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15/12/2013

Les Poètes, l'émission à écouter

Trente ans après son assassinat il faut lire librement Jean SENAC. Quarante neuf ans après son assassinat dans la chambre à gaz d'Auschwitz, il faut lire librement les poèmes de jeunesse de Benjamin FONDANE.

 

Et découvrir la voix d'Eric BARBIER, poète qui vit au pied des Pyrénées, en cliquant sur : 

 

 http://les-poetes.fr/emmission/emmission.html

 

Le script de l'émission du jeudi 12 décembre 2013:

 

 

 

Christian Saint-Paul qui a participé à l’hommage rendu à Jean SENAC à la Maison des Diversités, 36 rue d’Aubuisson à Toulouse, fait entendre un poème de celui-ci mis en musique et chanté par Gilles MECHIN ; c’est Alain BREHERET, pianiste bien connu des toulousains et qui accompagne depuis longtemps le poète chanteur Bruno RUIZ qui est au piano dans cet enregistrement.

 

L’Algérie a fêté le cinquantenaire de son indépendance en 2012 et on célèbre cette année le centenaire de la naissance d’Albert Camus. Les cérémonies laissent toutefois dans l’ombre un des témoins incontournables de ce passé aux plaies ouvertes : son nom ? Jean Sénac. Écrivain et poète, pied-noir et indépendantiste, chrétien et révolutionnaire. Caillou dans les souliers de la France et de l’Algérie, Sénac bouscule les deux rives et les eaux troubles de la Méditerranée.

 

Fils spirituel d’Albert Camus - fêté par Lettres d’Automne, à Montauban pour son édition 2013 -, qui l’appelait affectueusement,  en espagnol, « mi hijo », il deviendra un « fils rebelle » à son endroit sur « la question algérienne ».Camus qui parmi dénonça le sort fait aux autochtones dans son célèbre reportage  « Misères en Kabylie » , qui initia Jules Roy, de son propre aveu, à l’anticolonialisme, après avoir prôné une « Trêve civique » pour mettre fin  aux violences  , récusée et dénoncée  par les « Ultras » sera fustigé par les activistes de sa communauté et ne trouvera pas grâce auprès des indépendantistes algériens à la suite de sa fameuse phrase sur sa  mère et la justice ? Etonnante coïncidence, en cette année 2013 : on commémore à la fois le centenaire de la naissance de Camus et le quarantième anniversaire de la mort de Jean Sénac, tout deux tragiquement disparus. Camus dans un accident et Sénac dans un meurtre. Tous les deux restent, à des degrés différents, des figures et des passeurs d’une double réconciliation qui tient ses fondements par une juste appréciation des brûlures de  l’histoire et  les nuances de la  mémoire entre les deux rives de Méditerranée. C’est à la fois un devoir et une urgence face aux remugles haineux et aux feux qu’attise un  racisme voué aux poubelles de l’histoire. Non loin de Toulouse, Jean Sénac avait trouvé écoute et solidarité chez l’éditeur Jean Subervie avec le soutien du poète Jean Digot (1912- 1995).                            Il passait ainsi  par Toulouse pour aller publier à Rodez, en région Midi-Pyrénées, ses adresses poétiques dont plus d’une avait  résonnance avec la poésie la Résistance française. C’est là qu’il publiera son manifeste poétique : « Le soleil sous les armes ». Il serait temps cinquante  après, les Accords d’Evian, la paix retrouvée,  l’indépendance de l’Algérie  de tendre à nouveau l’oreille sans manichéisme  à ces deux contemporains capitaux.

 

Max Leroy auteur de ‘Epitaphe pour Jean Sénac’ écrit :

 

 

 

« Fils d’une femme de ménage et petit-fils d’un mineur espagnol, le jeune Jean grandit dans les rues d’Oran, quelque part entre les appels à la prière du muezzin et les versets de Saint Paul que sa mère, fervente catholique, lui demande de réciter. Son enfance est sans-le-sou mais radieuse : le soleil d’Afrique rend les mois moins difficiles à finir. Les Arabes, les Berbères et les Kabyles ? Il ne les connait pas. Les Européens et les « indigènes », tel qu’on les nomme alors, se croisent sans vivre ensemble, chaque communauté « serrée dans son ghetto ». Mais sa mère n’entend pas prêter main forte au racisme quotidien qui charpente tout régime colonial : elle n’a de cesse de lui rappeler qu’il faut s’intégrer à la culture majoritaire, celle de ces millions d’âmes, souvent musulmanes, qui partagent leur quotidien depuis maintenant un siècle. « Maman ! Ce soir encore, apprends-moi à parler comme toi », écrira-t-il, quelques décennies plus tard, dans son roman Ébauche du Père…Sa rencontre avec les cercles nationalistes algérois dessillent ses yeux d’Européen : il prend la mesure des injustices qui meurtrissent ses compatriotes musulmans et s’engage sans délai aux côtés de tous ceux qui rêvent d’une Algérie nouvelle. « En Afrique du Nord, se taire c’est trahir. » Nous sommes en 1950 ; l’heure est encore au réformisme : Ferhat Abbas et Messali Hadj s’activent, par les voies légales, à faire entendre la voix de leur peuple. L’État français répond par le silence ou la matraque. Les répressions de Sétif, Guelma et Kherrata, durant le mois de mai 1945, ont marqué les cœurs : certaines franges de l’indépendantisme algérien envisagent désormais le recours à la lutte armée. Prendre le maquis, à l’instar des glorieux combattants de l’Indochine occupée, face aux fins de non-recevoir du gouvernement républicain ? C’est en tout cas ce qu’envisage le futur leader du FLN, Mohammed Larbi Ben M’Hidi, qui n’hésite pas à confier ses projets d’insurrection à son ami Jean Sénac. »

 

A lire l’anthologie de Jean SENAC publiée à Actes Sud.

 

Une émission sera consacrée à Jean SENAC en 2014.

 

 

 

 

 

Saint-Paul salue ensuite le succès du travail de l’Atelier Imaginaire (http://www.atelier-imaginaire.com) animé à Lourdes et à Tarbes par Guy ROUQUET ; il signale la parution de deux livres qui rassemblent de fortes signatures qui s’expriment sur leur démarche d’écrivain et sur ceux qui a les ont déterminé dans leur passage à l’acte de la création. Il s’agit de :

 

Le livre d'où je viens

 

16 écrivains racontent

 

Préface de Guy ROUQUET

 

L'Atelier Imaginaire

 

Le Castor Astral

 

voir doc

 

 

 

et de :

 

 Mon Royaume pour un livre

 

16 écrivains racontent

 

Avant-propos de Guy Rouquet

 

Préface de Joël Schmidt

 

L'Atelier Imaginaire

 

Le Castor Astral

 

voir doc

 

Guy ROUQUET sera prochainement l’invité de l’émission « les poètes ».

 

Enfin, avant d’accueillir son invité, Saint-Paul incite à la lecture de Benjamin FONDANE « Comment je suis né » textes de jeunesse rédigés entre 1914 et 1922, traduits du roumain par Marlena Braester, Hélène Lenz, Carmen OSZI, Odile Serre et présentés par Monique JUTRIN, aux éditions Caractères collection cahiers latins, 110 pages, 18 €. Dans son « journal » de jeunesse, sorte d’autobiographie imaginaire, FONDANE se met à rêver sa propre vie, s’interrogeant sur sa venue au monde. Sous le masque de l’humour perce l’angoisse d’être, l’incertitude d’exister.

 

Benjamin FONDANE demeure l’un des grands poètes philosophes du XXème siècle et ce livre est indispensable pour appréhender cette œuvre majeure. Une émission lui sera consacrée en 2014.

 

 

 

Saint-Paul accueille alors son invité, le poète Eric BARBIER ; voici sa version brève de présenter sa biographie : « Voici donc une "presque biographie qui est presque de tout le monde", comme l'écrivait Antonio Porchia.

 

Je suis né en 1964 à Tarbes, d'un père cheminot et d'une mère employée à la sécurité sociale. Etudes interrompues peu après le bac; je travaille à la bibliothèque municipale. Marié depuis 2005, je sais l'indispensable qui nous unit et la chance de poursuivre de précieuses amitiés.

 

Engagé en écriture depuis 1997, grâce au travail de certains animateurs de revues et éditeurs des textes sont parus dans: Comme ça et Autrement, Rivaginaires, Multiples, Mange Monde, Nouveaux Délits, Salmigondis, Hématomes Crochus, Interventions à Haute Voix, Gros textes, Liqueur 44, les anthologies De Belles Palissades (Gros Textes/Décharge), Du Plus Nu de nos Voix (Rafael de Surtis). »

 

Eric BARBIER a publié :

 

Dans la Brève Terre  2003  Hélices

 

Le regard Chargé de Jours Différents     2009   Encres Vives

 

Regagner l'aube    2009     Rafael de Surtis

 

Quelle Ombre ?    2010   Rafael de Surtis

 

Promesse Achevée à Bras Nus    2011   Rafael de Surtis

 

Rouge Silence    2012   Rafael de Surtis

 

Dans son premier recueil, « Dans la brève terre », Eric BARBIER confie :

 

De la vie je suis perclus de créances

 

D’amantes d’amis de nuits échouées

 

Un nuage attaché au pied

 

La tête décomptée d’illusions

 

Toujours un éclat sous le pas

 

Un gravier de torrent inscrit

 

Un fragment sur la langue

 

Qui gêne l’échappée des mots

 

Comme ces gestes qui auraient pu

 

Accomplis de mains maladroites

 

Pressées et aimantes

 

Dessiner sur ton corps

 

La carte d’un avenir

 

 

 

A lire la poésie d’Eric BARBIER, nous comprenons selon l’expression de Misrahi que « toute création émerge, éclatante, d’une espèce de nuit qui la précédait ». Saint-Paul n’hésite pas à citer l’acteur écrivain Richard BOHRINGER : « Je crois savoir pourquoi les poètes sont malheureux. Parce qu’ils sont du signe de l’invisible. Que leur façon d’aimer est mystérieuse et souvent sans gloire. » La retenue dans le ton des poèmes de BARBIER dissimule à peine une mélancolie sourde dont il ne cesse de se débarrasser par une contemplation rassurante du monde, celui qui l’entoure, celui des fastes quotidiens de la nature, des montagnes au pied desquelles il vit. C’est en homme de la terre, que parle Eric BARBIER. Les villes et leur foisonnement humain l’ont épargné. Il règne dans une sérénité inquiète sur un for intérieur qui l’habite et il sort du silence par les bribes mesurées de ses textes. Et il va du silence à l’intensité de la langue et retourne au silence. Dans ce quasi sacrilège de rompre le silence, l’écriture arrive par effraction : « Ecrire, effraction dans la voix de l’autre » dit-il dans « Promesse achevée à bras nus ». Mais il vit dans cette pure attente :

 

La joie s’affiche   la peine demeure

 

chaque mai la mémoire hésite

 

devant la douceur du grand cèdre

 

 

 

L’oiseau même seul est un grand peuple

 

tu envies de sèches décharges d’églantiers

 

une longue chute nous espère

 

 

 

Seul soudain dans la langue où sombrent

 

les tentations au point du jour

 

la volupté de son attente

 

 

 

*

 

Ce qu’inscrivit dans la tête

 

La pointe de ce silex

 

L’anecdote n’y trouve place

 

 

 

La vie trame à même le jour

 

Le vêtement d’attente de l’amour

 

 

 

Là rien ne vieillit

 

Ni la soie ni même la mer

 

Une vigie aux distractions souveraines

 

Le corps le veilleur

 

 

 

Lecture d’extraits de ses recueils et d’inédits par Eric BARBIER et au cours de l’entretien lecture de quelques textes par Saint-Paul.

 

Le souffle est repérable dans la poésie de BARBIER, et il signe l’authenticité du poète. Sa posture pourrait se rapprocher d’une des définitions de la poésie de Maurice BLANCHOT : « la poésie n’est pas donnée au poète comme une vérité et une certitude dont il pourrait se rapprocher ; il ne sait pas s’il est poète, mais il ne sait non plus ce qu’est la poésie, ni même si elle est ; elle dépend de lui, de sa recherche, dépendance qui toutefois ne le rend pas maître de ce qu’il cherche, mais le rend incertain de lui-même et comme inexistant ».

 

Les six recueils publiés constituent déjà un parcours à suivre, à la recherche de l’être véritable, fraternel avec le monde robuste qui habite Eric BARBIER.

 

A lire !

 

14:19 Publié dans COPINAGE | Lien permanent | Commentaires (0)

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