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16/05/2011

Des dizaines de migrants abandonnés en pleine mer

Source : http://www.cyberpresse.ca/international/201105/11/01-4398177-des-dizaines-de-migrants-abandonnes-en-pleine-mer.php?utm_categorieinterne=trafficdrivers&utm_contenuinterne=cyberpresse_B9_international_29810_accueil_POS1

 



Des migrants africains attendent, à Misrata, de pouvoir... (Photo: AFP)

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Des migrants africains attendent, à Misrata, de pouvoir quitter la Libye en proie à des violences depuis plusieurs semaines déjà.

Photo: AFP

Isabelle Hachey
La Presse

«Pourquoi?»

Le père Moses Zerai jure qu'il répétera la question, encore et encore, jusqu'à ce qu'il obtienne une réponse.

«Pourquoi personne ne les a sauvés?»

Ils étaient 72 à bord du bateau qui a quitté le port de Tripoli, le 25 mars, pour l'île italienne de Lampedusa. Ils ne se sont jamais rendus.

Après avoir dérivé pendant 16 jours en mer Méditerranée, le bateau en panne s'est plutôt échoué sur les côtes libyennes, avec seulement 11 survivants à son bord.

Les autres sont morts de faim et de soif, abandonnés par des militaires européens qui les ont carrément laissés mourir un à un sur leur rafiot, selon une enquête du quotidien britannique The Guardian.

Dernier appel

Le père Moses Zerai est l'un des derniers à avoir été en contact avec le capitaine, avant que la batterie de son téléphone satellite ne s'éteigne. Établi à Rome, ce prêtre catholique originaire de l'Érythrée est considéré comme le berger des migrants africains en Europe. Il se bat pour leurs droits depuis des années.

«Quand ils m'ont joint, j'ai appelé les gardes-côtes italiens. Peu après, des militaires ont survolé le bateau en hélicoptère et ont lancé des bouteilles d'eau et des paquets de biscuits aux passagers. Ils sont partis en leur assurant que des sauveteurs seraient bientôt là. Mais personne n'est revenu», raconte le père Zerai en entrevue téléphonique.

Après cinq jours de dérive et de détresse, le bateau est passé près d'un porte-avions. Deux jets en ont décollé pour survoler le bateau à basse altitude. Sur le pont, deux femmes brandissaient leurs bébés affamés. Mais les militaires n'ont rien fait pour leur venir en aide. Le bateau a continué à dériver.

Alors, les passagers ont commencé à mourir, les uns après les autres.

Des morts, encore des morts

«Tous les matins, on se réveillait pour trouver de nouveaux cadavres, qu'on gardait 24 heures avant de les jeter par-dessus bord, a raconté l'un des survivants, Abu Kurke, au Guardian. «Les derniers jours, on ne savait plus qui on était... soit on priait, soit on mourait.»

Au bout de 10 jours, presque tous les passagers étaient morts, selon M. Kurke. «On avait gardé une bouteille d'eau de l'hélicoptère pour les deux bébés. On a continué à les nourrir après la mort de leurs parents. Mais après deux jours, les bébés sont morts aussi - ils étaient si petits...»

Droit international

«La loi internationale du transport maritime est claire: si un bateau éprouve des difficultés en mer, il est obligatoire de l'aider», souligne le père Zerai.

L'OTAN a démenti avoir refusé de secourir les migrants. La marine française a aussi soutenu que son porte-avions Charles-de-Gaulle, dont le Guardian dit qu'il s'agit probablement de celui que le bateau a croisé en mer, ne se trouvait pas dans le secteur à ce moment-là. Et l'hélicoptère? Mystère.

«Les militaires étaient-ils italiens, français, britanniques? Je ne sais pas, dit le père Zerai. L'OTAN nie, d'accord. Alors qui?»

Le bateau s'est échoué le 10 avril près de la ville assiégée de Misrata. Les 11 survivants ont été arrêtés et emprisonnés pendant quatre jours. Deux rescapés n'ont pas survécu aux geôles de Kadhafi. Aujourd'hui, ceux qui restent se cachent à Tripoli. Prêts à embarquer dans le prochain bateau pour l'Europe.

 

12/05/2011

Gaspillage alimentaire : un exemple

 

http://www.youtube.com/watch?v=P0XuzmwIUOA&feature=pl...

Surconsommation

 

http://www.youtube.com/watch?v=oeSg9zYbFms&feature=fv...

07/05/2011

Justice est faite ?

 

Après qu’Oussama Ben Laden a été abattu au Pakistan par un commando américain [1], Barack Obama a déclaré : « Justice est faite ». Puis la chefferie de l’État français, qui s’y connaît en équité, a bissé :« Justice est faite ». Puis le quotidien Le Monde, où les indigènes sont, comme on sait,« tous américains », a titré, cet après-midi : « Justice est faite ».

 

Notes

[1] Dans une opération menée, semble-t-il - c’est du moins ce qu’affirme « un haut responsable de l’administration Obama » -, à l’insu des autorités locales : nous sommes donc en train de parler, t’auras compris, de ce qui ressemble très fort à une violation caractérisée de la souveraineté d’un État.

[2] N’oublions jamais que le gars avait été formé à la rude mais performante école yankee de la war against communism.

[3] Liste non exhaustive...

[411/9.Autopsie des terrorismes, Le Serpent à Plumes, 2001.


Source : Politis http://www.politis.fr/Justice-Est-F...

12/02/2011

La Tunisie et les dictats du FMI : Comment la politique macro-économique entraîne la pauvreté et le chômage dans le monde

Source  http://www.michelcollon.info/La-Tunisie-et-les-dictats-du-FMI.html

 

10 février 2011

Les médias occidentaux proclament, en chœur, que le général Zine el-Abidine Ben Ali, ancien président déchu de la Tunisie, est un dictateur. Le mouvement de protestation tunisien est simplement décrit comme la conséquence d’un régime antidémocratique et autoritaire défiant les normes de la « communauté internationale ». Toutefois, Ben Ali n’était pas un « dictateur ». Les dictateurs décident et dictent. Ben Ali était un serviteur des intérêts économiques occidentaux, un pantin fidèle qui obéissait aux ordres, avec l’appui soutenu de la communauté internationale.

 

 

L’interférence étrangère dans les affaires intérieures de la Tunisie n’est pas mentionnée dans les reportages médiatiques. Les hausses de prix de la nourriture n’ont pas été « dictées » par le gouvernement Ben Ali, mais imposées par Wall Street et le Fonds monétaire international (FMI).

 

Le rôle du gouvernement Ben Ali a été d’appliquer la médecine économique mortelle du FMI, laquelle, sur une période de plus de 20 ans, a servi à déstabiliser l’économie nationale et à appauvrir la population tunisienne.

 

En tant que chef d’État, Ben Ali n’a pas pris de décision importante. La souveraineté nationale était un souvenir. En 1987, au plus fort de la crise de la dette, le gouvernement nationaliste de gauche d’Habib Bourguiba a été remplacé par un nouveau régime, fermement engagé à adopter des réformes du « marché libre ».

 

La gestion macro-économique sous le commandement du FMI était aux mains des créanciers extérieurs de la Tunisie. Au cours des 23 dernières années, la politique sociale et économique du pays a été dictée par le consensus de Washington.

 

Ben Ali est demeuré au pouvoir, car son gouvernement a obéi et appliqué efficacement les dictats du FMI, tout en servant à la fois les intérêts des États-Unis et ceux de l’Union européenne.

 

Ce système a été implanté dans de nombreux pays.

 

La continuité des réformes fatales du FMI requiert un « changement de régime ». La mise en place d’une marionnette politique assure l’application du programme néolibéral, tout en créant des conditions propices à l’effondrement éventuel d’un gouvernement corrompu et impopulaire ayant servi à appauvrir une population entière.

 

Le mouvement de protestation

 

Ce ne sont pas Wall Street et les institutions financières internationales situées à Washington qui sont la cible directe du mouvement de protestation. L’implosion sociale a été dirigée contre un gouvernement plutôt que contre l’interférence des puissances étrangères dans l’orientation de la politique gouvernementale.

 

Au début, les protestations n’étaient pas le résultat d’un mouvement politique organisé et dirigé contre l’imposition des réformes néolibérales.

 

De plus, des indications laissent croire que le mouvement de protestation a été manipulé dans le but de créer un chaos social, ainsi que d’assurer une continuité politique. Des reportages non corroborés révèlent des actes de répression et d’intimidation par des milices armées dans de grandes zones urbaines.

 

La question qui importe est comment la crise évoluera-t-elle ? Comment la question plus large de l’interférence étrangère sera-t-elle abordée par le peuple tunisien ?

 

Du point de vue de Washington et de Bruxelles, on prévoit le remplacement d’un régime impopulaire et autoritaire par un nouveau gouvernement fantoche. Des élections sont envisagées sous la supervision de la soi-disant communauté internationale, auquel cas des candidats seraient présélectionnés et approuvés.

 

Si ce processus de changement de régime devait être mis en œuvre pour le compte d’intérêts étrangers, le nouveau gouvernement mandataire assurerait sans doute la continuité du programme politique néolibéral ayant servi à appauvrir la population tunisienne.

 

Le gouvernement transitoire mené par le président intérimaire Fouad Mebazza se trouve actuellement dans une impasse, avec une opposition féroce émanant du mouvement syndical (UGTT). Mebazza a promis de « rompre avec le passé » sans toutefois spécifier si cela signifie l’annulation des réformes économiques néolibérales.

 

Aperçu historique

 

En chœur, les médias ont présenté la crise en Tunisie comme une question de politique intérieure, sans offrir de perspective historique. La présomption veut qu’avec la déposition du « dictateur » et l’installation d’un gouvernement dûment élu, la crise sociale se résoudra tôt ou tard.

 

Les premières « émeutes du pain » en Tunisie remontent à 1984. Le mouvement de protestation de janvier 1984 a été causé par une hausse de 100 pour cent des prix du pain. Cette augmentation a été exigée par le FMI dans le cadre du programme d’ajustement structurel tunisien (PAS). L’élimination de subventions alimentaires était une condition de facto de l’accord de prêt avec le FMI.

 

Le président Habib Bourguiba, qui a joué un rôle historique dans la libération de la Tunisie du colonialisme français, a déclaré un état d’urgence en réaction aux émeutes :

 

Alors que les tirs retentissaient, la police et les troupes d’armée en jeeps et en véhicules blindés de transport de troupes se sont déployées à travers la ville pour réprimer l’« émeute du pain ». La démonstration de force a finalement amené un calme inquiétant, mais seulement après que plus de 50 manifestants et passants furent tués. Ensuite, dans une émission dramatique de cinq minutes diffusée à la radio et à la télévision, Bourguiba a annoncé qu’il annulait la hausse de prix. (Tunisia : Bourguiba Lets Them Eat Bread - TIME, janvier 1984)

 

Après le désaveu du président Bourguiba, la hausse de prix du pain a été annulée. Bourguiba a congédié son ministre de l’Intérieur et a refusé de se conformer aux demandes du consensus de Washington.

 

Le programme néolibéral avait tout de même été établi et avait mené à une inflation galopante et au chômage de masse. Trois ans plus tard, Bourguiba et son gouvernement ont été chassés dans un coup d’État sans effusion de sang, « en raison d’incompétence ». Cela a conduit à l’installation du général Zine el-Abidine Ben Ali comme président en novembre 1987. Ce coup ne visait pas Bourguiba : il était largement destiné à démanteler de façon permanente la structure politique nationaliste établie initialement au milieu des années 1950, tout en privatisant les avoirs de l’État.

 

Le coup militaire a non seulement marqué la fin du nationalisme postcolonial mené par Bourguiba, il a également contribué à affaiblir le rôle de la France. Le gouvernement Ben Ali s’est fermement aligné sur Washington plutôt que Paris.

 

À peine quelques mois après l’installation de Ben Ali comme président en novembre 1987, un accord majeur a été signé avec le FMI. Un accord avait également été conclu avec Bruxelles concernant l’établissement d’un régime de libre-échange avec l’Union européenne. Un programme de privatisation massive sous la supervision du FMI et de la Banque mondiale a aussi été lancé. Avec des salaires horaires de l'ordre de 0,75 euro, la Tunisie était par ailleurs devenue un paradis de main d’œuvre bon marché pour l’Union européenne.

 

Qui est le dictateur ?

 

Un examen des documents du FMI suggère que depuis l’inauguration de Ben Ali en 1987 jusqu’à aujourd’hui, son gouvernement s’était fidèlement conformé aux conditionnalités du FMI et de la Banque mondiale, incluant le congédiement de travailleurs du secteur public, l’élimination du contrôle des prix de biens essentiels à la consommation et l’implantation d’un programme de privatisation radical. L’abolition des barrières commerciales ordonnée par la Banque mondiale a favorisé le déclenchement d’une vague de faillites.

 

À la suite de ces bouleversements de l’économie nationale, les remises en espèces provenant des travailleurs tunisiens dans l’Union européenne sont devenues une source de plus en plus importante de recettes en devises.

 

Environ 65 000 Tunisiens vivent à l’étranger. En 2010, le montant total des remises en espèces étaient de l'ordre de 1,960 milliards de dollars, une hausse de 57 % par rapport à 2003. Une grande part de ces remises en devises sera affectée au service de la dette extérieure.

 

L’augmentation spéculative des prix de la nourriture dans le monde

 

En septembre 2010, un accord a été conclu entre Tunis et le FMI, lequel recommandait l’annulation des subventions restantes comme moyen d’atteindre un équilibre fiscal.

 

La prudence fiscale demeure une priorité très importante pour les autorités [tunisiennes], qui, dans l’environnement international actuel, voient également la nécessité de maintenir en 2010 une politique budgétaire d’un grand secours. Au cours de la dernière décennie, les efforts visant à réduire significativement le ratio d’endettement public ne devraient pas être compromis par un politique budgétaire trop laxiste. Les autorités sont engagées à contrôler fermement les dépenses actuelles, incluant les subventions […] (IMF Tunisia : 2010 Article IV Consultation - Staff Report ; Public Information Notice on the Executive Board Discussion ; and Statement by the Executive Director for Tunisia http://www.imf.org/external/pubs/ft...)

 

Il convient de noter que l’insistance du FMI relativement à l’austérité budgétaire et à l’abolition des subventions coïncide chronologiquement avec une nouvelle augmentation des prix des aliments de base aux bourses de marchandise de London, New York et Chicago. Ces hausses de prix sont en grande partie le résultat des spéculations pratiquées par d’importants intérêts financiers et commerciaux de l’industrie agricole.

 

Ces augmentations des prix des aliments, résultant d’une manipulation pure et simple (plutôt que de la rareté), ont servi à appauvrir des populations partout dans le monde. Ces hausses constituent une nouvelle étape dans le processus d’appauvrissement mondial.

 

« Les médias ont simplement induit l’opinion publique en erreur en ce qui concerne les causes de ces augmentations de prix, en se concentrant presque exclusivement sur les questions des coûts de production, du climat et d’autres facteurs entraînant la réduction des réserves et pouvant contribuer à l’augmentation du prix des produits essentiels. Bien que ces facteurs puissent entrer en jeu, leur pertinence est limitée dans l’explication de la hausse impressionnante et dramatique des prix des produits de base.

 

La montée en flèche des prix des aliments est largement due à la manipulation des marchés. Elle est attribuable aux transactions spéculatives sur les marchés des produits de base. Les prix du grain sont augmentés artificiellement par des opérations spéculatives de grande envergure aux Bourses mercantiles de New York et de Chicago.

 

Les transactions spéculatives sur le blé, le riz ou le maïs peuvent avoir lieu sans qu’il y ait de transactions réelles sur marchandises. Les institutions qui spéculent sur le marché de grains ne sont pas nécessairement impliquées dans la vente et la livraison réelles du grain.

 

Les transactions peuvent utiliser des fonds de l’Index des marchandises, lesquels sont des paris sur le mouvement général à la hausse ou à la baisse des prix des produits de base. Une « option de vente » est un pari que le prix diminuera, une « option d’achat » un pari que le prix augmentera. Par une manipulation concertée, les négociateurs institutionnels et les institutions financières font monter le prix et ensuite placent leurs paris sur un mouvement à la hausse des prix d’un produit en particulier.

.

La spéculation génère de la volatilité sur les marchés. En retour, l’instabilité qui en résulte encourage davantage d’activité spéculative.

 

Les gains sont réalisés lorsque les prix augmentent. Inversement, si le spéculateur vent à découvert, les gains seront enregistrés lors de la chute des prix.

 

Cette récente hausse spéculative du prix des aliments a favorisé un processus mondial de création de la famine d’une ampleur sans précédent. » (Michel Chossudovsky, Global Famine, Global Research, 2 mai 2008, http://www.globalresearch.ca/index....;;aid=8877)

 

Il y a eu, de 2006 à 2008, une hausse dramatique des prix de tous les produits essentiels, dont le riz, le blé et le maïs. Le prix du riz a triplé en cinq ans, passant d’environ 600 $ la tonne en 2003 à plus de 1800 $ la tonne en mai 2008.

 

(Michel Chossudovsky, http://www.globalresearch.ca/index....;;aid=9191. Pour plus de détails voir Michel Chossudovsky, chapitre 7, Global Poverty and the Economic Crisis dans Michel Chossudovsky et Andrew Gavin Marshall, éditeurs, The Global Economic Crisis, The Great Depression of the XXI Century, Global Research, Montréal 2010, http://globalresearch.ca/index.php?...;;aid=20425 )

 

L’augmentation récente du prix du grain est caractérisée par un bond de 32 % enregistré durant la deuxième moitié de 2010 dans l’indice composite des prix alimentaires.

 

La forte hausse des prix du sucre, des céréales et des oléagineux a conduit les prix alimentaires mondiaux à un record en décembre, dépassant les coûts de 2008, lesquels avaient déclenché des émeutes à travers le monde, et suscitant des mises en garde à l’effet que les prix s’aventuraient en terrain dangereux.

 

En décembre, un indice compilé mensuellement par les Nations Unies a battu son record de juin 2008 pour atteindre le niveau le plus élevé depuis la création des registres en 1990. Publié par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (ONUAA) située à Rome, l’indice, qui suit les prix d’un panier de céréales, des oléagineux, des produits laitiers, de la viande et du sucre, a augmenté pendant six mois consécutifs. (Jill Treanor, World food prices enter 'danger territory' to reach record high, The Guardian, 5 janvier 2011)

 

Amère ironie : avec une augmentation du prix des aliments en arrière-plan, le FMI recommande l’annulation des subventions dans le but d’atteindre l’objectif d’austérité budgétaire.

 

Manipulation des données sur la pauvreté et le chômage

 

Il règne un climat de désespoir social, les vies sont brisées.

 

Alors que le mouvement de protestation en Tunisie est visiblement le résultat d’un processus d’appauvrissement de masse, la Banque mondiale soutient que les niveaux de pauvreté ont été réduits grâce aux réformes de libre-marché adoptées par le gouvernement Ben Ali.

 

Selon le rapport de la Banque mondiale sur la Tunisie, le gouvernement tunisien (avec l’appui des institutions de Bretton Woods) a contribué à réduire les niveaux de pauvreté à 7 % (des niveaux nettement plus bas que ceux enregistrés aux États-Unis et dans l’Union européenne).

 

La Tunisie a enregistré des progrès remarquables en matière de croissance équitable, de lutte contre la pauvreté et d’indicateurs sociaux. Son taux de croissance s’est maintenu à 5 % en moyenne au cours des vingt dernières années, avec une progression régulière du revenu par habitant et une augmentation parallèle du bien-être de sa population mise en évidence par un taux de pauvreté qui est parmi les plus bas de la région (7 %).

 

 

La réduction de la pauvreté est attribuable principalement à la progression régulière du revenu par habitant […] L’amélioration du réseau routier rural a joué un rôle particulièrement important en permettant aux populations pauvres vivant dans les campagnes d’accéder aux marchés et aux services urbains. Les programmes de logement ont amélioré les conditions de vie des populations pauvres et permis de dégager des revenus et de l’épargne pour financer des dépenses alimentaires et non alimentaires, ce qui a contribué également à agir favorablement sur l’allégement de la pauvreté. Les subventions alimentaires, qui étaient destinées aux pauvres, quoiqu’elles n’aient pas fonctionné de façon optimale, ont également aidé les habitants pauvres des villes. (Banque mondiale, Note de présentation de la Tunisie)

 

Ces chiffres sur la pauvreté sont de pures fabrications, sans compter l’« analyse » économique et sociale sous-jacente. Ils présentent le libre-marché comme le moteur de réduction de la pauvreté. Le cadre analytique de la Banque mondiale est utilisé pour justifier un processus de « répression économique » appliqué dans plus de 150 pays en développement à travers le monde.

 

Comme seulement 7 % de la population vit dans la pauvreté (comme le suggère l’« estimation » de la Banque mondiale) et que 93 % arrive à satisfaire ses besoins fondamentaux en termes de nourriture, de logement, de santé et d’éducation, il n’y aurait pas de crise en Tunisie.

 

La Banque mondiale participe activement à la manipulation de données et à la déformation de la détresse des Tunisiens. Le taux de chômage officiel est de 14 % et le niveau réel de chômage est beaucoup plus élevé. Le taux de chômage enregistré chez les jeunes est de l’ordre de 30 %. Les services sociaux, dont la santé et l’éducation, se sont effondrés sous le poids des mesures d’austérité économique du FMI et de la Banque mondiale.

 

La Tunisie et le monde

 

Ce qui arrive en Tunisie relève d’un processus économique mondial qui détruit la vie des gens par la manipulation délibérée des forces du marché.

 

De manière plu générale, « les dures réalités économiques et sociales sous-jacentes aux interventions du FMI sont la forte hausse du prix des denrées alimentaires, des famines au niveau local, des mises à pieds massives de travailleurs urbains et de fonctionnaires, ainsi que la destruction des programmes sociaux. Le pouvoir d’achat à l’échelle nationale s’est effondré, des cliniques médicales et des écoles ont été fermées, et des centaines de millions d’enfants sont privés de leur droit à un enseignement primaire ». (Michel Chossudovsky, Global Famine, op cit.) 

Il est nécessaire de diriger le mouvement de protestation non seulement contre le gouvernement mais aussi contre l’ambassade étasunienne, la délégation de l’Union européenne et les missions du FMI et de la Banque mondiale en Tunisie. [M. C. mis à jour le on 22 janvier 2010]

 

Article original en anglais : Tunisia and the IMF's Diktats : How Macro-Economic Policy Triggers Worldwide Poverty and Unemployment, publié le 20 janvier 2011.

Traduit par Julie Lévesque pour Mondialisation.ca.

01/02/2011

Vaches ou machines ?

Les humains, une espèce intelligente certes, sensible parait-il, mais sensée ?????????????

http://www.rue89.com/2008/09/28/des-vaches-a-hublot-pour-regarder-passer-les-chercheurs

 

23/01/2011

À PROPOS DE DUVALIER : ALERTE ! de Gérard Bloncourt

Nous assistons à une véritable mascarade ! Duvalier doit être emprisonné comme il le mérite. Il a volé des centaines de millions de dollars ! Il a fait assassiner et torturer des milliers de patriotes! Il a ruiné le pays !Qu'est-ce que cette tragi-comédie d'un soi disant "pardon"! Que fait le gouvernement Préval ? Que font les  gouvernants français qui l'on hébergé durant 25 ans, sans qu'il soit jamais inquiété ? Où est-elle la Patrie des droits de l'Homme ! Le scandale continue ! Justice pour notre peuple ! Justice pour tous les êtres épris de Liberté et d'authentiques convictions démocratiques !


 

Des informations alarmantes donnent à penser que Jean-Claude Duvalier ne serait pas jugé et condamné en Haïti. De sombres manœuvres seraient mises en place pour tenter de le soustraire à la justice de son pays. On parle de l’expulser vers la France où il a jouit de 25 ans d’impunité et où il pourrait continuer à se terrer une fois de plus.
Dans l’ombre on avance aussi la solution du « pourrissement ».
Il est scandaleux qu’il n’ait pas été immédiatement incarcéré et le fait qu’il soit maintenu dans le luxueux confort de son hôtel donne à penser que l’actuel gouvernement haïtien n’a nullement l’intention d’appliquer les mesures de sévérité qui s’imposent envers cet ex dictateur responsable de crimes contre l’humanité, qui a en outre massivement pillé les fonds publics.
Duvalier n’est pas revenu en Haïti sur un coup de cœur. Il y a été invité. On lui a promis qu’il serait acclamé et que les portes d’un nouveau pouvoir lui seraient ouvertes.
Le fait même que des militaires l’aient accueillis à l’aéroport et escorté jusqu’à son Hôtel prouve qu’au sommet de l’Etat des ordres pour ce faire ont été donné.
Mais la pression des organisations qui défendent les Droits humains, telles Amnesty International, l'Institute for Justice & Democracy in Haiti (IJDH) et le Bureau des Avocats Internationaux (BAI) et nos propres organisations, ont obligé les autorités haïtiennes à se livrer à des démonstrations qui donneraient à croire qu’elles appliquent le droit.
Il faut que le gouvernement Préval, qui jusqu’à présent s’est tu, indique clairement sa position, et prennent les mesures qui s’imposent de toute évidence.
Il faut que ce despote soit mis en prison.
Il doit répondre de ses crimes.
Restons vigilants et mobilisés !

 

Gérald Bloncourt
Président du « Comité pour juger Duvalier »
 20 Janvier 2011

 

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DUVALIER _IMPORTANT

 

Thèmes de l’Emission de la semaine 

Orlando le 21 janvier, 2011

Actualités Politiques : Grandes Lignes

La coïncidence du retour de Duvalier dimanche dernier et l’arrivée le jour suivant de Jose Miguel Insulza pour remettre aux autorités haïtiennes et spécifiquement confirmer la conclusion du rapport des experts de l’OEA, est significative ! Elle surprend, remplit instantanément l’avant-scène politique, inquiète et provoque de la confusion et de l’émoi. Cette coïncidence fait l’objet de multiples spéculations et interprétations. Il est très difficile de pouvoir croire à la spontanéité de la manifestation pro-Duvalier. Les manifestants qu’on a vus à l’aéroport, sont évidemment trop jeunes pour se rappeler du règne de Duvalier père ou fils. Les autorités haïtiennes, bien sûr, font semblant d’être surprises par cette irruption théâtrale. Alors qu’il est absolument certain que Préval était non-seulement au courant, mais aussi de connivence. Un diplomate français en Haïti a dit : « On n’en a eu vent, que quand l’avion a atterri en Guadeloupe » (sic). Alors que le cadre duvaliérien présent à l’aéroport, avant l’atterrissage, avait déjà orchestré à l’avance tout ce qui était nécessaire et approprié pour la circonstance, manifestation, accueille, presse, cortège motorisé etc., pour recevoir Duvalier et sa femme et les conduire à leur hôtel. C’est un fait que ceci n’était ni un secret ni une surprise, quand on constate dimanche l’impeccabilité d’exécution du programme d’accueille triomphal et la présence tout endimanchée des vieux de la vieille garde duvalierienne à l’aéroport. Il n’y avait rien de spontané. Le seul accroc à l’impeccabilité d’exécution de l’agenda, a été la conférence de presse annoncée pour lundi, qui n’a pas eu lieu. On n’a donné aucune explication d’ailleurs. On l’a simplement renvoyée pour mardi. Et mardi, c’était l’autre coup de théâtre rocambolesque, la convocation de Duvalier au parquet par le juge d’instruction pour être auditionné.

 

La presse espagnole en guise d’explication pour ce retour inattendu, fait savoir que Duvalier soit souffrant. Qu’il ne vient que pour visiter son pays avant de mourir. Cette explication est en contradiction avec ce que dit Duvalier lui-même : « Je ne suis venu que pour aider. » Et sa femme d’ajouter : « Nous ne sommes ici que pour quelques jours. » Aider qui à faire quoi ? Voilà le hic.

 

Arriver au beau milieu d’une crise électorale aiguë sans précédant que le secrétaire général de l’OEA semble être en train de négocier avec Préval. Et précisément à la date où le second tour aurait dû normalement avoir lieu, si les résultats publiés le 7 décembre 2010 n’étaient pas contestés, augmente les possibilités que ce soit un coup de théâtre prémédité et calculé.

 

Tous ceux qui sont familiers avec les us et coutumes gouvernementaux, la complexité des négociations et des pourparlers qu’ils auraient dû engendrer. Ils savent, que compte tenu de ce qu’est l’histoire et le dossier politique du personnage qui rentre pour visiter après 25 ans d’exil, du patrimoine catastrophique que lui et son régime ont légué, les circonstances dans lesquelles son gouvernement et son régime ont été renversés du pouvoir, la coïncidence très problématique d’une conjoncture de fin de règne, de probabilité de fin de régime, and last but not least, celle d’une crise électorale aiguë et explosive, où cette visite, soit disant inattendue vient de faire irruption, qu’il y ait très certainement des tractations politiques et des complicités de toutes sortes qui sous-tendent ce retour théâtral, dramatique et paradoxal.

 

On ne peut pas s’astreindre qu’à la conjecture et qu’à la suspicion ! On ne peut pas non-plus ne pas placer au centre de cette affaire, l’implication et la participation directe d’au moins trois acteurs principaux, le gouvernement français, le gouvernement haïtien, Duvalier et très probablement un quatrième, Jose Miguel Insulza. Vu le rôle important qu’Insulza a eu en tant que dirigeant de l’instance hémisphérique dans les manœuvres qui ont rendu possible le retour paradoxal au pouvoir en février 2006, au lendemain d’une longue lutte insurrectionnelle qui venait de renverser le régime dont Préval a été le 1er premier ministre, le second et le quatrième chef d’état. 

 

Croyez-vous qu’un dictateur haïtien vivant en exile en France depuis 25 ans, peut  manifestement faire des réservations en son nom pour lui et sa femme à une grande ligne aérienne connue tel que la Air France à destination d’Haïti, au beau milieu d’une crise électorale explosive publiée et commenté mondialement, sans que le gouvernement français ne le sache ? Peu importe ce que dit le gouvernement français, ceci est catégoriquement une impossibilité !

 

Dans l’arène politique haïtienne la rivalité traditionnelle entre la France et les Etats-Unis est persistante, peu importe la tendance du pouvoir français. N’a-t-on pas vu, Dominique de Villepin alors ministre des affaires étrangères du gouvernement de droite de Jacques Chirac, au lendemain du renversement du gouvernement populiste de Jean Bertrand Aristide, inviter avec insistance Hugo Chavez, un populiste notoire, à s’immiscer directement dans les affaires politiques haïtiennes ? Alors que paradoxalement à la même époque en France on s’engageait dans une levée frénétique de masse pour barrer le chemin au populiste notoire Jean-Marie Le Pen pour l’empêcher d’avoir accès au pouvoir.

 

Selon les informations reçues, l’oncle de Jude Célestin, Rony Gilot une autorité duvalierienne, a orchestré la coïncidence de la visite de Duvalier et d’Insulza. Cette manœuvre n’a-t-elle pas eu le résultat escompté ? La visite de Duvalier n’a-t-elle pas été la diversion qui a rempli l’avant-scène nationale et internationale et éclipsé totalement l’importance de la visite d’Insulza ?

 

Mis à part le succès incontestable de la diversion, Insulza a fait pire. Il a édulcoré la version finale du rapport avant de le remettre à Préval et au CEP. Ceci les a réconfortés. Comme on le constate. La fuite délibérée de la version initiale du rapport ayant paniqué les gens du cercle rapproché de Préval, pour les rassurer, il leur avait dit : « Ne vous en faites pas. J’ai l’OEA dans mes poches. » Expression métaphorique peut être. Mais qu’en pensez-vous ?

 

Si Insulza pense pouvoir, dans cette conjoncture, s’appuyer sur un support quelconque du Brésil, pour imposer la continuité, quand les Etats-Unis, la France et le Canada, s’y opposent, il se trompe. La politique et le comportement traditionnel du Brésil et du Mexique, dans ces circonstances, a toujours été, pas d’interférence directe.

 

Il est a remarqué que la publication de la version initiale du rapport des experts de l’OEA, n’avait suscité aucune réaction adverse dans l’arène politique nationale et internationale. Réitérer la publication des résultats du 7 décembre dernier, sera évidemment une catastrophe. On vient d’en faire l’expérience ! Les Etats-Unis, la France et le Canada en sont aussi conscients. Ils veulent littéralement à tout prix éviter un tel carnage. Il n’y a que la caste et le régime qui ont exercé le pouvoir depuis 53 ans à avoir intérêt dans un chambardement, pour bénéficier du temps de récupération. Car leur décrépitude et leur décomposition étant un handicape sévère et manifeste à leur survie immédiate ; Il leur faut par tous les moyens provoquer un délai d’au moins de deux ans pour leur récupération. C’est là que se situe le dilemme de ceux qui s’opposent au deuxième tour entre les deux candidats incontestablement les plus populaires et veulent refaire les cartes. Refaire les cartes, donne une seconde chance à qui ? Aux candidats de la caste et du régime qui veulent toujours maintenir le pied à l’étrier.

 

Or aujourd’hui, l’impératif, si on veut vraiment sortir du gouffre de malédiction où l’on se trouve depuis 53 ans, c’est de rompre ! Il n’y a pas d’autre alternative !


Gerald BLONCOURT
gerald.bloncourt@club-internet.fr

22/01/2011

Brèves Tunisie : les 40 voleurs, intérêts US et israéliens, désordre organisé...

A lire sur : http://www.michelcollon.info/Breves-Tunisie-les-40-voleurs.html

 

Le Dakar renoue avec une triste habitude

Créé le 13/01/2011 à 17:17 Par Be. C.
De Sports.fr

Source et pour en lire plus : http://grouchos.org/090106sifflet.htm

Après les deux travailleurs morts électrocutés en marge de la course samedi dernier, le Dakar 2011 doit faire face au décès d'un nouvel homme, mercredi, très tôt dans la matinée. Sous les coups de 6h, Eduardo Osvaldo Amor, un concurrent argentin, est en effet entré en collision avec un automobiliste, qui n'a pas survécu à ses blessures. Une enquête a d'ores et déjà été ouverte.

Toutes les mesures de précautions n'ont donc pas évité le drame. Alors qu'Amaury, l'organisateur du Dakar, avait mis l'accent sur la sécurité des spectateurs et des concurrents pour cette édition 2011, un décès est venu entacher la course, jeudi. "A 6h10 ce matin, un accident de la circulation s'est produit entre le concurrent argentin n°410 et un automobiliste, 30 km après la sortie de la spéciale à l'entrée du village de Tinogasta, le concurrent se dirigeant en liaison vers le bivouac de Chilecito", explique ainsi le communiqué de presse de l'organisation. La voiture en question est la la Toyota des Argentins Eduardo Osvaldo Amor et Alejandro Horacio Fenoglio.

Un accident qui se révèle fatal, puisque malgré l'arrivée des secours, le patient succombe finalement à ses blessures, une fois arrivée à l'hôpital de Tinogasta. Si aucune autre information n'a filtrée pour le moment, l'organisation annonce que "la justice de la province de Catamarca à ouvert une enquête afin de déterminer les circonstances de l'accident". C'est donc le premier décès directement lié à la course, et impliquant un concurrent. Deux autres décès sont toutefois à déplorer en marge de la course puisque deux personnes sont mortes électrocutées, durant le montage des différentes installations liées à la course.

Un décès qui vient donc entacher le bilan d'Amaury, qui avait annoncé avant la course que "la sécurité restait la préoccupation majeure des organisateurs du rallye". Pour protéger les spectateurs, l'organisation avait ainsi prévu "une très large campagne d'information à travers les médias", pour prévenir des zones dédiées au public. Pour ce qui est des liaisons, "la vitesse sur les itinéraires devra être conforme à la législation en vigueur et sera sévèrement contrôlée". Des mesures qui n'ont finalement pas suffi, même si des zones d'ombres demeurent sur les circonstances de cet accident
.

23/12/2010

Wikileaks et Cantona servent-ils à quelque chose ?

 

Michel Collon  le 21 décembre 2010

Voir la vidéo : http://www.michelcollon.info/Wikileaks-et-Cantona-servent-ils-a.html

16/11/2010

15 joyeuses propositions pour l'emploi des jeunes et des seniors

http://www.institutmontaigne.org/15-propositions-pour-l-emploi-des-jeunes-et-des-seniors-3229.html

Présidente du groupe de travail : Danielle Nees
RAPPORT - Septembre 2010

Jeunes et seniors au travail

Le pacte de 1945 selon lequel les actifs financent les études des jeunes et les retraites des seniors est aujourd’hui dépassé. La part de la population qui supporte cette double charge s’est considérablement réduite : près de 80% des emplois en France sont assurés par la population des 25-54 ans, alors que celle-ci ne représente que 40% de la population totale. Le taux d’emploi des jeunes comme celui des seniors reste trop faible. Cette concentration de l’activité économique n’est pas tenable : elle pèse sur la croissance et fragilise la solidarité entre les générations.

15 propositions pour l'emploi des jeunes et des seniorsCe Rapport formule quinze propositions concrètes pour développer l’emploi des jeunes et des seniors. L’objectif est simple : permettre à chacun de travailler autrement pour vivre autrement, afin de restaurer l’esprit de solidarité qui fait aujourd’hui cruellement défaut à notre société.

 

 

 

 

 

et :

"L’Institut Montaigne ? C’est un laboratoire d’idées créé en 2000 par Claude Bébéar, ancien PDG d’Axa. Ce « think tank » se déclare « dépourvu de toute attache partisane ». Mais il est financé par quatre-vingt grandes entreprises, parmi lesquelles Areva, Barclays, BNP-Paribas, Bolloré, Bouygues, Dassault, Ernst & Young, LVMH, Sanofi-Aventis, SFR, Total, Vinci, Veolia... Des structures absolument pas « partisanes » et qui se gardent bien d’exercer une quelconque influence sur les politiques et le sens de l’intérêt général." Lire le reste sur :

http://www.bastamag.net/article1282.html

 

03/11/2010

La peste brune gangrène l’Occident

Source : http://www.michelcollon.info/La-peste-brune-gangrene-l-Occident.html


15 octobre 2010

Du Nord au Sud et d’Est en Ouest, l’Europe est à nouveau prise dans le tourment de la peste brune. Presqu’aucun pays du vieux continent n’est épargné.

 

Voilà que même en Suède, le parti d’extrême droite " Démocrates de Suède" dirigé par Jimmie Aakesson passe la barre des 4%, avec 5,7% des votes et obtient 20 sièges aux législatives. L’alliance de centre-droit sortante remporte les élections mais perd la majorité absolue avec 49,2 des sièges, ce qui permet à l’extrême droite d’occuper la position confortable d’arbitre au sein du parlement suédois. L’ autre surprise est la montée fulgurante de l’extrême droite dans un ancien pays communiste comme la Hongrie. En avril dernier, avec 16,7% des voix,le Mouvement pour une meilleure Hongrie (Jobbik) est, tout comme son homologue suédois, entré pour la première fois au Parlement avec 46 sièges. Si on peut expliquer la montée de l’extrême droite dans des pays comme la Bulgarie ou la Hongrie par l’augmentation de la pauvreté, cet argument perd tout son sens dans des pays comme la Hollande ou l’Autriche. Aux Pays-Bas, le 9 juin dernier, le PVV de Geert Wilders s’est installé comme troisième force dans le paysage politique néerlandais, avec 15,5 % des voix et 24 sièges au Parlement contre neuf auparavant. En Autriche, le Parti autrichien de la liberté (FPÖ) et l’ Alliance pour l’avenir de l’Autriche (BZÖ) cumulent 29 % des voix aux dernières législatives.

 

Conseils municipaux et parlements sont progressivement investis. Aux élections européennes de juin 2009, l’extrême droite a réalisé un score à deux chiffres dans des pays comme la Hollande, la Belgique, le Danemark, la Hongrie, l’Autriche, la Bulgarie et l’Italie. Maintenant, c’est au tour de l’exécutif de tomber entre les mains de ces formations fascisantes. Après que l’Autriche en ait fait l’expérience, c’est en Italie, l’un des six pays fondateurs de l’ UE, que le parti populiste de la Ligue du Nord participe au gouvernement de Silvio Berlusconi. A l’allure ou vont les choses, il est fort probable que plusieurs autres pays suivront.

 

La montée du fascisme en occident n’est nullement un accident de l’histoire. Cette vision du monde puise son sens dans la pensée colonialiste et raciste du 19ème siècle et continue de nos jours à faire moult émules en Europe et en Amérique du nord. En temps de vaches maigres, le vernis universaliste et démocratique se craquelle et fond comme neige au soleil mettant à nu les traits hideux de la modernité. Depuis le 19ème siècle, l’Europe balance entre deux mode de pensée : l’universalisme ambigu à la française et l’ethnocentrisme de type germanique. Le tiraillement entre universalisme et repli nationaliste trouve ses origines en France dans la pensée d’un Tocqueville et d’un Renan d’un coté et celle d’un Gobineau de l’autre. Bien que croyant à la hiérarchie des races, les deux premiers voyaient d’un bon oeil le rapprochement des races et des cultures, symbolisant ainsi l’optimisme libéral mais combien naïf du 19ème siècle. Gobineau, lui, confondant race et nation, pensait que la pureté raciale était la clef de la vitalité durable des nations, il assurait que les peuples élites, entendez par là les peuples de race blanche, en se mélangeant avec les autres, couraient à la dégénérescence raciale et sociale. C’est cette dernière lecture de la société qui semble actuellement envahir le mental d’une frange de plus en plus importante du monde occidental.

 

Paradoxalement, c’est toujours au moment ou à la veille d’un projet expansionniste que la grande bourgeoisie pousse la population vers le repli identitaire en la dressant contre un épouvantail choisi selon l’intérêt du moment. Des politologues de diverses tendances considèrent que l’extrême droite n’a pas d’avenir car xénophobe, antimondialiste , se situant à contre courant du néolibéralisme dominant. On oublie très vite que pendant les années vingt et trente, les partis populistes n’auraient jamais pu s’emparer du pouvoir en Europe, sans le soutien de la grande bourgeoisie financière et industrielle. En Allemagne, c’est grâce aux Krupp, Siemens, Thyssen, Messerschmitt, IG Farben, re­groupés en cartels que Hitler a pu accéder au pouvoir et que l’économie de guerre a pu se mettre en marche . En Italie, les fascistes ont été également subventionnés par les grands patrons italiens de l’industrie d’armement (Fiat, Ansaldo, Edison) et par l’ensemble des milieux industriels et financiers. L’émergence des régimes fascistes a été l’outil idéal d’embrigadement et de militarisation de la société en vue d’une nouvelle guerre mondiale. En France, la situation n’était guère différente. Une synarchie, composée de banquiers et d’industriels imposait depuis 1922 ses choix aux politiciens, à l’armée et aux intellectuels de service. Pendant les années trente, les différentes formations d’extrême droite, issues des classes moyenne et pauvre, vont se liguer pour former la Cagoule, une vraie armée de miliciens financée par la grande bourgeoisie. Après le coup d’état raté de 1937 visant le gouvernement du Front Populaire , le gros des troupes de la Cagoule collaboreront avec l’occupant sous le gouvernement de Vichy. Dans son ouvrage " Le choix de la défaite ", l’historienne Annie Lacroix-Riz défend la thèse selon laquelle l’arrivée des hommes de Vichy au pouvoir était préparée d’avance. La transformation des institutions passait par la défaite française, voulue et planifiée par la grande bourgeoisie nationale. Ainsi l’occupation a permis ce que les autres régimes fascistes voisins ont réussi : démanteler un régime parlementaire mou et museler définitivement les partis de gauche et les syndicats, repaires du péril bolchevique. Ce qui préoccupait le plus le monde libre à cette époque, ce n’était nullement les libertés bafouées mais l’élimination de la vermine rouge qu’Hitler s’est chargé d’éradiquer au profit de tous. Mais, ayant raté son coup, ce dernier a payé cher son échec.

 

Bien qu’arborant des slogans et des revendications en contradictions avec les politiques de la classe dominante, l’extrême droite avec sa conception raciologique de la nation a toujours été instrumentalisée pour répandre un sentiment d’insécurité et de haine. Pendant les années trente, la démonisation du juif et du bolchevique a permis de rallier la majorité au national-socialisme. Le délire paranoïaque rendait plus aisée l’adhésion des masses à une guerre d’expansion impérialiste.

 

La rhétorique de la démonisation est une constante dans l’imaginaire occidental. Elle a toujours servi à rationaliser l’agression qui se trame et à la justifier après coup. On a vite fait de dénier à une altérité jugée démoniaque son humanité et par conséquent sa légitimité. L’urgence de son éradication s’impose alors comme un impératif moral. C’est comme si la modernité inquiète par essence, en quête perpétuelle de sens, ne retrouve sa cohésion et sa consistance et ne construit son identité que face à une altérité maléfique qu’elle s’invente selon les les besoins du moment. Ce que nous vivons en ce moment n’est pas sans nous rappeler les années trente du siècle dernier. Je sais que beaucoup ne manqueront pas de m’accuser d’anachronisme mais les similitudes sont si frappantes et si inquiétantes.

 

Si la figure du juif persécuteur et assassin du Christ, bolchévique de surcroît a fait les beaux jours des fascistes de l’époque, aujourd’hui, c’est celle de l’islamiste-musulman-arabe (pas la peine d’être très regardant sur la nuance) qui fait le bonheur de l’extrême droite européenne, nord-américaine, australienne...Voila que ressurgit des tréfonds du passé le sarrasin sanguinaire, violent, violeur, voleur, obscurantiste, barbare, inculte, conquérant, sans foi ni loi pour s’acharner contre les valeurs chèrement acquises du monde civilisé. Curieuse cette subite diabolisation de l’islam alors qu’il n y a que quelques années l’occident qualifiait les terroristes actuels du nom gratifiant de moujahidines. Il faut dire qu’à cette époque les islamistes combattaient l’armée soviétique en Afghanistan. Ce qu’il faut dire aussi est que l’islam radical a été encouragé, financé et propagé dans le monde arabo-musulman par ceux-la même qui le démonisent aujourd’hui. L’effondrement de l’URSS a créé en occident un vide qu’on pourrait qualifier à la limite d’existentiel. Le monde capitaliste s’est rendu compte alors de sa fragilité et de son incapacité à assurer sa cohésion interne sans s’inventer une altérité démoniaque. On a alors vite fait de remplacer le démon communiste défaillant par un autre, le démon islamiste. Curieux, cependant, cet enchaînement des faits. Les États Unis, pays traditionnellement anti-islamique et pro-sioniste promouvant et finançant l’extrémisme islamiste au moment où l’union soviétique implosait d’elle-même !... Et si l’objectif étasunien n’était autre que d’éveiller les vieux démons de l’extrême droite européenne et occidentale !... Mettre deux extrémismes face à face et provoquer une belle réaction en chaine ! En un mot instaurer " le chaos créateur " si cher à Condoleezza Rice !

 

La manœuvre a si bien réussi que toute l’Europe s’est mise en branle, sonnant l’hallali. La meute fascisante a retrouvé subitement toute sa hargne alléchée par la nouvelle proie, confondant taliban afghan, savant iranien, élu palestinien, ouvrier turc, jeune des banlieues, etc...etc...A tous les niveaux de la société, une atmosphère de guerre froide s’installe. Une vision duale et réductrice du monde opposant l’Occident à l’Orient, la civilisation à la barbarie relègue en arrière-plan les identités sociales. Depuis plus de vingt ans déjà l’extrême droite occupe les devants de la scène sociale, politique et médiatique, brandissant sans répit l’épouvantail arabo-islamique, semant la peur et l’insécurité, remodelant les clivages sociaux en dressant les unes contres les autres les ethnies et les confessions. Une marche à rebours vers le tribalisme !

 

Le plus inquiétant est l’apparition des milices idéologiques. 127 milices extrémistes ont été dernièrement répertoriées aux États Unis. En Hongrie, la Magyar Garda, émanation du parti d’extrême droite, Jobbik ; organisation para-militaire raciste et potentiellement violente s’est donné pour tâche d’expulser les Roms du pays (une manie en Europe ces derniers temps). En Italie, la situation est bien plus grave. Une multitude de milices fascisantes se sont implantées à travers la péninsule. Elles font office de police parallèle, remplaçant souvent la police d’état. Parmi ces milices on peut citer les Chemises Vertes des Gardes du Pô, la Garde Nationale Padane (Guardia Nazionale Padana) de la Ligue du Nord, d’ Umberto Bossi, la Guardia Nazionale Italiana (GNI) dont l’uniforme paramilitaire est calqué sur celui des milices crypto-nazies des années 30. On y retrouve l’aigle impérial romain, et surtout ce logo, le Schwarze Sonne ( soleil noir) à 12 branches, symbole central du mysticisme nazi. Dans le sud de la France, la Ligue du Sud, réplique en quelque sorte de la ligue du nord italienne vient de créer des milices qui font la chasse à la délinquance, entendez par là la chasse aux non-blancs. En région parisienne les identitaires ont pris le nom emblématique de « Projet Apache ». Ils sont très actifs dans les beaux quartiers et très influents parmi les supporters du PSG (virage Boulogne). La droite traditionnelle se met elle aussi de la partie. Dans un discours prononcé le 24 novembre 2009, Sarkozy propose : « ... Des réservistes expérimentés seront recrutés comme délégués à la cohésion police-population. Ils s’appuieront sur des "volontaires citoyens de la police nationale", c’est à dire des habitants dont je veux engager le recrutement pour qu’ils s’impliquent dans la sécurité de leur propre quartier... » Il s’agit en un mot d’installer des milices de quartier à l’image de ce qui se passe dans l’Italie de Berlusconi.

 

La dérive islamophobe s’amplifie à un point tel qu’elle devient alarmante. Votation contre l’édification de minarets en Suisse, profanation de cimetières musulmans en France, menace d’autodafé du Coran aux États Unis, attitude provocatrice d’Angela Merkel, honorant le danois auteur des caricatures du prophète...Sommes-nous donc à la veille de la neuvième croisade ?! Le phénomène déborde l’extrême droite et s’empare de la droite traditionnelle. En France, slogans et revendications du FN sont systématiquement adoptés par le gouvernement. Le calcul électoral ne suffit pas à lui seul à expliquer une telle dérive. Il faut croire plutôt que nous assistons à une radicalisation de la droite qui tend à se fasciser entraînant derrière elle une partie de la gauche bien pensante.On a de plus en plus l’amère impression que c’est Le Pen qui légifère et le gouvernement qui exécute. Le spectacle insupportable de l’expulsion des Roms et la déchéance de la nationalité française d’immigrés évoquent les mesures infligées par le gouvernement de Vichy et des nazis à l’encontre des tziganes et des Juifs durant l’occupation. La loi sur les mineurs délinquants passe de la responsabilité pénale individuelle à la responsabilité collective. Il s’agit de punir les parents d’enfants délinquants, autrement dit, pratiquer les punitions collectives qui rappellent les pires moments des exactions coloniales. Il ne manque plus que l’étoile verte à épingler sur la poitrine des immigrés quoique facilement reconnaissables au faciès. Nostalgique de l’apartheid étasunien ou sud-africain ou ébloui par l’admirable modèle social israélien, l’état français rafle la première place à tous ses voisins qui ne manqueront pas de l’imiter.

 

Lorsque le régime démocratique devient incompatible avec les intérêts de la grande bourgeoisie, celle-ci commence par abandonner progressivement les positions modérées de la droite traditionnelle et se tourne vers les formations fascistes. Tel a été le cas en Europe pendant les années trente, la situation aujourd’hui ne semble guère différente. On commence par agiter une menace entraînant une réaction paranoïaque : "le juif bolchévique" à l’époque, "le terroriste islamiste" aujourd’hui. Inhibée par le sentiment d’insécurité, la société perd toute réactivité et le pouvoir ne manque pas d’en profiter. L’épouvantail du 11 septembre a permis à l’état US de prendre des mesures liberticides, connues sous le nom de Patriot Act. Imitant les Etats Unis, le Canada, l’Allemagne, l’Italie et bien d’autres pays ont profité de l’ « aubaine » pour faire passer des lois portant atteintes aux libertés fondamentales. La France, en bon élève, surpasse tout les autres . Il est vrai qu’en temps de crise, cet état de non-droit permet de tenir en laisse la société et d’imposer une politique drastique d’austérité, cependant, ce type d’interprétation me semble bien en deçà de la réalité. Les dictatures fascistes installées par le grand capital sont souvent annonciatrices de grandes invasions impérialistes. La démonisation de l’altérité a pour fonction de transformer les conquêtes en actes de légitime défense. Hitler a choisi de conquérir son "espace vital" à l’ Est se donnant pour mission d’éradiquer le mal bolchevique, les Etats Unis et leurs alliés ont choisi leur "espace vital" au Sud-Est avec pour mission d’écraser le mal islamiste et peut-être même islamique...qui sait...

 

A ceux qui ne s’en sont pas encore aperçu, nous sommes déjà en pleine guerre mondiale ! Après l’Afghanistan et l’Irak à qui le tour ?...

L’Iran probablement... Et ensuite ?...La Chine peut-être...

 

Boulimique... bien trop boulimique l’occident !

 

 

Fethi GHARBI

02/11/2010

Pig Business

http://www.pigbusiness.co.uk/

Voir le film sous-titré en français :

http://www.youtube.com/watch?v=RO0PjcVihaM&feature=channel

 

31/10/2010

Plans d’austérité : Tour d’Europe

Source : http://www.michelcollon.info/Plans-d-austerite-Tour-d-Europe.html

Bart De Wever demande que l'on fasse des économies comme les pays proches de nous. Mais ça veut dire quoi ? Petit tour des mesures, pays par pays.



Bart De Wever s’est plaint lundi (dans l’émission Terzake sur la VRT) que les partis francophones lui faisait perdre un temps précieux. « Voyons les économies que font les pays autour de nous. Nous devons prendre des mesures urgentes. » Solidaire est parti en reconnaissance, pour un aperçu des plans d’économie et de la résistance des citoyens. En Belgique, les discussions communautaires cachent les visions des grands partis sur les 24 milliards qu’il faut économiser et surtout dans quels secteurs – ni les banques, ni les grosses fortunes, ni les fraudes fiscales – il faut économiser : le social, la sécurité, les chômeurs, les travailleurs… Comme dans le reste de l’Union européenne. Et la N-VA espère obtenir plus rapidement une plus grande autonomie de la Flandre. Diviser, conquérir et… économiser.
Grande-Bretagne

Plan du gouvernement

Economies de 94 milliards d’euros d’ici 2014

• Salaires, allocations et pensions : relèvement de l’âge de la pension à 70 ans, diminutions des montants de pensions pouvant aller jusqu’à 30 %, gel des salaires et des allocations familiales pendant 2 à 3 ans.

• Secteur public : économies de 22,7 milliards d’euros dans les soins de santé d’ici 2014 : 60 000 jobs sont supprimés, 2,5 milliards de moins d’allocations-maladie, et privatisation des hopitaux publics. Privatisation probable de la poste et 10 000 licenciements chez les pompiers ; un seul département public reste plus ou moins épargné : celui de la défense nationale ; fermeture de nombreuses bibliothèques publiques, piscines et services de placements.

• Emploi : le plan d’économies entraîne la suppression de 1,5 millions d’emplois d’ici 2014 dont 600 000 dans les services publics.

• Divers : économies de 25 milliards d’euros sur les allocations familiales, allocations de logement et de chauffage et sur la gratuité des services publics pour les 60+.

Résistance

La Fédération syndicale TUC prévoit des manifestations de masse dès la fin de ce mois quand seront connus les détails du plan d’économies, mais déjà des protestations se font entendre. Le mercredi 29 septembre de Glasgow à Londres, des dizaines de militants syndicaux ont envahi les rues. Le mois dernier, le trafic des trains et metro s’est arrêté à plusieurs reprises en protestation contre les licenciements qui menacent la sécurité ; ceci également début octobre.
France

Plan du gouvernement

Le gouvernement veut économiser 100 milliards d’ici 2013 (en réduisant le déficit public de 8 à 3 %).

• Pensions : une réforme prévoit le recul de la pension (de 60 à 62 ans) et l'allongement de la durée de cotisations pour une pension complète de retraite, ce qui conduit, dans la pratique, à obtenir celle-ci à 67 ans plutôt qu'à 65 ans. Les périodes d’inactivité ne sont pas comptabilisées.

• Dépenses publiques : les dépenses passeront de 319 en 2010 à 268 milliards en 2011. 31 638 postes de fonctionnaires seront supprimés. Un gel des salaires est prévu dés l’année prochaine.

• Sécurité sociale : économie de 2,5 milliards en 2011 en diminuant le remboursement sur les médicaments et sur les soins de longue durée.

Résistance

Dès le mois de juin, les syndicats ont mobilisé leurs affiliés pour des manifestations de masse : 2 millions le 24 juin, 2,5 millions le 7 septembre, 3 millions le 23 septembre, etc. Vu le refus du gouvernement de modifier ou de retirer le projet de loi et le vote de cette réforme par le parlement, les syndicats les plus radicaux (Sud, CGT, FO, …) ont décrété les grèves reconductibles le 12 octobre et des manifestations des secteurs privé et public ont eu lieu dans tout le pays. Les lycéens se sont joints aux militants et des citoyens ont bloqué la plupart des raffineries de pétrole, causant une pénurie aux stations d’essence.
Portugal

Plan du gouvernement

Plan de restrictions de 11,7 milliards d’euros d’ici 2013

• Salaires et allocations sociales : gel des salaires dans le privé et baisse des salaires des fonctionnaires entre 5 et 10 %, baisse des allocations sociales.

• Pensions : gel de toutes les pensions, hausse de l’âge de départ à la retraite de 65 à 67 ans.

• Secteur public : diminution du nombre de fonctionnaires de 10 % ce qui revient à la perte de 65 000 postes. Des entreprises d’Etats comme la poste , les chemins de fer, les entreprises de gaz et électricité, les télécoms, les autoroutes, les aéroports,… seront en tout ou en partie privatisés.

• Impôts : 6 milliards d’euro de revenus supplémentaires par la hausse de la TVA de 21 à 23 % et hausse des impôts sur tous les revenus ; fin de la déduction fiscale pour les dépenses d’enseignement et de santé.

Résistance

Il y a déjà eu trois jours d’action nationale. Le 5 février, 50 000 personnes manifestaient dans les rues de Lisbonne. Le 29 mai, il y en avait 300 000. Lors de la journée européenne syndicale du 29 septembre, plus de 100 000 personnes manifestaient dont 50 000 à Lisbonne et 20 000 à Porto. Les manifestations se sont faites à l’initiative du CGTP/IN, syndicat proche du Parti Communiste du Portugal. Le 24 novembre, une grève générale aura lieu dans tout le pays suite à une décision unanime de la CGTP/IN.
Espagne

Plan du gouvernement

Plan de restrictions de 15 milliards d’euros en 2011

• Diminution du budget de l’État de 7,7 % (en comparaison avec 2010) en 2011 (15 milliards d’euros de restrictions) avec baisse du budget de l’enseignement de 8,1 %, de la recherche de 7 %, de l’environnement de 31,8 %, des travaux publics de 34,6 % et de l’administration des impôts de 5 %

• Baisse des salaires des fonctionnaires de 5 %

• Pensions : gel des allocations, hausse de l’âge de départ à la retraite de 65 à 67 ans.

• Impôts : hausse des tarifs TVA de 16 à 18 % et de 7 à 8 %

Résistance

Le 29 septembre, trois quarts des travailleurs espagnols étaient en grève : il y avait plus de 10 millions de grévistes et 1,5 million de manifestants. L’industrie espagnole était paralysée. C’était la première grève générale depuis huit ans à l’appel de deux grands syndicats espagnols- la socialiste UGT et les Commissions ouvrières, historiquement proche du PCE (le Parti communiste espagnol). En Andalousie, le bastion du mouvement communiste en Espagne, 50 000 personne sont manifesté à Séville, 20 000 à Huelva et Córdoba, 18 000 à Málaga 18 000 et 12 000 à Grenade. Il y avait encore 100 000 personnes à Oviedo, capitale des Asturies et 70 000 à Vigo en Galice. Les plus grandes manifestations ont eu lieu à Barcelone (400 000) et à Madrid (500 000).
Italie

Plan du gouvernement

Économie de plus de 24 milliards d’euros lors de la période 2011-2012

• Pensions : allongement de l’âge de la retraite pour les femmes de 61 à 65 ans, un minimum de 41 années de cotisations pour obtenir une retraite complète, passage de la retraite à 67 ans en 2018, gel des pensions dans le secteur public.

• Salaires : gel des salaires des fonctionnaires pendant trois ans ; modération et baisse des salaires, qui selon le syndicat CGIL toucheront principalement les revenus d’environ 1 200 euros.

• Secteur public : baisse de plus de 400 000 postes dont 140 000 dans l’enseignement et 160 000 dans les soins de santé ; en outre, des économies de 1,4 milliard d’euros dans l’enseignement.

Résistance

Le vendredi 08/10 il y a eu une grande grève dans l’enseignement, avec des manifestations dans plus de 80 villes. Les 13 en 15 octobre, encore des grèves dans l’enseignement. Les 21 en 22 octobre c’est le tour des bus, train et tram. Les 14 en 25 octobre tous le secteur des transports aériens. Le syndicat des metallos organise également la lutte contre les projets d’allongement du temps de travail et la flexibilité. Samedi 16 octobre, à Rome, un million de personnes manifestaient : les secteurs métal et d’autres secteurs, ainsi que des étudiants et des politiciens de l’opposition sous le slogan « grève, grève, grève » studenten
Pays-Bas

Plan du gouvernement

Plan d’économies de 18 milliards d’euros

• Salaires et allocations : gel des salaires des fonctionnaires et réduction de diverses allocations de remplacement

• Economies sur l’accueil des enfants

• Coupes dans les aides sociales, le travail adapté et la loi pour les jeunes handicapés

• Le gouvernement veut affaiblir les syndicats par une nouvelle loi qui ne rend plus nécessaire leur approbation sur les accords salariaux auprès de l’administration

Résistance

Le syndicat et des organisations progressistes ont prévu une première manifestation le 23 octobre sous le slogan « Nous n’allons pas payer la crise ! »
Allemagne

Plan du gouvernement

Plan d’économies de 82 milliards d’euros d’ici à 2014 dont 11,2 milliards dès 2011

• Emploi : suppression de 15 000 jobs dans l’administration

• Réduction de l’allocation de chômage

• Allocation parentale : réduction de l’allocation parentale pour les hauts salaires (versée aux parents qui restent à la maison pour s’occuper de leur enfant) et suppression de l’allocation pour les personnes qui ont le revenu minimum

• En 2006, l’âge de la pension a été repoussé jusqu’à 67 ans. Si l’âge de la pension n’est pas atteint, alors le montant de la pension diminue de 100 euros par mois

• Secteur public : coupes dans l’enseignement, la culture et la santé

Résistance

En Allemagne, l’industrie du lait bavaroise a eu un rôle déterminant dans la résistance contre la crise politique de Merkel. Les semaines précédentes, des grèves d’avertissement ont eu lieu. Les agriculteurs et les travailleurs de l’industrie du lait ont tenu des piquets dans les 20 plus importantes entreprises laitières. Ils ont reçu le soutien de syndicalistes métallurgistes et des services publics. Ils revendiquent une augmentation salariale de 5 %, un même salaire pou un même travail dans les entreprises sous-traitantes et la possibilité pour les plus anciens de prendre leur retraite en échange de l’embauche de jeunes. Dans le secteur du lait en Bavière, on travaille en feu continu, ce qui affecte la santé des agés. Le syndicat du secteur de l’alimentation a reçu le soutien d’une grande partie de la population. Hans Hartl, responsable syndical, s’attend à un automne chaud. (Junge Welt, 15/10)
Grèce

Plan du gouvernement

Plan d’économies de 30 milliards en 3 ans

• Salaires : diminution de 10 % des salaires des fonctionnaires, blocage des salaires dans le privé, salaire minimum passé de 740 à 500 euros

• Pensions : diminution des allocations de pensions, recul de l’âge de la pension et suppression des départs en retraite prévus

• Impôts : augmentation de la TVA de 11 à 23 % sur un tiers des biens et services et augmentation de 63 % des accises sur le carburant

• Secteur public : réduction de 35 % du personnel du rail, augmentation des tarifs des transports publics et fermetures de plusieurs ligne ; libéralisation du marché de l’énergie, augmentation des tarifs de l’énergie de 40 à 100 %

• Libéralisation du travail : suppression des conventions collectives de travail et de la journée de 8 heures, mesures qui vont favoriser la flexibilité

Résistance

Le PAME, le front militant de lutte des travailleurs, animé par le Parti communiste de Grèce (KKE) a déjà organisé avec succès 12 grèves générales depuis l’annonce des mesures d’austérité. C’est la force syndicale de loin la plus militante du pays. Le 7 octobre, il y avait de nouveau une grève générale dans les services publics et ce ne sera pas la dernière.




Source : Solidaire

22/10/2010

Indécents ces Américains !!!

http://www.agoravox.tv/actualites/international/article/usa-indecence-interdite-27921

Libre et indépendant, dites-vous ?

http://www.agoravox.tv/actualites/societe/article/milgram-asch-stanford-experience-28009

 

17/10/2010

Nîmes et Cannes, les Chicago français : TF1 a encore frappé !

Published on Rue89 (http://www.rue89.com)

By Laurent Mucchielli

10/16/2010 - 12:34


Un reportage d'Appels d'urgence les place en tête des villes les plus délinquantes. C'est faux : explications de Laurent Mucchielli.


Notre intention n'est pas de revenir sur la polémique lancée fin septembre [1] par le député
socialiste Arnaud Montebourg à propos de la chaîne de télévision TF1.
Mais un fait est là : les jours et les années passent, et une certaine télévision -pas
exclusivement celle dont on va parler ici- continue à distiller volontairement la peur dans la
population. L'actualité de cette deuxième semaine d'octobre nous oblige à y revenir, preuves
en main.


« Quatre mois » d'enquête pour un résultat très partial.


Le 12 octobre, la chaîne TF1 diffusait un nouveau numéro de l'émission Appel d'urgence
intitulé « Nîmes : Flics sous tension contre jeunes délinquants prêts à tout ». [2]


Cette émission « propose, à travers des documents exclusifs, de suivre sur le terrain et sur le vif, des professionnels des urgences durant leurs interventions au quotidien ». Bref : on fait du spectaculaire.
Le ton est évidemment plus qu'alarmiste. La présentatrice affirme en ouverture : « Depuis le début des années 2000, Nîmes partage avec Cannes la première et peu enviable place au hit parade du plus haut taux de délinquance. Une délinquance qui sévit dans les quartiers sensibles mais qui touche aussi désormais le centre-ville et les petites communes périphériques, jusqu'ici relativement épargnés.
Agressions, vols, cambriolages, trafics de drogue et de voitures volées… Chaque jour, les 400 fonctionnaires du commissariat de la cité gardoise sont sur la brèche pour tenter de combattre le sentiment d'insécurité qui s'est parfois installé dans la population. »
Elle précise aussi que « les équipes d'Appels d'urgence ont suivi, pendant quatre mois, le travail des policiers nîmois ». Un temps très long pour une « enquête » aussi partiale, reposant sur un incroyable amateurisme en matière statistique.
Certes, il y a à Nîmes des quartiers très difficiles, c'est un fait. Et le travail des policiers l'est en proportion, c'est tout aussi clair. Mais ce n'est pas un scoop. Ce genre de reportage aurait pu être tourné dans des dizaines et peut-être même des centaines de quartiers ailleurs en France.
Nîmes et Cannes ne sont pas les villes les plus dangereuses. Pourquoi donc cette focalisation nîmoise ? La raison officielle ou apparente est donnée dans la première phrase de la présentation du reportage : Nîmes et Cannes (dont le reportage ne parle pas en réalité) seraient les deux villes ayant le plus fort taux de délinquance en
France.


Sauf que c'est faux : chacun peut consulter le classement du taux de criminalité par
circonscription de police, publié chaque année par le ministère de l'Intérieur sur le site
internet de la Documentation française. Le dernier volume, consacré à l'année 2009 [3] fournit
comme d'habitude un classement des villes selon leur taux de criminalité.
En réalité, la ville qui arrive largement en tête de ce triste palmarès est Saint-Denis (93),
suivie d'Avignon (84) et de La Courneuve (93). Nîmes et Cannes arrivent dans le premier
peloton qui suit ces échappées, avec des taux de délinquance en réalité comparables à de
nombreuses villes comme Nice, Lille, Marseille, Perpignan ou encore Aubervilliers et
Bobigny.


Quatre mois de travail, donc, reposant sur un choix initial que l'on peut invalider en deux
minutes de lecture sur Internet.

 

Le « taux de criminalité » des villes établi sur un calcul biaisé


Au risque de paraître vouloir accabler ces journalistes, on ira même un tout petit peu plus
loin dans l'analyse statistique. Non pas pour revenir ici sur le problème que nous avons déjà
soulevé de la représentativité des statistiques de police (par exemple dernièrement au sujet
de la délinquance des filles [4]). Mais pour réfléchir à la signification de ce « taux de
criminalité par villes ».


De quoi s'agit-il ? Simplement du rapport entre le nombre de faits constatés annuellement
par la police et le nombre d'habitants des communes, tel que comptabilisé par l'Insee sur la
base des recensements de la population [5].

Le problème est ici le suivant : la population des habitants permanents d'une ville n'est pas
forcément constante. Elle peut au contraire connaître des variations réellement énormes. Et
le nombre d'infractions constatées par la police peut en réalité reposer sur un nombre de
résidents temporaires sans commune mesure avec le nombre des habitants permanents.
Deux exemples majeurs illustrent ce problème. Le premier est le phénomène saisonnier
touristique. Rappelons que la France est la première destination touristique dans le monde,
et que la Côte d'Azur est sa première zone touristique.
C'est ainsi que la ville de Cannes, qui compte officiellement 71 500 habitants au 1er janvier
2009, voit en réalité sa population tripler pendant l'été et accueille au total environ 2,5
millions de visiteurs par an [6]. Ceci ne provient pas uniquement du tourisme estival car,
comme chacun sait, Cannes accueille aussi un festival de cinéma mondialement connu.
Et voilà le deuxième exemple : après le tourisme, les événements particuliers suscitant un
important et soudain afflux de population. A Cannes son festival, et à Nîmes ses deux
grandes férias (celle de Pentecôte -la plus connue- mais aussi celle des vendanges en
septembre).


Lors de la féria de Nîmes, la population est multipliée par sept !


C'est du reste ainsi que le reportage de TF1 commence : par des scènes tournées lors de la
féria, dont on rappelle qu'elle accueille environ 1 million de personnes sur seulement quatre
jours, ce qui multiplie par sept la population (146 500 habitants au dernier recensement).
Concentré de population, concentré de boissons alcoolisées (car cette fête traditionnelle liée
à la tauromachie est aussi une énorme beuverie) et concentré de bagarres, de vols et de
dégradations en tous genres.
Et l'on pourrait ainsi multiplier les exemples : si Saint-Denis est la première commune du
palmarès officiel de l'insécurité, quel rôle y joue le fait qu'y est implanté le Stade de France ?
Même chose pour le tourisme général et le festival particulier (de théâtre) à Avignon.
Le problème général est donc le suivant : quelle part le taux de criminalité officiel de ces
villes doit-il non pas uniquement à une activité délinquante locale et permanente mais aussi
à des concentrations sans commune mesure de populations saisonnières ?
Là encore, en quatre mois d'enquête, les journalistes de TF1 auraient pu trouver des
réponses chiffrées auprès des autorités policières locales. Mais encore fallait-il se poser la
question.


TF1 a choisi la peur comme ligne éditoriale d'Appels d'urgence.


Comment la chaîne de télévision française la plus regardée (quelle responsabilité ! ) et la
plus fortunée (il sera difficile de plaider l'erreur due à un manque de moyens) peut-elle
produire une telle médiocrité d'information, pour ne pas dire une telle désinformation ?
Notre hypothèse est que, derrière la raison officielle ou apparente, il y a en réalité une raison
cachée. Cette raison, c'est le but premier de ce reportage qui n'est pas de comparer des
villes entre elles ni même de savoir où se situent les problèmes les plus importants.

La véritable motivation est de montrer quelque chose qui fera peur. C'est pour cela qu'il
fallait choisir ces deux villes de province dont l'une est peu connue (c'est Nîmes), l'autre
possède une image totalement éloignée de celle que l'on se fait ordinairement de la
délinquance (c'est Cannes).
Cette peur est activée ainsi par l'un de ses mécanismes les plus classiques et les plus forts :
la contagion. Et cette contagion est elle-même double. D'une part, le problème ne
concernerait plus seulement les très grandes agglomérations, il se diffuserait en province.
D'autre part, il ne concernerait plus seulement les « quartiers sensibles » (et ses barbares
bien connus), il se répandrait et viendrait menacer les braves gens du centre-ville.


Blog principal:
Laurent Mucchielli [7]
Montebourg : « TF1 a une tradition délinquante » [1]


""La Cité du mâle", quelle nullité !" sur le blog perso de Laurent Mucchielli [8]

source: http://www.rue89.com/laurent-mucchielli/2010/10/16/nimes-et-cannes-les-chicago-francais-tf1-aencore-
frappe-171484

 


Links:


[1] http://www.rue89.com/2010/10/03/montebourg-tf1-a-une-trad...

[2] http://videos.tf1.fr/appels-urgence/nimes-flics-sous-tens...

[3] http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/104000...

[4] http://www.rue89.com/node/169664

[5] http://www.insee.fr/fr/

[6] http://www.cannes.com/index.php?option=com_content&ta...

[7] http://www.rue89.com/laurent-mucchielli

[8] http://bit.ly/aTKiRg

 

 

Petit avis perso : ces méthodes médiatiques à l'américaine n'ont rien de surprenantes vu le but recherché. Personnellement, je ne regarde pas TF1 et pour cause, je ne regarde pas la tv du tout et ce depuis 15 ans ! Boycott total et sans aucun effets secondaires indésirables. Seulement désirables : du temps en plus, des infos, du cinéma etc librement choisis, des pensées libres et des libres pensées, des activités créatives, des enfants heureux, des ondes en moins etc etc... et je n'ai pas PEUR !!!

30/08/2010

LA FINANCE À L’ASSAUT DE LA BIOSHERE

« Le problème de cette nature, c’est qu’elle est gratuite »

Hélène Leriche, citée dans le

publi-reportage Spécial Biodiversité,

 Libération 29 juin 2010

 

La biodiversité est sous les feux de la rampe. Se basant sur les atteintes irréversibles portées au monde du vivant, l'Organisation des nations unies (ONU) a déclaré 2010 « année de la biodiversité ». Le battage médiatique est à son comble. Point d’orgue : la Convention sur la biodiversité, issue du Sommet de la terre de Rio en 1992, réunira en octobre prochain, à Nagoya (Japon) les 193 États signataires du traité. Cette 10ème conférence des Parties (COP 10) [1]  se déroulera au siège du Keidaren, le puissant syndicat patronal japonais. Pour cet événement qu’ils ont largement sponsorisé,  une présence massive des lobbies d’affaires_est attendue.  Sur la table des négociations à Nagoya, les enjeux seront aussi pharamineux qu’ils sont occultés. Sous prétexte de préservation de la biodiversité, se prépare un recadrage complet de la structure et des finalités de la convention. Petite histoire d’une formidable imposture.

 

  La notion de biodiversité ne se limite plus aujourd’hui à « la diversité des êtres vivants et de leurs caractères génétiques ». Dans un parallélisme parfait avec les services environnementaux de l’OMC (organisation mondiale du commerce), établis dans  l'Accord général sur le commerce des services (AGCS) [2] elle s’étend à « tout le matériel » susceptible d'être mis en valeur. Elle inclut non seulement les plantes, les animaux, les gènes, mais également les paysages, les forêts, le captage et la filtration de l'eau, les savoirs faire traditionnels, les cultures, la «sensibilisation» du public, etc.

 

Dans les coulisses de la Convention, de nombreux organismes publics et privés, des États  s'affairent depuis près d'une décennie : l'ONU et ses organismes satellites, l'Union européenne, en particulier la France et l’Allemagne, les Etats-Unis, l'Australie, le Canada etc... S’appuyant sur les penseurs néo-libéraux, ils décrètent, avec Pavan Sukhdev, que la seule solution est d’offrir «  une argumentation économique exhaustive et irréfutable pour la conservation des écosystèmes et de la biodiversité». Ce responsable des marchés internationaux de la Deustche Bank à Bombay est également fondateur d'un programme de «comptabilité environnementale» en Inde. La finance se pose en sauveur de la planète.

 

Mais le problème est de donner une valeur marchande à des millions d'espèces et de molécules différentes. Pour contourner la difficulté, l'évaluation de la biodiversité ne porte plus sur les espèces mais sur tous « les services économiques », depuis la pollinisation à la filtration de l’eau, rendus à l'homme par la totalité des écosystèmes (forêts, zones humides, prairies, récif corallien...). Des services estimés par le professeur américain Robert Costanza [3] à 33 000 milliards $ en 1997 soit le double de la valeur mondiale brute produite cette année là.

 

 

 

 

 

 Boîte à outils planétaire 

 

Pour donner une valeur aux écosystèmes, de 2001 à 2005, l’ONU a élaboré le Millenium Ecosystem Assessment (MEA) [4]. Il doit être décliné à l'échelle de la France avant la fin de l'année. Ce document identifie 31 services rendus, classés en 4 catégories. Ces catégories ont été recoupées avec la cartographie complète fournie les bases de données géographiques transmises par les satellites [5]. L’ensemble permet de connaître l’état des sols, des sous-sols, les gisements de ressources naturelles, les ressources marines etc.  Au prétexte d’établir des zones de protection de la biodiversité, les fameuses trames vertes et bleues,  le globe terrestre est ainsi scruté et transformé en parts de marché.

 

Mais le zèle économétrique ne s’arrête pas là. Depuis 2007, c’est le TEEB (The Economics of Ecosystems and Biodiversity) qui élabore, toujours sous la direction du banquier Pavan Sukhdev, un système complexe pour calculer la valeur monétaire de chaque « service écosystémique » (sic !). Discrétion oblige, les conclusions de ces constructions mathématico-financières ne seront présentées qu’en octobre 2010 à Nagoya.

 

Sans attendre la conférence de Nagoya toutefois, un premier symposium destiné au monde des affaires, intitulé le « business of biodiversity », s’est tenu à Londres le 13 juillet. Julia Marton-Lefèvre, directrice de l'UICN (Union internationale pour la conservation de la nature), a présenté l’étude « TEEB for business » pour faire un appel du pied aux transnationales. Le rapport promet  aux entreprises près de 1 100 milliards $ de profits supplémentaires en 2050, grâce aux services écosystèmiques [6] .  Parmi les contributions au symposium, notons celles de William Evison, de PricewaterhouseCoopers, Mikkel Kallesoe, du World business Council for sustainable development qui regroupe des multinationales aussi notoirement écologiques que Dow chemical.

 

Pouvoir offshore, élus hors-sol

 

Il reste à mettre en place le système qui va organiser et contrôler ce marché. En mai 2010, à Nairobi, « un groupe de travail  spécial à composition non limitée » de la CDB propose la création d’une plate-forme science-politique pour appliquer un plan stratégique, tout en déclarant « qu’il était prématuré d’en discuter ». En juin 2010, en Corée, les représentants de 90 États  adoptent cette proposition : l'Intergovernmental science-policy platform on biodiversity and ecosystem services (IPBES) [7] est lancée. En écho, le G8 réuni le 25 juin au Canada, applaudit sa création. Elle doit être entérinée en septembre, à New York, lors de la 65 éme Assemblée générale de l’ONU. L’IPBES réunira des représentants des États, mais également des experts, des firmes et des financiers. Cette plate-forme sera chargée de fournir l'expertise scientifique en matière de biodiversité. Mais contrairement au GIEC [8], dont elle prétend être la réplique pour la biodiversité, elle aura également un mandat politique. Forte de l’aval de l’ONU, l’IPBES sera, à Nagoya, investie d’un pouvoir supranational. Elle contrôlera l’application d’une convention sur la diversité biologique (CDB) complètement détournée de ses objectifs d’origine. Le plan stratégique, qui sera adopté à Nagoya, couvre une période jusqu’à 2020. Quant aux instruments pour y parvenir, le monde des affaires aura carte blanche.  « L’intérêt et les capacités du secteur privé (…) dans la conservation et l’utilisation durables de la biodiversité et des services des écosystèmes comme source de futures opérations commerciales, et comme condition à de nouvelles possibilités commerciales et de débouchés (…) » est salué ad nauseum par un groupe de travail préparatoire à la 10ème conférence de la CDB [9].

 

Les banques dans les starting blocks

 

La véritable question qui intéresse les banquiers et les fonds d’investissement, c’est à l’évidence de transformer la biodiversité en fonds monétaire.

Des systèmes de compensation, comme le «Paiement et compensation des services environnementaux» (PSE) sont déjà en vigueur. Pratiqué depuis quelques décennies, ce système se résume à cette idée : les écosystèmes fournissent des services essentiels au bien-être humain, pourquoi ne pas les faire payer? Pour les pays du Sud, la FAO a proposé une convention-type de PSE. Elle incite, par exemple, les agriculteurs à cesser la culture sur brûlis ou à pratiquer l'écobuage... «Toutefois, le PSE ne s'applique pas aux multinationales, en particulier celles qui détruisent les forêts pour planter des palmiers à huile.  Il ne contraint que les petits paysans qui mettent fin à leurs droits d'usages » reconnaît Alain Karsenty, du CIRAD [10 .  En l’échange d’une compensation arbitraire, les petits paysans du Sud n’auront plus qu’à acheter les engrais et les pesticides…

 

Il existe également  les « réserves d’actifs naturels » (RAN), que la filiale biodiversité de la Caisse des dépôts (CDD) commence à créer en achetant des terrains qu’elle remet à l'état de «nature», comme elle l’a déjà fait dans la plaine de la Crau. Par ailleurs, la filiale gère des espaces de compensation pendant 30 à 50 ans pour le compte d'un aménageur (exemple de l'autoroute A 65).  

 

Pour gérer ces contrats, les banques de compensation entrent en jeu. « Elles existent déjà aux Etats-Unis pour les zones humides », a expliqué Capucine Chamoux, de l'ambassade américaine à Paris, lors de la conférence de l'ICREI, réuni à Aix-en-Provence en juin dernier. Une société privée finance, via un crédit bancaire, la restauration d'une zone humide; «celui qui offre la meilleure prestation au plus bas prix emporte le marché de gestion».

 

Le trou noir de la finance

 

Chacun sait que les  banques de compensation, telles Clearstream, ne sont absolument pas régulées. Leurs activités sont fondées sur les contrats à terme qu'elles transfèrent ensuite aux chambres de compensation chargées de vérifier les transactions.  Leur fonctionnement est si opaque qu'en 2008, elles ont été qualifiées de « trou noir de la finance». Comment peut-on prétendre qu’elles vont protéger la biodiversité et les écosystèmes  ? 

 

Selon Sarah Hernandez, économiste environnementale, la compensation financière a toutes les chances de devenir «une licence de destruction» de la nature[1 . Le seul intérêt serait donc celui des banques. Elles seront habilitées à transformer les territoires en actifs financiers et ceci n’est pas une vue de l’esprit. L’Allemagne n’a-t-elle pas suggéré, en mars dernier, que la Grèce « offre ses îles » pour compenser sa dette[12]? Grâce aux réserves d’actifs naturels, les banques  auront davantage d'occasion de spéculer.

 

Cette préséance accordée aux fonds spéculatifs dans le management global des écosystèmes de la planète, aussi scandaleuse qu’elle soit, n’est pas tout à fait surprenante. La richesse et le pouvoir ont changé de mains aux Etats-Unis en 2007.  Devançant pour la première fois les patrons d'entreprises industrielles ou technologiques, les responsables des fonds spéculatifs et privés sont arrivés en tête du classement des fortunes publié dans  «Forbes Magazine»[13] . Et ils comptent bien conserver la première place. Le cœur du capitalisme financier

s’apprête à franchir un nouveau pas : se garantir sur nos réserves d’actifs naturels.

Après avoir coulé le système économique par des investissements véreux, il ne manque plus aux banques que de couler la terre.

 

Dépossession généralisée

 

Au nom de la biodiversité, cette nouvelle gouvernance affectera le statut et le sort de toutes les ressources naturelles pour des décennies. L’OMC ne s’y est pas trompé. Son rapport sur le commerce mondial 2010, publié fin juillet, s’intitule «Commerce des ressources naturelles ». Son directeur, Pascal Lamy se félicitait dans un communiqué du 27 juillet 2010 que « les choses » allaient bouger en octobre. Bouger pour qui et dans quel sens ? Cette financiarisation de la nature va soustraire  aux communautés locales et aux souverainetés nationales l’usage de leurs ressources et territoires. «On ne peut pas protéger la biodiversité sans toucher au droit de propriété», affirmait Patrick Hubert, ex-conseiller d'État qui a dirigé plusieurs cabinets ministériels, dont celui de Dominique Perben.

 

 Cette nouvelle gestion implique la transformation du droit de propriété, propriété individuelle, bien sûr, mais aussi propriétés de l’État et des communes, propriétés collectives en Afrique et dans l’hémisphère Sud en général. Certes, l’érosion génétique, la dégradation des écosystèmes et l’épuisement des ressources prennent des proportions alarmantes. Mais les solutions proposées par les technocrates et les financiers à Nagoya, vont à contre-sens de la préservation de la nature. Vont-ils y parvenir à les imposer ? L’alerte sur le détournement de Nagoya est lancée et commence à se répercuter à travers la planète [13].

 

Agnès BERTRAND, co-auteur de « OMC, le pouvoir invisible ». Fayard, 2002

Françoise DEGERT, journaliste

 

Notes :

[1]  www.cbd.int/cop10/

[2]  L’Accord général sur le commerce des services constitue l'annexe 1B de l'Accord de Marrakech. Cf. http://www.marianne2.fr/Le-complot-de-l-OMC-contre-les-se...

fr.wikipedia.org/.../Accord_général_sur_le_commerce_des_services -

fr.wikipedia.org/.../Organisation_mondiale_du_commerce

[3]  Robert Costanza : «The value of the world’s ecosystem services and natural capital» Nature n°387, 1997, p.253 à 260. www.nature.com/nature/journal/v387/n6630/abs/387253a0.html

Professeur en économie environnementale, Robert Costanza a longtemps enseigné à l’université de Vermont  (USA) avant de rejoindre l’université d’État de Portland.

[4] Évaluation des écosystèmes pour le millénaire - www.millenniumassessment.org/fr/History.aspx

 [5]  La base de données Corine Land Cover couvre déjà trente-huit pays européens

fr.wikipedia.org/wiki/Corine_Land_Cover

[6] Site général  du « TEEB » : www.ecosystemmarketplace.com - Rapport du « TEEB for business » : www.teebweb.org/LinkClick.aspx?fileticket=ubcryE0OUbw%3d&...

[7] Plate-forme intergouvernementale sur la science et la politique de la biodiversité et des services écosystémiques

http://ipbes.net/

[8]  Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat

fr.wikipedia.org/.../Groupe_d'experts_intergouvernemental_sur_l'évolution_ du_climat

[9] Conférence des Parties  à la Convention sur la diversité biologique. Dixième réunion Nagoya, Japon, 18-29 octobre 2010. Point 10 de l’ordre du jour. Rapport du « groupe de travail spécial à  composition non limitée » de l’application de la convention sur les travaux de sa troisième réunion. http://www.cbd.int/cop10/info/

[10] Alain Karsenty, chercheur au CIRAD, consultant dans plusieurs organisations internationales, dont la Banque mondiale. Il est intervenu lors de la 8ème conférence internationale de l’ICREI, qui  s’est tenue à Aix-en-Provence du 17 au 19 juillet 2010.

L’International center for research on environmental issues (ICREI), ou Centre international de recherche sur l’environnement, fondé par Alain Madelin, est actuellement présidé par Max Falque. www.icrei.org

 [11] 5ème colloque sur « la réparation des atteintes à l'environnement » organisé à la Cour de Cassation, le 24 mai 2007 -www.courdecassation.fr/colloques_activites_formation_4/20...

[12] L’Expansion.com et AFP du 4 mars 2010

 www.lexpansion.com/.../pour-se-desendetter-la-grece-n-a-qu-a-vendre-ses- iles_228033.html

[13] « Big Bodies vs the Biosphere. Confronting the global corporate hijack of Nagoya’s COP10 »

www.truth-out.org/big-bodies-vs-biosphere56561?print

01/06/2010

Contours de l’ordre mondial. Continuités, changements et défis - L’intervention de Noam Chomsky à Paris.

Texte de la conférence donnée par Chomsky au Théâtre de la Mutualité à Paris, le samedi 29 mai 2010.

Parmi les thèmes apparaissant dans le titre, ce qui est le plus important dans mon esprit, et je présume dans le vôtre également, ce sont les défis pour aujourd’hui ; ils sont en effet bien réels et à certains égards effrayants. Certains défis concernent même la survie des espèces si l’on parle des armes nucléaires et des menaces pesant sur l’environnement, ces sujets traités lors des récentes conférences de Copenhague sur le climat et de New York sur le Traité de Non-Prolifération (TNP), avec dans les deux cas des résultats qui ne sont guère favorables. Parmi les autres défis importants, on trouve l’avenir de l’Union Européenne (actuellement très incertain) et le rôle des économies émergentes et leurs différentes configurations dans un monde qui se diversifie, avec l’Organisation de coopération de Shanghai, les BRIC [Brésil, Russie, Inde, Chine], l’Union des nations sud-américaines (Unasur) et d’autres. A une autre échelle, la financiarisation de l’économie américaine et des autres économies de premier ordre (étroitement liée à la montée d’un système de production asiatique) a eu un impact majeur sur nos sociétés et le système mondial. Pour prendre un exemple, Martin Wolf, le très respecté commentateur du Financial Times, approuve la conclusion selon laquelle l’origine de la crise des dettes publiques mettant en danger la survie de la zone euro « est la débauche passée de larges segments du secteur privé, en particulier du secteur financier ». Les marchés financiers, écrit-il, « ont financé l’orgie et maintenant, dans la panique, refusent de financer l’assainissement qui en découle. A chaque étape, ils ont agi de façon procyclique », transformant la crise en une catastrophe potentielle. L’économiste John Talbott ajoute : « Si quelqu’un doit être blâmé pour ces crises, ce sont les banques qui ont trop prêté et ce sont donc elles qui devraient payer le prix fort de la restructuration. » Or, au cours de la crise actuelle et contrairement aux pratiques antérieures, le ministère des finances américain a adopté un plan de sauvetage pour l’Europe, qui est un système inventé au cours de la crise actuelle par la Réserve fédérale américaine [FED] et le ministère des finances a garanti aux banques de s’en sortir indemnes. Aux Etats-Unis, les effets à long terme pour le pays incluent une stagnation pour une majorité de la population et une croissance radicale des inégalités, avec des conséquences potentiellement explosives. Le pouvoir politique des institutions financières bloque toute réglementation sérieuse, si bien que les crises financières régulières que nous avons connues ces trente dernières années deviendront donc probablement encore plus sévères.

Il n’est pas difficile de poursuivre : on ne manque pas de défis à relever. Mais on ne peut les comprendre et s’y attaquer de manière sérieuse qu’en les inscrivant dans une perspective plus large.

A un niveau très général, il est utile de garder à l’esprit plusieurs principes de large portée et de grande signification. Le premier est la maxime de Thucydide : « Les forts font comme ils l’entendent, et les faibles souffrent comme il se doit. » Cette maxime a un corollaire important : les systèmes de pouvoir comptent sur des spécialistes en gestion de doctrine, à qui il revient de montrer que ce que font les forts est noble et juste, et que si les faibles souffrent, c’est leur faute. Il s’agit d’une tendance qui fait honte à l’histoire intellectuelle et remonte à ses plus anciennes origines.

Les contours persistants de l’ordre mondial reflètent cette maxime de très près. Depuis la seconde guerre mondiale, les Etats-Unis dominent le monde des affaires et continuent de le faire à bien des égards, malgré des changements importants. Pendant la guerre, des hauts responsables ont compris qu’au bout du compte, les Etats-Unis détiendraient un pouvoir sans précédent dans le monde et ils ont soigneusement planifié l’organisation du monde de l’après-guerre. Ils ont délimité une « vaste zone » dans laquelle les Etats-Unis détiendraient « un pouvoir incontesté » avec « une suprématie militaire et économique » tout en veillant à la « limitation de tout exercice de souveraineté » de la part des Etats qui pourraient interférer avec leurs intentions planétaires. La vaste zone devait inclure au moins l’Extrême-Orient et l’ancien empire britannique, y compris les ressources énergétiques de l’Asie occidentale ; le contrôle de ces ressources apporterait « un contrôle important sur le monde », fit remarquer plus tard un planificateur influent. Alors que la Russie prenait le dessus sur les armées nazies après la bataille de Stalingrad, les objectifs de la vaste zone se sont étendus aussi loin que possible en Eurasie, au moins jusqu’à sa base économique en Europe de l’Ouest. Il a toujours été entendu que l’Europe pourrait choisir de suivre une voie indépendante, peut-être la vision gaulliste d’une Europe de l’Atlantique à l’Oural. L’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) a été en partie destinée à contrer cette menace et le problème reste tout à fait d’actualité aujourd’hui.

Les Etats-Unis ont continué à protéger avec zèle leur propre souveraineté, tout en rejetant les revendications de même ordre provenant d’autres pays. Les Etats-Unis ont contribué à la création des juridictions internationales, mais n’ont accepté leur autorité qu’avec des réserves décisives : en particulier, les Etats-Unis ne seraient pas soumis aux traités internationaux, y compris la charte de l’ONU. De la même façon, en signant la Convention sur le génocide 40 ans plus tard, les Etats-Unis se sont exemptés de son application. Ces deux réserves ont été invoquées devant la Cour internationale de justice et la Cour a relaxé les Etats-Unis des accusations d’agression et de génocide pour ces motifs. Une autre illustration est fournie par la doctrine Clinton prévoyant que les Etats-Unis se réservent un droit de « recours unilatéral à la force militaire » pour s’assurer « un accès sans restriction aux marchés clés, à l’approvisionnement en énergie et aux ressources stratégiques ». Clinton faisait écho à un thème familier. Dans les premières années suivant la seconde guerre mondiale, le diplomate américain George Kennan a expliqué qu’en Amérique latine « la protection de nos matières premières » doit être une préoccupation majeure. « Nos matières premières », dont le hasard veut qu’elles se trouvent ailleurs, nous appartiennent de droit. Telles sont les prérogatives de la puissance selon la maxime de Thucydide.

Une deuxième maxime importante a été formulée par Adam Smith. Il observa que dans l’Angleterre de son époque « les principaux architectes » de la politique étaient les « marchands et les fabricants ». Ceux-ci s’assuraient que leurs propres intérêts étaient bien servis sans tenir compte des effets « néfastes » sur les autres, y compris sur le peuple anglais, mais plus gravement encore sur ceux qui souffraient ailleurs de « l’injustice sauvage des Européens », en particulier en Inde britannique (qui fut sa principale préoccupation).

Dans les démocraties industrielles d’aujourd’hui, les principaux architectes de la politique sont les institutions financières et les sociétés multinationales. La version actuelle de la maxime d’Adam Smith, dans une version plus sophistiquée, est la « théorie d’investissement de la politique » développée par l’économiste politique Thomas Ferguson, qui considère les élections comme des occasions pour des groupes d’investisseurs de s’allier afin de contrôler l’Etat. Cette théorie permet de faire de très bonnes prédictions politiques sur une longue période. Depuis les années 1970, la part des institutions financières dans les bénéfices des entreprises a fortement augmenté, pour atteindre aujourd’hui environ un tiers aux Etats-Unis. Leur pouvoir politique a évolué de concert, menant au démantèlement de l’appareil de réglementation qui avait évité les crises financières depuis la Grande Dépression. Ces institutions financières ont également fourni l’essentiel du soutien à Barack Obama, l’aidant à le porter à la victoire. Elles s’attendaient à être récompensées, et elles l’ont été, avec un énorme plan de sauvetage (financé par les contribuables) visant à les sauver des conséquences de l’effondrement destructeur de l’économie dont elles portent la plus grande part de responsabilité.

L’un des thèmes principaux dans l’élaboration des politiques des puissants est ce que nous pourrions appeler le « principe de la Mafia ». Le parrain ne tolère pas la « défiance réussie ». Même le plus petit acte de désobéissance est dangereux. Il pourrait devenir un « virus » qui « répandra la contagion », pour emprunter les mots de Henry Kissinger quand il préparait le renversement du gouvernement d’Allende. En d’autres termes, le virus est un domino qui pourrait faire tomber toute la rangée. Le principe a été maintes fois invoqué par les Etats-Unis pendant leur période de domination mondiale, et a bien sûr de nombreux antécédents.

Les principes en vigueur dans l’élaboration d’une politique entrent parfois en conflit. Cuba en est un exemple très instructif. A une écrasante majorité, le monde s’oppose à l’embargo américain, conçu, comme nous le savons à partir des archives internes, pour punir la population de son incapacité à renverser un gouvernement désobéissant. Pendant des décennies, la population américaine a également été favorable à la normalisation des relations. Il n’est pas rare que les décideurs ne tiennent pas compte de l’opinion publique mondiale et nationale, mais ce qui est plus intéressant, dans ce cas, c’est que de puissants secteurs de l’économie privée sont également favorables à la normalisation, notamment l’agro-alimentaire, l’industrie pharmaceutique et les entreprises du secteur énergétique. La politique consistant à punir les Cubains persiste néanmoins, en violation de la maxime d’Adam Smith mais en accord avec le « principe de la Mafia ». Les intérêts plus larges de l’Etat priment sur les intérêts commerciaux locaux. Les mêmes personnes peuvent prendre des décisions différentes en fonction du rôle qu’elles jouent dans les institutions, dans d’autres cas également comme l’Iran d’aujourd’hui avec des précédents intéressants remontant au renversement du régime parlementaire par les Etats-Unis et le Royaume-Uni [en 1953] : des entreprises du secteur énergétique ont été contraintes par l’Etat à prendre 40% de la concession britannique, en désaccord avec leurs préférences à court terme mais en accord avec la planification étatique plus large.

Dans le cas de Cuba, les archives et documents historiques sont riches et instructifs. Quelques mois après que Cuba eut obtenu son indépendance (en janvier 1959), les Etats-Unis prirent des initiatives pour renverser le régime. L’une des principales raisons avancées dans les documents internes à l’administration était la « défiance réussie » que représentait Cuba pour les politiques américaines (remontant à la doctrine Monroe de 1823) ; il s’agissait là d’un intolérable affront et d’une menace de contagion. La menace fut immédiatement reconnue par le gouvernement d’Eisenhower, mais plus explicitement par les libéraux de l’équipe de Kennedy qui arriva au pouvoir deux ans plus tard. Avant son entrée en fonction, le président John Fitzgerald Kennedy mit sur pied une mission pour l’Amérique latine, dirigée par l’historien de gauche Arthur Schlesinger. Dans son rapport au nouveau président, Schlesinger ne manqua pas de prévenir que d’autres pays pourraient être infectés par le virus castriste « de l’idée de prendre en main ses propres affaires », un danger particulièrement grave, ajoutait-il « quand la distribution des terres et des autres formes de richesse nationale favorise les classes possédantes… et que les pauvres et défavorisés, encouragés par l’exemple de la révolution cubaine, exigent alors des conditions de vie décentes ». L’ensemble du système de domination pourrait se défaire si l’idée de prendre en mains son destin devait étendre ses funestes tentacules.

Un vaccin contre le virus de la politique.

Dans de telles circonstances, les prescriptions politiques sont sans ambiguïté : il est nécessaire de détruire le virus et de vacciner les victimes potentielles. Ce traitement standard fut appliqué immédiatement : d’abord lors de l’invasion de la baie des Cochons [en 1961], et , après cet échec, une vaste campagne fut menée pour apporter « les terreurs de la terre » à Cuba, pour reprendre les mots utilisés par Schlesinger dans sa biographie du frère du président, Robert Kennedy, qui se vit assigner cette tâche comme mission prioritaire. Cela n’a pas été une mince affaire, en dehors du fait que cela mena le monde à une menace de guerre nucléaire. En attendant, la région fut protégée de l’infection par le fléau d’une répression sans précédent depuis l’époque des conquistadors. Cette répression débuta par un coup d’Etat militaire au Brésil en 1964, planifié par le gouvernement Kennedy qui installa les premiers d’une série d’Etats policiers répressifs comprenant le Chili, l’Uruguay, et les assassins argentins (comptant parmi les chouchous du président Ronald Reagan). Cette calamité s’étendit à l’Amérique centrale sous le gouvernement Reagan, développant la torture, les tueries en série et autres crimes.

Un fait passé pratiquement inaperçu en Occident a pourtant une grande importance : la vaccination des victimes potentielles consista dans une large mesure en une guerre contre l’Eglise, laissant derrière elle une liste sanglante de martyrs religieux. En 1962, lors de Vatican II, le Pape Jean XXIII fut à l’origine d’un effort historique pour réhabiliter le Christianisme des Evangiles qui avait été détruit au quatrième siècle, quand l’empereur Constantin avait fait du Christianisme la religion de l’empire romain, convertissant « l’église persécutée » en une « église de la persécution », pour reprendre les mots du distingué théologien Hans Küng. S’inspirant de Vatican II, les évêques d’Amérique latine adoptèrent « l’option préférentielle pour les pauvres », renouvelant avec le pacifisme radical des Evangiles. Des prêtres, des religieuses et des laïcs apportèrent le message des Evangiles aux pauvres et aux persécutés en les encourageant à prendre leur destin en main et à travailler ensemble pour surmonter la misère de la survie sous la contrainte du pouvoir américain.

La réaction à cette grave hérésie que constituait la théologie de la libération fut immédiate. Le coup d’Etat au Brésil en constitua la première étape. La guerre contre les Evangiles a été consommée en novembre 1989, quelques jours après la chute du mur de Berlin, quand six intellectuels latino-américains de premier plan, des prêtres jésuites, ont été assassinés par un bataillon d’élite du Salvador, fraîchement sortis de l’école spéciale de guerre de John F. Kennedy [John F. Kennedy Special Warfare School]. La responsabilité de l’écrasement des efforts faits pour faire renaître le Christianisme n’est pas masquée. Cette école de formation à la guerre a depuis été renommée l’Ecole des Amériques [School of the Americas] ; célèbre pour son entraînement des tueurs d’Amérique latine, elle annonce fièrement dans son message publicitaire que la théologie de la libération a été « vaincue avec l’aide de l’armée américaine », avec un petit coup de main du Vatican qui utilisa des moyens plus doux : l’expulsion et l’autocensure.

Nous apprenons beaucoup sur nous-mêmes en comparant un événement qui a dominé l’actualité de novembre dernier [2009], avec un non événement du même mois. L’événement fut la célébration euphorique du vingtième anniversaire de l’émancipation de l’Europe de l’est de la tyrannie russe, saluée comme une victoire de la non-violence et de l’idéalisme, et il s’agit bien de cela. Le non événement fut le silence qui entoura, dans le même temps, la consommation de la guerre haineuse qui écrasait la théologie de la libération et détruisait « les organisations populaires combattant pour défendre les droits humains les plus fondamentaux », pour reprendre les mots prononcés par l’archevêque Oscar Romero, « la voix des sans voix », quelques jours avant son assassinat par ceux-là mêmes qui menaient cette guerre. La comparaison entre ce qui s’est passé dans les années 1980 au sein des sphères d’influence de la Russie et des Etats-Unis (ainsi que les réactions que cela a suscité en Occident), est très éclairante, mais régulièrement expédiée aux oubliettes d’une histoire inacceptable.

Les guerres d’Indochine, qui comptent sans doute parmi les crimes les plus horribles de l’après-guerre, illustrent également le fonctionnement du « principe de la mafia ». Lorsque les Etats-Unis décidèrent de soutenir la guerre meurtrière de la France pour reconquérir son ancienne colonie, la préoccupation centrale était que l’indépendance du Vietnam ne puisse devenir un virus contaminant les autres pays, peut-être même l’Indochine riche en ressources et même enfin le Japon, ce que l’historien John Dower appela le « super domino ». Le Japon pourrait devenir le centre industriel d’un continent asiatique indépendant, et ceci en établissant le Nouvel Ordre qu’il avait cherché à créer dans les années 1930. Les Etats-Unis n’étaient pas prêts à perdre la phase du Pacifique de la seconde guerre mondiale même si Washington avait bien l’intention de fournir au Japon « une sorte d’empire vers le Sud », quelque chose comme un Nouvel Ordre pour reprendre la phrase de George Kennan, mais maintenant au sein du système mondial dominé par les Etats-Unis, donc acceptable.

Là aussi, les moyens standard pour faire face à un virus furent mis en œuvre avec une extrême brutalité. Le virus fut supprimé en démolissant la résistance sud-vietnamienne, puis une grande partie de l’Indochine. La région fut vaccinée en mettant en place dans les pays voisins de féroces dictatures militaires. L’Indonésie fut protégée de la contamination par ce que le New York Times appela le « stupéfiant massacre de masse » de 1965 – un « rayon de lumière en Asie » claironna son correspondant de gauche, exprimant ainsi l’euphorie occidentale débridée pour, d’une part, le massacre de centaines de milliers de personnes (la plupart des paysans sans terre) et, d’autre part, la destruction du seul parti politique de masse tandis que le pays s’ouvrait à la libre exploitation occidentale, dont les crimes ont été comparés (par la CIA ) à ceux de Hitler, Staline et Mao. Le conseiller à la sécurité nationale de Kennedy et Johnson, McGeorge Bundy, fit observer rétrospectivement que la guerre du Vietnam aurait bien pu s’arrêter après que l’Indonésie avait été vaccinée en toute sécurité par cet opportun « stupéfiant massacre de masse ».

Révision de l’histoire.

Après l’offensive du Têt de janvier 1968, la communauté des affaires américaine conclut qu’il était inutile de prolonger la guerre qui alors nuisait à l’économie du pays. Le gouvernement suivit à contrecœur. Comme la politique du gouvernement évolua, l’opinion des élites changea également, et une histoire imaginaire fut inventée dans laquelle tout le monde était une « colombe » qui s’ignorait (tellement bien cachée qu’on n’en trouvait aucune trace dans les archives). Les équipes de Kennedy réécrivirent leurs premiers récits pour répondre aux nouvelles exigences. Cette révision de l’histoire fut un succès complet, comme le fut le maintien de limites strictes sur des critiques acceptables A la fin de la guerre, les plus dissidents au sein du courant dominant jugèrent que la guerre était « une erreur », qu’elle avait débuté par des « efforts maladroits pour faire le bien », et que, finalement, elle nous coûtait trop cher (selon Anthony Lewis). Assez étonnamment, pour 70% de la masse de la population peu éclairée, la guerre était « fondamentalement et moralement un mal », et non « une erreur ». Les critiques formulées par les élites concernant la guerre en Irak sont très similaires. Obama, par exemple, est considéré comme un critique de principe de cette guerre parce qu’il l’a jugée comme étant une « erreur stratégique ». Des critiques semblables de l’invasion russe en Afghanistan avaient paru dans la Pravda. Nous ne les jugions pas « fondées sur des principes », alors que c’est ce que devait penser la classe des commissaires d’alors. Partout les réactions sont tout à fait conformes à la norme historique et aux mêmes principes.

Généralement, on convient que la guerre du Vietnam fut une défaite pour l’Amérique. C’est exact si l’on prend en compte les objectifs maximaux : le Vietnam n’a pas été transformé en un pays comme les Philippines. Si toutefois on prend en compte les objectifs principaux, la guerre fut plutôt une réussite. Le virus a été détruit et la région vaccinée avec succès contre la contamination. Les conséquences à long terme sont mitigées, mais le succès reste considérable. Un titre récent du Financial Times en donne un exemple significatif : « Tokyo accepte la défaite de la base navale d’Okinawa ». L’article indique que « le premier ministre japonais a reconnu hier une défaite concernant ses efforts pour déloger d’Okinawa une base maritime américaine dont la présence est controversée, tout en suggérant que le sud de l’île devait continuer à "porter ce fardeau" pour le bien de l’alliance entre Tokyo et Washington », malgré l’écrasante opposition populaire. Le Japon est le principal détenteur de la dette américaine, mais il reste à l’abri au sein du système mondial. C’est une des continuités qui mérite notre attention.

Observez en revanche la guerre en Irak. Les Etats-Unis ont été contraints de céder pas à pas aux pressions populaires réclamant la démocratie et l’indépendance. Il s’agit d’une grande victoire pour la résistance non-violente. Les forces d’invasion pouvaient tuer les insurgés et détruire Falloujah, commettant d’horribles crimes de guerre, mais elles n’ont pas été capables de faire face à des centaines de milliers de manifestants exigeant des élections, et à plusieurs reprises Washington à dû faire marche arrière face au nationalisme irakien. Récemment encore, en janvier 2008, Washington tenait toujours fermement à ses principaux objectifs de guerre : le président a ainsi indiqué au Congrès qu’il ne tiendrait aucun compte d’une loi qui pourrait entraver l’engagement américain en vue d’établir des bases militaires « permettant le stationnement permanent des forces américaines en Irak » ou « permettant aux Etats-Unis de contrôler les ressources en pétrole de l’Irak ». Quelques mois plus tard, les Etats-Unis ont dû également abandonner ces objectifs. Washington a été contraint d’accepter la défaite en Irak devant la résistance nationale irakienne. Mais l’opposition à l’agression au sein du pays agresseur est un autre élément à prendre en compte. C‘est cette opposition qui a empêché les démocrates libéraux d’avoir recours à certaines mesures dont ils pouvaient disposer aux Etats-Unis dans les années 1960. Cela compte parmi les vraies réussites du militantisme politique des années 1960 et des traces qu’il a laissées, contribuant à civiliser la société américaine. Cela s’est également produit ailleurs.

Un vainqueur : l’Iran.

L’Irak a été pratiquement détruit et les Etats-Unis vaincus, mais il existe un vainqueur : l’Iran. Peu d’analystes sérieux contesteraient la conclusion du correspondant respecté du Financial Times au Moyen-Orient écrivant que l’invasion « a énormément accru l’influence de l’islamisme chiite iranien » (David Gardner) pour la plus grande déconvenue des Etats-Unis, de son client israélien et de son protectorat saoudien, celui-ci poursuivant une relation avec les Etats-Unis qui « durera jusqu’au moment où le dernier baril de pétrole aura été extrait des réserves souterraines saoudiennes », comme le fait remarquer l’universitaire Gilbert Achcar.

Les analystes en politique étrangère admettent que c’est l’Iran qui constitue la crise majeure actuelle, avec son programme nucléaire. Aucune personne saine d’esprit ne souhaite que l’Iran, ou n’importe qui d’autre, développe des armes nucléaires. Toutefois, c’est un peu trompeur de dire que l’Iran défie la « communauté internationale » en poursuivant, au mépris des ordres du Conseil de sécurité et de l’AIEA, son programme d’enrichissement nucléaire. En fait, le monde est majoritairement opposé au très rude régime de sanctions que les Etats-Unis cherchent à durcir davantage. L’opposition n’inclut pas seulement les dissidents iraniens, mais aussi les puissances régionales : la Turquie et la Ligue Arabe. Cette opposition comprend également le Brésil, peut-être le pays le plus respecté de l’hémisphère sud, qui a vigoureusement appuyé le droit de l’Iran à enrichir de l’uranium, en tant que signataire du TNP. Il faut faire également un certain effort pour oublier que trois Etats nucléaires ont carrément refusé de signer le TNP : le Pakistan, l’Inde et Israël, tous trois alliés des Etats-Unis, dont les programmes nucléaires bénéficient toujours de l’assistance américaine.

En septembre dernier, le Conseil de Sécurité a adopté la résolution 1887, qui, en dehors de sa condamnation de l’Iran, a invité tous les Etats à signer le TNP et à résoudre leurs conflits en accord avec la Charte des Nations Unies, qui interdit la menace d’intervention par la force. Deux Etats violent les termes de cette résolution : les Etats-Unis et Israël, qui insistent pour que « toutes les options soient ouvertes », y compris les plus violentes. L’Inde a répondu à la résolution 1887 en annonçant qu’elle peut maintenant fabriquer des armes nucléaires avec le même rendement que les superpuissances. L’envoyé d’Obama a immédiatement informé l’Inde qu’elle n’est pas assujettie à cette résolution. L’Inde et le Pakistan continuent de développer des armes nucléaires. Les relations militaires entre les Etats-Unis, l’Inde et Israël sont même en train de se resserrer. Bénéficiant des importations « à double usage [civil et militaire NDT] » en provenance des Etats-Unis (et de France également), l’Inde passe maintenant aux techniques de destruction les plus avancées : celles-ci comprennent des plateformes d’armes laser dans l’espace et des satellites destructeurs, selon le commandant des forces aériennes.

Au même moment, l’AIEA a adopté une résolution demandant à Israël d’adhérer au TNP et de faciliter l’accès des inspections internationales. En dépit des objections de l’Europe et des Etats-Unis, qui ont cherché à bloquer la résolution, celle-ci a tout de même été adoptée. Comme dans le cas de l’Inde, Obama a immédiatement informé Israël qu’il n’était pas soumis à ces exigences, renouvelées encore il y a quelques semaines. Aux Etats-Unis, tout ceci passe totalement sous silence, comme en Europe je suppose, mais il est facile de voir pourquoi les accusations d’hypocrisie faites au président iranien Mahmoud Ahmadinejad peuvent avoir un écho ailleurs.

Obama a également réagi à la résolution 1887 par d’autres moyens. Le Pentagone a annoncé qu’il allait accélérer la livraison des armes les plus meurtrières disponibles, à l’exception des armes nucléaires. Il s’agit de bombes de 13 tonnes conçues pour détruire des bunkers profondément cachés et protégés par 5 tonnes de béton armé. Ce à quoi vont servir ces bombes n’est pas un secret. La planification de ces « obus d’artillerie massive » a débuté dans les années Bush, mais a traîné en longueur jusqu’à la prise de fonction d’Obama ; il a alors immédiatement demandé que soient accélérés leur développement et leur déploiement. Ensuite, Obama a envoyé ces armes aux îles Diego Garcia dans l’Océan indien ; il s’agit d’une base importante pour le bombardement du Moyen-Orient et de l’Asie centrale. Il a également envoyé aux îles Diego Garcia une offre de sous-marins pour contrer les sous-marins aux missiles d’attaque rapide qui opèrent dans les eaux du Moyen-Orient et d’Afrique de l’Ouest, selon l’annonce de la marine américaine, non confirmée. Ce sont de nouvelles menaces contre l’Iran, en violation de la résolution 1887 et de la Charte des Nations Unies.

Il existe un contexte plus large. Pour ceux qui se sont sérieusement engagés dans la non-prolifération, certaines mesures peuvent être entreprises. L’une d’entre elles serait la création de zones sans armes nucléaires [nuclear weapons-free zones, NWFZ]. L’Union africaine est parvenue récemment à un accord pour créer une zone de ce type, mais cet accord ne peut être mis en œuvre. La Grande Bretagne et les Etats-Unis insistent pour que l’île Diego Garcia ne soit pas incluse, car les Etats-Unis l’utilisent pour stocker des armes et des sous-marins nucléaires. Une zone sans armes nucléaires dans le Pacifique sud connaît les mêmes problèmes. Au début, c’était la France qui bloquait car elle voulait utiliser ses îles pour des essais nucléaires, maintenant ce sont les Etats-Unis qui bloquent en insistant pour que ses îles du Pacifique bénéficient d’une dérogation.

Le cas le plus significatif se trouve bien sûr au Moyen-Orient où les tensions régionales pourraient être atténuées par la création d’une zone sans armes nucléaires. C’est une question brûlante dans la région depuis un certain temps, et elle a été une nouvelle fois posée le mois dernier lors de la conférence conjointe des Nations unies et du TNP. L’Egypte, qui préside le mouvement des non-alignés comptant 118 nations, a fait circuler un appel pour la création d’une zone sans armes nucléaires au Moyen-Orient, comme cela avait été convenu avec l’Occident (y compris les Etats-Unis) en 1995 lors de la conférence de révision du TNP. Washington s’est officiellement engagé, mais insiste pour qu’Israël y fasse exception, et n’a pas laissé entendre que ces dispositions s’appliqueraient à eux-mêmes. La secrétaire d’Etat Hillary Clinton a déclaré, lors de la conférence du TNP, que ce n’est pas encore le moment de créer une zone sans armes nucléaires au Moyen-Orient. Washington a par ailleurs insisté pour que ne soient pas acceptées les propositions qui demandent à Israël de se soumettre au contrôle de l’AIEA ou qui invitent les signataires du TNP (les Etats-Unis en particulier) à rendre publiques les informations relatives « aux installations et aux activités nucléaires israéliennes, y compris l’information ayant trait aux précédents transferts de technologie nucléaire vers Israël ».

La technique pour s’y dérober est d’adopter la position d’Israël, demandant que toute proposition soit subordonnée à un règlement de paix total. Si ce n’est qu’il est soumis à une interdiction effective de la part des Etats-Unis, il existe un accord quasi-unanime sur la façon de régler le conflit israélo-arabe, et cela depuis 1976. Il date du moment où des pays arabes de la région introduisirent une résolution au Conseil de sécurité, appelant à un accord pour une solution à deux Etats comprenant la frontière internationale et toutes les garanties prévues par la résolution 242 (le document de base par accord commun). Les Etats-Unis opposèrent leur veto à cette proposition de résolution en 1976, et une nouvelle fois en 1980. Tout s’est poursuivi à l’identique. Les principes de base sont soutenus par pratiquement le monde entier, y compris la Ligue arabe, l’Organisation de la conférence islamique (comprenant l’Iran) et des acteurs concernés qui ne sont pas des Etats, dont le Hamas. Un accord selon ces termes est bloqué par les Etats-Unis et Israël, qui sont à la tête du front du rejet depuis 35 ans, bien qu’il existe une exception décisive et très instructive. Lors de son dernier mois à la présidence des Etats-Unis, en janvier 2001, Bill Clinton a entamé des négociations israélo-palestiniennes à Taba, en Egypte qui sont presque parvenues à un accord (selon les déclarations des participants) avant qu’Israël ne mette fin aux négociations.

Il est important de rappeler que les Etats-Unis et le Royaume-Uni possèdent une responsabilité unique dans le processus de création d’une zone de non prolifération d’armes atomiques au Moyen-Orient. Dans leur tentative de fournir en 2003 une mince couverture juridique à leur invasion de l’Irak, ils ont cité la résolution du Conseil de sécurité 687 (de 1991) qui demandait à l’Irak de mettre fin à son programme de développement d’armes de destruction massive. Les Etats-Unis et le Royaume-Uni prétendaient que cela n’avait pas été fait. Nous n’avons pas besoin de nous attarder sur ce prétexte mais notons que cette résolution engage ses signataires à créer une zone de non prolifération d’armes atomiques au Moyen-Orient.

La destruction de l’environnement.

J’ai dit que la prolifération des armes nucléaires est l’un des deux défis qui mettent littéralement en danger la survie de notre espèce. Cette question n’est pas prise en compte malgré l’impressionnante rhétorique déployée. Il en va de même pour la deuxième menace : la destruction de l’environnement. Ce qui se passe aux Etats-Unis est particulièrement important, comme toujours, mais est également très révélateur. Le secteur des entreprises mène une campagne massive de propagande pour que l’opinion publique abandonne ses préoccupations concernant le changement climatique lié aux activités humaines, et avec le plus grand succès puisque cette conviction a baissé et réunit maintenant tout juste un tiers de la population. Les responsables à qui revient cette tâche de propagande, visant à lutter contre cette conviction, savent aussi bien que nous que le « canular progressiste » est bien réel et que les perspectives sont peu réjouissantes (1). Ils s’acquittent en fait du rôle que les institutions leur ont assigné. Dans une économie de marché, ces responsables doivent agir de façon à maximiser les gains à court terme. S’ils ne le font pas, ils seront remplacés par d’autres, qui eux le feront. D’ailleurs, selon le droit anglo-américain des sociétés, il s’agit d’une obligation juridique. Ce qui signifie qu’ils ne doivent pas tenir compte des externalités (l’impact d’une opération à l’extérieur de l’entreprise). Dans ce cas, le sort de l’espèce humaine est une externalité qu’ils doivent écarter dans la mesure où l’économie de marché prévaut. La logique est la même lorsque des directeurs de sociétés financières ne prennent pas en compte le risque systémique, tout en sachant qu’en agissant de la sorte ils provoqueront une crise financière. Dans ce cas, leur comportement n’est pas irrationnel. Ils savent qu’après l’effondrement du château de cartes qu’ils construisent, ils peuvent aller se mettre à l’abri de ce qu’ils appellent l’Etat nourricier, tout en serrant fort leur livres de Hayek, Friedman et Rand. Il n’existe pas de tels recours lorsque les externalités liées à la destruction de l’environnement sont ignorées. Il n’est pas facile toutefois de surmonter les nécessités institutionnelles. Les deux grandes menaces pesant notre survie demeurent redoutables.

L’effacement des nations.

Passons à un autre sujet, il y a en ce moment beaucoup de discussions agitées concernant un grand changement de pouvoir dans le monde. Les spéculations vont bon train pour savoir si (ou quand) la Chine pourrait, avec l’Inde, remplacer les Etats-Unis comme puissance dominante mondiale. Si cela devait arriver, cela signifierait que le système mondial redeviendrait proche de ce qu’il était avant les conquêtes européennes. Les taux de croissance des PIB chinois et indien ont été, en effet, très spectaculaires ces derniers temps. Mais il faut ajouter quelque chose. L’indice de développement humain (IDH) des Nations unies indique que l’Inde occupe toujours une place proche du bas du classement : la 134ème, légèrement au-dessus du Cambodge, au-dessous du Laos et du Tadjikistan. La Chine se place à la 92ème place, un peu au-dessus de la Jordanie , en dessous la République Dominicaine et l’Iran. L’Inde et la Chine souffrent également d’inégalités très fortes, si bien que plus d’un milliard de leurs habitants se trouvent beaucoup plus bas dans ce classement. En outre, une comptabilité précise irait au-delà des mesures faites actuellement en prenant en compte les coûts très sérieux que la Chine et l’Inde ne peuvent plus ignorer ; l’écologie, la diminution des ressources naturelles et bien d’autres choses encore. Les spéculations sur le changement de pouvoir dans le monde négligent quelque chose que nous savons tous : les nations, n’occupant plus la même place dans le système interne de distribution du pouvoir, ne sont pas les vrais acteurs au sein des affaires internationales, un truisme porté à notre attention par cet incorrigible radical d’Adam Smith, comme nous en avons déjà parlé.

En gardant à l’esprit le truisme radical d’Adam Smith, on s’aperçoit qu’il existe en effet un changement de pouvoir dans le monde mais pas celui qui occupe le devant de la scène. Il s’agit d’un déplacement allant de la main d’œuvre mondiale vers le capital transnational, ce déplacement s’étant nettement intensifié pendant les années de néolibéralisme. Le coût en est très lourd, y compris pour les travailleurs américains qui sont victimes de la financiarisation de l’économie et de la délocalisation de la production et qui ne parviennent à maintenir leurs revenus qu’en s’endettant et en créant des bulles de valeurs. Les paysans indiens sont affamés et des millions de travailleurs chinois sont en lutte : la part du travail dans le revenu national y décroît plus rapidement que dans la plupart des autres pays.

La Chine joue un rôle de premier plan dans le changement réel du pouvoir mondial, elle est devenue en grande partie une usine d’assemblage au sein d’un système régional de production. Martin Hart-Landsberg a traité cette question dans un ouvrage important (2). Le Japon, Taiwan et d’autres économies d’Asie exportent des pièces et des composants vers la Chine et lui fournissent également la plus grande partie de la technologie de pointe. On s’est beaucoup préoccupé de la hausse du déficit commercial des Etats-Unis avec la Chine mais on a fait moins de cas du déficit commercial croissant des Etats-Unis avec le Japon et les autres pays d’Asie au moment où le système de production régional se met en place. Le Wall Street Journal en conclut que si l’on comptait uniquement la valeur ajoutée des constructeurs chinois, le véritable déficit commercial entre les Etats-Unis et la Chine serait réduit dans une proportion de 30 % alors que le déficit commercial entre les Etats-Unis et le Japon augmenterait de 25 %. Les constructeurs américains suivent le même chemin en fournissant des pièces et des composants à la Chine , qui les assemble et les exporte en retour en grande partie vers les Etats-Unis. Pour les institutions financières, les géants de la distribution, les propriétaires et les gestionnaires des industries manufacturières ainsi que pour les secteurs étroitement liés à ces centres de pouvoir, tout cela est merveilleux. Mais ce n’est pas le cas pour la majorité des Américains dont les revenus stagnent depuis trente ans au milieu d’une concentration stupéfiante de richesse, de l’effondrement des systèmes d’aide et des infrastructures ; tout ceci conduisant à une situation intérieure des plus inquiétantes. Nous observons des développements similaires en Europe et ailleurs.

La situation en Afghanistan.

Enfin, on devrait dire quelques mots au sujet de l’Afghanistan. Dans la première opération de la nouvelle stratégie d’Obama, les Marines américains ont conquis Marjah, une petite ville faisant partie de la province du Helmand, le principal foyer de l’insurrection. Le New York Times signale que :

« Les Marines se sont heurtés à l’identité des talibans, une identité tellement dominante que l’on peut décrire ce mouvement comme un parti unique dont l’influence touche tout le monde dans la ville. Nous devons reconsidérer notre définition du mot "ennemi" a déclaré Larry Nicholson, commandant de la brigade expéditionnaire des Marines dans la province du Helmand. "La plupart des gens ici se considèrent comme des talibans... Nous avons à réajuster notre manière de penser de façon à ne pas chasser les talibans de Marjah, c’est l’ennemi que nous essayons de chasser", a-t-il déclaré. »

Les Marines sont confrontés à un problème qui a toujours harcelé les conquérants. Il s’agit d’un problème bien connu des anciens Marines du Vietnam. Le plus grand érudit du gouvernement d’alors se lamentait que l’ennemi était le « seul véritable parti politique possédant une assise populaire » et que tous les efforts faits pour se mesurer à lui sur le plan politique ressemblerait à un affrontement entre le menu fretin et une baleine. C’est en en utilisant notre avantage comparatif – la violence – que nous avons donc dû surmonter leur force politique. D’autres ont connu des problèmes similaires, par exemple les Russes en Afghanistan dans les années 1980 : ils ont gagné toutes les batailles mais ont perdu la guerre. Après le triomphe de Marjah, les forces dirigées par les Etats-Unis s’apprêtent à donner l’assaut sur la ville principale de Kandahar où, d’après les sondages de l’armée américaine, 95% de la population s’oppose à l’opération militaire et 5 personnes sur 6 considèrent les talibans comme « nos frères afghans ». Encore une fois, cela fait écho aux conquêtes antérieures.

Contrôle des cerveaux.

Dans ces conditions, il n’est pas étonnant que les autorités soient préoccupées par le fait que le soutien intérieur puisse s’éroder davantage encore. Une « fuite » récente émanant d’un rapport de la CIA , fait remarquer que « le peu d’informations livrées au public concernant la mission en Afghanistan a permis aux dirigeants allemands et français de ne pas tenir compte de l’opposition populaire et d’augmenter régulièrement leur contingent militaire pour la Force internationale d’assistance et de sécurité (FIAS). Berlin et Paris conservent respectivement le troisième et le quatrième rang en termes de forces militaires présentes au sein de la FIAS , malgré l’opposition de 80% des Allemands et des Français à l’augmentation du déploiement des troupes au sein de la FIAS (selon un sondage datant de l’automne dernier) ». Il est donc nécessaire « d’adapter le message » pour « prévenir ou du moins contenir d’éventuelles réactions violentes ». Pour la France , la CIA recommande d’avoir recours à une propagande élaborée pour prendre en compte le « profond souci pour les civils et les réfugiés » et pour expliciter le sentiment de culpabilité des français liée à leur abandon. La note recommande de mettre particulièrement en avant la question de l’éducation des filles qui peut devenir « un point de ralliement pour l’opinion publique française en grande partie laïque, et donner aux électeurs une raison de soutenir une cause nécessaire malgré les victimes ». Les faits, comme d’habitude, n’ont pas la moindre importance. Si l’on prend par exemple les progrès de l’éducation des filles à Kaboul lors de l’occupation russe, ou le véritable impact des opérations militaires.

La note de la CIA doit nous rappeler que les Etats possèdent un ennemi intérieur : leur propre population, qui doit être contrôlée quand elle s’oppose à la politique de l’état. Ce problème se pose même dans les Etats totalitaires. L’Allemagne nazie a ainsi dû disputer une guerre « des armes et du beurre » pour tenir le public en respect. Dans les sociétés plus démocratiques, le recours à la force doit être remplacé par une propagande efficace dans la « bataille éternelle pour contrôler le cerveau des hommes » et pour « fabriquer un consentement » grâce à des « illusions nécessaires » et par une « simplification extrême, puissante émotionnellement ». (Citation des chefs d’entreprise et du philosophe préféré d’Obama, Reinhold Niebuhr, vénéré par les personnalités de l’establishment pour des motifs intéressants que je vais devoir laisser de côté.) La bataille pour contrôler l’ennemi intérieur est tout à fait à propos aujourd’hui, et devrait être une préoccupation de première importance pour ceux qui veulent faire face de manière constructive aux graves défis d’aujourd’hui.

Noam Chomsky

(1) Aux Etats-Unis, une partie des climato-septiques présente le réchauffement climatique comme un canular monté par le camp progressiste qui chercherait ainsi à prendre le pouvoir, NDT.

(2) Martin Hart-Landsberg et Paul Burkett, China and Socialism, Market Reforms and Class Struggle, Monthly Review Press, New York, 2005.

29/05/2010

«Des enfants meurent à cause des gangsters de la Bourse » Jean Ziegler

Dans ses livres qui ont marqué l’opinion, Jean Ziegler n’a cessé de dénoncer le caractère absurde et criminel des politiques du capitalisme envers les peuples du tiers monde. Il a été le rapporteur spécial pour le droit à l'alimentation du Conseil des droits de l’homme aux Nations unies de 2000 à 2008. Michel Collon l'a interrogé à Genève sur la crise, la Bourse, la faim, Obama, Israël…

 


Jean Ziegler interviewé par Michel Collon

Source: michelcollon.info

La crise t’a surpris ?
Dans sa violence, oui. Je ne pensais pas que les truands de la finance allaient ruiner l’économie mondiale à une telle vitesse : 1.800 milliards de valeurs patrimoniales ont été détruites. Pour les pays du tiers-monde, c’est une catastrophe totale. Mais aussi pour les pays industrialisés.

Ce sont encore les pauvres qui paient ?
Oui. Le 22 octobre 2008, les quinze pays de l’euro se sont réunis à Paris. Sur le perron de l’Elysée, Merkel et Sarkozy ont dit : « Nous avons libéré 1.500 milliards d’euro  pour le crédit et pour  augmenter le  plafond d’autofinancement de 3 à 5% ». La même année, les mêmes pays européens ont réduit leurs subventions pour le programme alimentaire mondial (qui ne vit que de ces subventions) de 40 %. De six milliards de dollars à moins de quatre milliards.
Ce qui fait qu’au Bangladesh, on a supprimé les repas scolaires. Un million d’enfants  sont gravement et en permanence sous-alimentés. Ces enfants meurent donc à cause des gangsters de la Bourse. Il y a là des morts véridiques. Les spéculateurs, aujourd’hui, devraient être jugés au tribunal de Nuremberg.

Quelle leçon les puissants ont-ils tiré de la crise ?

Aucune. Prenons l’exemple de la Suisse. Le contribuable suisse y a payé 61 milliards de dollars pour le sauvetage de la plus grande banque : UBS. L’an dernier, en 2009, les dirigeants d’UBS, toujours proche de la  faillite, se sont distribués entre eux des bonus pour quatre milliards de francs suisses ! Le pillage est total et l’impuissance des gouvernements qui se comportent comme des mercenaires est totale aussi. En tous les cas, en Suisse, en France, en Allemagne où j’ai quelques renseignements. C’est un scandale permanent.
Le masque néolibéral est tombé évidemment, avec sa prétendue légitimité. Mais le cynisme et  l’arrogance des banquiers triomphent totalement.

Et du côté du public, sens-tu une évolution ?

Non, si tu regardes les chiffres, ils sont catastrophiques. Toutes les cinq secondes, un enfant meurt de faim. 47.000 personnes meurent de faim tous les jours. Un milliards de personnes (c’est-à-dire un homme sur six) sont gravement et en permanence  sous-alimentés. Alors que l’agriculture mondiale dans l’état actuel de son développement pourrait nourrir sans problème douze milliards d’êtres humains avec 2.700 calories par individu par jour ! Donc, au début de ce siècle, il n’y a plus aucune fatalité. Un enfant qui meurt de faim, au moment où nous parlons, est assassiné. C’est catastrophique.
L’ordre mondial du capital financier globalisé est meurtrier - épidémie, décès par la pollution de l'eau , etc… - et en même temps absurde : il tue sans nécessité. C’est l’ordre des oligarchies et du capital financier mondialisé. Sur le plan de la lutte contre la faim, l’échec est total.

Tu as été, de 2000 à 2008, le rapporteur des Nations-Unies sur le problème de la faim dans le monde. Quel bilan tires-tu ? As-tu servi à quelque chose ?Oui. La conscience a augmenté. Plus personne aujourd’hui, ne considère ce massacre quotidien comme un fait de la nature. On va en Europe, je crois, et en tout cas dans les pays de la périphérie vers une insurrection des consciences. Il faut une rupture radicale avec ce monde cannibale.

Alors que le problème de la faim n’est pas résolu, on dépense de plus en plus pour faire la guerre.

En 2005, pour la première fois, les dépenses mondiales d’armement (pas les budgets militaires, juste les dépenses  d’armement) ont dépassé mille milliards de dollar par an. Nous vivons dans un monde d’une absurdité totale.

Obama avait pourtant fait de belles promesses…
Il est vrai qu’Obama suit totalement la surdétermination de l’Empire. Je ne l’ai jamais rencontré, c’est sûrement quelqu’un de bien, mais la réalité qu’il affronte est effrayante. Les Etats-Unis restent la plus grande puissance industrielle au monde : 25 % des marchandises industrielles sont produites  par eux, avec pour matière première le pétrole : 20 millions de baril par jour dont 61% sont importés. On peut l’importer de régions comme le Moyen-Orient ou l’Asie centrale, ce qui les force à maintenir une force armée totalement hypertrophiée, et le budget fédéral est donc complètement parasité par les crédits militaires… Mais telle est la logique de l’Empire.

Quel est ton sentiment sur ce qui se passe maintenant en Israël et comment cela peut-il évoluer ?
Je pense que Tel-Aviv dicte la politique étrangère des Etats-Unis avec le lobby de l’AIPAC, comme puissance déterminante.

Avant les politiciens, ce sont quand même d’abord les multinationales pétrolières qui décident d’armer Israël.

Oui, la logique fondamentale est que pour les intérêts pétroliers, il faut un porte-avion stable. Et l’Etat d’Israël mène - ce n’est pas moi qui le dit, c’est un rapporteur spécial des territoires occupés - une politique permanente de terrorisme d’Etat. Tant que ce terrorisme continue, il n’y aura pas de paix au Moyen-Orient, il n’y aura pas de fin au conflit Iran - Irak, ni rien du tout. Tout est sans issue sauf si enfin l’Union européenne se réveillait, tu comprends ?

Que pouvons-nous faire, nous Européens, pour la réveiller ?
Depuis juin 2002, existe un accord de  libre échange entre Israël et les 27 pays de l’Union européenne qui absorbent 62% des exportations  israéliennes. Dans cet accord, l’article 2 (c’est le même dans tous les traités de libre échange) dit : le respect des droits de l’homme par les partis contractantes est  la condition pour la validité de l’accord. Mais les violences faites aux Palestiniens - vol de la terre, torture permanente, éliminations extrajudiciaires, assassinats, organisation de la sous-alimentation comme punition collective – tout cela, ce sont des violations permanentes des droits de l’homme les plus élémentaires. Si la Commission européenne suspendait pendant 15 jours l’accord de libre-échange, les généraux israéliens reviendraient à la raison immédiatement. Or, l’Europe des 27, ce sont des démocraties, c’est à nous de jouer, nous opinions publiques.

Comment ?

Il faut forcer nos gouvernements. Nous ne sommes pas impuissants. En Belgique, il y a beaucoup de problèmes, en Suisse et en France aussi. Mais une chose est certaine : les libertés publiques existent. Il faut se saisir de ces libertés publiques pour imposer à nos gouvernements un changement radical de politique, c’est tout. S’ils ne le font pas, alors il ne faut plus voter pour eux, tu comprends, c’est aussi simple que ça !

Mais tous ces gouvernements sont d’accord de soutenir Israël. En France, par exemple, que ce soit l’UMP ou le PS, ils soutiennent Israël.
Soutenir la sécurité et la permanence d’Israël, c’est une chose. Mais cette complicité avec le terrorisme d’Etat et la politique de colonisation, ce n’est pas possible. C’est la négation de nos valeurs, c’est « du fascisme extérieur » : c’est-à-dire que nos valeurs sont démocratiques à l’intérieur de nos frontières et à l’extérieur, nous pratiquons le fascisme par alliance.

Et enfin, le rôle des médias dans tout ça ?
Ils sont complètement soumis. Notamment en période de crise, les journalistes ont peur pour leur  emploi. L’agressivité du lobby israélien est terrible. Moi, j’ai subi la diffamation la plus effroyable, et ça continue aux Nations-Unies d’ailleurs, c’est grâce à Kofi Annan que j’ai survécu. Israël est un danger pour la paix du monde, Israël cause d’effroyables souffrances. Et dans ce pays, les opposants comme Warschawski sont complètement marginalisés. Mais si l’opposition israélienne anticoloniale et anti-impérialiste n’a pas la parole, n’a pas d’influence, eh bien, nous allons vers la catastrophe. Il faut soutenir les opposants.

Et le rôle des médias à propos de la crise ?
La crise est présentée comme une fatalité, une catastrophe naturelle. Alors que les responsables sont identifiés !