puis s’inscrit pour le plaisir à un cursus universitaire littéraire, exclusivement en cours par correspondance. Sa thèse de troisième cycle a été consacrée à rétablir la biographie et à réhabiliter l’œuvre d’un auteur oublié du XVIIIe siècle, au parcours fort étonnant pour son époque ; il est des chemins romanesques qui se croisent avec bienveillance dans le décalage des temps...

Autres publications :

Henri-Joseph Dulaurens (1719-1793), réhabilitation d’une œuvre, Paris, Champion, DHS 109, déc. 2006, 540 p.
Ouvrage consacré à la reconstitution bibliographique de Dulaurens, dont l’œuvre essentiellement anonyme était jusqu’alors mal connue, sous-estimée et controversée. L’étude aborde également la portée des écrits de l’auteur et ses liaisons avec les littératures du siècle.

Écrire et s’enfuir, dans l’ombre des Lumières ; Henri-Joseph Dulaurens (1719-1793), Paris, Les Points sur les i, Collection des Gueux Littéraires, oct. 2009, 326 p.
Cet ouvrage fait suite au premier, avec compléments biographiques et lecture analytique de l’œuvre. Dulaurens y est décrit dans son intimité psychologique. De nombreuses archives inédites ont été retrouvées et consultées pour l’élaboration de ces deux ouvrages, adaptés d’une thèse consacrée à l’auteur.

et donc Chômologie portative, ou Dictionnaire du cynisme social, Paris, Les Points sur les i, 2005, 158 p. Publié sous le pseudonyme à peine voilé d’Esteban Capusa, ce petit pamphlet sans prétention est calqué sur la Théologie portative, ou Dictionnaire abrégé de la religion chrétienne (1768), attribué à D’Holbach, où la religion prise pour cible dans le second a été remplacée par l’ANPE dans le premier !

J'ai trouvé sur le site du défouloir des précaires, ces extraits agrémentés d'autres trouvailles qui ne figurent pas dans le livre, que vous pourrez lire ci-dessous :

 

A

 

Abnégation, ou sacrifice de soi au bénéfice d’autrui. Autrement dit : qualité majeure et forcée de tout chômeur, qui en a donc au moins une.

 

Actionnaire. Fainéant chronique, coléreux et menaçant, qui ne bosse jamais et qui réclame tout le temps du pognon, c’est un parfait chômeur qui a raté sa vocation.

 

Aide soignante. Nouvel idéal des jeunes filles n’ayant pas pu obtenir une instruction de 3ème cycle universitaire. Devenir aide soignante en l’an 2000 relève cependant d’un long parcours de la combattante, ponctué de concours et de vastes frais, parcours bien supérieur en difficultés à celui des infirmières des Trente Glorieuses. Ceci est dû au fait que l’accès au métier d’infirmière, en France, est aujourd’hui impossible puisque cet art est réservé aux Espagnoles, beaucoup plus intelligentes et adroites que les Françaises au chômage.

 

Alinéa : C'est un peu comme les puces. Il en sort toujours une du plancher pour te piquer rien qu'à toi, pile au moment où tu devais poser tout nu pour des photos, comme il y a toujours un alinéa quelque part qui s'applique à ton cas pour t'exclure de la nouvelle mesure avantageuse qu'on vient juste d'annoncer à la télé.

 

Ambition. Sentiment naturel visant à s’élever dans la vie pour se situer au-dessus du lot, soit par son travail, soit par son mérite, soit par l’exploitation de son talent. Curieusement, les minus les plus ambitieux du monde politico-économique ont réussi à imposer une façon géniale de s’élever au-dessus d’autrui sans faire le moindre effort, sans talent, et avec encore moins de mérite qu’un gagnant du loto : il suffit d’enfoncer autrui plus bas que soi.

 

Arnaque. C’est drôle, ceux qui réclament le pouvoir finissent toujours par le prendre, alors que ceux qui réclament le travail finissent toujours par se faire prendre pour des cons.

 

ASSEDIC. Il paraît que ce serait une Association pour l’Emploi dans l’Industrie et le Commerce (Qui le savait ?). En vrai, ça ressemble plus exactement à une Aumône Sèche et Suffisante pour Endiguer le Dynamisme et l’Insolence du Chômeur.

 

B

 

Bilan (de compétences), ou intitulé extravagant de l’un des multiples stages utiles proposés par une célèbre agence qui est censée en avoir (des compétences). En gros, c’est une sorte d’initiation où l’on persuade ceux que personne ne veut plus fréquenter, qu’ils ont des tonnes de qualités cachées mais qu’ils ne savent pas les mettre en valeur. Le fin est justement d’apprendre à dissimuler ces qualités, lorsqu’on en a trop, ou en tout cas lorsqu’on en a au moins une bonne. Ceci est destiné à ne pas énerver le monde que vous énervez déjà assez comme ça par votre seule existence de parasite, non mais : pour qui vous prenez-vous ?! Vous aviez évidemment besoin d’un stage afin que des gens compétents, eux, puisqu’ils travaillent, vous rappellent tout ça. D’ailleurs, ces gens compétents, qui travaillent dans la célèbre agence, vous apportent surtout la réponse universelle à cette question fondamentale qui vous tourmente depuis déjà longtemps (sinon vous n’auriez pas accepté ce stage) : question : « Où est la solution de mon problème ? » – réponse : « Continuez à chercher, elle est en vous ; compétent comme vous l’êtes, vous finirez bien par la trouver. »

 

BIT. Bureau International du Travail (si, si, ça existe et c’est à Paris) ! On aurait choisi NIC, c’eut été aussi parlant (Non Intéressé par les Chômeurs). Il n’existe d’ailleurs pas de BIC (Bureau International du Chômage), sans doute parce que ça, c’est jetable.

 

Bras. Il paraît qu’on en manque. Généralement, ce sont les petits patrons et les grosses matrones qui le disent avec indignation, sous-entendant qu’il y en a plein qui se reposent au chômage. Si tu es un homme et que tu te sens visé, n’hésite pas à répondre à ton interlocuteur que pour ce qui est des bras, tu ne peux pas le dépanner parce que tu n’en as pas plus que lui, mais qu’en revanche, tu as un cerveau et une bite, au cas où il en manquerait aussi.

 

Top

 

C

 

Carrière. Archaïsme dont on ne trouve la résurgence que dans les rares métiers médiatiques (présentateur, politicien) ou artistiques (chanteur, écrivain, chômeur).

 

Chômage : [ ! ]  “ ... Chuuuut !... Taisez-vous donc, inconscients, vous n’avez pas honte ?! 

 

Convocation. Terme courtois et respectueux, utilisé notamment par les administrations de la police et de la justice en lieu et place d’invitation. L’ANPE en use avec force prévenance (traduire menace) lorsqu’elle propose au chômeur, soit un (sous-)emploi, soit (et c’est beaucoup plus fréquent) un bilan de situation dite professionnelle (!). Le chômeur serait donc poliment assimilable à un coupable ?

 

Cynique : Toi-même !

 

D  

 

Dégrader (se). « Comme c’est triste de voir les êtres qu’on chérit se dégrader peu à peu », disait déjà Flaubert... On comprend pourquoi ce n’est pas lui qui a inventé l’ANPE. 

 

Délocalisation. Cela doit vouloir dire “déménagement sous protection pour que les chiens errants et les abeilles n’attaquent pas les camions ni les ouvriers”, puisqu’à chaque fois, les déménageurs arrivent en cachette la nuit et sont armés de battes de base-ball. Et puis souvent, le lendemain, il y a des types emmitouflés de noir avec des cagoules et des armes de Rambo qui viennent pour protéger l’ouvrier quand il s’enferme dans le bureau du patron pour éviter les piqûres d’abeilles.

 

E

 

Exclu. Électron libéré de l’ensemble des inclus à coups de pieds au cul, équivalent du relégué antique, du lépreux moyenâgeux, de la femme d’Henri VIII ou du moustique entêté qu’on chasse le soir dans la chambre.

 

F

 

Fainéant. Synonyme inavoué du mot “Fonctionnaire” (défini ci-dessous dans la liste), c’est aussi l’insulte favorite qu’emploient ceux dont la principale source de revenus consiste à faire bosser les autres, ou bien de ceux qui adorent voir transpirer autrui alors qu’eux-mêmes ne transpirent jamais.

 

Fin de droit. C’est exactement l’expression tronquée qu’il convenait de mettre en usage en matière socio-économique et historico-culturelle : la France est, depuis déjà fort longtemps, le pays de la fin des droits de l’homme !

 

Fonctionnaire. Énorme concurrent du chômeur. Il coûte une fortune au contribuable, il a la garantie de son statut à vie car personne ne peut le virer, il est antiproductif et donc ne sert à rien non plus, il a le culot de réclamer son seizième mois hebdomadaire à chaque rentrée comme le second sa prime de Noël à chaque sortie, il détient le record du monde de l’absentéisme occidental et, en outre, il présente cette même tendance surprenante à s’énerver lorsqu’on lui demande s’il a l’intention de travailler un jour.

Footballeur. Seule profession où l'on devient milliardaire à 20 ans en jouant, avec les encouragements de la foule laborieuse ; où l'on prend sa retraite à 30 ans sans que personne n'y trouve à redire, et surtout pas ceux qui doivent bosser plus de 45 ans pour en avoir une de merde ; où l'on peut donner des coups de boule devant la terre entière à quiconque semble vous manquer de respect en italien, sans avoir de compte à rendre à la justice et avec la bénédiction générale.

 

Fumer. Et en plus, tu fumes ?!

 

Futur. Pourquoi du compliques toujours tout ?!

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G

 

Gâteau (part de...) : disons que c’est dommage pour les chômeurs : ils font tous du diabète...

 

H

 

Hippie ou hippy. Mention souvent camouflée dans la partie “années 60 et 70” du CV des chômeurs de plus de cinquante ans.

 

Humour. Avec les comiques d’aujourd’hui, tu sais bien que pour accéder au rire, il faut choisir un camp. Alors si t’es chômeur, l’humour, oui, mais... entre chômeurs seulement, sinon ce serait de la provoc’.

 

I

 

Insécurité... de l’emploi, dans les banlieues, routière ; de l’emploi, dans les banlieues, routière ; de l’emploi, dans les banlieues, routière... Ah! Mince ! J’ai fini les pétales.

 

Intérim : ça vient du latin et ça veut dire pendant ce temps-là. D'où les expressions : “Intérim tu nous fais pas chier”, ou bien “Intérim je peux coucher avec ta femme”, ou encore “Intérim pas de maladies, pas de syndicats, pas de casse-couilles”.

 

Isolement : ou quel est le comble de l’isolement ?… Ben, c’est d’être au chômage, c’est-à-dire dans la plus grande des confréries, où se mêlent toutes les origines, toutes les professions, tous les profils, où la victimisation devrait donner lieu à l’un des plus vastes rapprochement humain, au plus bel élan de solidarité et de soutien collectif, à… Argh !Allez tous vous faire voir.

J

 

Job : 

 

– T’en as trouvé un, chérie ?

 

– Oui, j’en ai trouvé un, mais comme d’habitude, il commence par z.

 

Justice. L’exclu n’y a accès que par le biais des aides juridiques. Autrement dit, il n’y a pas accès. C’est normal, non ? puisqu’il est exclu, ce maraud ne va pas en plus réclamer justice !... Bon, d’accord, il y a eu l’affaire des “recalculés”... Certes, de temps en temps, il y a des juges isolés qui se lancent dans l’humanitaire. Surtout quand le Syndicat de la Magistrature a des comptes à régler avec Monsieur le Ministre. Mais ça ne dure pas. La preuve : tous les recalculés ont été déboutés en appel, après que le Syndicat de la Magistrature a obtenu d’urgence une partie ce qu’il demandait.

 

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K

 

Kleptomane. Terme scientifique. Sauf quand c’est celui qui pique l’argent de ceux qui travaillent, tout en les encourageant à travailler pour continuer à ne rien foutre lui-même : là, on préfère utiliser l’un des termes populaires de chômeur ou de patron (c’est selon).

 

L  

 

Loup-garou. Voir Patron.

 

Luxe : curieusement, pour les uns, c’est synonyme de vacances alors que pour les autres, c’est synonyme de travail. Allez y comprendre quelque chose ! 

 

M

 

Malade. Mais non ! Arrête, avec ça ! C’est pas toi, c’est le système qui est malade.

 

Mexicain. Mention à porter dans la case “dernier emploi exercé” lorsque l’on ne s’en rappelle plus.

 

Motivation. Si tu me demandes encore quelles sont mes motivations, je te les mets dans la fraise toutes les deux.

 

N

 

Non. Généralement assorti de t’es un con (sous-entendu ou pas), c’est le leitmotiv que doit subir le chômeur têtu s’il n’a toujours pas compris qu’il énerve les gens des bureaux d’embauche, à leur poser toujours la même question idiote.

 

Nomade. Aujourd’hui, on dit SDF. Ça fait plus kitch, et ça peut sous-entendre Standing De Fortune.

 

O

 

O.S. Anciennement Ouvrier Spécialisé, de nos jours plutôt Oisif en Solde. Il faut noter que lorsqu’on cherche du travail, on tombe souvent sur des os.

 

 

 

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P

 

Parasite. Le tout est de savoir lequel est le plus nuisible et le moins étranger à tous les maux du monde dit social : le pou, le chômeur, le grand patron, le gros ou le petit actionnaire, l’État, le fonctionnaire, le morpion… Quoi qu’il en soit, ce ne sont pas les chômeurs qui parasitent le système, mais l’ANPE qui parasite les chômeurs.

 

Patron. Souvent confondu avec le Manager stock-optionné, ou le repris de justic... (Pardon !) le Grand Patron nommé par l’État, il n’est pas forcément cet être abject qui considère que l’employé est un Gnakoué qui lui doit tout et qui doit se contenter de rien. Le patron, parfois petit, prend le risque de dégringoler plus bas que ses employés en cas d’échec, surtout s’il comptait sur le MEDEF pour le soutenir et s’il n’a pas eu la présence d’esprit, comme les grands, de délocaliser son compte bancaire. Lorsqu’il a le temps de lâcher la vapeur en se faisant fouetter chez une maîtresse dominatrice une fois par semaine, il lui arrive alors de ne pas trop faire subir ses états d’âme despotiques à ses subordonnés. Il lui arrive également de ne pas harceler ses secrétaires pendant que sa femme le surveille, de payer les heures sup. au personnel concerné lorsqu’un inspecteur du travail constate par hasard leur effectivité, d’accorder des échelons à ceux qui peuvent y prétendre selon les conventions collectives après intervention syndicale, et de respecter le droit du travail quand il y est contraint par les prud’hommes. Le (petit) patron, parfois, a le mérite d’être un ancien chômeur, même s’il oublie vite son triste passé ou ne s’en sert que pour reproduire, à son profit, les statuts qu’il a précédemment endurés (stages et contrats poubelles à répétition). Il est surtout le grand oublié des inventeurs du suivi de l’emploi : l’ANPE, depuis qu’elle existe, n’a encore pas pensé à lui organiser des “stages de recherche intensive d’employés”, avec apprentissage de la lettre de recrutement motivée, le tout assorti d’un revenu de 420 euros par mois pendant 6 mois, afin de mieux le rapprocher des réalités de l’offre et de la demande.

 

PIB, PNB, PPA, Pnud :

 

– Vous savez ce que c’est, vous ?

 

– Bien sûr. Le premier est la somme annuelle des valeurs ajoutées sur les biens et services réalisés sur le territoire national par l’ensemble des entreprises nationales ou non, le second étant la somme du premier et du solde des revenus des facteurs de productions transférés par ou à l’étranger sachant que le chiffre, à parité de pouvoir d’achat (PPA), caractérise la puissance économique du productivisme national. Ainsi, selon le Pnud (Programme des Nations Unies pour le Développement), le volume des exportations de la France ayant été multiplié par trois durant ces vingt dernières années, la France n’a jamais été aussi compétitive dans le monde.

 

– Ough ! Vous pouvez répéter la réponse ?...

 

– Toi y’en a vivre de mieux en mieux depuis trente ans, Ducon.

 

– T’as raison, Ducapable, c’est pour ça que le chômage n’a pas cessé d’augmenter depuis trente ans et qu’on peut plus se loger même en bossant.

 

Profession : Nom, prénom... jusque-là, ça va, on peut répondre. Mais après... SPF ?

 

Prédation. On ne peut pas parler d’“idéologie libérale”, parce que le terme “idéologie” supposerait qu’il y ait une idée. Il s’agit plutôt de “prédation libérale”. Un prédateur n’a aucune réflexion : il ne méprise pas seulement sa victime, il la culpabilise et la sanctionne. Il ne se lie jamais d’amitié avec ses congénères : il peut s’associer momentanément avec eux par intérêt ou par nécessité, mais il les tuera au moindre moment d’opulence. Voyez le comportement des lions autour de la carcasse de ce salaud de gnou, ou bien celui des requins à l’odeur de la moindre goutte de sang. N’espérez pas raisonner un prédateur : il ne comprendra jamais autre chose que son intérêt bestial, il ne reviendra jamais sur ses positions, même si vous avez réussi par miracle à le conditionner un temps, et il ne mangera jamais des pommes, même si sa femelle en mange de grosses, parfois (voyez certains politiques). Si vous êtes un gnou dans la nature, face à un prédateur, votre seule issue est la fuite. Si vous êtes un homme ou une femme, dans un monde civilisé, vous n’avez aucune raison de continuer à fuir, à vous cacher et à pleurer. Physiquement, votre prédateur n’a rien de plus que vous. Curieusement, il est même souvent plus faible et beaucoup plus lâche que vous.

 

Précarité. Depuis le temps qu’elle dure, on se demande ce qu’attend l’Académie pour en faire un synonyme de “stabilité”.

 

Q

 

Quand ? : « Quand on t’aura besoin. Pas avant, ni après. »

 

Que dalle :

 

– Et pourtant, je cherche, hein ! Et je suis vachement motivé, hein ! Et j’ai fait tous les stages que vous m’avez obligé à faire, hein !...

 

– Hein ?!

 

Quinquagénaire : ancien mort-vivant, aujourd’hui rejoint par le quadra, lui-même bientôt surfait par le trentenaire. C’est fou ce que l’exclusion vous vieillit un homme, alors qu’il passe son temps à faire la couleuvre sur le hamac.

 

R

 

Radar automatique, ou distributeur de sanctions automatisées, tellement le citoyen est coupable et irresponsable. Cette chose bizarre, issue du plus mauvais film de science-fiction ou de l’imaginaire rudimentaire de quelque politicard populiste sans âme, est la machine prémonitoire de ce qui attend le citoyen polisson du meilleur des mondes, au troisième millénaire. En effet, préparons-nous à voir surgir le “Distributeur automatique de coups de pieds au cul dans l’entreprise” pour tout travailleur qui aurait l’outrecuidance de s’octroyer une seconde d’inattention pendant ses heures de travail, ou encore la “Règle sauteuse qui tape systématiquement sur les doigts de la main gauche de tout employé droitier”, lorsque ce dernier se permettrait de laisser sa main gauche au repos pendant que sa main droite se tape tout le boulot.

 

Il y avait tout de même mille autres solutions que les radars automatiques (voir ci-après notre définition de la répression) : rétrécissement des voies, bandes frontales de ralentissement, autorégulation des moteurs, capteurs-émetteurs à l’entrée des lieux sensibles pour ralentissement automatisé, multiplication des ronds-points, pose d’obstacles identiques à ceux des péages, interventions aléatoires de police non pour piéger et réprimer mais pour faire ralentir, stages de sensibilisation obligatoires, 2 ou 3h d’auto-école obligatoires par an ou bien non obligatoires mais assorties d’un point de bonus... Ah, évidemment, la méthode “radar-caisse et débilisation du piégé” est tout à fait dans l’esprit de la délocalisation d’usine. C’est pourquoi tout nous porte à penser qu’il y a aussi mille autres solutions en matière de choix du travail et de gestion du chômage.

Raté : ancienne appellation de l’exclu. De nos jours, on ne peut plus être un(e) raté(e) puisque le système ne vous laisse plus le loisir d’essayer de réussir quelque chose.

 

Retour à l’emploi (aide au). Vu l’orientation de la courbe du chômage qui ne va qu’en croissant depuis bientôt 40 ans, il serait plus utile d’aider les travailleurs provisoires (pardon pour le pléonasme) à l’entrée au chômage.

 

Rien faire, ou chercher du boulot. Pour un chômeur, ça revient au même puisque chercher du boulot, c’est ne rien obtenir non plus, alors, autant ne…

 

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S

 

S.M.I.C. Stimulant Magique et Incitatif du Chômeur qui, au vu de cet incroyable émolument auquel il a décidément le privilège d’échapper, préfère lâchement rester chez lui dans la béatitude.

 

Stage : officiellement, c'est une période d'activité temporaire en vue de se perfectionner. Qu'est-ce qu'il y en a, ces temps-ci, des gens perfectionnistes, sur le marché ! C'est pas étonnant, avec tous ces fignoleurs, qu'on ne trouve plus assez de bourricots pour occuper des boulots de merde qui ne demandent aucun perfectionnement.

 

T

 

Travailler (ils n’ont qu’à aller). Vous connaissez l’histoire du type qui a perdu son larfeuille et à qui le flic du bureau des pertes demande, sourcil droit froncé, le gauche soupçonneux : « …z’avez votre larfeuille, vous ? »

 

Travailler (ils ne veulent pas aller). Expression consacrée, à l’attention des chômeurs, notamment de la part de ceux qui croient ou qui prétendent travailler. Pourtant, le nombre de gens qui ne fichent rien dans les entreprises, lorsqu’ils n’en ralentissent pas carrément le fonctionnement, est autrement plus élevé que celui des chômeurs ! En effet, demander à des employés attitrés de faire une heure supplémentaire, c’est 99 fois sur 100 leur demander la lune ou provoquer la prochaine grève. Pourquoi voudrait-on que les mêmes, une fois au chômage, se muent en esclaves et en sous-pantins ? Surtout lorsqu’on les pioche et qu’on les jette à la carte du patron, tout en les payant au lance-pierre, et en les persuadant qu’on leur fait là une grande faveur ?

 

En outre, les chômeurs qui ne cherchent plus de travail ont au moins une excuse, eux : on les en a écœurés.

 

Travailleurs. Assorti de “Travailleuses”, il s’agit de l’acouphène résonnant du sempiternel disque rayé de certains vieux Partis très nostalgiques, qui veulent encore croire que le mot est un compliment et la notion un idéal.

U

 

UNEDIC. “Union Nationale pour l’Emploi Dans l’Industrie et le Commerce”. En fait, tout ce qui finit par DIC, ça veut dire “Dans l’Industrie et le Commerce”. Ça ne veut pas dire “Des Incapables au Chômage”. Autrement dit, aucun de ces organismes ne s’occupe vraiment de l’emploi des chômeurs, mais seulement de l’emploi de ceux qui travaillent déjà dans l’industrie et le commerce. Quant aux individus qui perdent un tel emploi, l’Unedic est certes là pour leur jeter une aumône provisoire, mais surtout pour leur rappeler qu’ils sont en train de ruiner ceux qui bossent toujours dans l’industrie et le commerce.

 

V

 

Vérité. C’est sans doute ce qu’il y a de pire chez le chômeur : sa situation est tellement criante de vérité qu’il n’a plus besoin d’ajouter quoi que ce soit pour susciter la haine du reste du monde.

 

W

 

Wagon-lit : dernier hôtel 3 étoiles du sans-emploi qui a la chance d’habiter près d’une gare de triage.

 

X

 

X : catégorie professionnelle dans laquelle les jeunes chômeuses peuvent encore espérer bénéficier d’un bon coup de piston.

 

Y

 

Yéti : ou abominable homme des neiges, aussi légendaire et inquiétant pour le chômeur que ne le sont les synonymes de cet animal fabuleux : employeur, ami ou conjoint.

 

Z

 

Zigzag. Cette onomatopée désigne, au figuré, l’évolution sinueuse de la vie de quelqu’un (selon le Larousse). Ne pourrait-elle être aujourd’hui usitée au sens propre pour remplacer l’abréviation latine CV ? En effet, curriculum vitae signifie carrière de la vie. Or, la carrière est une chose qui n’existe plus et qui n’a même jamais existé pour la plupart des chômeurs. Il est donc absurde de demander un CV à un chômeur ! Il serait plus juste de lui demander son Zigzag.

25/05/2013

Les cerveaux du règne animal

Un article de Frans de Waal, traduit de l'anglais par Dominic Hofbauer


 Qui est le plus intelligent : un humain ou un singe ? Eh bien, tout dépend de la tâche à accomplir. Prenons le cas d'Ayumu, un jeune chimpanzé mâle qui infligea un affront aux capacités humaines de mémorisation lors d'une étude menée à l'Université de Kyoto en 2007. Dans cette expérience, le chimpanzé retient des séries aléatoires de 9 chiffres, compris entre 1 et 9, qui apparaissent une fraction de seconde sur un écran tactile, puis disparaissent, masqués sous de petits carrés blancs, qu'Ayumu touche ensuite tour à tour, dans l'ordre croissant des numéros qui figuraient à leur place. Je me suis moi-même essayé à cet exercice, sans parvenir à me souvenir de l'emplacement de plus de 5 chiffres consécutifs, alors que je disposais de bien plus de temps que ce chimpanzé au cerveau agile. Dans l’étude réalisée à Kyoto, Ayumu a aussi distancé – et de loin – tout un groupe d'étudiants. L'année suivante, il battait le champion britannique des concours de mémoire, Ben Pridmore.




Comment soumettre un chimpanzé – ou un éléphant, une pieuvre, un cheval… – à un test de QI ? Cette question sonne comme le début d’une histoire drôle, mais elle compte en réalité parmi les interrogations les plus épineuses auxquelles la science est confrontée aujourd'hui. Durant les dix dernières années, les chercheurs en cognition animale ont imaginé quelques stratagèmes ingénieux pour y répondre. Et leurs découvertes ébranlent la place unique que l'homme s'octroie dans l’univers depuis, au moins, l'Antiquité grecque. Selon la scala naturae (échelle de la nature) d'Aristote, les différentes formes de vie sont classées de bas en haut, avec les humains au sommet. À l’âge des Lumières, le philosophe René Descartes – un fondateur de la science moderne – considérait les animaux comme des automates sans âme. Au XXe siècle, le psychologue américain B. F. Skinner et ses adeptes les dépeignaient comme n’étant guère plus que des machines répondant à des stimuli. S'ils admettaient qu’ils puissent apprendre, ils leur déniaient la pensée et la sensibilité. La notion de « cognition animale » demeurait un oxymore. Cependant, un éventail grandissant de données indique que nous avons sous-estimé à la fois l'étendue et le niveau de l’intelligence animale. Une pieuvre peut-elle utiliser des outils ? Les chimpanzés ont-ils le sens de l’équité ? Les oiseaux peuvent-ils deviner ce que savent leurs congénères ? Les rats ressentent-ils de l'empathie pour leurs amis ? Il y a quelques dizaines d'années, nous aurions sans doute répondu « non » à toutes ces questions. De nos jours, nous en sommes moins certains.

Les recherches menées avec des animaux ont longtemps été handicapées par nos préjugés anthropocentriques : nous leur proposions souvent des tests qui fonctionnent bien avec des humains, mais moins bien avec d'autres espèces. De nos jours, les scientifiques cherchent davantage à s'adresser aux animaux dans leurs propres termes, au lieu de les traiter comme des humains à poils ou à plumes. C'est là un changement d'approche qui modifie fondamentalement notre compréhension de leurs capacités. En voici un parfait exemple. Pendant des années les scientifiques ont pensé que les éléphants sont incapables d'utiliser des outils. Tout au plus admettait-on qu’il pouvait leur arriver de prendre un bâton pour se gratter le dos. Dans des expériences menées dans le passé, on mettait à la disposition des éléphants un long bâton pour voir s’ils s’en servaient pour attraper de la nourriture placée hors de leur portée. Ce dispositif fonctionne bien avec les primates, mais les éléphants ne montraient aucun intérêt pour le bâton. On en conclut que les éléphants ne comprenaient pas le problème. Il ne vint à l'esprit de personne que c’était peut-être nous, les chercheurs, qui ne comprenions pas les éléphants. Considérons le test du point de vue de l'animal. Contrairement à la main des primates, l’organe de préhension des éléphants est aussi leur nez. La trompe ne leur sert pas uniquement à saisir la nourriture, mais aussi à la sentir et la toucher. Avec leur odorat incomparable, ils savent exactement ce qu’ils vont chercher. La vue joue un rôle secondaire. Mais dès qu'un éléphant se saisit d'un bâton, ses conduits nasaux sont bloqués. Même quand le bâton est proche de la nourriture, elle ne peut être ni sentie ni touchée. C’est comme proposer à un enfant une chasse aux oeufs de Pâques avec les yeux bandés.

Quelle sorte d'expérience rendrait justice à l'anatomie et aux capacités propres de l'animal ? Lors d'une visite récente au zoo de Washington, j’ai rencontré Preston Foerder et Diana Reiss du Hunter College, qui m’ont montré comment Kandula, un jeune éléphant mâle, réagit à ce problème s'il lui est présenté différemment. Les scientifiques ont suspendu un fruit au-dessus de l'enclos, hors de portée de l'éléphant. L'animal avait à sa disposition un bâton et une solide caisse carrée. Kandula a ignoré le bâton mais, au bout d’un moment, il s’est mis à pousser la caisse avec sa patte, en ligne droite, jusqu'à ce qu'elle soit juste sous le fruit et qu'il puisse s'en servir comme marchepied et atteindre la nourriture avec sa trompe. Un éléphant peut donc utiliser des outils – à condition que ce soient les bons. Pendant que Kandula savourait sa récompense, les chercheurs m’ont expliqué comment ils avaient varié l'exercice, le rendant plus difficile pour l’éléphant. Ils avaient placé la caisse plus loin dans l’enclos, hors de sa vue, de sorte que lorsque Kandula regardait le fruit convoité, il lui fallait se souvenir de la solution et s'éloigner de la nourriture pour aller chercher l'outil. À part quelques espèces dotées d’un cerveau de grande taille, comme les humains, les grands singes et les dauphins, peu d'animaux en sont capables. Kandula l’a fait sans hésiter, allant chercher la caisse placée très loin de lui.

Une autre erreur fut commise lorsqu'on voulut soumettre des éléphants au classique « test du miroir », qui renseigne sur la capacité d'un individu à reconnaître son propre reflet. Dans les premiers essais, les chercheurs placèrent un miroir sur le sol devant la cage des éléphants. Mais la glace était bien plus petite que le plus grand des animaux terrestres. Tout ce que l'éléphant pouvait y apercevoir c’était quatre pattes derrière une double série de barreaux (car le miroir les dédoublait). Lorsqu'on dessina une marque sur le corps de l'animal qu'il ne pouvait voir qu'avec l'aide du miroir, il ne la remarqua pas. On en conclut que la conscience de soi est ou : était ? absente chez cette espèce. Mais Josua Plotnik de la Think Elephant International Foundation modifia le dispositif expérimental en mettant à la disposition des éléphants un miroir carré de 2,5 mètres de côté que les éléphants pouvaient toucher, sentir, et même contourner pour regarder derrière. Une éléphante d’Asie sut se reconnaître. Debout devant le miroir, elle frotta à plusieurs reprises avec sa trompe la croix blanche que l'on avait dessinée sur son front, chose qu’elle ne pouvait accomplir qu’en faisant le lien entre son reflet et son propre corps.

Il y a vingt ans encore, on pensait que notre espèce surpassait toutes les autres dans la capacité de reconnaissance faciale. Cette croyance erronée reposait là aussi sur un dispositif expérimental inadéquat. On avait fait des tests sur d’autres primates, mais en leur soumettant des visages humains, supposés plus faciles à distinguer. Lisa Parr, l'une de mes collaboratrices à l'Université d'Emory, obtint pourtant des résultats excellents en testant l'aptitude des chimpanzés à reconnaître des visages d'autres chimpanzés. En sélectionnant des portraits sur un écran d'ordinateur, ils parvenaient même à établir des liens de parenté entre de jeunes chimpanzés et leurs mères, à partir d'un choix composé d'une femelle et de deux autres singes (dont l'un était son enfant). Leur choix n'était déterminé que par la ressemblance physique, car les chimpanzés de l'expérience ne connaissaient aucun des chimpanzés vus à l'écran.

Il nous faut peut-être aussi repenser la physiologie de l'intelligence. Prenons le cas des poulpes. En captivité, ces animaux reconnaissent leurs soigneurs, et parviennent à ouvrir des boîtes à pilules munies de bouchons de sécurité – ce qui n'est d'ailleurs pas toujours facile pour un humain. Les poulpes possèdent le cerveau le plus volumineux que l'on puisse trouver chez les invertébrés, mais leurs capacités étonnantes ont peut-être une autre origine. Il semble en effet que chez ces animaux, le siège de la cognition ne soit pas uniquement dans le cerveau. Les pieuvres possèdent des centaines de ventouses, chacune munie d'un ganglion avec des milliers de neurones. Ces « mini-cerveaux » sont connectés entre eux et composent un système nerveux largement réparti dans tout l'organisme. C'est la raison pour laquelle un tentacule sectionné peut ramper tout seul et même saisir de la nourriture. Lorsqu'une pieuvre change de couleur pour se défendre, en prenant par exemple l'apparence d'un serpent marin venimeux, il se peut que la décision vienne de la peau elle-même et non du cerveau central. Une étude de 2010 a mis en évidence la présence de séquences de gènes dans la peau des sèches semblables à celles qu’on trouve dans la rétine. Se pourrait-il qu’un organisme possède une peau qui voit et huit bras qui pensent ?

Soyons prudents, cependant, car il nous est aussi arrivé par le passé de surestimer les capacités mentales des animaux. Ainsi, il y a environ un siècle, on a cru qu’un cheval allemand nommé Hans savait soustraire et additionner des nombres. Son propriétaire lui demandait, par exemple, combien faisaient 4 x 3, et Hans frappait son sabot sur le sol 12 fois. Les gens étaient stupéfaits et Hans devint une attraction internationale. Du moins jusqu'à ce que le psychologue Oskar Pfungst se mette à étudier les aptitudes du cheval. Pfungst découvrit que le cheval ne réussissait les calculs que lorsque son propriétaire connaissait la réponse et que Hans pouvait le voir. Apparemment, le propriétaire changeait légèrement de position ou d'attitude lorsque Hans atteignait le nombre exact de coups de sabots. (Le propriétaire faisait cela inconsciemment, il n’y avait pas trucage délibéré de sa part.) Certains estiment que la leçon à tirer de cette découverte est que Hans doit être rétrogradé sur l’échelle de l’intelligence. Pour ma part, je trouve ce cheval très intelligent. Il n’était peut-être pas très doué pour le calcul, mais sa compréhension du langage corporel humain était remarquable. Et n'est-ce pas là une des aptitudes dont les chevaux ont le plus besoin ?

La prise de conscience de « l’effet Hans », comme on a coutume de l’appeler de nos jours, a fait beaucoup progresser la recherche en cognition animale. Malheureusement on n'en tient pas suffisamment compte lors de recherches comparables menées avec des humains. Quand on teste en laboratoire les capacités cognitives des chiens, leurs propriétaires ont les yeux bandés, ou alors on leur demande de regarder dans une autre direction. Par contre, on continue à tester les jeunes enfants alors qu’ils sont assis sur les genoux de leur mère. Cela revient à supposer que les mères font simplement office de chaises, alors que chacune d’elles souhaite certainement que son enfant réussisse. Rien ne garantit que leur regard, leurs mouvements de tête, ou de légers changements de position ne soient pas autant de signes que l’enfant est capable de décoder. Cette asymétrie dans les conditions expérimentales est à prendre en compte tout particulièrement dans les tests visant à comparer l'intelligence des grands singes à celles des enfants. Les scientifiques qui pratiquent ces tests soumettent souvent les mêmes problèmes aux deux espèces et traitent les sujets exactement de la même manière. Du moins le croient-ils. Mais les enfants sont tenus par leurs parents ; on leur dit « regarde ça ! » « Où est le lapin ? », et ils interagissent avec des membres de leur propre espèce. Les singes par contre sont derrière les barreaux d’une cage, ne bénéficient pas du langage ou de la présence d’un proche parent qui connaît les réponses, et se trouvent face à des membres d’une autre espèce. L’expérience est massivement biaisée en leur défaveur. Mais s'ils ne réussissent pas à faire aussi bien que les enfants, on en conclut invariablement qu'ils ne possèdent pas les capacités mentales étudiées. Une étude récente sur les mouvements oculaires des chimpanzés a montré qu’ils suivent beaucoup mieux le regard de leurs congénères que celui des humains. Cette simple découverte a des implications considérables pour toute expérience nécessitant que l'animal prête attention aux expérimentateurs humains. La barrière d'espèce explique peut-être entièrement les différences de performances constatées entre les enfants et les chimpanzés.

Le problème de l'absence de preuves sous-tend bon nombre de nos conceptions erronées à propos de l'intelligence des animaux. Lorsque je me promène en forêt dans l’État de Géorgie, où je vis, et que je n’entends ni ne vois aucun grand pic, suis-je autorisé à en conclure que l'oiseau est absent ? Bien sûr que non. Le pic est bien connu pour son talent à contourner les arbres pour rester hors de vue. La seule chose que je puisse dire est que je manque de preuves. À cet égard, les sciences de la cognition animale ont de quoi laisser perplexe. Elles ont derrière elles une longue histoire d’affirmations sur l’absence de capacité mentales diverses, fondées uniquement sur un petit nombre d’expériences de type « promenade en forêt ». De telles conclusions contredisent le fameux adage de la psychologie expérimentale : « L'absence de preuve n'est pas la preuve de l'absence. »

Considérons à présent la question de savoir si nous sommes la seule espèce à se préoccuper du bien-être d'autrui. On sait que les grands singes vivant à l’état sauvage se portent mutuellement assistance pour, par exemple, se défendre contre un léopard, ou consoler des congénères dans la peine à grand renfort d'embrassades. Pourtant, ces observations ont été ignorées durant des décennies, tant on s'est focalisé sur des expériences sensées montrer le caractère purement égoïste des animaux. On a affirmé cela sur la base d’un dispositif conçu pour voir si un chimpanzé pousserait de la nourriture vers un autre. Mais il se peut que les chimpanzés n’aient pas compris le dispositif. Car, lorsqu'on leur a proposé d'obtenir de la nourriture avec un système de jetons (un type de jetons pouvant être échangé contre de la nourriture uniquement pour celui qui les donne, l’autre en procurant aussi à un second chimpanzé), ils ont préféré les jetons qui en procuraient aux deux. Il est même possible que d'autres espèces fassent preuve d'une générosité similaire. Une étude récente a montré que des rats libéraient un congénère prisonnier, même quand une boîte de chocolats était posée à côté d’eux. De nombreux rats ont d’abord libéré leur congénère, puis ils se sont jetés sur les friandises qu’ils ont volontiers partagées.

Dans mon domaine de recherche, on observe une constante historique : chaque fois qu'un supposé « propre de l’homme » trouve son équivalent dans le règne animal, on en invoque aussitôt un autre pour le remplacer. Pendant ce temps, la science ne cesse de miner le mur qui nous sépare des autres animaux. Après les avoir considérés comme des automates fonctionnant sur le mode « stimulus-réponse » ou comme des machines guidées par l’instinct, le regard que nous portons sur eux a changé : nous les voyons désormais comme des décideurs au comportement sophistiqué. L'échelle d'Aristote n'est pas seulement en train de raccourcir, elle se transforme en un buisson qui comporte de nombreuses branches. N'y voyons pas une insulte à la supériorité humaine. Ce dont il s’agit, c’est de reconnaître, enfin, que la vie intelligente n'est pas tant à rechercher aux confins de l'espace qu'elle n'est à découvrir en abondance ici, sur Terre, juste sous nos yeux.


Article mis en ligne le 22 mai 2013

 

 

Frans B. M. de Waal est professeur en éthologie des primates au département de psychologie de l'Université Emory à Atlanta, et directeur du Living Links Center au Yerkes National Primate Research Center. Il a publié de nombreux livres dont La politique du chimpanzé, De la réconciliation chez les primates et Le singe en nous.

L’article ci-dessus est paru le 23 mars 2013 dans le Wall Street Journal, aux États-Unis. sous le titre « The brains of the Animal Kingdom ». Nous remercions Frans de Waal et le Wall Street Journal d’avoir autorisé les Cahiers antispécistes a en publier la traduction française.

La Rédaction

http://www.cahiers-antispecistes.org/spip.php?article425

MONSANTO, ANONYMOUS NE T'OUBLIE PAS

 

 

Citoyens du monde Bonjour

Monsanto

Votre siège est situé à Saint-Louis, Etats-Unis, et au 21ème siècle vous êtes spécialisés dans les biotechnologies végétales.

Vous avez été fondé en 1901 par John Francis QUEENY.

Originellement entreprise de produits chimiques, votre nom est associé à celui des P.C.B et de l'agent orange, massivement utilisé par l'armée américaine lors de la guerre du Vietnam.

Monsanto, vous êtes détenteur d'un brevet, aujourd'hui périmé, sur le glyphosate et vous êtes l'un des principaux producteurs de semences génétiquement modifiées...

Comme nous pouvions nous y attendre, les études récentes sur les OGM et sur le roundup sont contestées par vos soins, et ce, sans doute, sans aucune pression de l'agrochimie.

Parce que cela ne doit pas permettre de clore les débats, Anonymous vous met en garde !

Le Centre National de Recherche Scientifique, l'Institut National de la Recherche Agronomique sont-ils dénués à ce point de biologistes et d'expérimentateurs qu'il faille toujours s'en remettre à vos études, toujours pilotées par vous-même? Syngetal, Pioneer et dont les données restent secrètes ! Au nom du secret industriel !

 

 

Votre entreprise a fait et continue de faire l'objet d'enquêtes et d'actions en justice concernant à la fois les produits chimiques ou issus du génie génétique que vous mettez sur le marché, ainsi que pour vos méthodes de lobbying.

Pour ces faits Monsanto, nous vous observons.

Nous vous demandons de communiquer la vérité.

Parce que les discours les plus courts sont les meilleurs.

Parce que nous n'oublions pas.

Redoutez nous

 

 

 

 

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24/05/2013

Planète Larklight de Philip Reeve

    Planete-Larklight_large.jpg

 illustré par David Wyatt, traduit de l’anglais par Jean Esch, Folio (Gallimard), janvier 2013

415 pages, 18,30 €

 

Nous sommes en plein cœur du XIXème siècle, la construction du Crystal Palace est en cours pour accueillir la première grande exposition universelle à Londres. Arthur Mumby et sa sœur, qui ont perdu leur mère, vivent seuls avec leur père, un scientifique spécialiste en xénologie, sur une lointaine orbite. Et ceci, littéralement, car Arthur et Myrtle habitent Larklight, une étrange maison-vaisseau un peu délabrée, qui appartenait à la famille de leur mère, avec pour s’occuper d’eux et de la maison quelques domestiques mécaniques d’un modèle un peu ancien, dont un automajordome en forme de chaudière nommé Raleigh, et des Porcs Voltigeurs, parfaits pour le ménage. Tout cela n’a rien d’exceptionnel à une époque où, grâce à Isaac Newton, les voyages dans l’espace sont des plus communs et les planètes et l’éther fort habités par toutes sortes de créatures. Les vaisseaux se déplacent tout naturellement grâce à l’alchimie et il y a des comptoirs de commerce un peu partout.

C’est comme ça que Philip Reeve nous propulse dans une odyssée haletante, baignée d’une atmosphère des plus steampunk, que Jules Verne aurait, sans aucun doute, adoré. La question qui se pose au fur et à mesure que l’on avance dans le livre, c’est « mais où va-t-il chercher tout ça ? ». En effet, l’auteur fait preuve d’une imagination absolument époustouflante, avec une profusion de détails d’une richesse inouïe, qui fait que nous ne pouvons que nous immerger totalement dans l’histoire et y croire. Impossible de s’ennuyer une seconde, c’est du grand roman d’aventure. Un régal ! Après avoir posé le décor de Larklight, très rapidement, l’auteur y amène Mr Webster, un mystérieux visiteur qui va faire basculer Arthur et Myrtle, bien malgré eux, dans une série de péripéties extraordinaires et très souvent terrifiantes. Après s’être échoués sur la face cachée de la lune et avoir failli servir de repas aux larves affamées d’une Mite Potière, ils seront sauvés par le jeune pirate Jack Havock et son équipage hors du commun. C’est le moins qu’on puisse dire, puisqu’il est composé d’une lézarde bleue spécialiste en alchimie, d’un crabe géant, d’un Ionien trapu à quatre bras, de deux Jumeaux Tentacules, sorte d’anémones de mer sur pattes qui roucoulent comme des oiseaux et d’un lutin très grossier. Tout ce joli monde vit de rapines en naviguant dans l’éther à bord du Sophronia. Accepter leur aide sera un véritable calvaire pour Miss Myrtle, une jeune fille tout de même très anglaise et très distinguée, mais la vie réserve souvent des surprises de taille, et chacun peut se surprendre lui-même dans des circonstances fort difficiles. Ici, elles s’enchaîneront à la vitesse de la lumière de notre lampe de chevet, à même de réveiller, même chez le plus blasé des lecteurs, – adultes n’hésitez pas ! – l’enthousiasme et le goût du rêve qui demeurent tout au fond de nous. Un petit bémol peut-être, arachnophobes s’abstenir si vous le pouvez, mais je doute que quiconque puisse reposer ce livre, une fois qu’il l’aura commencé !

 

Cathy Garcia

 

 

ps : et en plus ils sont en train d'en faire un film, et ce bouquin est vraiment géniaaaaaaaaaaaaaaal !

 

 

PhilipReeve2008.pngPhilip Reeve est né et a grandi à Brighton, où il a travaillé pendant de nombreuses années comme libraire, tout en commençant à coécrire, produire et mettre en scène des pièces de théâtre à petit budget. Passionné par l’écriture depuis son enfance, Philip Reeve est également illustrateur et a mis en images environ quarante livres pour enfants, dont plusieurs best-sellers couronnés de nombreux prix.

 

 

 

 

 

Vient de paraître : des oranges sentimentales de Christian Degoutte

oranges.jpg

 

 

- L’espoir repose au creux de tes cuisses avec tes mains

 

arrondies autour d’un petit bol de lait chaud.

 

- L’espoir ?

 

                     - si ce n’est ça comment nommer dans tes mains

 

ce petit sein de lait chaud cette roseur d’ellébore de l’air

 

ou ta patience à rester fraîche qu’on dirait d’une orange ?

 

- L’espoir ?

 

                     - si ce n’est ça comment nommer

 

ce qui a détourné tes larmes

 

                                               l’aile d’avril neigeuse

 

encore sur tes joues le vin sucré de cannelle d’un basson

 

ou sur la porcelaine ta bouche tranchée par la soif ?

 

- L’espoir.

 

                     - comme ce que je voudrais saisir avec les dents

 

entre tes lèvres humides

 

                                       le petit éclair rose de ta langue.

 

 

 

 

 

80  pages au format 14 x 21, 9 € (+ 2 € de port – port compris à partir de l’achat de 2 exemplaires)

Commande à Gros Textes Fontfourane

05380 Châteauroux-les-Alpes

(Chèques à l’ordre de Gros Textes)

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21/05/2013

Balance, de et par Mädir Eugster

 

 

 

 

 

RIGOLO Swiss Nouveau Cirque

http://www.rigolo.ch/

17/05/2013

Des déchets radioactifs venant de Chine découverts au port d'Alger, découverte d'un réseau qui disperse ces substances

  

Des déchets radioactifs en provenance de Chine ont été découverts au port d'Alger et les responsables de ce trafic feraient partie d'un réseau international qui disperse ces substances sur le continent africain, a rapporté jeudi le quotidien francophone Le Soir d'Algérie.

Les déchets radioactifs sous forme de roches ont été découverts le 9 avril par les douaniers du port d'Alger. Ils étaient stockés dans trois conteneurs de vingt pieds en provenance de Chine, a indiqué Le Soir d'Algérie.

Les douaniers ont signalé avoir découvert des pierres de différentes tailles et de différentes couleurs. Les analyses réalisées sur des échantillons ont confirmé le caractère radioactif de ces roches, selon le journal.

Les trois conteneurs ont été importés par un opérateur algérien. La marchandise a été chargée au port de Qingdao, en Chine, à bord du Nicolas, un navire battant pavillon antiguais, selon les premiers éléments de l'enquête cités par le journal qui précise que le navire avait fait escale à Malte avant de rallier Alger.

Le journal relève que les enquêteurs travaillent sur la piste d'un important réseau de trafic de déchets radioactifs d'envergure internationale.

Ce réseau, selon la même source, transporte puis disperse sur le continent africain des substances radioactives produites dans des pays développés.

L'origine de ces roches n'a toujours pas été déterminée mais des analyses complémentaires sont effectuées au port d'Alger, a rapporté le journal.


Source ©AFP / 16 mai 2013

 

http://naturealerte.blogspot.fr/2013/05/16052013algerie-d...

11:39 Publié dans NUCLEAIRE | Lien permanent | Commentaires (0)

Super trash / Festival de Cannes - côté poubelles...

 

 

Super trash - un film de Martin Esposito - SORTIE 9 OCTOBRE 2013

 

 

 

 

Alain Jégou

Je le connaissais de nom, c'est souvent ce que l'on dit, quand on apprend qu'un poète est parti avant qu'on puisse le connaître "pour de vrai", et pourtant il n'était pas né de la dernière marée ! Alors voilà, Alain Jégou a embarqué le 6 mai dernier pour, comme on dit, son dernier voyage. J préfère croire qu'il n'y a jamais de dernier quoi que ce soit, mais plutôt d'innombrables premières fois et donc pour la première fois dans cette vie là, Alain Jégou est mort. Il était l'ami de Claude Pélieu, de Bruno Sourdin, de Jean Azarel et tant d'autres. Je pense aussi à l'ami Yann Orveillon, déjà deux ans qu'il a embarqué lui aussi pour des horizons inconnus. Le monde des poètes est aussi vaste que petit, surtout celui des poètes sincères, ceux qui ont l'âme éprise de véritable liberté et le coeur à nu.

 

Jegou-Alain_par-j_yves-gloaguen2.jpg

 

Allez donc voir le blog http://alainjegou.blogspot.fr/ mis en ligne par la bibliothèque de Quimperlé et que vive la parole du poète-marin-pêcheur.

 

 

Cathy Garcia

 

 

16/05/2013

Vient de paraître : Claques & boxons, Ed. Nouveaux Délits

couverture.jpg

130419 la gd castafiore.jpgPoèmes de Cathy Garcia, illustrations de JL Millet

 

 

Non monsieur, ici

 Il n’y a pas d’amour
 Il n’y en a jamais eu
Pensez bien sinon, monsieur
Qu’on s’en serait aperçu
 

 

 Ici monsieur

Il n’y a que la rage
Et si l’amour y venait
Il y ferait naufrage.
 
 

130419 couche-tard.jpg

 
Éditions Nouveaux Délits
ISBN: 978-2-919162-02-4
42 pages

Imprimé sur papier recyclé calcaire 100 gr, couverture calcaire 250 gr

12 + port



 


Pour commander, envoyez un mail à nouveauxdelits arobase orange point fr.

 

La Russie avertit Obama: une guerre globale sur la disparition des abeilles menace

 

 

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Par Sorcha Faal, le 10 mai 2013

Les minutes alarmantes de la rencontre de la semaine passée entre le président Vladimir Poutine et le secrétaire d’état US John Kerry révèlent "l’extrême outrage" du dirigeant russe concernant la protection, par le régime Obama, des géants de l’agrochimie Syngenta et Monsanto face à une "apocalypse des abeilles" dont le Kremlin avertit qu’elle "mènera très certainement" à une guerre mondiale.

Selon ces minutes, publiées aujourd’hui au Kremlin par le ministère des ressources naturelles et de l’environnement de la fédération de Russie (MRNE), Poutine était si énervé du refus du régime Obama de discuter de ce sujet très grave qu’il déclina pendant trois heures de recevoir Kerry, qui avait voyagé jusqu’à Moscou pour une mission diplomatique programmée d’avance, mais se ravisa pour ne pas créer une scission encore plus grande entre les deux nations.

Au centre de cette dispute entre la Russie et les USA, annonce ce rapport du MRNE, sont les "preuves incontestées" qu’une gamme d’insecticides neuro-actifs liés à la nicotine, connue sous le nom de néo-nicotinoïdes, détruisent la population d’abeilles de notre planète, ce qui, laissé en l’état, pourrait anéantir la capacité de notre monde à faire pousser assez de nourriture pour nourrir ses populations.

 

Cette situation est devenue si sérieuse, rapporte le MRNE, que la Commission Européenne dans son ensemble a institué la semaine dernière une interdiction de précaution de deux ans (devant commencer le 1 décembre 2013) sur l’usage de ces pesticides "tueurs d’abeilles" à la suite de la Suisse, de la France, de l’Italie, de la Russie, de la Slovénie et de l’Ukraine, qui avaient déjà tous interdit l’usage d’organismes génétiquement modifiés des plus dangereux sur le continent.

Deux des néo-nicotinoïdes les plus redoutés sous le coup de cette interdiction sont Actara et Cruiser, fabriqués par la multinationale suisse de biotechnologie Syngenta AG, qui emploie plus de 26000 personnes dans plus de 90 pays, eu troisième rang mondial des ventes sur le marché commercial des semences agricoles.

Il est important de noter, dit ce rapport, que Syngenta, avec les géants de la bio-tech Monsanto, Bayer, Dow et DuPont contrôlent maintenant presque 100% du marché global de pesticides et de semences et plantes génétiquement modifiées.

Relevable également à propos de Syngenta, poursuit le rapport, en 2012 Syngenta fut condamnée en Allemagne pour avoir caché le fait que son maïs génétiquement modifié tue le bétail, et paya comme réparation d’une plainte collective $105 millions aux USA suite à la découverte de la contamination de l’eau potable de quelques 52 millions de citoyens états-uniens, dans plus de 2000 bassins aquifères avec son herbicide "changeur de genre" Atrazine.

L’épouvantable gravité de la situation, dit le MRNE, peut être constatée dans le rapport publié en mars dernier par l’American Bird Conservancy (ABC), où ils avertissent du danger dans lequel se trouve toute la planète, et où nous pouvons lire, notamment:

"En tant que composante d’une étude sur les effets de la classe d’insecticides les plus utilisés au monde, des produits chimiques similaires à la nicotine appelés les néo-nicotinoïdes, l’American Bird Conservancy (ABC) a appelé à une interdiction de leur usage et à la suspension de toutes leurs applications en attente d’un examen indépendant des effets de ces produits sur les oiseaux, les invertébrés terrestres et aquatiques, et d’autres organismes vivants.

Il est clair que ces produits chimiques ont le potentiel d’affecter des chaînes alimentaires entières. La persistance dans l’environnement des néo-nicotinoïdes, leur propension au ruissellement et à l’infiltration dans les eaux souterraines, et leur mode d’action cumulatif et grandement irréversible chez les invertébrés soulèvent des inquiétudes écologiques sérieuses,"

a dit Cynthia Palmer, co-auteure du rapport et directrice des programmes sur les pesticides pour ABC, l’une des organisations les plus éminentes des USA pour la conservation des oiseaux.

ABC a commandité le toxicologue environnemental de renommée mondiale le Dr. Pierre Mineau pour mener ces recherches. Le rapport de 100 pages, "L’impact des insecticides les plus usités de la nation sur les oiseaux", passe en revue 200 études sur les néo-nicotinoïdes dont des études menées par l’industrie elle-même et obtenues grâce au Freedom of Information Act US (loi sur la liberté de l’information, ndt). Le rapport évalue le risque toxicologique encouru par les oiseaux et les écosystèmes aquatiques, et comprend des comparaisons exhaustives avec les anciens pesticides que les néo-nicotinoïdes ont remplacé. Le document conlut que les néo-nicotinoïdes sont mortels pour les oiseaux et aux systèmes aquatiques dont ils dépendent.

"Un seul grain de maïs enduit d’un néo-nicotinoïde peut tuer un passereau," atteste Palmer. "Même un tout petit grain de blé ou sa canule raité avec le plus ancien des néo-nicotinoïde – dénommé imidacloprid – peut empoisonner un oiseau de manière fatale. Et aussi peu qu’un dixième de semence de maïs recouverte de néo-nicotinoïde par jour pendant la saison de ponte est tut ce qu’il faut pour perturber la reproduction."

Le nouveau rapport conclut que les taux de contamination par les néo-nicotinoïdes dans les eaux de surface et souterraines aux États-Unis et autour du monde ont déjà dépassé le seuil constaté être mortel pour beaucoup d’invertébrés aquatiques.

Rapidement suite à ce sévère rapport, dit le MRNE, un large groupe d’apiculteurs et d’écologistes états-uniens a porté plainte contre le régime Obama à cause de la poursuite de l’usage de ces néo-nicotinoïdes, affirmant: "Nous amenons l’EPA (Environmental Protection Agency, agence de protection de l’environnement US, ndt) devant les tribunaux à cause de son échec à protéger les abeilles des pesticides. Malgré nos meilleurs efforts pour prévenir l’agence des problèmes posés par les néo-nicotinoïdes, l’EPA a continué d’ignorer les signes d’avertissement clairs d’un système agricole en péril."

La gravité de ce qui est vraiment devenu le système agricole planétaire du fait de ces plantes et semences génétiquement modifiées et ces pesticides, poursuit le rapport, peut être comprise à travers la décision de la Commission Européenne la semaine dernière, qui fait suite à leur interdiction des néo-nicotinoïdes, où ils projettent de rendre illégales presque toutes les plantes et semences non-enregistrées auprès de l’Union Européenne, et nous pouvons lire, entre autres:

"L’Europe se précipite vers les bons vieux jours de 1939, 40… Une nouvelle loi proposée par la Commission Européenne rendrait illégales "la culture, la reproduction et le commerce" de toutes semences végétales qui n’aient pas été "testées, approuvées et acceptées" par une nouvelle bureaucratie de l’UE dénommée "l’agence de l’UE des variétés végétales.

Cela s’appelle la Loi sur le Matériel Reproductif Végétal, et entend rendre le gouvernement responsable de presque toutes les plantes et semences. Les jardiniers chez eux qui font pousser leurs propres plantes à partir de semences non-régulées seraient considérés comme des criminels sous cette loi."

Ce rapport du MRNE souligne que bien que cette action de l’UE paraisse draconienne, elle est néanmoins nécessaire pour purger le continent d’une poursuite de la contamination par ces "monstruosités de semences" engendrées par la génétique de laboratoire.

Ce qui rend encore plus perplexe dans tout cela, dit le MRNE, et qui provoqua la colère de Poutine envers les USA, sont les efforts fournis par le régime Obama pour protéger les bénéfices des producteurs de pesticides en face des dommages catastrophiques infligés à l’environnement. Comme le dit, entre autres choses, le Guardian News Service dans leur article du 2 mai intitulé "Les USA rejettent l’affirmation de l’UE que les pesticides sont la principale cause pour la chute de population des abeilles":

"L’Union Européenne a voté cette semaine une interdiction de deux ans de l’usage d’une classe de pesticides, connus sous le nom de néo-nicotinoïdes, qui a été associée avec la disparition des abeilles. Le rapport du gouvernement US, par contre, trouva des causes multiples à la disparition des abeilles mellifères."

Le MRNE ajoute que les "vraies" raisons derrière la protection accordée par le régime Obama à ces géants de la biotechnologie qui détruisent notre monde peuvent être trouvées dans l’article intitulé "Comment Barack Obama est-il devenu l’homme de Monsanto à Washington?" et qui lit, entre autres:

"Après sa victoire aux élections de 2008, Obama donna des postes-clés à des employés de Monsanto dans des agences fédérales ayant une influence considérable sur les thèmes alimentaires, la USDA (US Department of Agriculture, ministère de l’agriculture US, ndt) et la FDA (Food and Drug Administration, agence des aliments et des drogues, ndt): à la USDA, comme directeur du National Institute of Food and Agriculture (institut national de la nourriture et de l’agriculture, ndt), Roger Beachy, ancien directeur du Danforth Center de Monsanto. Comme commissaire adjoint de la FDA, le nouveau tsar des sujets de sécurité alimentaire, le notoire Michael Taylor, ancien vice-président des relations publiques de Monsanto. Taylor avait été instrumental dans l’obtention de l’approbation de l’hormone de croissance bovine fabriquée en laboratoire de biogénétique par Monsanto."

Encore pire, après que la Russie ait suspendu l’importation et l’utilisation du maïs transgénique de Monsanto suite à une étude suggérant un lien avec le cancer du sein et des dommages aux organes en septembre dernier, le Russia Today News Service a rapporté la réaction du régime Obama:

"La Chambre des Représentants US a passé en catimini un ajout de dernière minute à sa loi de prévision budgétaire agricole pour 2013 la semaine dernière – incluant une provision protégeant les semences génétiquement modifiées de litiges en cas de risques sanitaires.

Le texte, portant le titre officiel de "Farmer Assurance Provision" (provision d’assurance des fermiers, ndt), a été dénoncé par des opposants au lobbying biotechnologique comme le "Monsanto Protection Act", car il retirerait aux tribunaux fédéraux l’autorité pour faire immédiatement stopper la plantation et la vente de plantes et semences génétiquement modifiées en dépit de toutes considération sanitaires des consommateurs.

La provision, également décrite comme un "texte biotech", aurait dû passer par des comités agricoles ou juridiques pour examen. Au contraire, aucune audition n’a eu lieu, et le document était de toute évidence inconnu de la plupart des Démocrates (qui détiennent la majorité au Sénat) avant son approbation comme partie du HR 993, la loi de financement à court terme qui fut passée pour éviter une banqueroute du gouvernement fédéral."

Le 26 mars, Obama signa discrètement ce "Monsanto Protection Act" en loi, assurant ainsi que le peuple états-unien n’ait auucn recours contre ce géant de la biotechnologie alors qu’ils tombent malades par dizaines de millions, et que des millions en mourront certainement dans ce que ce rapport du MRNE appelle la plus grande apocalypse agricole de l’histoire humaine comme plus de 90% de la population des abeilles sauvages aux USA a déjà disparu, et jusqu’à 80% des abeilles domestiques ont également disparu.

 

Source: http://www.whatdoesitmean.com/index1679.htm

15/05/2013

Féminin singulier, exposition

Ambert copie.jpg

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13/05/2013

UN PRIVÉ À BAS BILAN d'Eric Dejaeger

Il sera là dans quelques jours. Qui ? Non, quoi !

Mon polar UN PRIVÉ À BAS BILAN qui paraît chez Cactus Inébranlable éditions.

Son prix : 15 €.

La couverture est visible ici.

Vous pouvez le réserver chez moi (port en sus) ou passer commande chez l’éditeur (Jean-Philippe Querton - cactus.inebranlable@gmail.com).

N'hésitez pas à soutenir les (petits) éditeurs indépendants !

22:24 Publié dans COPINAGE | Lien permanent | Commentaires (0)

Gaia, la Terre mère, est-elle obligée d'aimer ses enfants ?

Débat | Sous-estimé en France, le penseur Bruno Latour est une star à l'étranger, où il développe l'une des théories les plus avant-gardistes sur l'avenir de la terre : celle de Gaia, un système complexe, fini et capable de s'autoréguler. Qui pose la question de la survie non-plus de la planète mais des humains.

Le 04/05/2013 à 00h00
Weronika Zarachowicz - Télérama n° 3303

 Première photo de la Terre prise de la Lune par l'équipage de l'Apollo 8 en décembre 1968. 
 © NASA

Première photo de la Terre prise de la Lune par l'équipage de l'Apollo 8 en décembre 1968.

© NASA

La scène se passe en février dernier, dans la très vieille et vénérable université d'Edimbourg. Une foule dense d'étudiants, d'enseignants, de curieux venus d'Ecosse et d'ailleurs se presse pour assister à un rendez-vous incontournable du monde intellectuel : les Gifford Lectures, des conférences sur la théologie, la philosophie et leur rapport à la science, données par la crème de la pensée occidentale depuis plus d'un siècle. Hannah Arendt, John Dewey, George Steiner, Richard Dawkins, Noam Chomsky, Henri Bergson ou Raymond Aron y ont dispensé leurs lumières. Et ce 18 février 2013, c'est un Français à l'œil pétillant et aux sourcils broussailleux qui ouvre son cours.

Bruno Latour est sociologue, anthropologue, philosophe, reconnu en France, mais un peu en catimini. A l'étranger en revanche, c'est une star – il est traduit en trente langues, et plus souvent cité sur Google que Michel Serres, l'un de ses maîtres. Il est admiré pour son œuvre foisonnante, qui empoigne la question de l'écologie et de la modernité, et dément « l'idée reçue d'une décadence de la pensée française », comme l'écrivait récemment le philosophe Patrice Maniglier. Pour les Gifford, notre philosophe aventurier affronte une figure mystérieuse et controversée : Gaia, qu'il propose de regarder « en face ». « Combien de fois, explique-t-il devant un auditoire captivé, m'a-t-on conseillé de ne pas utiliser le terme et de ne pas avouer que j'étais intéressé par les livres de James Lovelock ! »


L'une des conférences de Bruno Latour aux Gifford Lectures à l'université d'Edimbourg

La terre : un être vivant capable de s'autocontrôler ?

Gaia, la déesse, Terre mère redoutable et toute-puissante de la Grèce archaïque, fleure bon les romans de l'écrivain de science-fiction Isaac Asimov, le new age et les néopaganismes. Mais Gaia, c'est surtout une déroutante hypothèse scientifique, formulée au début des années 1970 par un scientifique inventeur anglais, James Lovelock, et une microbiologiste américaine, Lynn Margulis : la Terre, selon eux, n'est pas une matière inerte.

Si la vie a pu y prospérer, c'est parce qu'elle constitue une énorme entité composée d'interactions entre différents écosystèmes, comprenant la biosphère terrestre, l'atmosphère et les océans. Chacune de ses composantes – physiques, chimiques, biologiques – interagit de façon à maintenir un environnement optimal pour la vie ! Bref, Gaia est un gigantesque « être vivant » capable d'autocontrôler sa température et la composition de sa surface, écrit Lovelock en 1974 (1).

Un écosystème autorégulé à la surface de la Terre,
somme de tous les autres écosystèmes en interaction

D'abord rejetée comme « non scientifique » et non vérifiable, cette hypothèse révolutionnaire a peu à peu repris du galon. Plusieurs organismes scientifiques internationaux ont endossé la théorie d'un « système Terre », écosystème autorégulé à la surface de la Terre, somme de tous les autres écosystèmes en interaction. Parallèlement, les scientifiques ont confirmé que notre planète fait face à des changements environnementaux globaux, en passe de modifier la relative stabilité du climat que Gaia contribuait jusqu'ici à maintenir. La biodiversité se réduit. L'effet de serre augmente. Le climat se réchauffe à très, très grande vitesse.

On connaît la suite : création du Giec (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat) et ses nombreux rapports, prise de conscience générale, grandes conférences internationales sur le climat qui, l'une après l'autre, échouent... Rappelons les dernières prévisions : la température moyenne de la Terre, actuellement de 15 °C, pourrait augmenter de 3 à 4 °C d'ici à 2060, de 6 °C d'ici à la fin du siècle. Aucun chercheur n'ose imaginer les conséquences du scénario pour ceux qui habiteront la planète à ce moment-là, principalement nos ­enfants ou nos petits-enfants.

Un nouvel âge géologique : l'anthropocène

Mais on peut raconter l'histoire d'une autre façon, popularisée par un scientifique néerlandais, le Prix Nobel de chimie Paul Crutzen : nous sommes entrés dans un nouvel âge géologique, l'anthropocène. Pour la première fois dans l'histoire de la Terre, l'anthrôpos – l'homme – est devenu la force géophysique qui modifie le plus la planète. L'être humain est déjà le premier agent de production et de distribution dans le cycle de l'azote ; avec la déforestation, il est l'un des principaux accélérateurs de l'érosion ; sans parler de son rôle dans le cycle du carbone, qui bouleverse la composition chimique de l'atmosphère !

“Littéralement, la Terre se dérobe sous nos pieds”

« En l'espace de deux générations, depuis les années 1950, nous voilà confrontés à l'anthropocène : l'obligation de prendre en charge la biosphère et l'atmosphère, résume le philosophe Patrick Degeorges, chargé de mission au ministère de l'Ecologie. Nous sommes contraints de repenser l'histoire humaine à échelle géologique, à la fois vers le passé et vers le futur, puisque nos émissions de carbone nous engagent pour les prochains dix mille, voire cent mille ans. C'est un éclatement des horizons qui donne le vertige : littéralement, la Terre se dérobe sous nos pieds. »

Ce vertige, les géologues, les climatologues, les chimistes ne sont plus seuls à le vivre. Du côté des humanités, des philosophes s'y confrontent à leur tour et élaborent une pensée de l'anthropocène. On les compte sur les doigts des deux mains – Bruno Latour, Isabelle Stengers, Mary Midgley, John Baird Callicott, Catherine Larrère… Mais leurs textes font souffler un vent nouveau, ultra créatif et puissant, qui nous fait dépasser les simples injonctions techniques – éteignez les lumières, pensez à recycler, pensez à la planète. Leur ­pari ? Nous donner à voir ce que nous ne voyons plus, comme il y a quelques jours, par exemple, cette révélation (en une du New York Times, passée presque inaperçue chez nous) que la calotte glaciaire des Andes, au Pérou, a fondu en vingt-cinq ans, alors qu'elle avait mis mille six cents ans (au moins) à se constituer.

Pourquoi avons-nous tant de mal à réagir et à « faire attention », comme dit la philosophe belge Isabelle Stengers ? Tâche immense en effet que de sentir des changements « globaux » quand on n'est pas soi-même un être « global » ; de ressentir le « climat » quand les seules façons d'en parler sont des gigantesques modèles conçus par ordinateur. « C'est toute la difficulté du changement climatique ; nous ne pouvons en faire l'expérience en tant que tel, car c'est une construction, un grand récit scientifique qui reste déconnecté de la vie quotidienne, en particulier dans les mégapoles globalisées où conditions et modes de vie nous insensibilisent », explique Patrick Degeorge. Bref, nous autres modernes sommes incapables de regarder Gaia en face et de faire le deuil de nous-mêmes.

“L'anthropocène et Gaia sont deux concepts
extraordinairement en avance sur l'époque”

« L'anthropocène est le concept philosophique, religieux, anthropologique et politique le plus décisif jamais produit comme alternative aux idées de modernité », affirmait Bruno Latour en Ecosse. Quelques semaines plus tard, dans son bureau de Sciences Po, les yeux du philosophe pétillent toujours autant quand il évoque Gaia. « Au XVIe siècle, on a découvert l'Amérique. Au XIXe, on découvre non pas d'autres terres au sens d'une extension de l'espace, mais au sens d'une intensification de notre rapport à cette Terre. C'est aussi important et nous sommes aussi démunis face à cette découverte que nos ancêtres avec leurs idées médiévales. Ce qui m'intéresse aussi, c'est que l'anthropocène et Gaia sont deux concepts élaborés par des chercheurs de sciences exactes, extraordinairement plus en avance sur l'époque que toute une flopée d'intellectuels, de politiques, d'artistes qui ne s'intéressent qu'à l'histoire des êtres humains. »

Un rapport harmonieux et non plus conflictuel à la nature

Voilà le premier intérêt de Gaia pour les philosophes : mettre les pieds dans le plat de l'anthopocentrisme. Bouleverser l'habitude des modernes de ne parler que d'eux, à travers la nature et tous les « non-humains » (animaux, microbes, montagnes...), selon la formule de Bruno Latour. Nommer Gaia, selon Isabelle Stengers, c'est donner « un coup de vieux aux versions épiques de l'histoire humaine, lorsque l'homme, dressé sur ses deux pattes et apprenant à déchiffrer "les lois de la nature", a compris qu'il était maître de son destin, libre de toute transcendance. » Les humains ne sont pas le centre de la vie, pas plus qu'aucune autre espèce. Ils constituent « une partie qui croît rapidement dans un énorme tout ancien », écrit Lynn Margulis dans un article remarquable sur Gaia. Ils sont là, dans, avec et à côté de l'eau, de l'air, de la terre, à côté des bactéries, à côté des éléphants, à côté des microbes et des arbres de la forêt tropicale. Tous liés les uns aux autres. Mais l'homme y est à la fois plus puissant et plus fragile que jamais...

Trouver de nouveaux modes de coexistence
entre humains et non-humains

La théorie Gaia ouvre un monde d'une complexité et d'une richesse étonnantes, avec une multitude de portes d'entrée. Celle, par exemple, offerte par un Américain encore trop méconnu en France, John Baird Callicott. Ce maestro de l'éthique environnementale insiste sur la nécessité de préserver le bien commun et de trouver de nouveaux modes de coexistence entre humains et non-humains (plantes, animaux...), en tenant compte des relations d'interdépendance qui définissent Gaia et en proposant de « penser comme Gaia ». Le philosophe américain dessine un nouveau rapport à la nature, harmonieux et non plus conflictuel, une précieuse et ambitieuse extension de l'éthique pour remplacer le paradigme industriel qui a marqué la modernité. Et dès lors, c'est toute l'idée que nous nous faisons de nous-mêmes qui s'en trouve transformée.


John Baird Callicot défend la théorie de Gaia à Paris en mai 2008

Vers les “humanités scientifiques”

Bruno Latour pousse plus loin la nécessité d'une refonte, et sur d'autres bases. Sus aux paradigmes d'hier, auxquels les modernes, les Occidentaux s'accrochent déséspérement, à ces fictions progressistes qui dressent une frontière entre le scientifique et la politique, la nature et la culture. Bienvenue dans les « humanités scientifiques », situées au croisement des sciences et de la politique. Elles seules sont capables de nous faire explorer le chaos d'aujourd'hui, et surtout de nous apprendre à naviguer dessus. Et quel morceau de choix que Gaia, née sous les doubles auspices de la science et des humanités ! Cette théorie dont le nom fut soufflé au scientifique ­Lovelock par... un écrivain, son ami William Golding, auteur de Sa Majesté des mouches. Gaia, quatre petites lettres à la place de « système cybernétique à tendances homéostatiques telles que détectées par les anomalies chimiques dans l'atmosphère terrestre ». Et à l'arrivée un « affreux mélange » qui permet à Bruno Latour de livrer un con­centré fulgurant et inventif de l'oeuvre qu'il construit depuis trente ans autour des sciences, de la politique, du droit, de la religion, de la métaphysique.

Un « système science », un cosmos fini et « local »
qui bouleverse radicalement la vision de l'univers infini

Le philosophe aborde Gaia par une démarche... gaïenne ! Il croise, interconnecte, enrôlant dans ce voyage mental Walt Disney, le cinéaste hongrois Béla Tarr ou le philosophe allemand Peter Sloterdijk. Il nous offre des clés essentielles pour mieux cerner cette entité étrange, ni divinité ni nature : un « système science » ; un cosmos fini et « local » qui bouleverse radicalement la vision de l'univers infini, sans limites des modernes ; une Histoire en soi, succession d'événements que Latour nomme « géo-histoires », histoires mélangées et intriquées de tout ce qui existe sur la Terre ; et surtout une injonction à repenser la politique, si seulement « on prend au sérieux ce que nous dit Gaia, à l'époque de l'anthropocène ».

Gaia : vengeresse ou indifférente à l'égard des humains ?

Prenons-la donc au sérieux. Et tentons d'interpréter ses messages. Gaia est en colère, elle prend sa revanche, affirme James Lovelock, devenu prophète du désastre dans l'un de ses derniers livres. « En empiétant sur l'environnement, c'est comme si nous avions à notre insu déclaré la guerre au système Terre. » D'où les cyclones Katrina ou Sandy, les grandes sécheresses, etc. Lovelock précise user d'une métaphore, mais est-ce la bonne, s'interroge Emilie Hache, jeune voix éloquente de la philosophie de l'écologie. « Il fait appel à cette métaphore guerrière pour nous faire (ré)agir, mais cette dernière nous engage-t-elle vers une façon d'agir intéressante, efficace ? Est-ce le type de relation dont nous avons aujourd'hui besoin ? » Imaginer une Gaia vengeresse nous amène en terrain glissant : comme si l'on savait ce qu'elle voulait, mais aussi comme si un tel scénario justifiait « une compensation, une punition et pourquoi pas la mort de l'humanité ».

L'enjeu est de nous protéger,
pas de sauver la planète

On préfère la version de Lynn Margulis, finalement adoptée par beaucoup de philosophes : une entité ni protectrice ni malfaisante dans sa relation à l'humanité. « Gaia s'en sortira toujours, qu'on soit là ou non, c'est le processus bactérien qui continue, résume Catherine Larrère, la spécialiste française de l'éthique environnementale. Elle n'a pas besoin de nous, humains comme non-humains. Nous ne pouvons mettre fin à la nature, mais nous pouvons nous menacer nous-mêmes. » C'est ce qu'Isabelle Stengers appelle les relations dissymétriques. L'enjeu est de nous protéger, pas de sauver la planète. Ce qui bouleverse radicalement les perspectives, pour les écologistes et les autres. Bien traiter Gaia, qui se montre de plus en plus sensible et « chatouilleuse », qui réagit de plus en plus vite à nos actions, nous oblige à retrouver « l'art de faire attention » et à redevenir sensibles, nous aussi : non pas parce qu'elle serait fragile, mais parce que nous dépendons d'elle pour vivre.

Encore faut-il définir ce « nous », et s'ouvre là l'un des pans les plus vertigineux des Gifford Lectures de Latour. Car qui est l'homme de l'anthropocène ? Non pas cet anthrôpos unifié comme les modernes continuent de nous le présenter, mais des hommes aux intérêts contradictoires, aux cosmos opposés, des adversaires en guerre : bref, résume Bruno Latour, « nous sommes dans Babel après la chute de la tour géante » ! Pensons aux violentes controverses sur la réalité du changement climatique, qui opposent les scientifiques du Giec aux climato­sceptiques. Ces derniers ne sont pas « irrationnels », ce sont des adversaires politiques qui investissent des millions de dollars dans des machines de guerre – comme les think tanks – pour contester le réchauffement. Car ils ont compris que cette thèse et ses implications représentent la fin de leur monde, celui de l'énergie bon marché, celui de la croissance et de la consommation sans limite.

“Nous devons identifier nos ennemis
et nos alliés, les gens de Gaia”

Cette vision prométhéenne d'un homme capable de modeler la nature à l'infini n'étant évidemment pas exempte d'intérêts matériels et financiers bien compris. « Logiquement et rai­sonnablement, ils résistent, ils se battent. » D'où la question fondamentale que Gaia nous oblige à affronter, la seule qui soit porteuse de solutions : quelle politique à l'âge de l'anthropocène ? « Nous devons identifier nos ennemis et nos alliés, les gens de Gaia, ceux qui ne se disent pas seulement "humains", poursuit Latour. Une fois cette décision prise (car c'est une décision), nous serons capables de reconnaître la multiplicité des peuples qui sont en conflit, un état de guerre, et ensuite on pourra parler de paix. Ce qui nécessitera de la diplomatie, des traités de paix... Ni la nature, ni Dieu n'apportent d'unité ni de paix. Mais "les gens de Gaia", ceux qui se disent "Terriens", peuvent peut-être devenir, eux, les artisans de la paix. » En attendant, avec ces Gifford Lectures, c'est bel et bien la première philosophie gaienne que Bruno Latour vient d'écrire. Et c'est, à l'image de Gaia, un monde effrayant et fabuleux.

(1) James Lovelock ne présente plus Gaia comme un « organisme » vivant, ayant une « finalité ».

 

La déesse Gaia, un mythe grec
L'hostilité des scientifiques à la théorie Gaia tient en partie à son nom, qui renvoie à la mythologie. Car Gaia, c'est la « Terre mère » originelle, déesse « aux larges flancs » de la mythologie grecque archaïque, héroïne de la Théogonie d'Hésiode. Née après le Chaos, Gaia est l'ancêtre maternelle des races divines et des monstres (mère des Titans et des Cyclopes, grand-mère de Zeus, etc.) : une déesse souvent cruelle et redoutable... 
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À lire

Facing Gaia. A new enquiry into natural religion, Gifford Lectures, février 2013, de Bruno Latour
Ethique de la Terre, de John Baird Calicott, éd. Wildproject, 2010.
Ce à quoi nous tenons, d'Emilie Hache, éd. La Découverte, 2011.
Au temps des catastrophes, d'Isabelle Stengers, éd. La Découverte, 2009.
Du bon usage de la nature, de Catherine et Raphaël Larrère, éd. Flammarion, 2009.
Ethiques de la nature, de Gerald Hess, éd. PUF (à paraître le 29 mai).

UE: La Commission Européenne va criminaliser presque toutes les semences et plantes non enregistrées auprès des gouvernements

 

La Commission Européenne va criminaliser presque toutes les semences et plantes non enregistrées auprès des gouvernements

Une nouvelle loi proposée par la Commission Européenne, rendrait illégal de « cultiver, reproduire ou faire commerce » de toute semence de légumes n’ayant pas été « testées, approuvées et acceptées » par la nouvelle paperasserie européenne, elle a pour nom « Agence pour l’UE sur la diversité des plantes ».
 

On l’appelle la Loi sur les matériaux de reproduction des plantes et son but est de rendre virtuellement responsable le gouvernement de toutes les plantes et semences. Les jardiniers amateurs qui cultivent leurs propres plantes à partir de semences non répertoriées seraient considérés comme des criminels en vertu de cette loi.

« Cette loi stoppera immédiatement le développement professionnel des variétés de légumes pour les jardiniers amateurs, les producteurs bio, et les petits maraîchers », a dit Ben Gabel, qui cultive des légumes et est le directeur du catalogue des semences naturelles. « Les jardiniers amateurs ont des besoins réellement différents – par exemple ils jardinent manuellement, n’ont pas de machines et ne peuvent ou ne veulent utiliser des pulvérisations chimiques. Il n’y a pas de moyen pour enregistrer les variétés qui conviennent à un usage domestique car ils ne répondent pas à des critères stricts de l’Agence pour la diversité des plantes, qui ne s’occupe que d’approuver le genre de semence utilisé par les agriculteurs industriels ».


 Virtuellement toutes les plantes, légumes, graines et jardiniers seront finalement enregistrés par le gouvernement


Tous les gouvernements, bien sûr, se sont entichés de l’idée d’enregistrer tout le monde et toutes choses. En vertu du paragraphe IV de la loi proposée par l’UE :

Paragraphe IV : enregistrement des variétés dans des registres nationaux et de l’Union
Les variétés, dans le but de les rendre disponibles sur le marché à travers l’Union, seront incluses dans un registre national ou dans un registre de l’Union via une procédure d’application directe par le CVPO(Community Plant Variety Office = Bureau de la communauté pour la diversité des plantes).
Les jardiniers doivent aussi payer une redevance à la bureaucratie de l’UE pour l’enregistrement de leurs semences. 


 D’après le texte de loi proposé : Les autorités compétentes et le CPVO prélèveraient une redevance pour le traitement des demandes, l’examen formel et technique comprenant des audits, la dénomination des variétés et la maintenance des variétés pour chaque année pendant la durée de l’enregistrement.
Bien que cette loi peut ne viser au début que les jardiniers professionnels, elle constitue un précédent pour se poursuivre tôt ou tard par les jardiniers amateurs et exiger qu’ils respectent ces mêmes stupides règlements.


La bureaucratie gouvernementale devient folle


C’est un exemple de dérapage de la bureaucratie », dit Ben Gabel. « Tout ce que fait cette nouvelle loi est de créer une tonne de fonctionnaires civils dans l’UE payés à déplacer des montagnes de papiers toute la journée, tout en supprimant un approvisionnement en semences aux jardiniers amateurs et en interférant avec les droits des agriculteurs de cultiver ce qu’ils souhaitent. Il est aussi très ennuyeux qu’ils se soient arrogés le pouvoir de réglementer et donner une autorisation dans l’avenir pour toutes les espèces de plantes – pas juste les plantes agricoles, mais les herbes, les tourbes, les fleurs, la totalité – sans avoir à le rapporter au Conseil pour être voté ».

Le jargon utilisé par une bureaucratie malade qui obligera les cultivateurs et jardiniers à se plier à cette loi de l’UE, est un langage bureaucratique orwellien qui ne signifie qu’une chose : tous les jardiniers devraient se préparer à se soumettre à la folie gouvernementale concernant les graines, les légumes et les jardins privés.

Comme on peut le soupçonner, cette idée est la « solution finale » de Monsanto, DuPont et autres corporations de semenciers qui ont depuis longtemps admis que leur but est de dominer complètement toutes les semences et cultures de la planète. En criminalisant la culture privée de légumes – transformant ainsi les jardiniers en criminels – les bureaucrates de l’UE peuvent enfin céder le total contrôle de l’approvisionnement alimentaire à de puissantes corporations comme Monsanto.

La plupart des semences de variétés anciennes deviendront criminelles


 Presque toutes les variétés anciennes de graines de légumes seront criminalisées en vertu de cette loi de l’UE. Cela veut dire que le fait de sauvegarder des graines d’une génération pour les ressemer l’année suivante –  base d’un mode de vie durable – deviendra un acte criminel.

De plus, comme l’explique Gabel, cette loi « …tuera efficacement l’utilisation des graines pour les jardins privés de l’UE ».

C’est le souhait ultime de tous les gouvernements, bien sûr : criminaliser tout action en vue d’une autonomie et rendre la population complètement dépendante des monopoles des corporations pour sa survie. C’est vrai aussi bien aux USA que dans l’UE. Voilà ce que font les gouvernements : ils prennent le contrôle, un secteur à la fois, année après année, jusqu’à ce que vous finissiez par vivre en esclave sous un régime dictatorial mondial.


Source: NaturalNews, via BistroBarBlog, traduction Bbb