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25/07/2010

Pouse d'Orage du Djungalo Théâtre

Moi qui suis revenue de bien des aspects du spectacle et du théâtre de rue d'aujourd'hui, j'ai beaucoup aimé en retrouver la magie, et surtout l'authenticité, hier à Montricoux, en assistant à une répresentation du Théâtre Djungalo "Pousse d'Orage", aussi je vous fait partager ci-dessous ce qu'il en est dit sur leur blog, dont je vous donne l'adresse ici :

http://www.blogg.org/blog-82520.html

CG

 

 

Le Mouvement Intellectuel Tsigane  et son nouveau projet: ''Sinthan Thea''.

Sinthan Thea est parrainé par le Cirque Alexandre Romanes et le Réalisateur Tony Gatlif. (Un grand merci a Tony, qui  a offert à notre petit théâtre familial  O Djungalo Teàtro les costumes de son dernier film ''Liberté).

Sinthan Thea - Théâtre et Terre Tsigane

Peuple sans pays par excellence, le Peuple Tsigane n’en demeure pas moins attaché aux endroits qu’il traverse et à ceux où le ramènent ses souvenirs. Le profond attachement aux lieux qui se rattachent à notre mémoire en tant qu’individu, est paradoxalement une façon d’exprimer notre détachement, pourtant inhérent à chaque groupe humain, de la notion de territoire en tant que peuple. Notre répartition géographique mondiale, démontre en effet qu’avant nous, nos ancêtres ne semblent pas avoir eu plus de prédilection pour l’une ou l’autre des contrées traversées. Aucune Terre ne semble les avoir retenu plus qu’une autre, si ce n’est de force, et l’unique soif de l’ailleurs semble guider leurs pas à travers l’histoire. Ils visitent le monde, franchissent les siècles sans chercher à marquer de leurs empreintes le temps qu’ils ignorent.

Le message est clair !

Ils ne nous laissent en héritage que l’embarras de choisir nous même notre Terre. Le voyage est transgénérationnel, et rien, ni personne n’est, et ne sera à l’origine de notre éternelle migration, si ce n’est notre propre conception de l'Unité.

Peuple nomade, nous  n’aspirons pas  à errer pour autant, et s’il nous fallait dessiner les grandes lignes de ce que serai demain la Terre de nos enfants,  Sinthan Théâ en serait peut-être une ébauche. En effet, elle ne serait ni tsigane, ni musulmane, si juive, ni chrétiénne,  ni française, ni grecque, ni américaine, ni africaine ! Nous pourrions, c'est vrai,  vouloir en faire  une  Terre philosophale, qui transmuterait le vil en oeuvre d'art, mais l'histoire nous a montré que nous n'étions pas complètement maîtres de nos destinées, alors ne prenons pas le risque d'être les premiers ''sanctifiés''. Nous  nous contenterons donc d'une simple planète Terre, avec des arbres, pour mettre nos caravanes à l'ombre, des fleurs pour les cheveux de nos femmes, de nos filles, de nos sœurs, et de l'eau potable. Et puisque la Connaissance est source d’exclusion du jardin d’ Eden sur cette Terre , nous y resterons  donc, sans honte,  ignorants !   Marcel Hognon

 

1/ Exposition d’œuvres d’art.

L’exposition de sculptures en terre cuite,( bronzes, marbres et matiéres divers également), de Marcel Hognon, (artiste professionnel - Maison Des Artistes), est évidement symboliquement liée au thème de Sintahn Thea, et n’est pas sans une certaine référence avec  les Tanagras, et leurs appellations liées au site géographique de leur conception.

2/ Ateliers plastique. ''La terre entre nos mains''. Elle ne sera que ce que nous en ferons !

Réalisation de figurines en terre cuite, (encadrement Marcel Hognon),  reliant les participants des ateliers, au spectacle Pousse d’Orage. (Dans la pièce, la Terre Tsigane est représentée par une petite statuette en argile cuite par un éclair, que les participants reproduisent à leur façon). Ces dernières seront cuites sur place. Ces ateliers incitent chaque participant à porter un regard sur la responsabilité de ses actes dans la gestion de la planète, mais également sur  le caractère irréversible qui en découle, et qui n'est plus gérable par l'espèce humaine. (Une terre cuite est irréversiblement abiotique).

 

3/ Représentation théâtrale : Pousse d'Orage, par le Djungalo Teàtro. Pièce familiale tout public en plein air.

Bien que le génocide Tsigane transparaisse en filigrane dans la pièce, le fil conducteur de Pousse d’Orage,  tourne autour de ce concept original de peuple sans territoire défini, ayant néanmoins une cohérence, une identité, une langue et une histoire commune au delà des frontières étatiques et continentales ! Cette pièce ouvre donc une réflexion sur la philosophie atypique qui est la nôtre dans ce domaine précis.

Pousse d’Orage : De Marcel Hognon -  1er prix au Concours International de Culture Romani en octobre 2009, à Lanciano -Italie.

 

 

Sinthan Thea est construit sur plusieurs axes complémentaires.

Diversité culturelle

 

 

1/ Sculpture.

a: Exposition nomade d’œuvres d’art  dans une ancienne roulotte de travail. (voir photo roulotte ci-dessous).

b: Ateliers ouverts au public . (Scolaire et autres). Façonnage  et cuisson .

2/ Ecriture. Vente de livres et dédicaces.

3/ Théâtre. Représentation en plein air.

 

Territorialité équitable

Le spectacle se jouant au milieu de notre intimité, le spectateur, à l’occasion du verre de l’amitié offert après la représentation, se retrouve tout naturellement invité privilégié, ami de marque accueillit en famille. C’est l’occasion d’aborder divers sujets, et notamment d'approcher le thème majeur de l’identité tsigane en France: Nos caravanes, et le besoin de territoires provisoires.

Développement durable

Plusieurs aspects.  Liste  non exhaustive.

 

1/ Adaptation et administration permanente de notre environnement immédiat.

2/ Gestion des ressources naturelles: Eau, énergie, espace, etc...

 

3/ Les notions de superflu, de tri sélectif, etc, liés à l’espace limité de notre habitat.

 

Sociologie équitable
Le peuple Tsigane, peuple Indo-aryen, est originaire du nord de l'Inde. Hérodote, 425 av JC, est, jusqu'à ce jour, le premier historien à citer officiellement le peuple Tsigane, (en grec : Σιγγινον), et à le présenter comme l’un des peuples fondateurs de l'Europe. Prémislas III, roi de Bohême, dans une lettre au Papa Alexandre IV, le 13 juillet 1260, cite le peuple Gingarorum - Jean Alexandre Vaillant, 1815, fait remonter l’arrivée de ce peuple en Europe, à l’époque préhellénique.  Une fresque de la villa romaine de Cicéron, 106/43 av JC, représente une famille de musiciens Tsiganes en scène. Retrouver notre histoire dans l'histoire !

 

 

 

 

21/07/2010

Echappée d'oeuvres, canton de Cazals (Lot)

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Tout au long du mois d'Aout: « échappée d'oeuvres »

Parcours d'Art dans les 9 villages du canton de Cazals sud-Bouriane : Marminiac, Cazals, Montclera, St Caprais, Goujounac, Gindou, les Arques, Pomarede et Frayssinet-le-Gelat vous donnant à voir Peintures, sculptures , installations9 villages investis par une vingtaine d'Artistes vous invitent qui dans leurs ateliers qui dans l'église qui dans les lieux de nature. Parcours d'Art en sud-Bouriane organisé par l'association « Un train peut en cacher un autre » (encourager, soutenir, promouvoir l'art contemporain en milieu rural) 05 65 53 05 08 lezateliers@orange.fr et http://www.lot-tourismecazals.com

nous avons travaillé sur ce projet depuis Janvier et maintenant, chaque village est en train de se préparer pour vous recevoir.Nous avons installé 200 panneaux , plus de 500 affiches ainsi quemis à disposition 20 000 tracts. Nous vous attendons nombreux, curieux et heureux pour découvrir notre patrimoine architectural, culturel et touristique

Entrée libre -plans disponibles offices de tourisme et tout

autre lieux culturel

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15/07/2010

Anicet Poéticopsychosophe, lundi 19 juillet, La Toulzanie (46)

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12/07/2010

J'ai lu Les deux fins d’Orimita Karabegović de Janine Matillon

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(Maurice Nadeau 1996)

 

Alors qu’on exhume, quinze ans après, des corps de musulmans bosniaques d’un charnier près de Srebrenica, et que plus de 700 victimes identifiées provenant d’une centaine de fosses communes ont été enterrées hier, le 11 juillet au centre mémorial de Potocari, à l'occasion du quinzième « anniversaire » du massacre de Srebrenica, j’avais déjà depuis quelques jours entamé ce livre de Janine Matillon, sachant que ce n’est pas exactement ce qu’on appelle dans les magazines féminins et autres, un roman d’été… Troublante coïncidence en tout cas, car je ne m’attendais pas à ce qu’on reparle tout à coup dans les médias de ces atroces massacres si vite tombés dans l’oubli, sans parler de la lamentable passivité pour ne pas dire complicité, des autres pays d’Europe et d’ailleurs.

Dans Les deux fins d’Orimita Karabegović, paru à peine un an après la fin de cette guerre, Janine Matillon nous plonge directement dans le ventre de la bête. Son héroïne Orimita, est une jeune étudiante bosniaque et musulmane, qui parle plusieurs langues et qui préparait à l’université de Zagreb une thèse sur Mallarmé et la logique négative, espérant devenir professeur de littérature française. Le premier jour où la guerre a frappé, elle assistait à un mariage à Vukovar, et le plafond de la salle s’écroule sur la table de noces et sur les convives. Pendant quelques mois, elle survit avec les survivants dans une cave avant de se retrouver emportée dans les flots de réfugiés. Elle finit par se faire arrêter et elle est embarquée brutalement avec beaucoup d’autres femmes, dont certaines meurent en route, dans d’immenses poulaillers transformés en camp. Mais Orimita, et onze autres jeunes femmes de sa condition, sont ensuite choisies pour subir un sort privilégié. Mises à part dans un autre bâtiment, une ancienne école, elles sont nourries et bien traitées, sous l’égide d’un professeur attentionné, qui leur administre journellement des cours, c'est-à-dire un lavage de cerveau idéologique. Ces douze jeunes femmes apprennent très vite qu’elles sont destinées à être purifiées, non pas par la déportation et la mort, mais par l’ensemencement quotidien de valeureuse et orthodoxe sève serbe, jusqu’à ce qu’elles en portent le fruit, ce qui leur offrira l’incroyable chance d’être accueillies au sein du seul et grand peuple légitime, du peule astral des Balkans et d’être lavée à jamais de leurs souillures d’origine.

Ce roman nous embarque donc dans le pire, avec pourtant une force poétique incroyable. C’est un roman viscéral, l’héroïne toujours au bord de basculer dans la folie, certaines de ses compagnes y sombreront totalement, et disparaitront de nuit, le fameux camion de minuit, et seront remplacées par d’autres comme si de rien n’était, car l’horreur est là, d’autant plus atroce qu’elle est pour un temps étouffée, déguisée, camouflée, mais Orimita hantée par Mallarmé y puise sa force, se protège par des couches de glace, de neige, combat le feu des obus, des massacres, de la violence et du sang, par le froid intense, la nudité de paysages à jamais glacés, tout son être se congele de l'intérieur. La poésie la sauve pour un temps mais la rage monte, insidieusement, la rage envers les épurateurs mais aussi, et peut-être encore plus fortement, pour le pays tant aimé, le pays de littérature, la France, dont elle ne peut croire la trahison, l’abandon, la langue de bois des technocrates « laissons le temps au temps » dit le président de France, pendant que le temps avance à coup d’obus, de chars et de tanks, dans ses grosses bottes de crapules saoules, et les têtes tombent sur les omoplates, et les membres se mélangent, détachés de leurs corps, et massacres, viols, pillages, incendies, se succèdent à la barbe de l’ONU et toute l’inexprimable horreur de cette démence qu’on appelle la guerre, et il faut laisser le temps au temps, pendant que tous les ministres, présidents, diplomates, militaires de France, d’’Europe et d’ailleurs ont « le sentiment d’avoir établi une bonne base pour la solution négociée », et d’ailleurs vient le temps où les réfugiés doivent rentrer chez eux, chez eux c'est-à-dire chez les conquérants, qui les renvoient sur les terrains truffés de mines, mais si les réfugiés rentrent chez eux, directive de l’Europe, il n’y a plus de réfugiés, effacés les réfugiés, disparus et enterrés les massacrés, les membres, les têtes, les corps, oubliés les massacres… Et chez Orimita, la rage monte insidieusement, une rage folle et froide, et quand elle se retrouve avec un groupe armé bosniaque, les siens donc, c’est un autre Islam qui monte, le sang appelle le sang, et un Moudjahidine lui impose un foulard sur la tête sous pene de l'égorger, et même ceux qui se sentaient plutôt athée sentent monter en eux la rage d’être autre, différent, et donc de l’être jusqu’au bout, intégralement, la haine appelle la haine et tout vole en éclat…Et chacun voit sa vision de plus en plus obstruée, étroite, l’autre est l’ennemi, l’autre est le tueur et doit être tué, "la Croatie aux Croates" lui lanceront les nouveaux ocupants de son appartement, et il devient impossible de retourner à la normalité, impossible ne serait-ce que de la supporter, quand on est allé aussi loin en enfer, même la littérature et la poésie n’y survivent pas. Deux fins seulement sont possible pour Orimita Karabegović, mourir ou tuer.

 

Janine Matillon, épouse de l’écrivain ex-yougoslave Stanko Lasic, a enseigné et vécu 15 ans à Zagreb, enseigne le croate, le bosniaque et le serbe à l'école des langues orientales à Paris.

 

Cathy Garcia, le 12 juillet 2010

03/07/2010

De l’absence des poètes… par JM Bongiraud

Source : http://parterreverbal.unblog.fr/de-labscence-des-poetes/#comment-275

 

L’humanité s’est construite lentement, elle a poursuivi son chemin entre espoir et crainte ; de l’étape primaire où l’homme était terrifié par les éléments naturels, en passant, pour ce qui concerne le monde occidental, par le miracle philosophique grec, l’apogée romaine, le souffle de la « Renaissance », et la révélation des Lumières, pour finir par s’éteindre et se désagréger sous l’accélération irrationnelle de la technologie. Il est faux de croire que les choses allaient « naturellement », qu’il en fut toujours ainsi. L'humanité a connu des soubresauts, des reculs pour sans doute mieux avancer tant que l'homme demeurait le complice, voire l'enfant, au sens de l'être, produit organique de la nature. Il construisait son monde parfois en lutte contre les éléments, tout en respectant l’harmonie existante.  Mais le monde, depuis plusieurs décennies, est en « mue » perpétuelle, tous les liens qui existaient avec son environnement cèdent de plus en plus rapidement, et pour l'avoir déjà écrit, ces liens  universels mettent en danger la terre entière. Il ne peut donc poursuivre dans cette voie sans que nul ne puisse y trouver à redire. Le symptôme le plus alarmant de notre époque est cette coupable attitude des politiques et de ceux qui les soutiennent. De croire également que l’homme pris comme individu n’y est pour rien est tout aussi hypocrite. On peut toutefois s'interroger sur les possibilités de sursaut, de résistance, voire de révolte qui nous habite, quant on sait que l’autorité est entre les mains de « démocrates » inconstants et soudoyés, et que le pouvoir dans celles d’hommes invisibles dispersés aux quatre coins de la planète, s’abritant en haut de leurs buildings derrière des vitres teintées ! Face au quidam, tentant d’une voix éraillée de crier son désarroi, il n’y a plus rien, qu’une souffrance plus ou moins visible, latente, une résignation d’esclave, une chair, un visage, un esprit qui se désagrège dans ce milieu où l’absence, l’absence de réponse, l’absence de présence, l’absence de vie est outrageusement entretenue par ces esprits invisibles. Ils sont devenus les dieux de notre Olympe moderne que l’on ne voit pas mais qui disposent des êtres d’une manière si concrète que leurs excès leur sont d'avance pardonnés par l'abominable et subtile pression médiatique !

 

L'humanité par de grands esprits est parvenue plus ou moins à contrôler sa fougue, sa frénésie. Ces génies, puisque leur talent dépasse la mesure commune des autres hommes,  lui ont fait découvrir son corps, son esprit, ses relations au cœur de ses membres, sa nécessité de vivre en accord avec la nature. Ils ont enseigné la vie en société, l'influence des astres sur la terre… certains ont tenté de par leur raisonnement de montrer une voie politique nouvelle, anarchiste, communiste… périlleuse certes, mais dont l'accomplissement est porteur d'espérance. L'immense orgueil humain gâche ces entreprises. Si l'on faisait la somme de tous les écrits de ces philosophes, poètes, des tableaux de ces peintres, chacun serait effaré de cette gigantesque entreprise élaborée au cours des siècles, non pas fabriquée pour uniquement témoigner de l'humanité, mais pour appeler l'homme à la vigilance, à la réflexion, à la décence. Aujourd'hui encore on peut les lire, les voir, les entendre, et j'en rencontre, j'en croise de ces êtres fraternels. Leur pensée, imprégnée de leur propre souffrance, organisée autour de leur lucidité  face aux événements de l'histoire, tente d’ameuter, de rameuter la populace, persuadée qu’elle est que ces êtres invisibles sont les garants de leur avenir ! Je les entends, je les lis, je les écoute, ceux qui sont déjà passés, ceux qui passent. Car autant que le présent, le passé ne doit pas nous échapper comme cela se passe actuellement. Ces femmes, ces hommes sont philosophes, sociologues, chercheurs… ils ne sont pas poètes.

 

Les poètes existent, tout au moins ceux qui croient porter ce qualificatif. Ils sont nombreux à utiliser les pages des revues, à disserter autour d’une table sur le malheur poétique, de l’absence de visibilité du phénomène poétique, à chercher tel ou tel éditeur qui leur permettra de poser leur œuvre sur le catalogue des anthologies post-mortem, de s’exposer sur le monde Internet… Mais qu’écrivent-ils, que disent-ils, qu’attendent-ils de l’humanité et que veulent-ils pour elle ? J’essaie d’en lire, j’en lis, et quand ils ne s’exercent pas à quelque nouveauté stylistique, à s’ingénier à l’ornementation enfantine de leurs poèmes, à claudiquer avec leurs mots, à s’épancher sur leur vie avec un sentimentalisme naïf, voire à raturer le réel par quelque artifice, ils se trompent en voulant nous faire croire au pouvoir poétique, à son indicible phénomène, à sa présence ou à son absence, ce qui est un peu la même chose. Et ils égrènent leur moi philosophique, en badaud de leur propre esprit. Mais ils ne sont guère nombreux voire pas du tout à entendre le monde souffrir autour d’eux, à avoir senti que la poésie réclame l’inconfort, qu’elle est objet de lutte, qu’elle est non seulement l’engagement de l’esprit, mais celui du corps, et qu’elle ne peut s’adjoindre la nature en tant que « faire-valoir » quand celle-ci est déchiquetée, et qu’elle ne peut s’acoquiner au libéralisme quand celui-ci oppresse les plus démunis. Elle doit se faire le témoin de la médiocrité de la société, de sa déchéance culturelle. Elle doit être, non plus le lit dans lequel le professeur va se complaire et l'élève s'endormir, mais le brasier dans lequel le monde sentira son corps se révolter contre l'insupportable et stupide consensus actuel. Alors ces poètes présents qui se meuvent douillettement dans les draps des deniers publics, en résidence ici, en colloque là-bas, peuvent-ils rendre compte de cette apocalyptique existence qui est celle de millions de terriens ? Vivre dans ce conformisme ne peut engendrer ni révolte ni rébellion ! Et si je reconnais autant de misère dans la poésie qu’il en existe dans la musique ou la peinture, le nombre imposant de ces pseudo-artistes ne fait pas la grandeur de l’un ou de l’autre ! Les « assis » ne sont plus les bourgeois mais les poètes déguisés sous leurs avatars métaphoriques. La poésie n’a jamais pesé très lourd, et ce n’est pas parce que quelques-uns sont morts poètes en des temps obscurs, qu’aujourd’hui elle est parvenue à se frayer une quelconque reconnaissance : j’en vois tant de médiocres poètes, d’insignifiants poètes, d’ignares poètes qui parcourent les rues, les boutiques, les prix, les salons, les écoles pour comprendre que la poésie est à mille lieux de sa vérité. La poésie ne vaut plus rien, à l’instar d’autres arts, que l’on voit rabaissés au rang de l’exotisme culturel, et elle est encore moins considérée qu'une fleur en voie de disparition que l'on protège par décret ! Mais l'une fait peut-être plus que l'autre pour l'humanité ? Comprendre une œuvre, ressentir une peinture, être émotionné par une musique, au sens de leur témoignage passé, présent et futur, c’est faire un effort incessant et sans cesse renouvelé. Mais c’est faire figure de marginal, d’incompétent, de jaloux en ne voyant pas dans le dernier album de tel chanteur, dans la dernière toile ingrate de tel barbouilleur, dans le pénultième livre de tel journaliste-vedette, la magnificence de l’art alors que tout ceci n'est que le produit d’une sous-culture que l'on badigeonne ou saupoudre de modernité. Il est temps de réaffirmer que c'est loin de la fureur, du bruit que les oeuvres se forment et que rien n'est plus moderne que ce qui n'est pas encore ! Comment ces « pseudo-artistes » ne peuvent-ils pas voir la manipulation dont ils sont l’objet ? Mais peut-être aussi en approuvent-ils la manière ? Ou tout simplement aiment-ils la fange douillette du capitalisme ?

 

Mais il n’est pas dans mon intention de prôner un élitisme, tout aussi idiot et sans avenir que cette puérile culture remisée au rang d'objet de consommation, mais au contraire de tendre l’art, dans toute sa plénitude historique et présente, à ceux à qui on le masque. Nul n’est trop sot, ou trop bête, ou insuffisamment instruit pour partager, découvrir, comprendre l’art. Il ne lui manque que l’éducation, la vérité historique, le fil reliant l’art siècle après siècle et qui, en définitive, le relie à lui-même. Ceci n’est pas de la subjectivité, comme le laisse croire les imbéciles qui font figure de référence dans certains domaines, c'est en oublier la réalité du monde. On ne peut mieux préparer l’avenir qu’en comprenant, apprenant, tissant des liens avec le passé. Nulle œuvre poétique actuelle ne me rassure, pas même celle dont on vante les mérites, qu'elle soit naissante ou presque accomplie ! La réalité du monde les dépasse.

 

On ne saurait donc vivre aujourd’hui en écrivant de la poésie au coin d’un feu, alors que les mots perdent leur équilibre et leur richesse dans cet univers compacté, que la médiocrité remplace la modestie, que la fanfare arpente les rues au son des « vive l'argent » ! On est, on a toujours vécu au milieu de l’âtre, mais pour que l'humanité ne s'y brûle pas, ni ne s’y perde, la poésie doit être autant le souffle sur la braise que l'outre sur les flammes.

Presque africaine de Jacqueline Merville


Presque africaine

récit

Editions Des femmes- Antoinette Fouque

Mars 2010



 

CRITIQUES


LE MAGAZINE DES LIVRES


JUIN JUILLET 2010

 

CHRONIQUE DE BERTRAND DU CHAMBON

LES LIVRES QUE VOUS N’AVEZ PAS LUS

 

Une grande, mais vraiment grande, et qui a déjà pas mal de livres à son actif, et qui a peint des toiles magnifiques, et qui nous conte depuis longtemps ses voyages initiatiques, sa vie, ses errances : c'est Jacqueline Merville.

Je suis un peu honteux de devoir vous présenter Jacqueline Merville, au cas où vous n'auriez rien lu d'elle : c'est un écrivain magnifique, une auteure, un poète, une femme, une... les mots sont insuffisants ici. Cette femme est un grand écrivain. Depuis La Ville du non, en 1986, et de nombreux romans, récits, poèmes, elle a sculpté une œuvre étrange, digne et grave. Une statue égyptienne. C'est Jacqueline la Merveille ! Et bien sûr, son histoire personnelle, parfois fidèlement restituée dans certains de ses textes les plus récents, nous surprend par l'audace mise en pratique, assumée, vécue : elle vit comme elle veut. Elle voulait partir, elle est partie. Elle voulait faire face à la souffrance du monde, elle l'a fait. "Vagabonde sur la terre", dit son éditeur L'Escampette, sur la quatrième de couverture de Voyager jusqu'à mourir. Ou voyager jusqu'à vivre ? Car vivant depuis presque vingt ans en Asie, surtout en Inde, elle a, avec son compagnon, fréquenté les chemins des pèlerins du nord au sud, avec bien peu de moyens et de volonté de fer. Et puis un jour... Oh, ce n'est pas racontable... Elle, elle sait le raconter. Dans The Black Sunday, elle a dit l'impensable : elle se trouvait sur les côtes de l'Inde au moment où est survenu le tsunami. Elle raconte cela : le tsunami.

Et voilà qu'aujourd'hui, alors qu'on pensait qu'elle avait vécu là-bas une expérience indépassable, elle avoue qu'elle en avait déjà vécu une auparavant, en Afrique. Elle dit seulement : "un "supplice". Elle n'utilise pas les mots habituels : torture, viol ; et elle raconte comment elle a survécu. Comment ne pas demeurer une demeurée : une victime. Dans ce texte superbe, Presque africaine, elle parle en son nom seul, et voici que depuis quelques semaines des femmes lui écrivent : merci d'avoir dit pour nous ce que nous ne pouvons pas dire.

Pourquoi avoir vécu tout cela ? C'est un mystère. Jacqueline Merville s'y confronte, et ose avancer encore : "Avais-tu besoin d'être, un instant, hors de la femme blanche ? De l'oublier comme on oublie son nom, sa respiration, sa pensée ? N'être plus l'étrangère. Devenir l'autre, sans peau."

Et c'est bien ce que l'on risque, à lire Jacqueline Merville, devenir l'autre, explorer des contrées inconnues, passer à l'autre comme on passe à l'ennemi. C'est une si forte expérience qu'il n'est point besoin, ici, d'en rajouter : quelques personnes voudront lire Jacqueline Merville, afin de faire cette expérience. D'autres, c'est certain, n'oseront jamais.

 

 

ARGOUL.BLOG.LEMONDE.FR

 

FUGUES ET FOUGE


Presque, parce qu’on ne parvient pas à dire. Presque, parce que l’Afrique, c’est fini ; on n’y reviendra pas. Des bulles de conscience crèvent comme des éclairs à la surface de cet inconscient qui tient à le rester. Pour protéger. Comment se reconstruire, envisager un avenir, après la catastrophe ? Supplice, torture, « l’insensé tombé sur toi ». Est-elle l’auteur, cette femme blanche égarée en Afrique pour voir, comme « toutes celles qui ne cessent de marcher dans le monde » ? Est-ce empathie pour toutes ces femmes qui subissent parce qu’elles sont bâties en trou et non en trique ?

Cette longue nouvelle méditative, poétique, égrène l’indicible. Non seulement ce qui ne parvient pas à sortir de soi pour devenir objectif, mais encore ce que tout le monde refuse obstinément d’écouter. Ce monde, c’est le monde « normal » de tous ceux « qui ne sont pas comme eux, les contents, les contentes, les bien assis, les gentils vivants. » Les stratégies d’évitement sont connues : elle l’a bien cherché, elle n’est pas conforme, déjà rebelle à Creys-Malville contre les hommes en noir que sont les CRS. L’aventure forcée en continent noir, n’est-ce pas la quintessence de ce pouvoir obtus, fondé uniquement sur la force, la domination mâle ?

Il y a du féminisme en Jacqueline, de la révolte contre la brute, la puissance mâle érigée, macho, tricarde, militaire. Les régimes des roitelets noirs apparaissent sous les traits de ce machisme exacerbé, sexe brandi, canon des chars, « pacification » forcée par clouage au sol, si possible en béton pour faire plus mal, plus mâle. Une femme blanche dans la brousse éveille la possession, la revanche du Noir musclé contre la femelle languide, faire taire sa « voix coloniale », celle qui impose, méprise et ordonne. Assouvissement, domination, triomphe de soi – comment dire cette conjonction du sexe, de la passion et des valeurs dans l’Acte ?

Déposition, confession, carnets écrits, rien ne va. Par les flics locaux, le bourreau torse nu est libéré de ses entraves ; la fille qui écoute passivement n’est là qu’une fois ; les carnets usés, noircis d’écriture incohérente, partent en fumée dans une cheminée des Cévennes. Il faut se purifier, dire pour accepter, mais il est dur de dire ce qui ne se dit pas, ce qui ne s’accepte pas. Où fuir ? Dans la durée qui fabrique du souvenir ? Dans l’écriture poétique qui reconstruit une histoire ?

Peut-être est-ce cela, le salut ? Le dire comme ça vient, par bribes et bulles, en recréant l’événement selon une logique absente sur le moment, une logique poétique (de ‘poiesis’ action de faire) seul moyen de la distance avec ce qui vous est arrivé. Le dire pour les femmes blanches, routardes naïves, mais aussi pour toutes ces femmes africaines qui ne peuvent rien dire, faute de mots et de pouvoir.

Car le mot est à peine prononcé, sitôt refusé, mais ce dont il s’agit ici est bien le pire pour une femme : le VIOL !

Lisez ce livre, il vous remue. Même mâle, vous y serez sensible. Nulle description à la Sade, ni scénario comme au cinéma, un viol ne se dit pas comme on décrit le fonctionnement d’une machine. Vous êtes victime, vous êtes dedans, vous êtes clouée. On ne raisonne pas dans ces cas là ; on ressent, on sent, on se sent. Douleurs, odeurs, la peur. C’est évoqué à mots choisis ; suggéré par métaphores.

« C’était en Afrique, elle jouait de la cora.
J’écoutais la religieuse jouer de cet instrument. Je n’étais pas morte. »

Ce n’est pas un haïku, mais y ressemble : tout est dit. Il n’y a au fond que la poésie pour le dire. Jacqueline Merville écrit et peint, colle des papiers comme en Asie ; vous serez heureux de la connaître.

***

Je vous en parle avant même de le lire tellement je suis touchée. Je remercie JM Bongiraud et ses Pages Insulaires de m'avoir permis de décrouvrir Jacqueline Merville, je me suis sentie immédiatement en résonance. Bien d'autres livres de cet auteur à découvrir, ainsi que son travail d'artiste sur son site : http://sites.google.com/site/jacquelinemerville/home

CG