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19/04/2013

L'idiocratie

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Formation de l'univers : le grand calcul

Auto-destruction

 

Si l'homme ne se transforme intérieurement, par une mutation de son psychisme, il figurera bientôt sur la liste de ces malheureuses créatures qui vivent un million d'année ou plus et disparaissent alors, faute d'avoir pu s'adapter. La question reste toujours posée de savoir si l'évolution de l'homme à partir du singe fut réellement un pas vers la survie de l'espèce ou une étape. Seul le temps pourra le dire.


L'origine de tous les problèmes qu'ils soient grands ou petits, réside dans le psychisme de l'individu.

Depuis plus d'un million d'années que l'homme existe sur cette planète, sa connaissance du monde extérieur a considérablement évolué, il a augmenté son pouvoir et sa capacité à faire face aux calamités naturelles. Intérieurement, dans sa conscience, l'homme n'a pas beaucoup évolué. Il reste très semblable à l'homme primitif - peureux et incertain, formant des groupes (religieux et nationaux), luttant et se préparant à la guerre, se cherchant des avantages et haïssant son prochain. Il est maintenant capable d'aller sur la lune et de communiquer sur tout le globe en quelques minutes, mais il trouve toujours difficile d'aimer son voisin et de vivre en paix. L'homme moderne est brutal, égoïste, violent, avide et possessif comme l'homme primitif d'il y a un million d'années, bien qu'il soit maintenant capables de se cacher derrière de belles paroles et de nobles pensées.
Ce développement déséquilibré de l'être humain l'a conduit au bord de sa propre destruction. Il est à la limite de la guerre nucléaire, dans l'imminence d'une extinction totale. Le pouvoir que lui a donné un savoir grandissant ne s'est pas associé à une intelligence et à une vision appropriées. Pourquoi? Pourquoi n'avons-nous pas psychologiquement évolué? Est-ce parce que nous n'avons pas tourné notre attention vers l'intérieur afin de comprendre notre esprit, nos pensées, nos sentiments? Nous sommes si satisfaits, si éblouis par nos exploits, nos "progrès" dans notre monde extérieur, que nous avons complètement négligé le monde intérieur de notre conscience. Chez l'homme primitif la haine ne pouvait avoir que peu d'ampleur, la puissance de l'homme moderne la rend bien plus dévastatrice et nous voyons ses conséquences désastreuses tous les jours autour de nous.
Une meilleure organisation de la société pourrait nous sembler être la réponse à ce problème. Mais ceci n'est qu'une illusion profondément enracinée. On ne peut être opposé, bien sûr, à une bonne organisation de la vie de tous les jours; mais il vous est impossible de construire une société pacifique et non-violente avec des millions d'individus qui sont violents, agressifs et égoïstes, quelque soit la façon dont vous y preniez. Si vous avez une société communiste, vous aurez la violence du communisme. Si vous avez une société capitaliste, vous aurez la violence du capitalisme. Vous pouvez d'une certaine manière canaliser la violence, mais elle se manifestera toujours ailleurs. Il y a eu des mouvements de révolutions mais la tyrannie de l'homme par l'homme n'a pas cessé, elle a seulement pris d'autres formes.
Une société véritablement pacifique, non-violente, n'est possible que si l'individu se transforme psychologiquement, fondamentalement. Tout autre changement et superficiel et temporaire. Il ne résoudra jamais les problèmes, il nous permettra seulement de faire face pendant un temps, dans certains cas. La société, c'est ce que l'homme est. De même qu 'une barre de cuivre se caractérise par les atomes qui la constituent, de même une société se caractérise par les individus qui la composent. Tous les problèmes que nous voyons dans la société aujourd'hui reflètent les problèmes de la psyché de l'individu. C'est pour cela que nous devons nous préoccuper de la transformation intérieure de l'homme et pas seulement de l'organisation extérieure de la société.
 
 

L'individu ne change que lorsque change sa conscience. La vertu ne se pratique pas.


Toutes les religions ont échoué à essayer de changer l'homme. Auraient-elles réussi, nous n'aurions pas aujourd'hui tant de cruauté, de guerres et de haine. Nous devons examiner pourquoi les religions ont échoué à changer l'homme et en tirer la leçon. Selon son essence, chaque religion a prescrit un chemin, un ensemble de vertus à observer et de vices à éviter. Et l'homme a lutté pendant des milliers d'années pour les respecter, mais cela n'a pas marché. La pratique des actes vertueux ne change pas en elle-même la conscience de l'homme. Pratiquer la bonté avec préméditation n'a jamais créer une conscience vertueuse. Cela redevient affaire d'effort, de recherche d'un but dans la vie, d'une méthode en vue d'une auto-satisfaction. En même temps, si le coeur est bon, cette bonté s'exprimera dans chaque acte, dans chaque pensée, parole et acte. Il n'est pas alors question de pratique. De même on ne peut pas pratiquer la non-violence, tant que l'on est agressif, haineux, violent intérieurement. Sinon, la non-violence devient une façade, un comportement hypocrite, la manifestation d'un calcul. Ce n'est qu'en observant les causes de la violence en chacun et en les éliminant (non par effort mais à travers une compréhension) que l'on peut venir à bout de la violence. Et quand nous mettons fin à la violence nous n'avons pas besoin de pratiquer la non-violence. Seul un esprit paresseux a besoin de se discipliner!
Donc, la vertu ne peut ni être pratiquée, ni être cultivée. c'est un état d'esprit, un état de conscience auquel on arrive quand il y a connaissance de soi, compréhension, clarté et vision. On ne peut pas l'atteindre par un effort volontaire. Elle exige une vision pénétrante. Et cette vision pénétrante passe par l'observation, par la réflexion, par l'attention sensible. C'est la perception de la vérité qui libère la conscience de son ignorance et de ses illusions. C'est l'ignorance qui engendre le désordre dans la psyché. Le bien doit être spontané sinon il n'est pas le bien. Tout changement dans le comportement extérieur de l'homme, résultant de la peur, de la contrainte, de la discipline, de la conformité, de l'imitation, et de la propagande ne représente pas un vrai changement dans sa conscience et est à la fois superficiel et contradictoire.
 
 

La vérité, la libération et l'illumination ne peuvent s'acquérir par l'intermédiaire d'autrui.


Depuis la nuit des temps, l'homme dépend d'un Guru, d'une religion ou d'un livre pour lui indiquer le chemin. Krishnamurti a montré que la vérité est un pays sans chemin et qu'aucun Guru, aucun chemin, aucune croyance, aucun livre ne peuvent vous y conduire. Il faut être sa propre lumière et ne pas chercher sa lumière auprès d'un autre. Le rôle d'un Guru est simplement de montrer, c'est à l'individu lui-même d'apprendre. Et la capacité d'apprendre est de loin plus importante que celle d'enseigner. Dans ce domaine, personne ne peut vraiment enseigner quoique ce soit à qui que ce soit. Chacun doit arriver à la vérité par lui-même et il lui faut commencer par se connaître. Il est impossible de trouver la vraie réponse à toute question sérieuse sans d'abord comprendre le fonctionnement de son propre processus de pensée, le conditionnement que l'on a acquis de ses propres expériences, traditions, culture, religion, etc... Nos croyances, nos opinions, nos conclusions, nos préjugés nous empêchent de voir les choses dans leur vraie perspective car ils altèrent notre vision. On devrait être conscient de ce fait et mettre en doute chaque conclusion qui vient à l'esprit car elle pourrait ne pas représenter la vérité. Le processus d'apprendre a lieu quand nous cherchons en nous-mêmes de cette manière dans l'intention de chercher la vérité et pas simplement la satisfaction. Et il faut vivre dans cet état de recherche, de questionnement et de doute tout au long de sa vie, sans chercher à parvenir.
Ce que l'on peut recevoir de l'autre est une pensée, une question, mais l'exploration doit être propre à chacun. A moins que vous ne découvriez la vérité par vous-mêmes, elle ne vous appartient pas, ce n'est qu'une description de la vérité. C'est ce qui fait la différence entre le Bouddha et le professeur de philosophie Bouddhiste. Le premier a la vision pénétrante actuelle, la conscience, tandis que le second n'en a que la description. L'homme a souvent pris le symbole, le mot, le concept pour la vraie chose. Le véritable chrétien est celui qui vit selon le sermon sur la montagne (et vous ne pouvez faire cela que si vous avez la conscience du Christ) et non celui qui se rend simplement à l'église pour effectuer tous les rituels. Un vrai bouddhiste est celui qui participe à la conscience du Bouddha et non celui qui obéit à l'église bouddhiste. Toutes les églises, toutes les religions organisées n'ont réussi qu'à réduire la grande vérité à un simple système, un symbole, un rituel. Ce qui importe n'est pas l'habit, l'étiquette, mais le contenu de la conscience intérieur. Le rôle de l' enseignant (le Guru) est semblable à celui d'une lampe sur le chemin. On ne doit pas s'asseoir et adorer la lampe, on doit cheminer. Krishnamurti a sans cesse insisté sur le fait qu'accepter ou rejeter ce qu'il a dit n'avait que peu d'importance, c'est seulement quand nous le questionnons, l'examinons et le découvrons nous-mêmes que tout cela a de la valeur. Dés lors que la vérité et la libération sont des choses à découvrir par soi-même à travers sa propre recherche, toute organisation qui essaye de propager "la vérité" par une croyance, une conformité ou une propagande ne peut qu'aboutir à un futur conditionnement de l'esprit de l'individu et par conséquent le rendre esclave. Une recherche sensée requiert une libération de toute croyance, préjugés, conclusions hâtives et conditionnement. Elle exige une profonde connaissance de soi. Puisque la vérité ne peut pas être organisée et propagée, les organisations spirituelles qui tentent de le faire n'ont aucune valeur.
 
 

La compréhension intellectuelle n'est pas une réelle compréhension.


Nous sommes souvent satisfaits d'une réponse intellectuelle à une question et cela met fin à notre recherche. Dans ce cas, la compréhension intellectuelle devient un obstacle à la découverte de la vérité. Il est facile de constater intellectuellement que l'on ne doit pas s'inquiéter quand son enfant est malade. Cette inquiétude n'aide pas l'enfant. Ce qui lui viendrait en aide serait de faire venir un médecin. Mais cet argument logique effacera-t-il notre inquiétude? Le fait de savoir que la colère est un vice nous empêche-t-il de nous mettre en colère? La vérité est bien plus profonde que la simple logique ou la simple raison et la réponse intellectuelle est incomplète. Donc une compréhension intellectuelle est insuffisante. Elle peut être utile dans certains cas mais elle reste superficielle. Cette compréhension peut être garantie par le moyen du livre par exemple mais c'est seulement un schéma de pensée pour la mémoire; il ne doit pas être confondu avec la vérité.
Donc, si la compréhension intellectuelle est une chose limitée, qu'est-ce alors qui révèle la vérité? Pour cela, chacun doit s'observer et observer son propre processus de pensée à la manière d'un vrai scientifique qui observerait un phénomène. Il ne fait pas intervenir sa volonté, il observe sans choix, sans laisser son désir interférer dans son observation. Quand on observe de cette manière, dans une attention neutre et passive, sans désir de former rapidement une opinion ou tirer une conclusion, tout en hésitant, patiemment et avec scepticisme, afin de se comprendre et de comprendre la vie, alors seulement on peut découvrir ce qui est vrai et ce qui est faux; le faux tombe de lui-même sans effort ni volonté. L'ignorance se dissout alors dans la lumière de la compréhension.
Sans cette investigation objective mais passionnée de soi-même, de ses conclusions, croyances, attachements, désirs et motivations, s'identifier intellectuellement à un groupe, à une théorie ou à une croyance et embrasser définitivement une cause quelle qu'elle soit, n'a que très peu de valeur. C'est tout aussi sot que de dire "mon pays est le meilleur parce que j'y suis né". Néanmoins c'est ceci qu'implique le nationalisme.
Il est tragique de constater que n'avons jamais été éduqués à nous regarder vraiment. Nous avons seulement été éduqués à apprendre sur le monde extérieur et à faire face d'une certaine manière à ses problèmes. Par conséquent nous nous formons en connaissant beaucoup de choses sur le monde extérieur mais en étant complètement ignorants de nous-mêmes, de nos désirs, ambitions, valeurs et point de vues sur la vie. Nous pouvons être très compétents dans nos métiers mais nous sommes totalement embarrassés lorsqu'il nous faut discerner si le plaisir appelle le bonheur, si le désir et l'attachement sont la même chose que l'amour, et pourquoi les différences entre les hommes deviennent des inégalités. Il n'est pas question dans la joie, l'amour, la non-violence et l'humilité, d'entreprise.
Elles accompagnent la recherche, la connaissance de soi et la compréhension, qui épure notre conscience en la libérant des opinions arrêtées, des croyances ou systèmes de pensée. Si nous regardons très clairement par une étude minutieuse et attentive que la poursuite du plaisir ne conduit pas à la joie, alors notre vision du plaisir se transforme à la source et nous abandonnons la poursuite du plaisir sans aucun effort, sacrifice ou répression. Il apparaît alors une austérité naturelle complètement différente de celle que l'on s'impose par la pratique. De même si l'on remarquait par sa propre observation et recherche, que l'on ait pas essentiellement différent des autres êtres humains, que nous partageons avec eux les mêmes problèmes de peur, d'insécurité, d'envie, de violence, de solitude, de peine et d'égoïsme qui opère dans notre inconscience à tous, alors nous ne nous sentirions pas si différents des autres. Par notre ignorance nous attribuons beaucoup d'importance aux différences superficielle, comme de croyance, d'appartenance, de connaissance, de capacité qui ne sont que des acquis. Nous ne nous sommes pas demandés pourquoi nous donnons une si grande importance, pourquoi nous les laissons diviser les hommes, alors qu'en réalité nous partageons la même conscience. Si vous ôtez à un homme son aisance, ses possessions, son statut, ses croyances et son savoir, et que vous regardez dans sa conscience, est-elle vraiment différente de celle d'un autre être humain? Tout comme la caste, la couleur, la foi d'un être humain ne change pas la composition de son sang; nos acquis qu'il soient mentaux ou matériels ne change pas le contenu de notre conscience. Si nous ne nous empêchons pas de voir la réalité de ceci, nous découvrirons réellement l'unité fondamentale de l'espèce humaine. C'est l'ignorance qui nous divise, non les différences.
 
 

Conclusion


L'humanité est captive d'une grande illusion. Elle pense qu'elle peut résoudre ses problèmes par la législation, par des réformes politiques et sociales, le progrès scientifique et technologique, par un plus grand savoir, une plus grande aisance, plus de pouvoir et de contrôle. Tout ceci peut résoudre en effet quelques problèmes; mais ce sont là des problèmes superficiels et temporaires. Ils auront le même effet que l'aspirine et ne guériront pas la maladie. Nous continuerons à créer de nouveaux problèmes d'un coté et essaieront de les résoudre de l'autre, pour maintenir l'illusion du "progrès". Et il nous reste que peu de temps, car la maladie évolue vertigineusement, prête à faire disparaître l'homme; si l'homme ne se transforme intérieurement, par une mutation de son psychisme, il figurera bientôt sur la liste de ces malheureuses créatures qui vivent un million d'année ou plus et disparaissent alors, faute d'avoir pu s'adapter. La question reste toujours posée de savoir si l'évolution de l'homme à partir du singe fut réellement un pas vers la survie de l'espèce ou une étape. Seul le temps pourra le dire.

Professeur P. KRISHNA, recteur du Rajghat Education Centre, Fondation Krishnamurti en Inde, Bénarès (traduit par Mme Rubagire) en Juin 1996. (15 ans déjà ! et ça ne s'arrange pas...)
 

17/04/2013

PIERRE RABHI : LA SOCIÉTÉ CIVILE EST PORTEUSE DU CHANGEMENT

 

Pierre Rabhi : la société civile est porteuse du changement

 

Écologiste convaincu, expert international pour la sécurité et la salubrité alimentaires des populations et la lutte contre la désertification, Pierre Rabhi est agriculteur, philosophe, écrivain et conférencier. Il m'a été proposé de réaliser cette interview par téléphone dans le contexte de l'affaire Cahuzac.

* Homme singulier dans le paysage politique français, le scandale Cahuzac vous a-t-il sidéré comme beaucoup de citoyens ?

- Non, pas du tout. Tout est possible dans le contexte d'un monde glauque, d'une complexité infinie. Si ce genre de scandale est possible, c'est que la société le permet. Toute l'histoire de l'humanité est jalonnée d'exactions. L'être humain reste égal à lui-même. Les hommes politiques sont l'émanation de la conscience collective. Il y a une forme d'acharnement thérapeutique des politiques dans une logique d'enrichissement et de prédation de la terre et des hommes. La planète est devenue un supermarché et l'humanité se prétend avancée en consacrant bien plus d'argent à des activités destructrices comme la vente d'armes qu'à celles qui permettraient d'assurer la paix ou combattre la faim dans le monde.

* Toute votre vie vous vous êtes attaché à dénoncer la corruption qui affame l'Afrique et l'ensemble des continents et de souligner «qu'une grande partie de la dette du Tiers Monde se trouve dans les coffres des banques suisses ou des sociétés d'investissement» (Pierre Rabhi Le chant de la Terre, Rachel et Jean-Pierre Cartier, La table Ronde, oct 2012). Déjà, vous proposiez de faire le procès de la corruption. Comment sortir selon vous de la crise politique et morale que traverse notre pays ?

- Des mesures comme celles annoncées par le chef de l'État aujourd'hui sont sans doute nécessaires, mais non suffisantes. Ce n'est pas en changeant seulement la périphérie qu'on changera les choses. Le changement de société ne se fera pas par des éléments factuels mais par un être humain modifié. La grande indignité de notre société, c'est d'avoir réduit la vie au lucre. D'ailleurs, on entend peu les religions sur ces questions de corruption, de financiarisation du monde.

Infléchir les comportements en réaffirmant les règles du vivre ensemble, en passant par des actions judiciaires et des lois, est indispensable, mais le mal est beaucoup plus profond.

Pour résister, Il faut s'attacher à l'éducation. Les enfants sont formatés pour s'adapter à un système de compétitivité, de sélectivité, de recherche du bonheur à travers l'accumulation de biens matériels. Il y a une injonction permanente à posséder indéfiniment, entretenue par des médias qui manipulent les consciences notamment par la publicité.

On doit apprendre très tôt ce qu'est la vertu.

Par ailleurs, les citoyens sont souvent peu conscients de la puissance qu'ils ont face aux dérives de notre monde. Ils ont le pouvoir mais n'en usent pas. Il y a bien des façons de protester, de résister au diktat économique, le boycott en est une. Il faut identifier quelles sont nos contradictions et faire le choix de ce à quoi on peut renoncer, cibler ce sur quoi on peut agir. Bien parler, bien agir et apprendre. Il faut incarner la parole.

* Edwy Plenel rappelait dans un article du 25/02/2013 cette citation de Marc Bloch au sujet de "L'étrange défaite" de 1940 et des élites dirigeantes : «Faiblesse collective n'a peut-être été souvent, que la somme de beaucoup de faiblesses individuelles». Croyez-vous qu'elle s'applique au contexte français actuel ?

- Je ne juge pas les hommes, ils auront rendez-vous avec leur conscience. Mais je serais plus radical avec le système qui prédispose à la corruption. Les paradis fiscaux devraient être supprimés, c'est là où se concentrent les transgressions les plus préjudiciables à l'espèce humaine.

* Les affaires actuelles accroissent-elles selon vous le risque Front National ?

- Ce triste spectacle du monde, cette corruption, la décrédibilisation de la politique peuvent amener les gens vers les extrêmes dans un mouvement irrationnel pour se venger. Il faut combattre l'humiliation, le miroir aux alouettes que constitue le recours à l'ordre brutal par l'amour du prochain et la pleine conscience de l'unité du genre humain. L'humanité doit se réconcilier avec elle-même au-delà des frontières.

* Quel doit-être selon vous le rôle des médias dans la révolution de l'esprit que vous appelez de vos voeux ?

- Tout changement appelle un niveau de conscience collective important. Les médias peuvent participer à cette prise de conscience à condition qu'ils ne soient pas trustés. Beaucoup participent à la manipulation de l'opinion en exerçant une censure de l'information.

* «Le vrai courage c'est, au-dedans de soi, de ne pas céder, de ne pas plier, de ne pas renoncer» comme le disait Jean-Pierre Vernant cité récemment par Edwy Plenel dans un hommage à ce résistant ?

- Le vrai courage c'est de parvenir à associer l'amour, la bienveillance avec la nécessaire résistance contre tout ce qui dénature l'humanité. L'engagement est épuisant. Parfois je dis avec malice que j'aimerais bien pouvoir donner ma démission, mais à qui ?

 

 

* Quel espoir avez-vous ?

- Partout autour de nous, des gens inventent le futur en prenant des initiatives originales dans tous les domaines que ce soit l'éducation, le soin, l'agriculture, la solidarité, le crédit, le commerce... Les femmes forcent mon respect dans bien des circonstances par leur courage, c'est l'énergie des femmes qui sauve bien souvent, qui fait que la vie l'emporte. Il est possible que toutes ces initiatives conjuguées fassent prévaloir une société qui affirme toute la noblesse de la puissance absolue de la modération face au modèle actuel.

La société civile est porteuse du changement auquel nous aspirons. Nous ne devons pas renoncer ne serait-ce que pour les générations qui vont prendre la relève. On transgresse : il faudra qu'elles corrigent. Ce n'est pas juste.

Entretien réalisé le 10 avril 2013

Un article de nadja, publié par blogs.mediapart.fr

04/04/2013

Nouvelles technologies : Une réflexion très intéressante

Source : http://www.peripheries.net/article333.html

 

[31/03/13] D’images et d’eau fraîche - Ode à Pinterest par Mona Chollet

Fantômes, extase et effroi sur les Internets

L’une des raisons pour lesquelles les mises à jour de Périphéries sont devenues si rares, c’est que j’ai été avalée par les réseaux sociaux. Maintenant, quand j’ai envie de recommander un livre, au lieu de me fatiguer à synthétiser le propos de l’auteur, à le décortiquer et à le commenter, à le mettre en relation avec des lectures passées, je balance deux lignes sur Facebook ou sur Twitter : « Lisez ça, c’est super. » Une grande avancée pour la finesse de la pensée et la richesse du vocabulaire.

Dans son étude des usagers du téléphone portable, le sociologue Francis Jauréguiberry (1) analyse ce que change dans les relations humaines le fait d’avoir à disposition des moyens de communication instantanée, et de pouvoir atteindre n’importe qui, n’importe quand, par un appel ou un SMS — mais sa réflexion vaut aussi pour un statut Facebook ou un tweet. Avec le portable et les réseaux sociaux, au lieu de laisser décanter en soi ce qu’on veut dire, au lieu de le ruminer longuement dans son coin, de le laisser mûrir, on s’exprime à flux tendus, par bribes. « La pulsion interdit l’élaboration de l’élan », écrit Jauréguiberry. Certains de ses interlocuteurs disent eux-mêmes que le portable représente à leurs yeux, dans leurs relations avec leurs proches, « un danger pour l’émotion pensée non plus comme passage à l’acte, mais comme tension créatrice. Le risque est de voir l’impulsion chasser l’imagination, et le bavardage remplacer l’échange. Le silence et le différé, condition de retour sur le passé et de projection dans l’avenir, sont les complices d’un présent créateur. Mais lorsque ce présent n’est plus qu’une succession d’immédiats éphémères, où se situe la continuité ? ».

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Denys Finch Hatton en safari

L’un des enquêtés de Jauréguiberry s’inquiète pour les lettres d’amour, en particulier : « Le téléphone a un aspect simplificateur de la pensée que le billet doux ou la lettre n’a pas. Parce que la lettre, on l’écrit, on la réécrit, on la jette, on la recommence... On prend plus de temps à faire passer le message. Avec le portable, c’est : “Je t’aime, tu me manques.” Non seulement c’est brut et peu sophistiqué, mais ça appauvrit, je crois, la relation. » Forcément, à l’époque où une lettre devait voyager pendant des jours, voire des semaines, avant d’atteindre son destinataire, il aurait paru légèrement incongru de se contenter d’un « Je t’aime mon chéri, bisous ». Ou alors, il fallait être Denys Finch Hatton (1887-1931), l’amant de l’écrivaine danoise Karen Blixen, dont Robert Redford a interprété le rôle dans Out of Africa de Sydney Pollack. Alors qu’il était parti en safari, son frère, qui avait besoin d’un renseignement urgent, avait envoyé des hommes à sa recherche. Les types avaient marché des jours avant de le dénicher. Et là, à la question « Connais-tu l’adresse de X ? », ce farceur de Finch Hatton avait fait répondre : « Oui. » Un peu comme s’il croyait qu’il avait les SMS gratuits dans son forfait.

« J’ai noté quelques subtilités récentes
de la technologie
pour nous rendre dépendants,
augmenter indéfiniment
les surfaces d’échanges,
j’ai noté le recul
des possibilités d’autarcie »
Emmanuelle Pireyre

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Lettre d’Eugène Delacroix à son marchand de tableaux, 28 octobre 1827

Cet appauvrissement des échanges ne concerne pas forcément le mail — même si certains observent que la logique du SMS est en train de le contaminer, et qu’on s’envoie des courriers électroniques de plus en plus brefs, à un rythme de plus en plus rapide. On peut penser au contraire que le mail, et le Net en général, à travers sites, blogs et forums, ont amené beaucoup de gens à développer une pratique de l’écriture qu’ils n’auraient pas eue autrement. Ce qui disparaît, en revanche, c’est la lettre, c’est-à-dire un support de communication physique, que l’on peut décorer, enluminer, parfumer, tacher, cacher, déchirer, et qui, à travers l’écriture manuelle, conserve l’empreinte du corps de l’autre. Les lettres ne se comptent plus qu’en millions chaque année en France, alors qu’il y a quinze ans c’était par milliards. Mais « la décrue date des années 1970 », quand tous les foyers de France ont finalement été équipés d’un téléphone. Sébastien Richez, chargé de recherche au Comité pour l’histoire de La Poste, indique que les lettres représentent aujourd’hui moins de 3% des échanges postaux, et prédit qu’en 2030 il n’y aura plus du tout de courrier : « J’ai fait un jour une petite présentation sur le thème : 1830-2030, vie et mort du courrier ! » (2)

Bref. Reste le problème des réseaux sociaux, et de la façon dont ils ôtent toute profondeur au temps, mais aussi dont ils nous privent de nos capacités de retrait et de concentration. « Mon cerveau d’avant Internet me manque », dit une illustration de Douglas Coupland qui a beaucoup circulé... sur Internet. Dans mon cas, il y a effectivement de quoi rester perplexe en comparant la personne tranquille et posée que j’étais avant — pas exactement avant Internet, mais disons aux débuts du Net, avant la grande accélération du web 2.0 —, lorsque je pouvais rester de très longs moments seule dans ma bulle, avec la créature fébrile et frénétique que je suis devenue : une zébulonne en surchauffe perpétuelle, incapable de ne faire qu’une chose à la fois, qui consulte à tout bout de champ ses multiples comptes (mail, RSS, Facebook, Twitter), qui abandonne les livres au bout de cinquante pages et qui ne sait plus où donner de la tête entre tous les objets dignes de son attention. Mon cerveau est devenu une passoire. J’envisage d’essayer la technique Pomodoro, qui consiste à installer un minuteur pour s’obliger à se consacrer à une seule tâche pendant vingt-cinq minutes : gros challenge en perspective. Dans Féerie générale (éditions de l’Olivier, lisez-ça-c’est-super), Emmanuelle Pireyre écrit : « J’ai noté quelques subtilités récentes de la technologie pour nous rendre dépendants, augmenter indéfiniment les surfaces d’échanges, j’ai noté le recul des possibilités d’autarcie. »

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Dans le « New Yorker »

En étant consciente de ces enjeux, pourquoi ne pas me déconnecter, alors, ou au moins lever le pied ? Parce que je suis accro. La curiosité de voir ce que postent les autres et la pulsion de partage sont les plus fortes. Je fais partie de ces internautes qui ont des idées politiques affirmées, et qui sont contrariés des décalages qu’ils peuvent constater entre ces idées et leur mode de vie, mais qui, quand il s’agit des réseaux sociaux, bien qu’avertis de leurs multiples pièges, se retrouvent face à une force d’attraction irrésistible. Ce qui conforte encore ma conviction que la gauche, en général, compte trop sur le sens moral des gens, néglige leur part d’irrationnel, et sous-estime la facilité avec laquelle leurs repères moraux et politiques peuvent être balayés par des stratégies de séduction efficaces.

Le plus affolant, c’est que l’un des moyens récents que j’ai trouvés pour me reposer l’esprit est encore... un réseau social : Pinterest (AU SECOURS, SAUVEZ-MOI). C’est plus fort que moi : toute cette richesse à disposition, c’est comme si une main géante sortait de l’écran pour m’empoigner et m’entraîner dans les méandres des Internets. Etant avant tout portée, par goût personnel et par nécessité professionnelle, sur le texte et sur l’information, j’ai mis longtemps à réaliser qu’il y avait un autre domaine dans lequel Internet avait mis fin au régime de la rareté, pour rassembler et systématiser une quantité vertigineuse de ressources : les images — photos et reproductions d’art. Je guettais avec avidité celles qui surgissaient de temps en temps sur Facebook (et je me perdais surtout dans le splendide Désordre de Philippe De Jonckheere), j’aimais la beauté et la respiration qu’elles apportaient dans le flot de l’actualité, mais sans avoir l’idée d’aller voir à la source, sur les sites spécialement dédiés à leur partage.

Sur Pinterest, pour ceux qui ne connaissent pas, on se crée un compte personnel avec des tableaux thématiques sur lesquels on épingle les images qui nous plaisent. On peut les télécharger depuis son disque dur, ou repiquer celles des autres et s’abonner à leurs tableaux quand ils nous intéressent. On peut aussi installer sur son navigateur un bouton « Epingler » totalement jouissif, qui permet de rafler en quelques secondes une image sur n’importe quel site qu’on visite pour l’ajouter à sa collection. L’ensemble est une vaste boucherie de droits d’auteur, mais beaucoup d’utilisateurs demandent expressément à ceux qui reprennent leurs images de ne pas enlever les crédits. Le droit commercial passe à la trappe, mais pas le droit moral — ou pas toujours...

Avant, pour se faire une collection personnelle, pour décorer son agenda de l’année ou les murs de son appartement, il fallait se contenter d’inspecter les tourniquets de cartes postales dans les musées ou les librairies, de découper les journaux et les magazines, de récupérer des programmes de spectacles ou des prospectus d’expositions. Maintenant, il suffit de taper le nom d’un artiste dans Google, ou de plonger dans l’univers vertigineux de Tumblr, de Flickr et de Pinterest, pour en recevoir une avalanche continue sur la tête. C’est sans fin : un compte ou un site mène à un autre, tout aussi alléchant, voire encore plus. Comme pour l’information et les idées, on plonge là-dedans avec émerveillement, mais en ayant aussi une conscience aiguë du caractère forcément dérisoire de ses explorations, ce qui procure une démangeaison de frustration, et le sentiment d’une démesure, d’une disproportion effrayante avec les capacités de l’esprit humain. On peut, à certains moments, nager avec aisance dans un flot d’informations et de productions passionnantes, et, à d’autres, avoir l’impression de ventiler des fils RSS comme un forçat casse des cailloux. Il y a presque de quoi paniquer, surtout que pendant ce temps-là le monde physique ne cesse pas d’exister pour autant, il continue à vous solliciter lui aussi.

C’est curieux : pourquoi on ne panique pas de la même façon quand on se trouve dans une bibliothèque, alors qu’on sait très bien, là aussi, qu’on ne pourra jamais lire tout ce qu’elle contient, et qu’on passera forcément à côté de livres qui, si ça se trouve, auraient changé notre vie ? Sans doute parce que la bibliothèque, on en voit les limites, on peut en faire le tour. Le livre, lui aussi, est un objet bien distinct : il est séparé des autres, même s’il contient une bibliographie qui y renvoie. Ce qui est flippant avec le web, c’est ce contenu à la fois dématérialisé et enchevêtré par le jeu des liens hypertextes, qui ne vous autorise jamais à le lâcher — il faut s’y arracher —, qui vous offre une image très proche de ce qu’est votre cerveau — même si les différences sont aussi nombreuses — et semble par là vous lancer un défi.

L’image de la « toile » est pertinente y compris dans sa dimension de piège collant dont il est impossible de se dépêtrer. Rien d’étonnant à ce qu’on soit engloutis, dépassés. Rien d’étonnant à ce qu’on soit absorbés au point de négliger au moins un peu notre environnement matériel, comme l’illustre assez bien ce dessin d’une utilisatrice typique de Pinterest (« The typical pinner », « l’épingleuse typique »). Peut-être qu’au bout de quelques années on sera dégrisés, on aura gagné en maîtrise, on aura pris un minimum de recul et rééquilibré nos vies ? Ou peut-être que c’est seulement ce que je me raconte pour me rassurer ? Plus le temps passe, plus le titre du premier numéro de Manière de voir consacré à Internet, « L’extase et l’effroi », en 1996, me semble un titre parfait (3).

Bovarysme 2.0

Sinon, autant le dire tout de suite : Pinterest, c’est la honte. J’aurais mieux fait de choisir Tumblr. Pour l’essentiel, Tumblr est branché, second degré, plein de gifs animés, de chats aux yeux rouges qui volent, de dérision et de parodies, ou alors de collections d’art pointues et dérangeantes. Alors que Pinterest est résolument premier degré, à la limite de la niaiserie. Chacun y met ce qui le fait rêver, de sorte qu’il offre une vue en coupe des fantasmes et des idéaux contemporains. On comprendra que ça m’intéresse... C’est sans doute pour cette raison qu’il a la réputation d’un réseau « féminin » : il déborde de robes de mariée, d’images romantiques et vaporeuses, de listes de shopping, de cupcakes, de cocktails, de fringues et de sacs, de mamans et de bébés, de photos de décoration intérieure, de produits de beauté, de mannequins filiformes et de recettes de cuisine. C’est la version 2.0 du bovarysme.

En fait, Pinterest reflète bien cette « culture féminine » que j’ai essayé de décrire dans Beauté fatale, une culture que les femmes se sont constituée au fil du temps autour des occupations et des préoccupations dans lesquelles la société les enfermait : le quotidien, l’univers domestique, le soin des enfants, le corps, la mode, la sensualité, ou encore le goût des choses petites, secrètes, cachées. Il s’agit d’une culture à laquelle beaucoup d’entre elles adhèrent encore, et qui est méprisée par la culture légitime, mais habilement récupérée et exploitée par la société de consommation et les médias de masse. Elle mêle des éléments à mes yeux tout à fait défendables, et d’autres franchement aliénants. La présence massive des seconds sur Pinterest a d’ailleurs amené certaines à estimer que ce réseau social « tuait le féminisme » (Amy Odell, « How Pinterest is killing feminism », Buzzfeed, 1er octobre 2012).

« Ce n’est pas ce qu’Internet était censé nous apporter », proteste Amy Odell dans cet article. Sauf que, là encore, Internet a deux visages : d’un côté, inévitablement, il est une vaste régurgitation de la vision du monde, de l’esthétique, des aspirations et des préoccupations que nous ont fait bouffer pendant des décennies, et que continuent à nous faire bouffer, les médias traditionnels, télé et magazines. Mais, de l’autre, il est aussi un lieu où les contester, et où faire mieux que les contester : les concurrencer, leur proposer des alternatives. Dans le domaine des images comme dans les autres, pour qui veut bien aller fouiller, il réintroduit une diversité inimaginable, alors qu’autrefois les médias traditionnels étaient seuls, ou presque, à façonner notre environnement culturel.

Certes, Pinterest est accablant au premier abord ; et, sur Tumblr, on trouve des flopées de comptes intoxiqués par l’univers de la mode et de la publicité, d’un érotisme glacial et glaçant, saturés de corps minces, lisses et aseptisés qui semblent en plastique, de logos de marques de luxe. Mais il suffit de creuser un peu pour découvrir des comptes qui vous emmènent radicalement ailleurs. On dirait que le monde entier (ou du moins une partie non négligeable du monde) a déversé en ligne tout ce qui dormait dans ses greniers. Et la circulation des images est fascinante à suivre, ou plutôt à deviner : une photo apparaît sur un Tumblr, elle est aussitôt repostée sur d’autres, et, quelques jours plus tard, vous la voyez ressurgir comme une fleur sur la page Facebook d’un de vos amis, après avoir probablement déjà fait plusieurs fois le tour de la Terre.

Dans l’usage que j’en fais, Pinterest est un antidote à Twitter. Twitter me sert à échanger des informations et des commentaires sur la politique nationale et internationale, sur la crise financière, sur la situation des femmes, sur le racisme, sur l’environnement... Autant dire tout ce qui va mal sur la planète. Certains font aussi un usage militant de Pinterest, mais ce n’est pas mon cas — même si la politique a tendance à revenir par la fenêtre. Le partage d’images est un moyen que j’ai trouvé de restaurer la vision du monde plutôt sombre que je retire de Twitter, qui, sinon, finirait par être minante. Un moyen parmi d’autres, mais assez fabuleux. Il me rappelle l’existence des trains qui arrivent à l’heure, sur lesquels il n’y a rien à écrire (encore que...), mais qui peuvent être rassérénants à contempler.

Pour ça, il faut accepter de se laisser aller à admirer béatement, sans se sentir stupide, en faisant taire son rabat-joie intérieur. Il faut accepter aussi, le cas échéant, d’avoir des goûts banals, ne pas vouloir jouer toujours à la plus maligne, ne pas chercher à se distinguer à tout prix ; un réflexe dont je constate qu’il est bien plus ancré que je ne le croyais. Mon amour-propre a résisté plusieurs semaines avant de me laisser créer un tableau « Chats », comme j’en mourais d’envie : tu ne peux pas ! Tu es journaliste au Monde diplomatique ! Ignacio Ramonet et Serge Halimi ne collectionnent pas les photos de chats, eux ! (Pour Alain Gresh, je ne jurerais de rien.) J’ai fini par craquer. Mais je me contrôle : pour le moment, du moins, je fais un casting impitoyable, je ne sélectionne que des chats artistiques et distingués. Enfin, presque. Il faut que je pense à me créer un tableau secret plein de chatons ébouriffés et trop mignons qui jouent avec des pelotes de laine.

De toute façon, en systématisant l’accès aux ressources documentaires, le web est une école d’humilité : on a très peu de chances d’être seul à détenir une image. Et, si on a la naïveté de le croire, un minimum de navigation dans les collections des autres nous détrompera vite. Il est d’ailleurs étonnant d’observer qu’on en retrouve certaines de façon régulière, insistante, au fil de ses déambulations, chez les gens les plus différents : des images qui ont visiblement tapé dans l’œil de tout le monde, pour des raisons souvent mystérieuses. Et, à l’inverse, je suis aussi parfois perplexe, presque choquée, en constatant que d’autres récupèrent une de « mes » images pour l’inscrire dans des univers tout à fait étrangers au mien. Chacun se sert chez les autres de façon un peu cynique, sans forcément adhérer à tous leurs choix. Ou alors, quelqu’un publie une image en l’accompagnant de commentaires extatiques, et vous la scrutez en essayant en vain de comprendre ce qu’il lui trouve, au juste. Sur Pinterest, chacun est à la fois très commun, très prévisible, très semblable aux autres, et absolument seul dans son monde. Ce qui amène à se poser des questions à peu près insolubles sur la formation du goût et les voies mystérieuses qu’elle emprunte : pourquoi est-ce que telle image me plaît autant, pourquoi est-ce qu’elle suscite ma convoitise, pourquoi est-ce qu’elle déclenche immédiatement un réflexe d’appropriation, alors que telle autre, pourtant très semblable, avec le même sujet, le même auteur, le même style, me laisse de marbre ? Ou comment s’offrir une psychanalyse sauvage par les images.

Toi aussi,
succombe au porno des escaliers

Ce dont je ne reviens pas, en tout cas, après trois mois, c’est le plaisir que j’y prends. Les images agissent comme des cataplasmes, comme une thérapie. Elles ont un pouvoir nourrissant, apaisant. On dirait qu’elles produisent des effets au niveau physiologique. C’est d’ailleurs ce que dit bien l’appellation « porn », si souvent accolée par les blogueurs à la catégorie particulière qui les passionne : Tree Porn pour les arbres, Cabin Porn pour les cabanes, Bookshelf Porn pour les bibliothèques, Interiors Porn pour la décoration intérieure... Le terme traduit l’idée d’orgie, d’abondance (« binge » est également un suffixe très prisé), mais il suggère aussi que ces images vous comblent, qu’elles répondent à un désir profond, qu’elles vous font un effet qui déborde la simple appréciation esthétique. S’y ajoute le plaisir de la collection : accumuler des variations sur un même thème permet de l’explorer de plus en plus finement, sous tous les angles, en conjuguant le bonheur de la répétition, de l’obsession, de l’entêtement, et celui de la nouveauté, de la variation, de l’élargissement progressif du champ. On vise une exhaustivité qu’on n’atteindra jamais, mais au moins, on balise le terrain, on pose des jalons.

On hésite cependant à faire ce constat, comme si ce plaisir procuré par les images n’était pas un phénomène homologué, comme si on n’était pas prêt à admettre qu’un objet visuel serve à autre chose qu’à nous communiquer une information ou à enrichir notre culture. « J’ADORE LES ESCALIERS. Est-ce que c’est bizarre ? Est-ce que c’est seulement moi ? » s’alarme par exemple le titulaire d’un Tumblr consacré au design. Alors que non, pas du tout. Vous commencez par vous surprendre et vous inquiéter vous-même en créant un tableau « Escaliers », et vous finissez par passer des heures à fouiller dans les images de cette catégorie, la langue pendante. D’ailleurs, bien sûr, il y a un porno des escaliers (à ne pas confondre avec le porno dans les escaliers, qui existe aussi). C’est fantastique, un escalier, quand on y pense. Sa façon de sculpter l’espace, de rappeler les cabanes et les escalades de l’enfance, de faire virevolter le corps et le regard, de suggérer une échappée, un ailleurs mystérieux qu’on ne fait qu’entrevoir et qu’on est libre d’imaginer... (D’accord, j’arrête.)

« Une estampe est un objet
qui permet de pénétrer
à l’intérieur de l’œuvre »

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Portrait posthume à la mémoire d’Hiroshige peint par Kunisada Utagawa. (Source : Wikipédia)

Dans son introduction à l’exposition de l’artiste japonais Hiroshige (1797-1858), cet hiver, le directeur de la Pinacothèque de Paris, Marc Restellini, écrivait :

« Grâce à Hiroshige, il nous est permis, à nous, public occidental, de comprendre comment une œuvre d’art est perçue au Japon et plus largement en Asie. Notre manière de voir une œuvre en Europe et en Occident est finalement très superficielle, purement esthétique ou simplement intellectuelle et s’attache à apprécier la forme, les couleurs, la composition ou la signification. (...). Le Japonais s’attache moins à l’apparence, mais vit la vision de l’œuvre comme un support de méditation. Une œuvre est avant tout un prétexte à un voyage intérieur. Ainsi, une estampe est un objet qui lui permet de pénétrer à l’intérieur de l’œuvre. C’est la raison pour laquelle la perspective dans les gravures japonaises est si évidente et si profonde. Elle aide à accompagner l’œil dans son voyage à l’intérieur de l’estampe. »

C’est intéressant, mais on peut se demander si le rapport décrit ici comme « japonais » n’est pas en réalité universel, et si la différence ne tient pas simplement au fait que, en Occident, on répugne à le reconnaître. Parce que, d’après ma modeste expérience, sur Pinterest, tout le monde, ou quasiment, est japonais. On y recherche des images qu’on peut habiter, dans lesquelles on peut se projeter, devant lesquelles on peut rêvasser. Les photos d’intérieurs, d’architecture, de maisons, de cabanes dans les arbres et d’abris en tout genre remportent un grand succès : les tableaux consacrés à ces thèmes font partie de ceux qu’on retrouve chez pratiquement tout le monde ; mais la plupart des images, quel que soit le sujet représenté, semblent choisies parce qu’elles offrent un abri, même si ce n’est pas au sens littéral. Je rêve des textes qu’une exploration de l’Internet des images aurait pu inspirer à Gaston Bachelard.

Et puis, il y a le mode de relation qu’induit Pinterest, lui aussi très reposant. Twitter, en permettant à tout le monde de parler à tout le monde, a un côté autos tamponneuses, mais sans la dimension enivrante et joyeuse : ça va à toute allure, c’est violent, ça s’accroche, ça s’engueule, ça s’insulte à l’occasion. Sur Pinterest, on se contente de communier dans les « oh ! » et les « ah ! » d’admiration. On ne cultive pas son réseau et son influence — même si on a aussi vu émerger quelques reines du life-style qui font exploser le compteur d’abonnés. Ici, il est pratiquement impossible de sortir une énorme connerie qui ruinera instantanément votre réputation auprès de centaines ou de milliers de gens. Très difficile aussi de frimer ou de céder au narcissisme : on ne court pas le risque de voir ses petits ou grands accès de vanité épinglés pour l’éternité sur Personal Branling. On est dans une activité gratuite, ce qui fait un bien fou.

Ce que je préfère, c’est les moments où vous explorez un compte qui vous plaît, vous le passez en revue minutieusement, pendant que son propriétaire fait de même avec le vôtre, chacun gratifiant l’autre d’un réépinglage, d’un « j’aime », d’un abonnement à l’un de ses tableaux. J’adore l’idée d’être en train d’échanger des objets d’admiration — un plaisir auquel m’avaient déjà fait goûter les albums Panini de mon enfance — avec une personne totalement inconnue, dont je ne sais parfois même pas si elle est un homme ou une femme, si elle habite à deux rues de chez moi ou à l’autre bout de la planète. Même l’âge n’a plus d’importance : je me retrouve à suivre les publications d’un Américain de 16 ans d’origine pakistanaise, et de pas mal d’autres gamins qui, entre deux envois d’images, soupirent sur leur Tumblr qu’ils sont déprimés de devoir retourner à l’école demain, ou postent des photos de leurs orgies au MacDo. Il se crée des entités déconcertantes, à la fois complètement opaques et très familières : « Bon, Thorstein Ulf est à fond dans les peintres chinois, ces temps-ci... Il vient encore d’en balancer quinze d’un coup, franchement, il est pénible... Mais patience, ça lui passera... »

Expansion du « fantomatique
entre les hommes »

Certains diront que c’est triste d’échanger avec de parfaits inconnus qu’on ne rencontrera jamais, alors qu’on n’adresse même pas la parole à son voisin de palier. Je ne suis pas sûre qu’on puisse voir les choses de cette façon. Il y a effectivement une grande pauvreté relationnelle dans nos sociétés, mais il n’est pas certain qu’Internet y soit pour grand-chose. Ce qui change, c’est que le type de rapport qu’on n’entretenait autrefois qu’avec des artistes — compositeurs, peintres, écrivains — à travers leurs œuvres, on l’entretient aujourd’hui avec une foule d’inconnus. Chacun devient auteur, à un degré plus ou moins grand : chacun met à disposition ses textes, ses réflexions, ses photos, ses compositions, ou, plus modestement, ses sélections d’images, de musiques ou d’articles, et se crée un public plus ou moins important qui y trouve de l’intérêt. Est-ce qu’on aurait l’idée de conseiller à quelqu’un qui lit un roman ou qui écoute un disque de sortir plutôt parler à ses voisins ?

Pour autant, difficile de prétendre que tout va bien avec cette nouvelle configuration. Ce type de communication fantomatique, avec ses richesses et ses limites, devient beaucoup plus présent, voire envahissant, qu’il ne l’était quand il concernait seulement les artistes. Avant Internet, on communiquait très rarement de façon virtuelle avec des inconnus non artistes, même si cela pouvait arriver : ces accidents — car c’en était — ont par exemple inspiré la trame de romans comme Papa Longues Jambes (Daddy Long Legs), de Jean Webster, en 1912 (adapté au cinéma avec Fred Astaire et Leslie Caron), dans lequel une jeune fille entretient une correspondance avec le mystérieux homme riche qui paie ses études, et dont elle n’a fait qu’entrapercevoir l’ombre — aux jambes interminables — au détour d’un couloir. Ou comme Les deux moitiés de l’amitié, le roman jeunesse de Susie Morgenstern : un garçon solitaire appelle un numéro pris au hasard dans l’annuaire et tombe sur une fille de son âge, juive alors que lui-même est arabe, et une amitié naît entre eux. Aujourd’hui, ce scénario — qui était aussi celui du film de Nora Ephron You’ve got mail, en 1998, avec Meg Ryan et Tom Hanks — est devenu banal : on entretient des relations virtuelles avec une foule de gens qu’on peut finir par rencontrer un jour... ou pas.

Mais ce n’est pas forcément trop grave, pourvu qu’on conserve par ailleurs assez de rapports directs avec des êtres humains en chair et en os. Ce qui est peut-être plus troublant, c’est que les relations s’hybrident. Avant, on cloisonnait : il y avait d’un côté les gens avec qui on était en interaction directe, physique, multilatérale — amis, famille, collègues, voisins... — et de l’autre ceux qu’on connaissait de loin, artistes, écrivains, peintres, acteurs, qui communiquaient de façon unilatérale avec la masse de leur public. Aujourd’hui, on peut à la fois voir ses amis de façon plus ou moins régulière et, entre deux rendez-vous, les lire sur leur blog, ou simplement sur leur compte Facebook, où ils s’adressent à une audience plus large. C’est une manière de rester en contact avec des proches que de toute façon, par la force des choses, on voit rarement, parce qu’on n’habite pas ou plus dans la même ville ou le même pays ; mais cela peut aussi créer des trous d’air étranges dans la relation, favoriser la paranoïa, les malentendus, les illusions, et laisser chacun enfermé dans son monde.

Dans une intervention au Théâtre du Rond-Point, en novembre dernier, Christian Salmon citait l’expression de Kafka parlant de la « crise mondiale de son âme ». Par « âme », il faut entendre « la possibilité humaine de faire et d’échanger des expériences ». A son époque déjà, Kafka estimait cette possibilité menacée. Il distinguait, résume Salmon, « deux sortes d’inventions techniques : celles qui permettent de rapprocher les hommes entre eux, d’établir des relations réelles, naturelles : le chemin de fer, l’auto, l’aéroplane ; et celles qui contribuent à rendre ces relations irréelles ou fantomatiques : la poste, le télégraphe, le téléphone, la télégraphie sans fil ». Alors Internet, on n’en parle même pas...

J’assume toujours ma vision enthousiaste d’Internet : il a modifié de façon spectaculaire les rapports de force dans la société, permis une éclosion d’expression fabuleuse. Ma génération ne serait nulle part sans Internet. En vingt ans, elle a déjà écrit une épopée. Je suis très consciente de la façon dont, loin de m’isoler, Internet a enrichi, très concrètement, ma vie réelle et relationnelle. Mais en même temps, je suis sensible à ces discours sur le trop-plein, la routine, le fantomatique. Est-ce que je serais en train de céder à un catastrophisme de Cassandre réac façon Finkielkraut ? A partir de quand le « fantomatique entre les hommes » cesse-t-il d’être, comme l’art, un bienfait, une forme de communication profonde et indispensable, complémentaire des autres, pour enfermer chacun dans une dérive solitaire et impuissante ? Est-ce que ce n’est pas aussi la vieille peur, la vieille réprobation sociale de l’imaginaire qui se manifeste dans les discours technophobes ? Entraînés dans des usages qui s’emparent de nous bien avant qu’on ait eu une chance de les penser, on peut seulement s’arrêter de temps en temps pour essayer de comprendre ce qu’on fout, au juste. Mais sans espérer apporter à cette question une réponse définitive.

Mona Chollet
Merci à Aurélia Aurita
pour l’expo Hiroshige,
et à Katia Berger, Constance Frei,
Magdalena Frei-Holzer et Franz-Josef Holzer,
dont la conversation toujours si agréable a nourri cet article...

P.-S. : une remarque de Joëlle Marelli (via Facebook) : « Sur les billets doux, les SMS, la communication instantanée, on a oublié l’usage “mondain” des télégrammes (les “petits bleus”) et des “pneumatiques”, notamment par Proust, qui écrit un mot à telle marquise pour lui dire qu’il a oublié ses gants chez elle puis avant de faire partir le message ajoute : “Ce message est sans objet puisque je viens de les retrouver.” »

(1) Francis Jauréguiberry, Les Branchés du portable. Sociologie des usages, PUF, 2003.

(2) « La passion des lettres », L’Express, 20 mars 2013.

(3) Mais bien sûr, en toute objectivité, le dernier est le meilleur.

 

Sur le(s) même(s) sujet(s) dans Périphéries :


Internet

* « La clé d’un espace commun »- De la gratuité, de Jean-Louis Sagot-Duvauroux - 25 avril 2006
* Patrimoine des savoirs ou marché de l’immatériel ?- Du bon usage de la piraterie, de Florent Latrive - 15 janvier 2005
* Modes de survie de l’Internet culturel- Une enquête réalisée pour le Secrétariat d’Etat à l’Economie solidaire - 7 février 2004
* Confessions d’un voleur, de Laurent Chemla- La face cachée de l’Internet - 8 mars 2002
* « Une boussole pour des combats dépareillés » - Pour la gratuité, de Jean-Louis Sagot-Duvauroux - mars 2002
* Aiguillage : l’Autre Site- 15 février 2002
* Houellebecq, l’as du patin à glace - Une abjuration de la création littéraire - 8 septembre 2001
* Jaloux des voisins- 22 juin 2001
* Ouverture d’uZine- Un espace pour discuter des (vrais) enjeux d’Internet - 15 septembre 2000
* L’année du blaireau - Nouvelle économie - avril 2000
* La Nouvelle Economie nous gave, II- Par Vassia Halbran - 10 mars 2000
* « Geste commercial »- La Nouvelle Economie nous gave - 9 février 2000
* La clef des champs- Le portail modeste et génial du web indépendant - 19 novembre 1999
* Refuser la fuite en avant - L’industrie de la consolation, de Bertrand Leclair - décembre 1998

31/03/2013

JL Millet - Ses vidéos - Art et questionnements

Toutes les vidéos sont visibles ici : http://www.zen-evasion.com/video.htm

 

JL Millet série noire IV.jpg

Jlmi Série Noire IV -2005

 

"Depuis les années '90, la vidéo est un mode d'expression plastique au même titre que la peinture ou le sculpture.

 

En peinture, la brièveté du geste est rendue possible par l'emploi de l'encre. En photo, on isole aisément un instant par essence fugitif. L'image obtenue, dans sa fixité, autorise la relecture et l'approfondissement.

 

La vidéo permet de donner corps à cette quête par la succession rapide de séquences en apparence dissociées. Il y a là une réelle métabolisation du sujet, puis dissolution du jugement par à priori et retour à la nature brute, initiale, spontanée.

 

C'est cette approche qui m'ouvre une nouvelle voie de travail.

 

Un premier brouillon, "Ici réside un ailleurs", m'a montré les possibilités de l'outil par le panachage de séquences tournées ou détournées de films ou d'images d'actualité. Un travail plus formel' "des Mains et des Têtes" a été composé d'images fixes tirées de mon travail en peinture associé aux bronzes de Louise Bourgeois visibles aux Tuileries au niveau du Jeu de Paumes.

 

Dans "Autodidaxie", j'essaie d'exprimer concrètement les apports extérieurs, conscients ou non, de la culture occidentale qui ont induit mon travail en peinture ouvert sur la culture asiatique.

 

 

Images en sont le plus souvent insoutenables dans "Horrific Zapping" - dont les prémices se trouvent dans les vers libres de "Ainsi va le monde" et dans la toile "Sabra & Chatila" - je montre, jusqu'à l'absurde et la nausée, la cruauté de l'animal autoproclamé homme ...

 

 

Pour se laver les yeux, sur un argument de Man Ray, j'ai assemblé des "Traces", dessins réalisés à l'ordinateur en 2004, en un "Cinépoème".

 

 

Vidéo suivante : "Zulu Love Letter". Une lettre d'amour zoulou est un assemblage hétéroclite de petites choses de récupération, principalement des capsules de soda, organisées en un motif décoratif à "tiroirs" dans lesquels la ou le destinataire trouvera mots et preuves d'amour... Les séquences que j'ai associées parlent d'amours adultes et renferment donc des images de nus sans que cela aille au delà de ce que l'on voit communément sur nos écrans de télévision.

 

 

Approche plus fantasmatique, " Hypnagogic Fantasies ", travail sur la période, plus ou moins brève, précédant le sommeil durant laquelle le conscient et l'inconscient s'enlacent, joute lascive qui s'achève avec l'endormissement total.

 

 

Le détournement de photos assisté par ordinateur est la base de "Cinépoème 2". Comme source, des sites web. Comme outil, un logiciel courant. Restait la musique sur laquelle je n'ai pas su trancher. Cinq versions existent donc. Cinq émotions très différentes. Pour le définitif provisoire, j'ai retenu la version jazz avec le vibraphone du Modern Jazz Quartet sur un thème de JS Bach Tears from the Children. Un régal. Il existe deux versions classiques : Pergolèse, le Stabat Mater et Francis Poulenc, le Salve Regina; une version avec la voix planante de Hope Sandoval et une version musique du monde avec les percussions de Lou Harrison.

(...) 

 

Second opus d'autodidaxie : "Autodidaxie 2", toutes les séquences ont été faites avec mon appareil photo numérique Sony DSC 3 en mode vidéo... "

Jlmi

13/03/2013

Le singe ne se laisse pas acheter par les Hommes qu'il juge égoïstes

Par Delphine Bossy, Futura-Sciences
 

Le capucin à houppe noire n'est pas dupe. S’il juge qu’une personne est égoïste, il n’acceptera pas de traitement de faveur de sa part. Il est capable de rejeter de la nourriture offerte par une personne qu’il aurait vue refuser d’aider quelqu’un d’autre.

Les singes refuseraient-ils l’égoïsme ? Les capucins sont de petits singes d’Amérique. La plupart des espèces du genre Cebus sont réputées pour être instinctivement sociables et coopératives. Elles sont aussi connues pour leur intelligence. Le capucin à houppe noire par exemple (Cebus apella) frappe des noix contre une branche pour les casser et utilise des outils pour râper l’écorce des arbres

Comme l’Homme, ce capucin semble être capable de se faire une idée sur une personne juste en la regardant. S’il peut choisir, il préférera un traitement de faveur de la part de quelqu'un qui est capable d’aider et de partager plutôt que d’un égoïste. C’est en tout cas ce que suggère une étude dirigée par le chercheur James Anderson de l’université de Stirling (Royaume-Uni), dont les résultats ont été publiés dans Nature Communications.

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Le capucin à houppe noire vit en Amérique du Sud et principalement au Brésil. Il est connu pour son caractère sociable et son intelligence. Il utilise quotidiennement des outils pour casser les coques des noix. Il jette, secoue et transporte divers aliments et objets. © José Reynaldo da Fonseca, cc by sa 3.0

Le capucin à houppe noire a été choisi pour cette étude précisément pour ses qualités sociales. Dans ce travail, sept singes ont été testés dans différents scénarios. Ils ont observé deux personnes interagir. Chacune détenait un bocal fermé qui contenait un jouet. Pour ouvrir son bocal, l’une des deux personnes demandait de l’aide à l’autre, qui pouvait accepter ou refuser. Ensuite, les deux personnes ont offert de la nourriture aux petits singes. Les capucins ne pouvaient choisir qu’une personne.

Les capucins préfèrent les personnes serviables

Lorsque l'aide a été accordée, les capucins ont choisi indifféremment la personne qui a demandé de l'aide ou celle qui a fourni l'aide. Mais lorsque l'aide a été refusée, les sept singes avaient plutôt tendance à accepter la nourriture de la part de la personne qui avait demandé de l’aide. Au cours de l’expérience, certaines personnes ont montré qu’elles n’aidaient pas l’autre parce qu’elles étaient déjà bien occupées avec leur bocal. Dans ce cas, les capucins n’ont pas montré de parti pris pour les personnes qui n’ont pas aidé.

C’est donc clairement lorsque l’Homme refuse délibérément de proposer son aide que le singe ne s’approche pas de lui. Peut-on pour autant assimiler ce choix à une forme de rejet de l’égoïsme ? Le refus d’aider peut être perçu par l’animal comme un signe de dangerosité. Il se préserve en choisissant la personne non dangereuse.

Le capucin montre-t-il une forme d’inférence sociale ?

Sarah Brosnan, éthologue à la Georgia State University (Atlanta, États-Unis), explique que ce type d'études a déjà été réalisé avec les grands singes. Ces résultats suggèrent donc que l'inférence sociale peut se produire chez les animaux dont la taille du cerveau et les capacités cognitives sont inférieures. L’inférence est l’un des points clés de la notion de logique. Elle traduit la capacité à identifier une chose sans la percevoir directement : comprendre qu’il y a le feu simplement en observant de la fumée, par exemple. Ou, dans cette étude, comprendre la méchanceté de quelqu’un uniquement par son geste.

L’étude a besoin d’être approfondie. Les singes auraient aussi bien pu voir les Hommes qui n’ont pas aidé comme des personnes plus faibles. S’ils sont intéressés par les objets qui sont à l’intérieur des bocaux, ils peuvent simplement préférer les personnes qui aident à les obtenir. C’est une question d’intérêt. Il serait donc nécessaire d’effectuer ces tests sur d’autres animaux sociables et non sociables pour interpréter ce choix.

11/03/2013

Liu Yi, peintre chinois des immolés tibétains

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Dans l'atelier de Liu Yi, de nombreux sujets tabous en Chine, des victimes du mouvement de la place Tiananmen aux immolés tibétains, attirent l'oeil parmi d'épaisses peintures à l'huile en noir et blanc.
Liu, 50 ans, fait partie des rares chinois "Hans", l'ethnie ultra-majoritaire dans le pays, à soutenir la cause des Tibétains, provoquant l'arrivée des autorités sur son lieu de création.                                       


Plus de 100 Tibétains se sont immolés par le feu ou ont tenté de le faire depuis 2009, symbole du désespoir de cette minorité face à la domination de Pékin. La crainte est telle de nouvelles immolations qu'à Pékin, les policiers qui surveillent la place Tian Anmen pour la réunion annuelle du sont équipées d'extincteurs.
La plupart des Hans acceptent le discours officiel, qui affirme oeuvrer pour le développement du Tibet tout en combattant les immolations.
Les Tibétains "demandent simplement la liberté de religion et le respect", affirme Liu, dans son atelier aux murs de briques, installé dans une communauté d'artistes à l'est de Pékin.
"Mon premier objectif est de commémorer leurs actes", explique-t-il. "Et aussi de faire connaître la vérité sur le Tibet à travers ces peintures, parce que, en Chine surtout, personne ne sait ce qui se passe là-bas".
Liu peint ses portraits à partir de photos fournies par une écrivaine tibétaine, mais il traite ses 40 sujets comme s'il les connaissait personnellement, insistant sur certaines histoires: le premier immolé, le plus jeune, la première femme...
"Celle-ci était mère de quatre enfants, celui-là avait un bébé de un an", détaille-t-il, se faufilant entre les visages sombres aux traits puissants qui, sans recours à la couleur, tracent des expressions paisibles mais des regards intrépides.
Depuis 15 ans, de plus en plus de Chinois Hans se convertissent au bouddhisme tibétain -- comme c'est le cas de Liu -- sans pour autant prendre fait et cause pour leur combat politique, explique Robbie Barnett, expert de la question tibétaine à l'université de Columbia à New-York.
Conversion au bouddhisme tibétain
Certains artistes ont trouvé l'inspiration dans les superbes paysages montagneux du Tibet. Quelques passionnés sont allés à la rencontre du , le chef spirituel tibétain en exil en Inde, qualifié par Pékin de "séparatiste" et accusé d'encourager les immolations.
"C'est très risqué et inhabituel pour un artiste han comme Liu d'entreprendre un tel projet publiquement. A ma connaissance, il n'y a pas de précédent", relève M. Barnett.
La Chine a massivement investi dans les régions tibétaines pour améliorer les conditions de vie mais contrôle étroitement les monastères, bannit les images du dalaï lama et condamne lourdement toute personne déclarée coupable d'encourager une immolation.
Pour les opposants, le développement au Tibet a surtout bénéficié aux Hans, au détriment de la culture et de la religion tibétaines.
Selon les statistiques officielles, le nombre de Hans dans la région autonome du Tibet a augmenté de 56% entre 2000 et 2010, et de 92% la décennie précédente, tandis que celui des Tibétains a progressé de seulement 12% et 15% pour les mêmes périodes.
En incluant les zones tibétaines d'autres provinces chinoises (Sichuan, Qinghai, Gansu et Yunnan), les Tibétains se retrouvent aujourd'hui en minorité sur leurs terres, selon le en exil à Dharamsala.
Liu espère éveiller les consciences avec sa dernière série de portraits, même s'il sait qu'il n'a aucune chance d'être exposé en Chine, pas plus que sa série consacrée à des opposants connus, dont les victimes de la répression de la place Tiananmen en 1989 ou ceux qui incarnent pour lui la "conscience de la Chine", tel le prix de Nobel de la paix Liu Xiaobo, emprisonné depuis 2010.
Liu Yi s'est épris du Tibet dès son premier voyage dans les années 1980, où il a adopté un chien et peint le dalaï lama.
Ses portraits d'immolés lui ont valu trois visites en dix jours des autorités, qui ont tenté de confisquer les oeuvres.
"A moins qu'ils ne me mettent en prison, tant que je suis libre, je continuerai à peindre", assure-t-il. "Je n'ai pas peur. Qui suis-je, comparé aux immolés?"

 

28/02/2013

Les Quanta, l'invisible et l'au-delà, Emmanuel Ransford


Emmanuel.Ransford est épistémologue, chercheur indépendant spécialiste de physique quantique, et conférencier. Il est l'auteur de la nouvelle physique de l'esprit et co-auteur de Les Quanta, l'invisible et l'au-delà de parution prochaine.

 

Emmanuel Ransford
Après des études scientifiques qui lui donnent un diplôme d’ingénieur et de statisticien, E.R. se tourne vers la physique quantique. Il se passionne pour les questions épistémologiques qu’elle soulève.

Il s’interroge en parallèle sur l’énigme de la psyché et sur celle du cerveau conscient, qu’il tente de reformuler selon une perspective qui n’est pas celle du matérialisme ni celle du spiritualisme. (Pour lui, la psyché humaine n’a pas une matérielle ni une origine surnaturelle.)
Cette double recherche le conduit à proposer la synthèse de l’holomatière (qu’il a aussi nommée la psychomatière), qui rajoute une dimension invisible – mais aux effets parfaitement repérables – à la matière ordinaire. Nous la croyons inerte et passive alors qu’elle ne l’est peut-être pas.
A partir de l’idée d’holomatière, il réinterprète les propriétés très étranges des quanta. Il parvient même à proposer une nouvelle façon, potentiellement testable, d’aborder et de comprendre le cerveau conscient.

Il est l’auteur de plusieurs articles, la plupart publiés en langue anglaise. En 2001 il contribue à l’ouvrage collectif : "Science and the Primacy of Consciousness" (Noetic Press, USA).

En 2007 paraît son premier livre en français, intitulé "La Nouvelle Physique de l’Esprit" (éd. Le Temps Présent). Il est suivi en 2009 par un livre écrit en collaboration avec Tom Atham, qui en est l’auteur principal. Il s’intitule "Les Racines Physiques de l’Esprit" (éd. Quintessence).
Son dernier ouvrage, intitulé "Les Quanta, l’Invisible et l’Au-delà", vient de paraître aux éditions Guy Trédaniel.

 

Conférences

• à venir : mercredi 20 mars 2013 - L'au-delà et la physique quantique à l'Observatoire du Réel
 

 

Livres

• Science and the Primacy of Consciousness (Noetic Press, USA)

• La Nouvelle Physique de l’Esprit, éditions Le Temps Présent, 2007

• Les Racines Physiques de l’Esprit, éditions Quintessence, 2009

• Les Quanta, l’Invisible et l’Au-delà, éditions Guy Trédaniel, 2012

25/02/2013

Simplicité volontaire

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19/02/2013

Hommage à Anne Sexton (1928-1974)

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(c) peinture de Joanna Rusinek

 

The Ballad of the Lonely Masturbator

et sa traduction, à lire ici :

http://jlmi22.hautetfort.com/archive/2013/02/11/hommage-a...

17/02/2013

Une petite claque à notre grand génie

Des scientifiques japonais ont démontré qu'un chimpanzé pouvait mémoriser en une demi-seconde la position précise et l'ordre correct de neuf numéros sur un écran d'ordinateur, révèle le journal The Independant.

Une série de petits carrés blancs numérotés de 1 à 9 apparaissent au hasard sur un écran. Devant l'écran, un singe va mettre une demi-seconde pour mémoriser la position précise de chaque carré et l'ordre de la séquence. Avec une incroyable vélocité, il pointe son doigt et efface un à un les carrés sans une seule erreur !

Une prouesse, si l'on en croit ces scientifiques japonais, car l'humain serait incapable de mémoriser aussi vite une séquence de chiffres dans les mêmes conditions, le singe ayant une mémoire de travail plus rapide.

Les seuls humains pouvant rivaliser sont atteints d'une forme d'autisme, le syndrome d'Asperger, toujours selon le journal.

09/02/2013

Ils vendent tout

 

Ils vendent les coquillages de bord de mer
Comme ils ont vendu l’eau,
Prêts à troquer leurs mères
Ces salauds...
Ils vendent le sable fin, les algues
Et ils conviennent
Pour s’enrichir de brev’ter
Les couleurs et l’oxygène.
Ils vendent aux plus offrants
Mais n’offrent rien, jamais d’cadeaux,
Sauf pour un abonnement de bienvenu
A tous leurs idéaux.
Ils vendent les hymens de
Jeunes vierges sur la planète
Et les mains ouvrières
De jeunes enfants analphabètes.
Ils vendent tous les combats d’hier,
Les acquis des grands-pères ;
Ils vendent ce qu’ils rejettent
Et tous leurs déchets nucléaires.
Ils vendent des dictatures
Et de l’or noir dans les assiettes,
Des mètres cubes d’air pur
Ils ont décidé qu’ça s’achète !
Ils vendent même le sacré,
Le visage des guérilléros ;
Les slogans des révolutions
En période de promo.
Ils vendent les symphonies
Aux opérateurs de mobile ;
Aux pays du Tiers-Monde
Ils vendent leurs vieilles automobiles.
Ils vendent tous les progrès passés
Et leurs vieilles maladies,
Ne dévoilent jamais les secrets
De leurs vieilles pharmacies.
Ils vendent la solidarité,
Les pièces jaunes des grands-mères ;
Préfèrent la charité,
Ont inventé l’humanitaire.
Ils vendent coûte que coûte
Tout c’qui leur coûte et même l’écoute ;
Vendent tous les engagements
Même les mots, leur langage ment .
 
Ils vendent à coup d’publicité
Des espoirs sans lend’mains
Au public des cités
A qui ils ont lié les mains.
Ils vendent la peau de l’homme
Et bien avant de l’avoir tué ;
L’ours, le loup et l’orme
Sont des espèces du temps passé.
Ils vendent des marées noires
Et sacrifient les littoraux ;
Dans l’arène des gueulards
Ils vendent l’agonie des taureaux.
Ils vendent de vieilles constitutions
Aussi malades que leurs systèmes ;
Ils condamnent la contestation
Dans des tribunaux qu’ils enchaînent.
Ils vendent depuis toujours
Le travail des travailleurs ;
Ont vendu nos vieux jours,
Des mouroirs comme dernière demeure.
 
Ils vendent l’idée laïque
En dépeçant l’universel ;
Les clergés revanchards
Sont toujours une bonne clientèle.
Ils ont vendu la signification
Du mot public,
Celui qui s’oppose aux lois de l’argent
Est archaïque.
Ils vendent aux oreilles innocentes
Que des chansons sans âmes
Pourvu qu’elles soient divertissantes,
Ils endorment le quidam.
Ils vendent au grattage, au tirage
A la française des bœufs ;
On se gratte, ils nous tirent,
Jamais d’affaire c’est pas du jeu.
Ils vendent aux yeux bleus des mineurs
Des poussières sans charbon ;
Ils percent au fond des cœurs
Une existence sans fond.
Ils vendent aux sans papiers
Des grillages sans les griots ;
Les marchands d’barbelés
Déménagent tous les idéaux.
 
Ils vendent le devenir
Des grands primates en liberté ;
Les forêts séculaires
Y’a plus d’endroits où se cacher.
Ils vendent des armes
A des culs-de-jatte fanatisés ;
Ils vendent des larmes
A des orphelinats entiers.
Ils vendent aux élites corrompues
Le pouvoir d’informer,
Des bouquets satellites
Remplis d’épines empoisonnées.
Ils vendent l’esprit critique
A quelques philosophes mondains,
Les chiens de garde de la pensée unique
Aboient pour rien.
Ils vendent des étiquettes
Cousues à même la peau des gens ;
Leurs marques sont des tatouages
Que l’on refuse aux indigents.
Ils vendent à nos consciences
Un nouveau vocabulaire,
Ne disent plus « indigènes »
Mais parlent de main d’œuvre moins chère.
Ils vendent des rallyes arrogants,
Font l’pari du Dakar ;
A chaque édition
Des enfants écrasés par un char.
Ils vendent leurs sommets capitaux
En face des bidonvilles, c’est chic !
Transforment une capitale
Le temps d’un enjeu olympique.
Ils vendent, ils crient
« Soldons ! », « Cédons ! »,
Qu’importe les périodes,
Ils ont même vendu les saisons !
Ont vendu les organismes,
Les cellules et les planctons...
...
Ils ont même vendu les saisons !
 
 
Thomas Petiot
 
 
 
(Merci à Tom !)

22/01/2013

Le chamanisme avec Corine Sombrun (sur France Culture)

Corine Sombrun, que je suis livre après livre depuis pas mal d'années maintenant, est aujourd'hui, après avoir été pianiste-compositeur puis reporterécrivaine-voyageuse, chamane. Elle a suivit l’enseignement des techniques de transe en Mongolie et collaborée avec des scientifiques. Elle est à l'origine du premier protocole de recherche sur la transe chamanique mongole étudiée par les neurosciences et vient de publier Les esprits de la Steppe chez Albin Michel.

 

Bibliographie :

Journal d’une apprentie chamane  Éd. Albin Michel / 2002
Mon initiation chez les chamanes Éd. Albin Michel / 2004
Dix centimètres, loi Carrez Éd. Belfond / 2004
Les tribulations d’une chamane à Paris Éd. Albin Michel / 2007
Sur les pas de Geronimo Éd. Albin Michel / 2008
Les esprits de la steppe Éd. Albin Michel / 2012

15/01/2013

AFRIPHOTOS - Marrons. Les esclaves fugitifs par Patrice Monteiro (Bénin)

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Marrons » est un terme emprunté à l’espagnol « cimarron », qui signifie « vivant sur les cîmes ».

Il provient d’un mot « arawak » définissant les animaux domestiques retournés à l’état sauvage, et par extension, les esclaves fugitifs. Les « Marrons » étaient une menace terrible pour le système colonial, ils étaient susceptibles de provoquer une guerre civile à tout moment. Les esclaves fugitifs étaient surveillés sans relâche et les peines infligées au moindre écart étaient particulièrement sévères, elles devaient marquer les esprits.

Les esclaves qui tentaient de s’enfuir subissaient les punitions décrites par la loi puis on leur posait un collier à longues tiges, qui avait pour fonction de s’accrocher dans les broussailles et gêner toute fuite. Dans le même esprit, ils existaient des carcans à clochettes, permettant d’entendre tous les déplacements de l’esclave.

L’esclave qui osait parler un peu trop à son maître subissait le châtiment du masque de fer. De même, pendant la récolte de la canne à sucre, on mettait des masques en fer aux esclaves assoiffés et affamés afin de les empêcher de goûter ou de manger de la canne.

Au cours de son enfance au Bénin, Fabrice Monteiro est marqué par la bande déssinée « Les Passagers du vent » de François Bourgeon. Une partie de l’aventure se déroule à Ouidah, au Bénin, village d’origine de sa famille paternelle. Il est fasciné par le réalisme des images, il reconnait les lieux déssinés, les visages lui sont familiers. C’est dans ces pages qu’il découvre ces colliers étranges portés par certains esclaves pour les empêcher de s’enfuir.
Son père lui raconte l’histoire de sa famille et la raison pour laquelle il porte un nom de famille portugais comme tant d’autres béninois. Son ancêtre s’appelait Ayedabo Adagoun Odo, il était originaire du Nigéria. Il est mis en esclavage par les portugais et envoyé au Brésil. Il est revenu au Bénin des années plus tard, affranchi sous le nom de Pedro Monteiro.
Sensible à la question de la traite négrière et du rôle joué par ce petit village de la côte béninoise, Fabrice décide d’explorer le sujet photographiquement afin de contribuer à la mémoire de l’esclavage.

A partir du CODE NOIR*, de lithographies et des rares photos originales d’esclaves, Fabrice reconstitue les plans de cinq modèles
d’entraves utilisées pour punir ou dissuader les esclaves de toute tentative de fuite. C’est à partir de ces plans que deux jeunes forgerons
béninois reproduisent les entraves mises en scène dans cette série photographique.
Afin d’obtenir un effet de clair obscur, il choisit une approche moderne du traitement de la lumière. Il conçoit une boîte noire, un studio
mobile permettant d’aller à la rencontre de ses modèles dans les ruelles de Ouidah.

* Le CODE NOIR a été élaboré par le ministre français Jean-Baptiste Colbert (1616 - 1683) et promulgué en mars 1685 par
Louis XIV.

Fabrice Monteiro
http://www.afriphoto.com/expositions_gallery.php?id=1207

 

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Qu'est ce qu'AFRIPHOTOS ?

Projet photographique d’Africultures, Afriphoto promeut depuis 2001 les photographes d’origine africaine en leur donnant un espace de visibilité et d’expression.

À travers diverses activités éditoriales (notamment la publication d'ouvrages monographiques et la production régulière d'articles, en liaison avec la base de données d'Africultures), la mise en place d'événements et projets, ainsi que par ce site Internet, notre objectif est de donner à voir une photographie actuelle ou plus ancienne, révélatrice de visions personnelles sur un continent trop souvent vu sous un seul angle.

Notre mission est ainsi double : d'une part, nous voulons contribuer de manière significative au travail de déconstruction des images négatives liées au continent africain et ancrées dans l'imaginaire occidental, d'autre part, notre travail vise à promouvoir les photographes qui, avec sensibilité et regard aiguisé, sont en mesure de nous offrir une alternative de qualité aux visions misérabilistes de l'Afrique que les médias nous ressassent à profusion. C'est dans cette même optique que nous accueillons également ici, avec enthousiasme, les travaux au long cours des photographes occidentaux dont le travail se situe ou porte vers l'Afrique.

Afriphoto agit ainsi, également, en tant qu’agence de photographes.
Nous essayons, autant que possible, de participer aux dynamiques susceptibles de donner aux photographes associés les moyens de se dégager des contraintes quotidiennes pour se consacrer plus sereinement à leurs travaux personnels.

Afin de remplir pleinement notre rôle de passeurs, de participer activement à la création d'une dynamique de réseau et et à la professionnalisation de photographes vivant parfois dans des pays et contextes très éloignés et différents les uns les autres, nous avons mis en place un forum, qui se veut un lieu d'échange ouvert pour réfléchir ensemble aux enjeux actuels de la photographie sur le continent.

Enfin, si depuis quelques années la "photographie africaine" semble avoir le vent en poupe, nombreuses sont toutefois les difficultés auxquelles certains photographes africains doivent aujourd'hui faire face sur place.
À travers nos articles, nous essayons donc d'explorer ce qui n'est pas forcément visible lorsque l'on visite les grandes expositions et biennales internationales où ces photographies sont exposées.
Les interviews, forme que nous privilégions dans la mesure où la parole des principaux intéressés est précieusement recueillie, nous permettent ainsi d'approcher ces dynamiques de manière plus large et de mieux comprendre les multiples facettes de cette photographie dont on entend de plus en plus parler aujourd'hui. Photographes reconnus, de studio, ou "free-lance" ont ainsi tour à tour la parole, en essayant de suivre le fil de l'actualité.

Pour terminer cette présentation, voici un clin d'oeil aux travaux de l’historienne de la photographie ouest-africaine, Érika Nimis, notamment à travers les propos tenus au cours de la conférence Où va la photographie africaine, donnée à la Maison Européenne de la Photographie le 7 juin 2006 :

« Comment écrire une histoire qui concilie deux photographies : l'une, produit d'exportation, répondant aux critères du marché de l'art, et l'autre, occultée, car non conforme aux discours occidentaux sur l'Afrique ? »

© Afriphoto.
 
http://www.afriphoto.com/accueil.php

05/01/2013

DEPUIS UN AN, LE CHAT DÉPOSE DES CADEAUX SUR LA TOMBE DE SON MAÎTRE

 

Insolite : Depuis un an, le chat dépose des cadeaux sur la tombe de son maître

 

On connaît les histoires de chiens fidèles à leur maître après leur mort. Depuis un an, c'est un chat, en Italie, qui se rend quotidiennement sur la tombe de son maître. Avec un cadeau.

L'histoire serait incroyable s'il n'y avait pas autant de témoins. Mais les habitants de Montagnana, un hameau de la commune de Marliana en Toscane, ne parlent plus que de Toldo. Et la presse italienne vient de leur emboîter le pas...

Toldo est un chat gris et blanc, âgé de 3 ans. Il a été recueilli, chaton, par un habitant de Montagnana, qui s'appelait Renzo Iozzelli. Celui-ci est décédé en septembre 2011, à 71 ans.

Présent à l'enterrement

Le jour de l'enterrement, Ada Iozzelli, la veuve de Renzo, a remarqué que le chat accompagnait la procession jusqu'au cimetière.

Le lendemain, elle a trouvé sur la tombe un rameau d'acacia... Elle a dit à sa fille qu'elle était persuadée que c'était un hommage de Toldo à son maître, celle-ci ne l'a pas prise au sérieux.

Mais les jours suivants, plusieurs habitants du village ont croisé Toldo au cimetière. Depuis, on le voit quotidiennement se rendre sur la sépulture de son maître.

Petits cadeaux

Plus surprenant encore, Toldo dépose parfois sur la tombe des petits cadeaux ! Des trouvailles de chat : il y a parfois des brindilles, un petit tas de feuilles, un mouchoir en papier, ou un gobelet en plastique...

Ada Iozzelli raconte que son mari était très affectueux avec Toldo. Le chat lui en est visiblement toujours reconnaissant.

 

Un article de ouest-france.fr, relayé par SOS-planete

03/01/2013

Voeux de Survival International

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25/12/2012

Pensez-y aussi

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...de froid, de faim, de bombes ou de chagrin... noël ce n'est pas une évidence pour tout le monde.

Juste ne pas l'oublier.

03/12/2012

Peut-on changer ce monde ?

Allons-nous laisser mourir ce monde sans rien tenter ? L’urgence ne peut plus être ignorée. Et une mutation intérieure est possible, pour préparer et permettre les changements possibles pour l’extérieur. C’est ce qu’affirment les personnalités qui ont signé ce texte d’appel, au premier rang desquels le maître zen Thich Nhat Hanh.

© P0RG
Nous sommes un certain nombre à penser que les valeurs fondatrices de nos civilisations sont cycliquement remises en cause.
Nous savons que les idéaux qui accompagnent les grandes épopées humaines ont besoin de se renouveler pour s’adapter à l’esprit des Temps et aux besoins des générations qui se succèdent sur la Terre.
L’humanité est-elle prête à accueillir une transformation de la conscience aussi radicale et profonde que celle qui lui permettrait de s’ouvrir à la splendeur du monde, à la manière d’un bourgeon qui explose au printemps pour faire apparaître la lumière de la fleur, prémisse de l’accomplissement du fruit ?
« ...L’éventualité d’une telle transformation constitue l’essentiel du message des enseignements des grands sages de l’histoire humaine :
Bouddha, Jésus et d’autres figures emblématiques sont les premières fleurs de l’humanité.
Ce sont les précurseurs des fleurs précoces, rares et précieuses et leurs messages respectifs ont été largement incompris et souvent déformés, car une floraison généralisée n’était pas encore possible à leur époque… »
(Eckhart Tolle)

L’humanité est-elle prête aujourd’hui, plus qu’elle ne l’était hier, à ce formidable changement intérieur qui prédispose à tous les changements possibles pour l’extérieur ?
Nous sommes une « grande minorité » à le croire et à le démontrer.
Toutes les résistances populaires des indignés face à l’imposture de la sphère financière, les innovations sociales en cours et les manifestations de la société civile pour instituer davantage de justice, davantage de solidarité, davantage de partage et de fraternité ne sont-elles pas les signes avant-coureurs de la mutation attendue ?
Toutes les initiatives citoyennes : « Resto du coeur », jardins de cocagne, économie solidaire, commerce équitable, AMAP (association pour le maintien des agricultures paysannes), Terres de Lien, Médecins sans frontières et combien d’autres mouvements bénévoles de protection de l’environnement et d’actions caritatives, n’en sont-elles pas les manifestations exemplaires ?
Elles suscitent l’adhésion spontanée et désintéressée de tant de jeunes aujourd’hui, parce qu’il sont plus préoccupés d’entraide, de solidarité et de coopération que de carrières, de compétitions ou de profits stériles…
Tous ces indicateurs du changement sont sous nos yeux, aussi incontournables et irrépressibles que la métamorphose de la chenille en papillon.
Le best-seller du Vénérable Thich Nhat Hanh, « Ce monde est tout ce que nous avons » est une invitation à relier l’écologie et la spiritualité, comme deux notions indissociables de l’énergie du "Sacré".
Nous devons changer ce monde : nous changer nous-mêmes pour le rendre plus juste, plus sûr et plus durable pour les multiples espèces qui en ont besoin avec nous... et après nous, et surtout ne pas laisser faire l'insupportable discrimination économique et sociale qui dégrade la personne humaine et qui compromet toute possibilité de vivre en paix sur cette terre.

N’est-ce pas le plus beau et le plus grand des enjeux que nous pouvons relayer sur la terre entière avec les modes de communications modernes dont nous disposons afin de susciter cet immense élan vers un idéal commun :v Protéger la vie et les ressources sur cette belle et unique planète en commençant par célébrer en nous les valeurs sacrées de la spiritualité et de la pleine conscience.
C’est le programme du Rendez-vous des 15 et 16 septembre prochain à l’Espace de la Grande Arche à Paris La Défense autour de l’engagement « pour une éthique globale », en faveur des principes d’équité et de non-violence.
N’éludons pas nos responsabilités individuelles et collectives dans la situation de ce monde en surgissement.
Apprenons à vivre ensemble et à incarner ce message de paix pour entrer dans la liberté.


Co-signataires :
- Docteur Christophe André , médecin psychiatre à l’hôpital Sainte-Anne, écrivain
- Philippe Desbrosses Agriculteur – Docteur en Sciences de l’Environnement, co-fondateur d’Intelligence Verte et des principaux mouvements d’Agriculture Biologique.
- Marc Luyckx Ghisi , théologien, mathématicien, philosophe, ancien conseiller spécial à la présidence de la Commission Européenne.
- Edgar Morin, sociologue, philosophe, auteur de nombreux ouvrages de référence.
- Docteur Hanh Nguyen Ngoc, médecin acupuncteur, enseignante du Dharma, présidente de l’association « Pour les Enfants du Vietnam ».
- Jean-Marie Pelt , botaniste, agrégé de pharmacie, écrivain, homme de radio.
- Patrick Viveret, philosophe, magistrat honoraire à la Cour des Comptes de Paris.
- Pierre Rabhi, agriculteur, philosophe, essayiste auteur de « la sobriété heureuse ».
 

01/11/2012

Sur les traces de la déesse et Le Temps des bûchers

Ce long métrage documentaire, qui donne la parole à des féministes érudites et militantes, est aussi un hommage aux géniteurs des civilisations occidentales pour qui le culte de la déesse semble avoir été au centre du système de valeurs modelant leur vie quotidienne. Par-delà 35 000 ans d'histoire, ces valeurs ont aujourd'hui une résonance particulière, car elles sont perçues par plusieurs comme seules garantes de notre survivance collective. Le film Le temps des bûchers constitue le deuxième volet de cette réflexion sur la spiritualité des femmes.