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11/11/2008

Brennilis : la centrale qui ne voulait pas s'éteindre

Foule et indignation après le film sur Brennilis

Le documentaire de Brigitte Chevet sur « la centrale qui ne voulait pas s'éteindre » soulève questions et indignation à Pont-de-Buis.

« Brennilis, la centrale qui ne voulait pas s'éteindre », le film de la réalisatrice Brigitte Chevet, a été projeté, vendredi soir, à la médiathèque de Pont-de-Buis dans le cadre du mois du Documentaire. Il a secoué le nombreux public de cette soirée très instructive. Le long-métrage, excellent et passionnant, met deux acteurs face à face, sans prendre partie : EDF, l'exploitant et démanteleur de la centrale, et le collectif Sortir du nucléaire.

Il pointe aussi du doigt de gros points noirs, comme la pollution et la sécurité du personnel. Posant au final cette question stupéfiante : qui de l'Ankou ou de l'Atome va gagner la partie à Brennilis ? L'épineux sujet a été évoqué en présence de la réalisatrice et d'un témoin privilégié en la personne de Michel Marzin, ancien adjoint du directeur du site.

Son témoignage, direct et sincère, évoque le solide mensonge qui a entouré cette immersion dans l'univers du nucléaire. « À l'époque, avoue-t-il avec émotion, nous étions fiers d'avoir participé à cette construction de la centrale. Avec le recul, je témoigne mais je ne pourrais pas revenir en arrière. Les moyens de sécurité n'ont pas été à la hauteur, le risque sous évalué...  Depuis 1982, 50 % des gens ayant travaillé au contact de l'eau lourde sont décédés à moins de 65 ans. C'est terrible, mais pas reconnu. Les employés contaminés des centrales étaient de la viande à neutron. »

Au long du débat, terrible mais lucide, plane le danger, opaque et invisible, de l'atome. Tout comme « l'énorme mensonge » et la « loi du silence ». Sans oublier les fuites, radioactives ou financières.

Un débat qui en appelle d'autres...

Au fil de cette soirée très animée, de nombreuses interventions ont concerné les dangers encore trop méconnus de l'énergie nucléaire, l'incapacité à maîtriser les rejets et le déficit cruel d'informations, notamment de la part des autorités exploitantes.

Brigitte Chevet, réalisatrice du film, reconnaît cependant avoir obtenu facilement l'autorisation de tourner et ne pas avoir subi de pression a posteriori. Michel Marzin, ancien directeur adjoint pense qu'il est plus sage d'attendre un siècle avant de déconstruire le réacteur, le cobalt, noyau de Brennilis, mettant trente ans à se désactiver de moitié.

« Par ailleurs, martèle-t-il, l'enquête publique, suite à l'arrêt de la déconstruction après de nombreuses négligences, sera un bon tremplin pour demander des vérités. Comme sur la pollution du lac au tritium, lors des rejets d'eau de refroidissement, qui ont contaminé les brochets. De plus, tout le bassin versant est touché, ainsi que des nappes phréatiques. C'est terrible, poursuit-il, mais j'ai vu une femme tripoter ces algues à mains nues, lors de prélèvements. Voire même mon responsable prendre des charges par imprudence. ».

Cet autre témoin, ancien militaire présent à Mururoa, témoigne : « C'est épouvantable, nous n'étions pas protégés, ni informés. Nous allions en short ramasser les déchets. Une dose, même très infime, ingérée suffit à condamner l'homme. Effrayant ! »

Le rapport de force, la confiance en la recherche qu'il faut financer, les énergies plus propres, l'omerta sur les mesures effectuées et le financement des laboratoires ont également été évoqués lors du débat qui en appelle d'autres.

Prochaines séances. Elliant, vendredi 14 novembre à la salle polyvalente (02 98 95 88 12) ; Moëlan-sur-Mer, mardi 18 novembre, Le Kerfany, tarif : 4 € (02 98 39 65 88) ; Châteaulin, jeudi 20 novembre, au Run ar Puns (gratuit).



30/10/2008

Nos enfants nous accuseront

Vous trouverez les salles qui, à ce jour diffuseront le film "Nos enfants nous accuseront" à partir du 5 novembre prochain,

Pour qu'un film existe, il faut qu'un maximum de personnes le regarde le plus tôt possible, premières heures, premiers jours...
Alors nous vous invitons si vous le souhaitez à faire suivre cette liste à tous vos contacts.

28/10/2008

Marcos Ana, Quichotte vivant

Par Cristina Castello

 

Dites-moi ce qu'est un arbre/Dites-moi le chant d'une rivière/

quand il se couvre d'oiseaux

Marcos Ana                                     

                                  

Almodóvar filmera la vie de l'homme qui a passé le plus de temps dans les geôles du franquisme. Sans rêves de vengeance, Marcos Ana continue de lutter contre le fascisme. Son histoire est témoignage des oiseaux sans ailes de cette barbarie ; c'est aussi une fête de tendresse qui hisse la Bonté  au-delà de toute horreur.

         Marcos Ana, poète et Quichotte. Un emblème universel de la lutte pour la liberté —88 ans, aujourd'hui— lui qui a été incarcéré dans les prisons du franquisme entre 1939 et 1961. Il a connu la frayeur dans sa peau, dans son cœur, et au travers des yeux de ses compagnons ; il a découvert l'opprobre aux mains des tortionnaires : des mains étrangères à la vie qui seulement le dimanche cessaient de massacrer, parce qu'alors les bourreaux priaient dans l'Église, avec le chapelain. Mais il a aussi connu des ravissements : dans les cachots du fascisme espagnol, Marcos Ana a « adopté » —comme l'on adopte un bébé— une fleur innocente, née dans la fêlure ténébreuse de la paroi la plus cruelle.

         Juché aux barreaux et châtié durement pour cette raison, il s'extasiait sur chaque pleine lune dont —grâce à son obstination— il pouvait jouir. Tel qu'un contrebandier, grille à grille, il distillait la poésie de Neruda et ses propres vers, comme une litanie qui invoquait la liberté. Il avait seulement 19 ans quand il a chu dans cet enfer du Régime, et vingt-trois de plus quand —comme une salve d'oiseaux heureux— il a pu quitter la cage pour embrasser la clarté de la lumière.

         Lumière aveuglante pour lui, qui ne connaissait que les ténèbres. Mais la vie, qui ne lui avait accordé que sa main mesquine, lui arrivait enfin mains offertes. Entre tous ses dons, elle l'a doté de voyages, de reconnaissance mondiale —l'accolade de l'humanité— de la possibilité de lutter et lui a révélé la poésie. Elle lui a dévoilé l'amour et le sexe… à 42 ans. Elle était jeune et brune, mince, belle et subtile. Elle s'appelait Isabel Peñalba et avait le regard bleu.

         Seront-ce les yeux de Penelope Cruz, l'actrice fétiche d'Almodóvar, ceux qui le regarderont depuis ce bleu d'Isabel ? Qui sait ? D'abord, le réalisateur terminera le tournage «Les étreintes brisées » et, peut-être commencera-t-il celui de «La peau que j'habite ». Alors, il se consacrera à « Dites-moi ce qu'est un arbre », le dernier livre de Marcos Ana ; l'œuvre qui parcourt le monde avec ses mémoires de prison et de vie, flamboyantes d'humeur, de la poésie de sa prose et du sens de l'existence comme un fait transcendant.

         Combien de films pourraient être faits au rythme des battements de cœur de ce Quichotte ? Quoi qu'il en soit, Almodóvar a choisi de prendre l'histoire de Marcos, « un survivant », quand il était déjà un oiseau en vol libre qui sillonnait les cieux à la sortie de l'enfer. Ce qui impressionne le cinéaste est qu'après avoir respiré tant de mort, le poète soit empreint de justice et de paix, de fraternité, de semailles, d'imagination, d'espoirs, et non de rancœur. Il se surprend de la passion du poète pour son prochain.  Il s'émeut parce que dans « Dites-moi ce qu'est un arbre », notre auteur raconte  —qu'à cause d'un compagnon qui l'a dénoncé— il a reçu l'une de ses deux condamnations à mort; et, par délicatesse, il ne donne pas son nom pour éviter un préjudice à la famille du traître.  

         Curieuse audace d'Almodóvar, artiste au langage cinématographique baroque, dont les sujets avaient été jusqu'à présent l'amour pour sa mère et pour les femmes, la sexualité, le ménage entre l'amour et la mort, et la transmutation de l'âme. Et bien que quelques faits de l'histoire qu'il filmera justifient à première vue son choix, il y a quelque chose de central, de plus étonnant. « Marcos Ana est à l'identique d'un ange —a expliqué le réalisateur—  je n'ai jamais connu si bonne personne ». À partir de ce tournage, sera-t-il possible de présumer des futurs scénarios almodovariens basés sur la valeur infinie de la bonté ?

 

 

 

Le regard bleu

Dites-moi comment est le baiser / d'une femme. Donnez-moi le nom de l'amour:/ je ne m’en souviens plus

Marcos Ana 

                                                               

         Après 23 années derrière les parois, le plus difficile fut la liberté. Apprendre à être libre. Marcos savait vivre dans la prison, où l'affection envers (et de) ses camarades était son soutien et son moteur. Bien qu'il ait été torturé jusqu'à presque en mourir ; bien qu'il ait vu assassiner tant de vies ainsi que sa jeunesse, il a gravé dans sa peau et son être les rires de ses amis et leur générosité. Avec eux il partageait la faim et le pain, les rêves et les hommages avec lesquels —dans les ombres de l'ombre et avec ingéniosité— ils honoraient les grands poètes. La prison était une « université démocratique », un foyer. Marcos a fondé les cercles littéraires, bien que l'imagination ait été sauvagement persécutée. Les geôliers devaient éviter la fuite physique des prisonniers ; et le chapelain, la fuite spirituelle. Il fallait empêcher la poésie, parce qu'elle était ennemie du système, elle était un être de plus à incarcérer… incarcérer le soleil ?  Allez !

          Dans la décennie des années 50 et à une cellule de châtiment inhumain ses compagnons l'ont approché, ils savaient comment

—oh, quelle grâce l'imagination !—, un stylo et des poèmes de Neruda et Rafael Alberti. Il les a lus plus de mille fois et…. il a commencé à écrire !  Mais... comment garder son mot écrit ? Et ici encore une fois la créativité. Ses « collègues » de prison apprenaient de mémoire ses vers, et ceux qui récupéraient la liberté étaient recueils de poèmes parlants de Marcos Ana, connu encore comme Fernando Macarro Castillo. Un temps après, il a reçu un petit livre publié avec ses poèmes… Homme, quel bonheur ! C'était les deux premières éditions de « Je t'appelle depuis un mur », publié alors au Mexique et au Pérou.

         Comme un jeu interminable de miroirs reflétés en eux-mêmes pour se multiplier, la caméra d'Almodóvar montrera aux esprits assoiffés du monde, la vie de notre personnage et concitoyen… oui ! Ça alors ! Telle succession de hasards ! … Le cinéaste est né dans La Manche, à l’égal de l’une des œuvres suprêmes de la littérature universelle : « L'Ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche »; de même que Don Miguel de Cervantes Saavedra, son auteur, qui avait ouvert les yeux à la vie à Alcala de Henares, dans une ville de la fameuse région, où Marcos demeurait depuis ses neuf ans et subissait son premier emprisonnement… Le hasard existe-t-il ?

         Vierge jusqu'à ses 42 ans, pour Fernando Macarro le monde extérieur était une légende, une fable, une fiction. Il n'y avait pas de murs, mais le ciel ; il y avait du lard ! —ce lard, son rêve d'affamé durant les 9.000 jours et nuits de sa réclusion—;  il y avait des voitures, des affiches lumineuses, des magasins ... des femmes ! Il y avait une vie « normale » qu'il avait oubliée après tant d'années derrière les parois. Habitué à l'horreur et à la nécessité, les lumières l'étourdissaient, il rendait la chère qu'il avait convoitée : il se sentait dans une autre galaxie... jusqu'à ce qu'arrive sa nuit bleue.

         Elle. Elle croyait qu'il était grisé et elle essayait de lui rendre l'argent, qu'il devait payer, car la jeune fille se prostituait. Fernando Macarro ne savait que faire, tout seul avec une femme et dans un hôtel ; il se sentait maladroit, étranger, désorienté, jusqu'à ce qu'il lui raconte la vérité : les 23 ans de prison et son inexpérience sexuelle. Elle s'est alors consacrée à lui avec amour : elle l'a emmené se promener par Gran Vía de Madrid et ils sont allés dîner, tandis qu'il parlait et parlait, comme une graine qui trouve sa terre fertile après la sécheresse.

         Le regard bleu a pleuré. Il a tant pleuré, pendant que Fernando lui contait le seul monde qu’il n’ait jamais connu. Il a pleuré pour toutes les  choses qui méritent des larmes (Jorge Luis Borges). Isabel Peñalba  —c’était elle, oui— l'a ramené  ensuite à l’hôtel et est parvenue à ce que Fernando lui fasse l’amour. Elle voulait qu’il renaisse, elle voulait l’inaugurer. Au petit matin, entre chocolat  et beignets ils étaient unis dans le lit, et quand le poète qui venait de naître  « viril » arriva de retour à sa maison, il  trouva  dans sa poche les cinq cents pesetas du paiement qu'elle n'avait pas voulu. Et un papier,  un appel, une prière d'amour : « pour que tu reviennes cette nuit ».     

         Il pensa à elle toute la journée avec désir et émotion, mais la crainte de l’offenser avec l’argent —qui était avant tout, ressource d’Isabel— se mélangeait à celle de détruire le souvenir de cette nuit de magie et pureté. Il ne savait pas s’il devait y aller, et ce fût une fleur encore, qui le conforta dans sa décision. Il acheta des douzaines de fleurs aussi lumineuses que celle, née dans la paroi la plus cruelle, qu’il avait adoptée comme un bébé. Les 500 pesetas —le prix de la nuit— se transformèrent en un bouquet de boutons d’orchidées et magnolias. Il les laissa à la réception de l’hôtel, avec une carte : « Pour Isabel, mon premier amour ».

          Franz Kafka a écrit que tant qu’on ne cesse de monter, les marches ne cessent pas; sous les pieds qui montent, elles se multiplient à l’infini. Isabelle a été la marche de l’amour.

         Almodóvar se réjouit dans cette courbe d’aurore, d’un tel ravissement de tendresse que les souhaits de sa caméra pourront refléter.

         Avant, bien avant, le phare de Marcos avait été l'affection envers ses parents, à qui il a pensé pour honorer le pseudonyme avec lequel nous le connaissons. Il a choisi Marcos, pour son papa : oh!, cette image d'une casquette solitaire saisie dans la branche d'un arbre brisé, quand un bombardement l'a assassiné; les yeux dévastés du fils avaient 17 ans. Il décida de s’appeler Ana, pour sa maman. Dévouée, sous son foulard noir, elle allait toujours le voir en prison ; et une fois encore, ils ne l’avaient pas laissé entrer. Le poids de son calvaire intérieur à dos, sachant son fils condamné à mort, elle avait commencé à revenir sur ses pas. Elle est tombée au sol, frappée, humiliée par les gardes.

         Maman Ana est morte dans un fossé, en ce Noël de 1943 : « … qu'elle est morte à genoux, ils m'ont raconté /crucifiée dans un rondin de pleurs, /avec mon nom de fils entre ses lèvres/ en demandant à Dieu la fin de mes chaînes »

 

Les Feux de la Rampe

Mon péché est terrible ; /j'ai voulu remplir d'étoiles/ le cœur de l'homme

Marcos Ana

 

         Depuis sa libération en 1961, grâce à la pression internationale, puisqu'il était condamné à soixante années d’emprisonnement—, il a parcouru l'Europe et une grande partie de l'Amérique brune. Il a connu Louis Aragon, Pablo Neruda, finalement Rafael Alberti et María Teresa León, Salvador Allende, Nicolás Guillén, Picasso, Yves Montand, Michel Piccoli, Prévert, Jean-Paul Sartre, Joan Báez, Miguel Ángel Asturias, Pedro Vianna et tant et plus. Il a transformé sa vie en une défense pour la liberté, contre tout autoritarisme. Il a fondé et il a dirigé à Paris, jusqu'à la fin du franquisme, le Centre d'Information et de Solidarité de l'Espagne (CISE) que Picasso a présidé. Et chaque personne qui l'interviewait, et encore aujourd'hui, repose toujours cette question : Miguel Hernández a-t-il vu dans la prison l'énorme poète à l’âme de cristal ? Oui, il l'avait vu. Au « Feu bleu de la poésie » —comme le nommait Neruda—  le franquisme l'avait assassiné à 31 ans, avec une tuberculose empoisonnée, dont ses bourreaux ne s’étaient jamais occupés.

         Pour ses deux ans de liberté, Marcos connut Vida Sender, qui fut sa femme durant de nombreuses années. Aujourd’hui séparés, ils entretiennent une amitié toujours plus profonde et partagent l’amour de « Marquitos » qui vit avec lui. « Marquitos » —actuellement caméraman, photographe et documentaliste— est le fils du couple et la plus grande offrande que notre Quichotte ait reçu de la liberté.

         Mais il y a eu d’autres rencontres. Comme celle,  avec cette musique d’accordéons et violons que, d'un orchestre lointain, il avait écoutée dans la prison de Burgos en Noël ‘60. Il n'a jamais su le nom et, bien qu'il la cherchât avec obsession, sans cette donnée et sans pouvoir la fredonner, il n'était pas possible de la trouver.

          Puis, le vertige des voyages, l’emporta à Copenhague où son lieu de résidence lui était offert dans la maison de… Karen. Haute, belle, fascinante, la déesse nordique ne pouvait communiquer avec lui que par signes. Marcos ne parlait pas un mot d’anglais et pas question du danois. Intimidé —toujours plus chaque minute et sans mot dire— il la regardait à la dérobée depuis un fauteuil ; elle le perçut : l’installa dans le canapé, atténua les lumières jusqu’à créer une atmosphère ténue pour accentuer la détente. Ensuite elle posa une musique choisie sur le tourne-disque et le laissa afin qu’il puisse se délasser.

         Alors, le sourire de la vie. Le miracle. La mélodie que le poète écoutait était celle du film « Des Feux de la rampe »,  la même que ce Noël; celle qu’il avait tant cherchée. La musique a provoqué un sursaut qui fit revenir Karen, inquiète, et s'asseoir avec lui, presque en lui. Le reste fut, l’embrassade silencieuse, la vibration à l’unisson, et le langage de l'amour et de la passion. Durant les cinq jours de sa permanence au Danemark et dans tant d’autres de sa vie d’homme libre, l'enchantement a peuplé d’étoiles le héros qui remplit d’étoiles le cœur de l'homme.

         « Dites-moi ce qu’est un arbre », Marcos Ana clamait au ciel le poème qui a donné le nom à son dernier livre.  Aujourd'hui, déjà tous les bois, tous les oiseaux et tous les fleuves ont conté son histoire. Aujourd'hui il se reconnaît comme un «arbre miraculeux», parce qu'il continue à dignifier la condition humaine. Et il embrasse les mots de son Paul Éluard admiré : « Les barreaux de la cage/Chantent la liberté /Un air qui prend le large/ Sur les routes humaines / Sous un soleil furieux /Un grand soleil d'orage ».

 

http://www.cristinacastello.com

 

16/06/2008

Les Enfants d'Arna

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Documentaire de Juliano Mer Khamis - 2004 - 55 mn

Excellent documentaire. L'un des meilleurs sur la question palestinienne.
C’est l’histoire d’une israélienne (juive) et de son fils (précisément le réalisateur du film Juliano Mer-Khamis, né aussi d’un père palestinien) qui montent un atelier-théatre avec des enfants du camp de réfugiés de Jenine dans les années 90.
Ces enfants sont comme tous les autres, ils aspirent à une vie normale, ils sont pleins de vie et de rêves. Le problème, c’est qu’ils vivent sous l’occupation d’une armée israélienne qui ne fait pas de détails. Ils grandiront et évolueront dans cet environnement jusqu’à devenir des résistants, et presque tous être tués. Le grand mérite du film est de les montrer à différents âges et étapes de leur vie et donc de suivre leur évolution.
Ce film a obtenu plusieurs prix : Meilleur documentaire, Festival de film de Tribeca, New York 2004 Prix Fipresci du meilleur documentaire, Hot Docs, Toronto 2004, Prix du jeune public et Mention spéciale, Visions du Réel, Nyon 2004.

Lumumba

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Film de Raoul Peck - 1999 - 1 h 56 mn

C'est un film-hommage au très charismatique Patrice Lumumba, dirigeant du Mouvement National du Congo, héros de son indépendance (1961) et - à trente-six ans à peine - premier chef de gouvernement du nouvel État indépendant.
A partir des années 60, souffle sur le continent africain, le vent de la décolonisation. Sauf que les serments d’indépendance promise par le Roi des Belges, Léopold II, se dissipent rapidement dans un bain de sang. Le rêve s’écroule et les luttes fratricides prennent le pas sur la domination coloniale. Raoul Peck retranscrit dans ce film les déchirements d’un homme amoureux de son peuple et de son pays. Lumumba est écartelé entre ses convictions et la dure réalité du pouvoir ; les alliances belliqueuses, les complots et les manipulations. Les idéaux de ce jeune homme autodidacte se flétrissent à mesure que le Congo s’achemine vers l’indépendance mais “On ne fait pas une révolution à moitié”.
La voix de Lumumba résonne encore comme une prédiction : “L’Afrique écrira sa propre histoire et elle sera, du nord au sud du Sahara, une histoire de gloire et de dignité”.

Massoud l'Afghan

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Une vallée contre un empire
Documentaires de Christophe de Ponfilly - 1989 / 1981 - 1 h 30 mn / 52 mn

Ahmad Shah Massoud, portrait d'un résistant que l'Occident n'a pas su écouter, mort pour la liberté.
Alors que les troupes soviétiques sont entrées en Afghanistan en décembre 1979, Christophe de Ponfilly et Jérôme Bony réalisent leur premier reportage clandestin dans la vallée du Panjshir. Une vallée contre un empire témoigne du début de la lutte d'un jeune commandant, Amah Shah Massoud. En 1981, qui aurait pu prévoir que les paysans afghans tiendraient tête à l'armée soviétique? Massoud, jeune chef de la guérilla installée au nord-est de Kaboul, dans la vallée du Panjshir, était sûr de la victoire. On le verra organiser son dispositif pour durer. Ce résistant infatigable croyait en la justice de sa cause. Tourné clandestinement en super 8, ce document a été le premier à témoigner des débuts du combat de Massoud.

Tuez-les Tous !

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Rwanda : Histoire d'un génocide "sans importance"
Documentaire de Hazan, Glucksmann et Mezerette - 2003 - 1 h 38 mn

En 1994, pendant trois mois, devant les caméras du monde entier et dans une indifférence quasi générale de la communauté internationale, le Rwanda bascule dans l’horreur. L’armée Hutu, aidée de miliciens et de civils, va massacrer un million de Tutsi en une centaines de jours, soit près de 10.000 personne par jour. Le génocide fut savamment orchestré et organisé et s’est nourri de la passivité de tous.
Trois jeunes réalisateurs français, troublés par le rôle ambigu de la France, ont décidé de mener l’enquête, à la fois au Rwanda et en Europe, pour tenter de comprendre, froidement, les mécanismes qui ont permis la réalisation du dernier génocide du XXe siècle. Investigations, mise en perspective historique, interviews des acteurs et des rescapés de cette tragédie dressent le sombre tableau de l’enchaînement des faits et mettent l’accent sur la passivité de la communauté internationale dans cette affaire.
Les documentaires sur le génocide au Rwanda ne sont pas nombreux, celui-là en plus de marquer dans l'histoire ce drame, ose poser les questions qui dérangent sur la responsabilité occidentale et principalement française et le rôle de ses manigances politiques dans ce sombre épisodes de l'Histoire de l'humanité.

Escadrons de la Mort

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l'Ecole Française
Documentaire - 2003 - 60 mn

Pendant les années de plomb en Amérique du Sud (70 - 80), ce continent était ravagé par les massacres et la répression féroces des dictateurs militaires. Ces dictatures installées ou appuyées par les Etats-Unis au nom de la lutte contre le communisme multiplient les exactions, les tortures, et sèment la tyrannie.
Mais les Etats-Unis n'étaient pas seuls à soutenir ces dictatures, des militaires français furent envoyés par le gouvernement français en Amérique du Sud avec une mission : former les tortionnaires sud-américains aux techniques déjà expérimentées par la France en Algérie ou en Indochine.

The revolution will not be televised

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Coup d'état contre Chavez
Documentaire de Kim Bartley et Donnacha O'Briain - 2004 - 1 h 15 mn

Le documentaire Coup d'état contre Chavez ou The revolution will not be televised ou encore Chavez, the film, réalisé par Kim Bartley et Donnacha O'Briain, a été tourné alors que les deux réalisatrices préparaient un documentaire sur le président Hugo Chávez au Venezuela. Elles se trouvaient à l'intérieur du palais présidentiel quand fut déclenché, le 11 avril 2002, le coup d'état conduit par les propriétaires des chaînes privées, les cadres de la compagnie pétrolière du Venezuela, ainsi qu'une poignée de dirigeants militaires avec le soutien, entre autres, des États-Unis, de l’Espagne, de la Colombie et du Salvador.
Le film présente la chronologie du putsch et la mobilisation des millions de Vénézuéliens qui entraîna le retour au pouvoir d'Hugo Chavez 48h après le début du coup grâce à la garde présidentielle

Afrique 50

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Documentaire de René Vautier - 1950 - 17 mn

Résistant maquisard, militant communiste et cinéaste engagé, René Vautier était un précurseur du cinéma militant. En 1950, il filme "Afrique 50", premier film anticolonialiste en France, et le présente en dépit de la censure française qui lui confisque une grande partie des ses bobines. Dans ce court documentaire, Vautier se consacre aux conditions de vie dans les villages des colonies françaises d'Afrique occidentale.
Le film fut - évidemment - saisi et interdit et René Vautier emprisonne.
"Je suis parti pour la Ligue de l'enseignement, où certains avaient senti la nécessité d'apporter des images neuves venant d'Afrique après le discours de De Gaulle: " La France se donne pour tâche d'amener les populations dont elle s'occupe à se gérer elles-mêmes ". On se disait: " Il faut voir." Je suis parti, pas plus anticolonialiste que ça, et c'est là-bas, voyant les choses et discutant avec les gens que, sympathisant à leurs côtés au vieux sens grec " souffrir avec ", je m'apercevais qu'effectivement le gars ne pouvaient pas me donner grand chose, n'ayant eux-mêmes pas de quoi manger. Là, se fait la cassure avec ceux qui vis à vis des autres sont des nantis. Ils vous apparaissent de l'autre côté d'une barrière que vous avez franchie. Et vous êtes avec d'autres, qui s'accrochent aussi à vous pour vous dire " parles en notre nom; fais-nous connaître ". Une confiance à ne pas trahir, qui fait aussi la joie de vivre. Effectivement, autour de tous ces ennuis avec Afrique 50, j'ai vécu dans la joie", raconte Vautier.

Ressources humaines

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Film de Laurent cantet - 1999 - 1 h 30 mn

Écrit et tourné avec des amateurs (chômeurs, cadres et syndicalistes), filmé dans unez usine en activité, Ressources humaines pose une question centrale : comment trouver sa place dans un monde du travail en pleine recomposition ?
Tout frais émoulu d'une grande école de commerce, un fils d'ouvrier revient effectuer son stage de fin d'études dans le service des Ressources Humaines de l'usine où travaille son père. Il y est chargé de réfléchir à l'application de la réduction du temps de travail à trente-cinq heures hebdomadaires. Mettant à profit ses connaissances, il s'attelle à la tâche avec le plus grand soin de l'intérêt général. Jusqu'au jour où il apprend que son père pourrait être une des victimes d'un nouveau plan social.

Le Bien Commun

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L'assaut final
Documentaire de Caroline Poliquin - 2002 - 52 mn

Dieu a créé le monde en sept jours. Aujourd’hui, l’homme d’affaires tout-puissant veut le vendre en sept jours afin de proclamer le Marché Total.
Ce documentaire est une enquête rigoureuse sur l’érosion de la notion de bien commun dans un contexte économique qui voit l’augmentation des privatisations et la généralisation des brevets et droits d’exploitation. Que ce soit au Canada, aux Etats-Unis, au Mexique, en France, au Brésil ou en Inde, les biens les plus essentiels à la vie sont devenus de simples marchandises : L’eau, la santé, les gènes humains et végétaux, les connaissances anciennes et nouvelles, plus rien aujourd’hui ne semble pouvoir échapper au destin de marchandise, et demain, ces biens communs ne seront-ils donc accessibles qu’aux plus offrants ?

Zoos humains

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Documentaire de Pascal Blanchard et Éric Deroo - 2004 - 52 mn

Les zoos humains, symboles inavouables de l'époque coloniale et du passage du XIXe au XXe siècle, ont été totalement refoulés de notre histoire et de la mémoire collective. Ils ont pourtant existé, et c'est par dizaines de millions (400 millions selon les estimations les plus basses) que les Européens et les Américains sont venus découvrir, pour la première fois, le "sauvage"... dans des zoos, des foires, des expositions officielles, des exhibitions ethnographiques et coloniales ou sur la scène des cabarets.
L'Occident a inventé le sauvage. Beaucoup plus, l'Europe et l'Amérique l'ont exhibé, l'ont montré, dans des zoos, des expositions ou des scènes de music-hall pour convaincre les populations blanches de leur évidente et définitive supériorité sur le monde. Telle est l'histoire des zoos Humains. la télé réalité aujourd'hui n'est pas autre chose. Et, le succès est au rendez-vous. Sachant jouer de cette demande voyeuriste, les impresarios d'hier et les producteurs d'aujourd'hui livrent en pâture des corps. Hier pour fabriquer de la race, aujourd'hui des modèles.
Une histoire inavouable ? Le documentaire se présente comme un voyage, comme une enquête autour des derniers vestiges d'une histoire que l'on a préféré oublier. Comme si, en rendant le corps, les restes de la Vénus Hottentote à l'Afrique du Sud en 2002, la France avait tourné définitivement cette page honteuse. Les pressions, interdictions de tournage et autres événements tout au long de la réalisation du film montrent bien la difficulté à regarder en face cette histoire.

La loi de la jungle

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Chronique d'une zone de non droit : la Guyane française
Documentaire de Philippe lafaix - 2003 - 52 mn

Prix du documentaire Festival international du film de l'environnement - Paris. Prix du meilleur film pour les droits de l'homme CinéEco - Portugal, alors pourquoi cet excellent documentaire n'a été retenu par aucune grande chaîne ? sans doute parce qu'il a été mis "sur liste noire" comme le dit L'Humanité, sans doute qu'il dérange.
Des frontières passoires dans une forêt équatoriale incontrôlable.
Une ruée vers l'or qui dégénère en Far-west tropical.
Des ressortissants brésiliens réduits en esclavage sur des sites d'orpaillage clandestins.
Les témoignages exclusifs de quatre survivants atrocement torturés.
Le premier procès en France depuis la guerre 39-45 pour tortures et actes de barbarie attribué à une organisation.
Des forêts et fleuves partout éventrés. Une contamination massive par le mercure (12 tonnes par an!) de toute la région (le pays des mille fleuves!) qui décime les guyanais dont les derniers amérindiens français.
Et tout cela se passe dans le plus grand département Français : la Guyane française!
Un documentaire d'une force exceptionnelle, un constat lucide et un véritable pavé dans la mare.

 

Les Glaneurs et la Glaneuse

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Documentaire d'Agnès Varda - 1999 - 1 h 22 mn
Grand Prix du Festival international du film sur les droits de l'Homme Oneworld 2001, Prix du public au Festival international du nouveau cinéma et des nouveaux médias de Montréal - 2000, Prix du Meilleur documentaire européen aux European Film Awards

« J'ai passé un an à le faire un documentaire sur ceux qui dans notre société vivent de nos déchets et de nos restes. Puisqu'on est dans une société de gâchis, il y a des gens qui vivent de ce qu'ils trouvent dans les poubelles. Parmi ceux-là, j'ai rencontré des gens formidables, qui ont une vision de la société. Ils ne sont pas misérabilistes, mais simplement miséreux. Ils ont compris que devant un tel gaspillage, il faut en profiter en quelque sorte, tout en dénonçant ce que cela veut dire. Je peux vous dire que ce film " les glaneurs " a circulé un peu partout en France et dans le monde entier. Il pose partout le même problème. Ce n'est pas celui de l'économie durable, du commerce équitable, c'est celui d'une société organisée autour du fric, " du plus gagné " une surproduction, une surconsommation, sur-déchets donc gâchis. Les combats sont à tous les niveaux. On peut essayer de freiner " l'esquintage " systématique des ressources naturelles. On peut faire un document sur les archis-pauvres d'Afrique du Sud, d'Inde ou d'Amérique du Sud. Ce qui m'a intéressée c'est dire " voilà, je vis en France, c'est un pays civilisé, "culturé", riche et il y a des gens qui vivent de nos poubelles ! " Cela a secoué plus d'un Français de voir ça. On ne recycle pas les exclus. Il y a une sorte d'allégorie dans le fait qu'ils deviennent " ceux que l'on met à la poubelle. " Ils n'ont pas besoin seulement de nourriture et d'argent, ils ont besoin de s'exprimer. Certains ont pu le faire dans mon film. Je me rendais compte à quel point la misère de partage existe. Chacun doit savoir qu'il est responsable de son voisin. Je crois beaucoup en l'engagement personnel. Par mon travail de cinéaste, je m'engage personnellement. Je suis une résistante ! » - Agnès Varda

22/08/2007

KIM KI-DUK

Je voudrais vous parler ici d'un de mes cinéastes fétiches : Kim Ki-duk
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Radical, esthétique, perturbant, percutant, viscéral, souvent torturé, voire violent, le cinéma de Kim ki-duk est toujours pourtant d'une grande beauté. Il explore les relations humaines à travers le prisme de la société coréenne. Kim Ki-duk s'est formé seul au cinéma. Je l'ai découvert avec Printemps, Automne, Eté, Hiver et Printemps, une oeuvre un peu plus paisible que ses autres films, une véritable perle cinématographique, magnifique !
 
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Puis j'ai vu un autre film de lui, et un autre et encore un autre jusqu'à vouloir TOUS les voir et me voilà totalement envoûtée par son univers, car ses films  bien que différents les uns des autres, conservent une marque, une griffe même, très très particulière.
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Kim Ki Duk est un conteur social. Ses histoires sont toujours une description précise d’un malaise de la société coréenne, qu’il soit militaire comme dans Address Unknow, ou bien sexuelle, inégalitaire comme dans Bad Guy, ou bien un peu plus conceptuel dans L’île ou Printemps, Eté, Automne, Hiver et Printemps. Ensuite le réalisateur aime les personnages en marge de la société : clochard, prostituée, militaire à la dérive, moine monastique. Il affectionne particulièrement sa condition sociale avant même ses traits de caractères. C’est dans des conditions difficiles, sensibles, que Kim Ki Duk nous dévoile une partie de sa vie en récitant des œuvres quasi autobiographiques qui expie ses malheurs telle un remède, une thérapie à ses souvenirs. Son expérience militaire, religieuse, artistique et ouvrière lui a donné une inspiration et des aspirations singulières.
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Kim Ki-duk est né le 1er janvier 1960 dans la province de Kyongsan à Bongwa en Corée du Sud. Il passe son enfance dans un village perdu dans les montagnes qu’il quitte en 1969 pour Séoul où il fait ses études. À 17ans, il est obligé de quitter le lycée agricole pour travailler comme ouvrier. Trois ans plus tard, il s’engage dans la marine pendant cinq ans. Il en ressort profondément transformé et passe alors deux ans dans un monastère pour devenir prêtre. Il se passionne alors pour la peinture et part étudier dans une école d’arts plastiques de Paris. Sans le moindre argent, il vit en vendant quelques toiles. Il entre pour la première fois dans un cinéma où il est notamment marqué par Le Silence des agneaux et Les Amants du Pont-Neuf. De retour de Corée en 1993 et désormais passionné par le cinéma, il s’intéresse à l’écriture de scénario. A Painter and a Criminal Condemned to Death est remarqué et lui vaut le prix de la création attribué par l’Association des Scénaristes. Il reçoit enfin en 1994 pour Double Exposure puis en 1995 pour Jaywalking des prix du scénario délivrés par la très puissante Commission du Film coréen. Il se lance alors dans la réalisation et achève en 1996 Crocodile son premier film inspiré de sa vie.A partir de là, Kim tourne au rythme d’un film par an des films à petit budgets. Après Wild Animals qu’il tourne à Paris, il sort en 1998 son troisième film Birdcage Inn. L'Île, réalisé en 2000 est son premier grand succès. Celui-ci est sélectionné au Festival de Venise ce qui lui permet de faire parler de lui en Europe alors que les critiques coréennes rejettent violemment son film. La même année, il réalise avec peu de moyens et en temps record Real Fiction qui prouve son grand talent pour l’improvisation. Il sort les années suivante deux autres films Address Unknow et Bad Guy son plus grand succès en Corée. Ses films sont invités aux Festivals de Venise et de Berlin. En 2002, il sort The Coast Guard appuyé par une grosse promotion due notamment à la présence de la star Jang Dong-gun. Cependant les recettes commerciales sont décevantes. Personellement j'ai beaucoup moins aimé celui là que les autres. Dans Printemps, été, automne, hiver… et printemps, Kim tout en s’intéressant toujours au marginaux apporte une touche spirituelle et aborde des thèmes comme la rédemption et le pardon. Il gagne le prix de meilleur réalisateur au Festival de Berlin pour Samaritan Girl et au Festival de Venise pour Locataires (3-Iron) qui sort en 2004. Les films et Kim Ki-duk sont marqués par leur caractère déconnecté dus à ses origines modestes et à son ignorance des règles formelles. Ses personnages principaux sont souvent des marginaux, à l’écart de la société coréenne. Il est un des rares réalisateurs coréen à avoir réussi à percer à l’étranger sans pourtant plaire aux critiques et au public de Corée. Il a dit après le tournage de "Samaria" : "J’ai une idée obsessionnelle, obstinée du cinéma en tant que mélange de tension, de crise, de paix, d’ironie et de destruction. Pour moi le cinéma, c’est tout ça à la fois."

1996 : Crocodile (악어, Ag-o)
1996 : Wild Animals (야생동물 보호구역, Yasaeng dongmul bohoguyeog)
1998 : The Birdcage Inn (파란대문, Baran daemun)
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2000 : Real Fiction (실제상황, Shilje sanghwang)
2000 : L'Île (섬, Seom)
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2001 : Adresse inconnue (수취인불명, Suchwiin bulmyeong)
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2001 : Bad Guy (나쁜 남자, Nappeun namja)
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2002 : The Coast Guard (해안선, Hae anseon)
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2003 : Printemps, été, automne, hiver... et printemps (봄여름가을겨울그리고봄, Bom
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2004 : Samaria (사마리아, Samaria)
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2004 : Locataires (빈집, Bin jip)
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2005 : L'Arc (활, Hwal)
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2006 : Time (타임, Time)
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2007 : Breath (Soom)
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20/04/2007

NOTRE PAIN QUOTIDIEN Unser täglich Brot

Documentaire réalisé par Nikolaus Geyrhalter
Durée : 1h 32
Date de sortie : 14 Mars 2007
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Au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, l’enjeu alimentaire en Europe est primordial et les mesures qui seront alors prises dans le nouveau cénacle de la jeune communauté européenne vont transformer nos systèmes de production agroalimentaire comme jamais. Ainsi tout en relevant le défi de nourrir ses millions d’habitants à leur faim, le modèle qui sera mis en place aura pour seule priorité d’atteindre ses objectifs et cela au mépris total des moyens à engager.
 
De fait, s’ouvrent alors jusqu’à nos jours six décennies où la crise alimentaire est définitivement bannie de nos existences pour faire place à un marché gigantesque où la profusion et la surproduction règnent. Cela toutefois ne fut pas réalisé sans contraintes ni sacrifices, nous en savons pourtant peu et c’est ce que va s’atteler à éclairer Notre Pain Quotidien, le documentaire qu’a réalisé entre 2003 et 2005, Nikolaus Geyrhalter. Ainsi, le cinéaste autrichien s’est-il demandé comment nous en étions arrivés à cette situation a priori idéale, et s’interrogeant par le seul biais de l’image non commentée à ce qui est et à ce qui se fait maintenant, il questionne son public sur le bien fondé du résultat obtenu. Savoir ce que fait l’homme pour subvenir à ses besoins bien au-delà du raisonnable et de toute préservation de la nature pose effectivement question à l’heure où l’écologie et l’avenir de la biodiversité sont en jeu. Et ce sera sans faux-semblants que Notre Pain Quotidien s’y collettera. Vives impressions garanties !

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Veaux, vaches, cochons, poulets sont ainsi montrés à tous les niveaux de la chaîne, de l’élevage à l’insoutenable abattoir où tous seront découpés, désossés et démembrés pour notre plus gourmande joie. En filmant comment est produit ce qui parvient dans nos assiettes, Nikolaus Geyralter explore en effet la face dissimulée et rarement montrée de nos industries agroalimentaires. Des immensités paysagères transformées à seule fin de culture en passant par les conditions incroyables réservées aux animaux qui nous nourrissent, c’est donc à une plongée sans retenue dans un monde qui nous est peu connu à laquelle nous convie le cinéaste accoutumé aux projets choc. Nous serons ainsi emmenés vers la froideur chirurgicale des chaînes de dépeçage des usines de découpe industrielle, puis ce sera au tour des immenses élevages industriels hors sol que la PAC a fait prospérer de nous ouvrir leurs portes, avant que les monotones paysages de l’agriculture intensive ne se dévoilent sous leurs toiles de plastiques et leurs tonnes d’engrais et de pesticides. Dans toute son insensible rigueur, c’est ainsi l’ensemble des pans de la production alimentaire occidentale qui nous est donné à voir, au gré des hectolitres de sang versé, des milliers de carcasses déchiquetées et des fruits ramassés en secouant les pruniers à la seule force de machines spécialisées.
 
Dans la lignée visuelle et intellectuelle de la trilogie de Godfrey Reggio regroupant Naqoyqatsi, Koyaanisqatsi et Powaqqatsi, documentaires cinglants qui montrent sans afféterie la vérité du monde, Notre pain quotidien révèle ainsi simplement et sans fausse pudibonderie ce qui est, en le filmant entièrement, sans enjoliver ou atténuer la force du réel. L’ensemble de fait est marquant et éprouve d’autant plus son spectateur que son traitement est volontairement radical.
 
C’est en effet par l’usage de plans séquence en cadrage presque continûment fixe, tous dépourvus de commentaires off que Nicolas Geyrhalter va fonder le filmage de son documentaire. Recherchant à impressionner, il entreprendra ainsi de tout montrer frontalement et dans la durée, au risque de vouloir consciemment incommoder, parfois jusqu’à la nausée et au mal être. Mais l’appel à l’éveil de notre conscience de consommateur citoyen passe peut-être par ce que certains qualifieront de surenchère artificielle. En tous cas, le cinéaste a le mérite de laisser à la seule appréciation du destinataire et à son unique sagacité, le soin de se faire sa propre opinion sur le sujet, tout en installant un dispositif habile de scansion basé sur l’alternance de moments antagonistes. Ainsi, entre séquences quasi insoutenables et instants de paix où sont filmés les hommes et les femmes qui oeuvrent pour nous nourrir, Notre pain quotidien alterne ses effets. Dans ses séquences les plus dures, il va de fait nécessairement brusquer, déranger par la violence techniciste qu’il montre et laisser à penser plus paisiblement dans ses moments de tranquillité, au gré de séquences où l’on verra l’ouvrier, l’employé ou le cueilleur en train de déjeuner et incarner le spectateur – consommateur lui-même, dans un contre champ astucieux.

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C’est donc pour cela que Notre Pain quotidien s‘avère une expérience cinématographique déroutante puisqu’il livre l’envers d’un décor que l’on refuserait objectivement d’accepter dans sa cruelle totalité malgré la nécessité., tout en nous tendant un miroir bien dérangeant En effet, dans un premier temps, ce métrage ne peut laisser indifférent par ce qu’il nous montre. Mais s’il saisit autant, c’est surtout parce dans un temps second, il fait ressortir dans un froid souci de réalisme le seul critère qui préside à la naissance, à la réussite de ces stratégies alimentaires et à leur inepte fondement : une rationalité mécaniste, tayloriste dépourvue d’âme, de compassion et très éloignée des critères écologiques de tout développement humainement durable. De fait donc, le plus déstabilisant dans ce métrage réside dans l’inconfort de penser que ce que l’on fait subir aux animaux et à la nature puisse révéler le traitement réservé en général aux plus faibles avec tant d’insensibilité et de cynisme. Cela sidère à dire vrai et même si cela exprime un bien regrettable péché de candeur, une interrogation se pose qui n’est pas le moindre mérite du film : doit-on l’accepter ?

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Instrumentaliser ainsi le vivant, le mépriser pareillement augure en effet de conceptions bien éloignées de celles qui visent à considérer ce dernier - sous toutes ses formes - comme une richesse à préserver et à entretenir. Dès lors, avec Notre Pain Quotidien comme avec Une Vérité qui dérange, il est raisonnable de se demander si le risque premier de telles structures agroalimentaires, de telle pratiques consuméristes et de mauvaises habitudes, n’est pas en dépit de leur impérieuse nécessité, de nous amener à perdre de vue nos racines mêmes et donc en définitive de nous détruire nous-mêmes en niant nos devoirs vis-à-vis de ce qui vit et de ce que l’on détruit chaque jour davantage.
 
Parce que Notre Pain Quotidien est une expérience hélas trop rare à vivre en salles, ce métrage de Nicolas Geyrhalter par ses fondements citoyens et ce qu’il propose, est indispensable à voir, surtout en cette période où la conscience environnementale s’impose comme une donnée fondamentale de nos existences.
 
 
Jean-Baptiste Guégan

 

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"We feed the world" ("Le marché de la faim"), d’Erwin Wagenhofer

Sortie le 25 avril.
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Pour aller plus loin :
  L’article de Cinéma Education : http://www.zerodeconduite.net/wefee...
  Lire aussi de Nicolas Bauche : De l’assiette au grand écran http://www.cafe-geo.net/article.php...
  Sur le film culte de J. Furtado, L’île aux fleurs, 1989 : http://www.filmdeculte.com/culte/cu...

A Lire : 

* Erwin Wagenhofer, Max Annas, Le marché de la faim, Editions Actes Sud, 2007

Extrait du livre : "Le chef de Deutsche Telekom annonce fièrement lors d’une conférence de presse que l’entreprise a fait des milliards d’euros de bénéfices, puis ajoute qu’on va licencier 30 000 employés - dont ceux qui ont contribué à engranger ces bénéfices. Voilà pour la question du chômage au temps du libre-échange. Nous devons réapprendre à prendre nos responsabilités, d’abord pour nous, puis pour nos actes. C’est ce qui est contenu dans ce "we" [...]. Et la bonne nouvelle, c’est que nous en sommes capables. Nous devons manger, nous devons faire les courses, et nous pouvons donc décider de ce que nous voulons. Ce système n’a ni été créé par la nature, ni par Dieu, ce sont les hommes qui l’ont fait et nous pouvons donc le changer. Voilà pourquoi le film et ce livre s’intitulent We feed the world et non They feed the world." E. Wagenhofer
* Jean Ziegler, "L’Empire de la Honte" (Fayard, 2006)
"Etant donné l’état actuel de l’agriculture dans le monde, on sait qu’elle pourrait nourrir 12 milliards d’individus sans difficulté. Pour le dire autrement : tout enfant qui meurt actuellement de faim est, en réalité, assassiné." Jean Ziegler

Rapporteur spécial de la Commission des Droits de l’Homme de l’ONU pour le droit à l’alimentation, Jean Ziegler fait figure d’ovni au sein de cette très respectable institution. Depuis trente ans, cet éternel révolté ne cesse de dénoncer l’injustice du système libéral et le cynisme des maîtres du capital qui font crever de faim une partie du monde pour nourrir l’autre.
A travers ses nombreux ouvrages, cet intellectuel hors norme s’est archané à démontrer que les méfaits du système capitaliste mondialisé ne sont pas les conséquences inéluctables de la ’main invisible’ qui guide les aléas du marché, mais bien l’oeuvre du cynisme de ces "nouveaux féodaux"...

11/12/2006

10 canoës, 150 lances et 3 épouses, avant-première au profit de Survival International

Survival est heureux d'accompagner la sortie dans les salles françaises du film "10 canoës, 150 lances et 3 épouses"

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Une avant-première est organisée au profit de Survival France
le mardi 19 décembre 2006
à 20h
au cinéma les 7 Parnassiens (Paris)

En des temps reculés, dans le nord de l'Australie. Le jeune Dayindi convoite l'une des trois femmes de son frère aîné, Ridjimaril, menaçant ainsi la loi tribale. Afin de ramener Dayindi dans le droit chemin, le vieux Minygululu lui raconte une légende ancestrale d'amours interdits, d'enlèvement, de sorcellerie et de vengeance qui tourne mal.

Le film de Rolf De Heer, l'un des cinéastes australiens les plus respectés, a été entièrement tourné en langue aborigène. Il constitue une plongée dans la culture traditionnelle et l'histoire du peuple aborigène, 'une histoire qui, comme le dit l'acteur aborigène David Gulpilil, n'est pas terminée. Elle se poursuit encore et encore car c'est celle de notre peuple et de notre terre...'

Cinéma les 7 Parnassiens
98 BD du Montparnasse
75014 Paris
M° Vavin

Renseignements et réservations possibles au 01 43 35 13 89

Tarif : 8,50 Tarif réduit : 6,70

Cliquez ici pour en savoir plus sur l'avant-première de "10 canoës, 150 lances et 3 épouses" :
http://survivalfrance.org/events.php?event_id=224

Le film sera le 20 décembre à l'affiche dans les villes suivantes :
Paris, Strasbourg, Lyon, Montreuil, St Ouen l'Aumone, Marseille, Aix en Provence, Dijon, Nîmes, Toulouse, Bordeaux, Montpellier, Rennes, Tours, Grenoble, Nantes et Lille.
Cliquez ici pour connaître le détail des salles :
http://survivalfrance.org/events.php?event_id=228


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Survival aide les peuples indigènes à défendre leur vie, protéger leurs terres et déterminer leur propre avenir.
Survival n'accepte aucune subvention gouvernementale et dépend exclusivement de ses membres et donateurs pour financer ses campagnes.

Pour en savoir plus ou apporter votre soutien :
http://www.survivalfrance.org

info@survivalfrance.org

20/10/2006

THE FUTURE OF FOOD

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 Deborah Koons Garcia / 2005



Future of food est une enquête choc réalisée, après trois ans de travail, par Deborah Koons Garcia. Au départ, la réalisatrice avait conçu un film sur l’utilisation de pesticides dans l’agriculture américaine. Ses recherches l’ont conduite à des questions plus angoissantes ayant trait aux OGMs (organismes génétiquement modifiés), leurs effets inconnus et potentiellement catastrophiques sur la santé humaine et sur l’environnement. Le documentaire soulève également les questions éthiques que posent les brevets génétiques, le contrôle de l’alimentation par des sociétés comme Monsanto, multinationale de biotechnologie agricole, porte drapeau du génie génétique.
Future of food est le premier film d’importance sur l’histoire et la technologie du génie génétique. Il traite des conséquences multiples causées par des semences génétiquement modifiées sur l’environnement, et du danger pour les consommateurs.

Le documentaire raconte l’histoire personnelle de Percy Schmeiser, agriculteur dans la province du Saskatchewan, au Canada, poursuivi par le géant de l’agroalimentaire Monsanto, parce qu’avaient été retrouvés dans ses champs des plants de colza résistant au Round-up. Percy cultivait ses terres depuis 50 ans quand une lettre de menace lui a été adressée par la multinationale : celle-ci exigeait le paiement de graines qu’il n’avait jamais semées. Le film montre le harcèlement dont Percy et sa femme Louise ont été victimes. Nous rendons aussi visite à des fermiers d’Oaxaca au Mexique, qui ont découvert que leur maïs local avait été envahi par du maïs transgénique alors même que sa culture est interdite chez eux. Au récit des agriculteurs viennent s’ajouter des entretiens avec des défenseurs de l’environnement, des universitaires, et des spécialistes reconnus des questions alimentaires.

Deborah Koons Garcia dispose brillamment toutes les pièces du puzzle et nous montre ainsi avec quelle rapidité notre système alimentaire se transforme. Brevetage du vivant, faillite des instances de régulation et de chercheurs dépendants financièrement de l’industrie agro-alimentaire, va et vient dérangeant entre le gouvernement américain et les conseils d’administration des grandes firmes d’agro-chimie, le film dresse un portrait inquiétant de l’agriculture en Amérique du Nord.

Deborah Koons Garcia a également réalisé All About Babies, Poco Loco et Grateful Dawg, un documentaire sur son mari, Jerry garcia, des Grateful Dead, aujourd’hui disparu.