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Sous couvert de l’inattaquable excuse de la sécurité, le gouvernement de Mariano Rajoy considère préventivement le manifestant comme dangereux. Il est ainsi automatiquement regardé comme une menace à la loi grâce au nouveau projet législatif de « Sécurité citoyenne » adopté par le conseil des ministres le 29 novembre dernier.
Des policiers arrêtent des manifestants lors d’un défilé contre la réforme du droit à l’avortement, le 20 décembre 2013 à Madrid (Andres Kudacki/AP/SIPA)
Metteur en scène et dramaturge, Astrid Menasanch Tobieson travaille entre la Suède et l’Espagne. Elle est membre du groupe de théâtre Sta ! Gerillan. La lettre ci-dessous était initialement adressée aux journalistes suédois et a été publiée le 19 décembre. Avec l’autorisation de l’auteure, la traductrice a pu la retranscrire en français.
Mathilde Rambourg
La lettre d’Astrid Menasanch Tobieson
Bouleversée, je vous écris sous le coup de l’indignation. L’Espagne, dans peu de temps, empruntera le chemin qui mène d’une démocratie ouverte à ce qui risque de devenir une démocratie fasciste et autoritaire.
Je vous écris après les événements qui se sont produits dans le quartier de Kärrtorp à Stockholm (où un groupe néonazi ultraviolent a attaqué une manifestation antirasciste il y a quelques jours).
Je vous écris à propos de qui se trame en Espagne. Je crois en tout cas que la Suède et l’Espagne se ressemblent en un point : l’avancée du fascisme devant l’indifférence de la société. Le 19 novembre, le gouvernement espagnol a approuvé un projet de loi dont le but est d’en finir avec les manifestations et les contestations au régime actuel. La méthode est classique : instaurer le silence grâce à la répression.
Avortement non, sécurité citoyenne oui ?
Le 29 novembre dernier, le Conseil des ministres du gouvernement conservateur espagnol a approuvé le projet de loi « Sécurité citoyenne » qui réforme le code pénal. Le texte, qui réduit les droits et libertés civiles (mais pas celle de faire l’apologie du franquisme) est unanimement rejeté par les mouvements sociaux, les syndicats, l’opposition, les organisations professionnelles comme celles des juges pour la démocratie, l’association unifiée des gardes civils ou la fédération des journalistes d’Espagne.
Je vous demande maintenant de l’aide, je vous demande d’informer. Le samedi 14 décembre à Madrid s’est déroulé une des 6 000 manifestations qui se sont organisées cette année en Espagne. Je le répète : une des 6 000.
Ces dernières années, le réseau de protection sociale a été ébranlé : privatisation des théâtres, tentatives de privatiser les hôpitaux, droit du travail ébranlé et transformé depuis sa base, licenciements innombrables, familles chassées de leur domicile, éducation civique suspendue dans les écoles, etc. Et afin de clore une longue liste, le vendredi 20 décembre, le gouvernement a approuvé la réforme du droit à l’avortement.
Ce que l’on a désigné comme une crise économique est, depuis le début, avant tout une crise démocratique. La couverture médiatique en Suède et en France sur la situation en Espagne a été très faible, et son analyse d’un point de vue social, inexistante.
La manifestation qui s’est tenue au pied du Congrès de Madrid le samedi 14 décembre, avait pour but de protester contre une nouvelle proposition de loi : la « ley de Seguridad Ciudadana », loi de Sécurité citoyenne.
Un groupe Facebook : 30 000 euros
Cette loi, qui contient 55 articles et punit autant d’actes différents, prévoit des amendes pour le manifestant, allant de 100 à 600 000 euros. Les infractions ?
Pour commencer, toutes les manifestations non-déclarées et prenant place devant le Congrès ou autre édifice appartenant à l’Etat – comme celle qui s’est déroulée samedi 14 à Madrid – seront interdites et la sanction ira jusqu’à 30 000 euros par participant. Cela sera le cas lorsque plusieurs personnes seront considérées comme un groupe.
L’interdiction des manifestations non-déclarées s’appliquera également aux réseaux sociaux. Se rassembler en tant que groupe sur Internet, autour d’une opinion, sera sanctionné de 30 000 euros. Créer un groupe, sur les réseaux sociaux ou dans un lieu public, autour de symboles ou de drapeaux, sera interdit : 30 000 euros d’amende.
Si dans une manifestation, un citoyen manifeste avec une capuche ou avec le visage couvert : 30 000 euros d’amende.
Capture d’écran du Huffington Post espagnol qui montre huit photos prises en 2013, qui ne pourront être diffusées en 2014 (Huffingtonpost.es)
Refuser de décliner son identité devant un policier : 30 000 euros.
Empêcher un policier de remplir sa fonction : 30 000 euros, ce qui, dans la pratique, signifie que les sit-in comme ceux qui initièrent le mouvement du 15-M en Espagne [ « Les Indignés », ndlr], seront strictement interdits.
Déshonorer le drapeau espagnol : 30 000 euros [en France, cet acte est passible de 1 500 euros d’amende, ndlr].
Réaliser un dessin satirique, prenant pour sujet, par exemple, un politique, sera interdit.
Utiliser des pancartes critiquant la nation espagnole : 30 000 euros.
Filmer ou photographier un policier en service : 30 000 euros.
Note de la traductrice
Les dénonciations faites par des policiers bénéficient de la présomption de véracité. Par conséquent, c’est celui qui fait l’objet de l’accusation qui devra démontrer la non-véracité de ce qui est avancé par les agents. Le système d’accusation fonctionnait ainsi également sous la dictature franquiste.
Selon l’écrivain Javier Marias, c’est une négation de la justice : cela revient à condamner directement l’accusé car il sera incapable de démontrer qu’il n’a pas pas commis l’acte dont on l’accuse puisque l’on part de la base que si, il l’a fait. Il sera d’autant plus difficile à l’accusé d’apporter des preuves à cause de la loi qui interdit de photographier ou de filmer des agents de l’ordre.
Et la liste n’est pas exhaustive. Dans tous les cas, le témoignage d’un policier ou d’un agent de sécurité sera suffisant pour infliger une amende au citoyen.
D’aucuns peuvent par conséquent se demander : l’Espagne fait-elle face à un mouvement de manifestations violentes ? Eh bien non. Le chef de la police Ignacio Casido a déclaré que ces 6 000 manifestations sont jusqu’à ce jour le mouvement le plus pacifique de l’histoire de l’Espagne.
Il n’y a pas si longtemps, l’Espagne était encore une dictature. Il n’y a pas si longtemps non plus que la guerre civile a eu lieu. Tous les débats sont politiques. Informer d’un événement est un acte politique. Ne pas le faire est un acte politique. Le silence est, au plus haut point, un acte politique. Le choix de garder le silence se fige dans la mémoire des générations. Cette loi néofasciste qui va être votée n’est pas sans lien avec la montée des fascismes en Europe. Cela nous concerne tous.
Je m’adresse à tous les journalistes, aux éditorialistes en France. Vous qui détenez l’espace médiatique. Je vous demande sincèrement de briser le silence vis-à-vis du régime qui est en train de s’imposer en Espagne.
Je vous demande de commencer à informer. Je vous demande de soutenir la liberté d’expression avec vos articles et vos apports au débat, je vous demande d’y apporter des analyses rigoureuses et profondes. Informez ! Informez sur tout !
Yves Artufel - éditeur bouquiniste « Je suis quelqu’un de très possible »
Yves Artufel est libraire, éditeur et poète. Il écrit des livres, il lit les textes des autres, il les imprime, il les vend dans ce qu'il appelle son épicerie littéraire. Il prend aussi la route pour faire connaître son travail au-delà des horizons de Châteauroux-les-Alpes. C'est, selon ses propres mots, quelqu'un de très possible.
Réalisation : Caroline Fontana, son et Kiyé Simon Luang, photographies. Durée 8’00’’, novembre 2012, Châteauroux-les-Alpes, Embrunais
Le trou du ciel est blanc comme la lune est noire quand elle n'est pas là ; et je me dis qu'il en va de cette année 2014 comme depuis tout le temps depuis tant et tant d'années : un vaste réservoir de ressources rêveuses ; et puis, depuis, tout là dedans, aujourd'hui, que vont devenir nos bateaux ivres ? toutes ces péripéties qui farce et attrapes moi si tu le peut, 'pan !' fait l'un à la foire questionne que je réponde, Ô mais réponds que je questionne ….. Ô l'escalade du mont paradoxe ! comme il est doux et cruel !
du fond du trou de ton ciel, la lune est aussi blanche que ton sourire est étrange ; et le penseriez vous ? La plus belle histoire d'amour ? En inversant la courbe de l'espoir ?
Sur le pont qui coule sous le ciel, du fond de l'or du temps va cette année pour un début qui sans cesse rigole en se fracassant sur les goudrons et sur les murs de notre civilisation ; vaille que vaille, dit l'homme sur son enclume, en regardant l'infini ; et l'étoile continu de pleurer rose au cœur de tes oreilles.... et l'infini continu de rouler blanc de ta nuque à tes reins et l'Homme continue de saigner noir à ton flanc souverain
Education alternative, école à la maison : lorsque, Logan LaPlante grandit, il veut être heureux et en bonne santé. Ce petit génie de 13 ans explique comment le "piratage" de son éducation a contribué à lui permettre d'atteindre cet objectif.
traduit (USA) par Martine Aubert, Edition Rivages, août 2013
560 pages, 24,50 €
Voici un étonnant roman, un pavé même, qui au début peut faire peur. En effet, on se demande un peu ce qu’on fait là, plongé brusquement dans le quotidien d’une famille américaine moyenne, éleveuse de moutons dans les Appalaches, un milieu rural et clos dont la vie est rythmée par les saisons et l’Église.
Tout démarre au moment où Dellarobia s’apprête à commettre l’irréparable. Dellarobia est la mère de deux jeunes enfants, Cordelia et Preston et l’épouse presque accidentelle de Cub, suite à une grossesse à 17 ans, dont l’enfant mort-né a basculé dans le silence et un oubli imposé. Ce mariage précipité l’avait empêchée, elle qui était plus brillante que la moyenne locale, d’aller étudier à la fac, pour se retrouver à la place, jeune épouse installée dans la chambre d’enfant d’un jeune homme bon mais lourdaud, écrasé par son père mais surtout sa mère, Hester, une femme de poigne, rude et méprisante. Les parents de Dellarobia étaient morts, la belle-famille était propriétaire d’une exploitation, c’était donc à considérer comme une chance.
Tout démarre donc au moment où Dellarobia est sur le point d’envoyer tout valser, faire craquer ce vernis familial étouffant sous lequel elle dissimule tant bien que mal un ennui abyssal. Elle est en chemin pour aller rejoindre un homme plus jeune qu’elle dans une cabane de bûcherons et tout bascule effectivement, mais pas dans le sens où elle l’imaginait. Ce qui l’attend sur la montagne, ce n’est pas un homme, mais un spectacle aussi éblouissant que bouleversant. La montagne est en flammes, un incendie qui lui semble comme un signe quasi mystique, car il ne s’agit pas de feu, mais de millions de papillons orange vif accrochés aux arbres.
Ce sont des King Billies, des monarques qui habituellement se regroupent l’hiver au Mexique.
Cet évènement hors du commun va bouleverser les habitudes et la vie de cette petite communauté rurale, et encore plus celle de Dellarobia, celle qui a eu la « vision » et qui bien-sûr ne peut révéler pourquoi elle était là-haut à ce moment-là sur la montagne, ce qui va déchainer toutes sortes de délires à son sujet, dont les médias vont s’emparer. La vie de Dellarobia bascule donc du tout au tout et plus encore lorsqu’un séduisant professeur d’université, Ovid Byron, spécialiste des monarques, va débarquer et installer un labo dans une grange de la propriété, en l’embauchant comme aide-laborantine.
Il est impossible de résumer ce roman d’une telle densité en quelques mots, mais l’auteur a réussi le prodige, vu le sujet très centré sur un espace-temps réduit, de faire que très vite on ne pense plus du tout qu’on en arrivera jamais au bout. Outre une façon de saisir le quotidien des plus banals d’une mère de deux jeunes enfants, avec une grande justesse et vraiment beaucoup d’humour, ce roman brasse avec autant de justesse de nombreux sujets qui posent question : changements climatiques et environnementaux, opportunisme politique et médiatique, fracture sociale, société de consommation et précarité, rapports entre monde rural et éducation ainsi qu’entre religion, tradition et science, sens de la vie de couple, dilemme entre maternité et épanouissement personnel…
Bien que tout cela se déroule donc chez les red-necks, comme ils se nomment eux-mêmes non sans ironie, même si le terme peut avoir une conation péjorative, Barbara Kingsolver réussit à donner à ce roman une envergure universelle dans laquelle beaucoup pourront se reconnaître.
De plus, toute lectrice et lecteur deviendra ainsi un(e) spécialiste confirmé(e) des monarques, ces merveilleux papillons migrateurs qui hibernent en grappes, toujours sur les sommets du centre du Mexique - leur installation dans les Appalaches étant pour l’instant heureusement pure fiction - avant de s’envoler mystérieusement par millions pour un trajet de plus de 4000 kms vers le Nord, d’où les générations suivantes reviendront pour hiberner sur les mêmes lieux que leurs parents, sans jamais y être allés auparavant.
Cathy Garcia
Barbara Kingsolver, est née le 8 avril 1955 aux États-Unis, à Annapolis, dans le Maryland. Journaliste, poète et romancière, elle a écrit une dizaine de livres, tous publiés chez Rivages. Connue pour son engagement écologiste, elle tient une place à part dans la littérature américaine. Que ce soit sous forme de romans, d'essais, de nouvelles ou encore de poèmes, ses écrits reflètent son intérêt pour la justice sociale et la biodiversité. En 2010, elle a obtenu le prestigieux Orange Prize pour Un autremonde.
Phoebe est atteinte du syndrome de l’insensibilité aux androgènes, un trouble de la différenciation sexuelle. Elle est née avec des chromosomes mâles et des testicules, mais son corps ne produit pas de testostérone. Après une enfance "normale" de fille, elle a appris à la puberté qu’elle ne pourrait jamais avoir d’enfants et qu’il faudrait procéder à l’ablation de ses testicules, car elle risquait un cancer. L’heure est venue de demander quelques explications à sa mère – ses deux sœurs étant atteintes du même syndrome. Un jour, elle décide de partir à la rencontre d’autres personnes qui partagent cette identité "intersexuelle". Résultat : un road-movie émouvant et drôle à travers l'Australie, émaillé d'images d’archives des années 1980 et 1990.
Un terrain truffé de caves troglodytiques aménagé depuis quinze ans en village est devenu un lieu ouvert à tous où l’on expérimente un mode de vie alternatif
L’histoire de Troglobal commence en 1997, lorsque cinq amis, dont deux acheteurs, décident de réinvestir un terrain truffé de caves troglodytiques avec, en contrebas, une ancienne petite carrière d’exploitation de tuffeau. De cette friche situé près de la Loire, ils décident de faire un village ouvert. À force de bonne volonté et de soutien, la décharge sauvage que l’endroit est devenu au fil du temps et la végétation envahissante sont déblayées pour rendre le lieu habitable.
Les entrées de deux caves troglotytiques.
Un lieu collectif
Le site troglodytique est actuellement occupé par une vingtaine d’âmes en moyenne, qui s’installent ou repartent selon leurs besoins et envies. Le quotidien se partage entre un lieu privé – une cave aménagée, une maison, un bus, une cabane, un dôme –et des lieux communs.
Dans la forêt, un dôme en bois recouvert de métal sert d’habitation.
La grande cour au cœur du hameau en est le centre névralgique. C’est par elle que l’on accède à la cuisine, à la réserve, au bureau avec ordinateurs et téléphone à disposition, à la bibliothèque ou à la salle de musique, chaque espace étant une cave creusée dans la roche.
La cour est le centre du collectif.
Décoration de la porte de la cuisine.
Le village lui-même devient alors un lieu collectif réunissant des gens de tous bords et de tous horizons, car aucune ligne politique ou religieuse n’oriente la philosophie de ce groupe. L’aspiration commune de ceux qui s’y établissent est de prendre un peu de recul face à une société qui ne répond pas pleinement à leurs attentes. Sans hiérarchie établie, les décisions concernant les travaux, les rénovations ou les tâches à effectuer se prennent en commun, au cours de réunions hebdomadaires.
Forge.
Ces discussions, parfois vives, servent aussi à soulever les problèmes que pose inévitablement la vie en collectivité : l’utilisation des espaces, les éventuelles difficultés relationnelles ou l’établissement des priorités de la semaine peuvent être sujets à controverse. Pas de vote à la majorité, le consensus est de mise dans le fonctionnement de ce collectif.
Création et soudure d’une sphère en tiges de métal autour d’un arbre de la cour.
Cependant, la part de liberté est assez grande pour que chacun soit aussi libre de prendre ses propres initiatives à tout moment. Ainsi la bonne volonté de chacun est-elle le moteur du quotidien du village Troglobal, suivant la motivation à effectuer ou non les tâches journalières comme la cuisine, la vaisselle, l’entretien du jardin, des toilettes sèches, etc.
Une démarche écologique et alternative
La dynamique du lieu incite les résidents du village à adopter une démarche écologique. Les toilettes sèches en sont un exemple, comme l’eau, puisée dans une nappe phréatique et évacuée dans un système de phytoépuration avant d’être rendue à la nature. Dans le même esprit, la serre et le potager permettent quelques récoltes issues du travail de la terre fourni par certains. Celles-ci leurs étant insuffisantes pour se nourrir, les habitants récupèrent, chez les commerçants et agriculteurs des alentours, des aliments consommables mais impropres à la vente.
La réserve abrite le fruit de la récup’. On y stocke les vivres.
La récup’ n’est d’ailleurs pas exclusivement alimentaire. Pour les travaux, les rénovations et autres chantiers, la plupart des matériaux sont des rebuts chinés çà et là. Avec peu d’argent, les villageois subviennent à leurs besoins primordiaux et peuvent avoir du temps pour se consacrer à leurs occupations personnelles.
La part de l’art
Un lion sculpté dans le tuffeau surplombe la porte du bureau et de la bibliothèque.
L’art, par exemple, est omniprésent à Troglobal, sous différentes formes : musique, peinture, photo ou vidéo… Partout où le regard se pose, des sculptures ornent les lieux. Celles de pierre, taillées dans le tuffeau, surplombent la cour et décorent les caves. Celles de métal, immense sphère de tiges de fer ou arbre immortel, modèlent un paysage atypique. Portes et fenêtres sont souvent ornées de vitraux créés dans l’atelier voisin.
L’art a toute sa place au village. Le fondeur prépare les moules pour ses futures sculptures de bronze.
Soudure de feuilles d’arbres en bronze sur un arbre de métal.
Car outre les caves d’habitation et les caves collectives, on trouve dans le village des caves ateliers. Vitrail donc, poterie, fonderie, couture, forge ou polyvalent, ces espaces sont à la disposition de qui veut y travailler. La taille de pierre, vocation historique du lieu, n’est pas en reste puisque l’ancienne carrière, tout en bas du site, est en cours de rénovation.
La consolidation du ciel de carrière par la confortation des piliers et la création de voutes en pierre est un chantier titanesque, mais qu’importe : les artisans qui s’y attèlent ont le temps.
C’est là le luxe qu’ont choisi les habitants de ce lieu, quelle que soit leur activité : le temps et la solidarité, forces de leur collectif, plutôt que le coûteux confort superflu qui engendre la surconsommation des ressources et des biens. Ils travaillent la pierre, le métal ou la terre. Ils conçoivent des sculptures de tuffeau ou de bronze, des vitraux ou des meubles. Mais surtout et avant tout, ils créent un mode de vie choisi et responsable.
Entretien | “Le vent se lève…” sera son dernier long métrage. Le cinéaste japonais, que nous avons rencontré à Tokyo, nous explique pourquoi.
Le 04/01/2014 à 00h00 Propos recueillis par Stéphane Jarno - Télérama n° 3338
Jeremie Souteyrat pour Télérama.
Cette fois c'est bien fini. Juré, craché, Hayao Miyazaki ne fera plus de longs métrages d'animation. Le vent se lève, il faut tenter de vivre, qui sortira le 22 janvier 2014 en France, est son ultime grande œuvre. A 72 ans, le pape de l'animation japonaise prend sa retraite. Lors d'une conférence de presse à Tokyo le 6 septembre 2013, Miyazaki a argué qu'il lui fallait de plus en plus de temps pour mener à bien ses films. Handicapé par des problèmes de main et de vue, le père deTotoro et de Princesse Mononoké dit avoir du mal à suivre le rythme. Pour dessiner, il doit désormais pencher la tête à quelques centimètres du papier comme il l'a montré aux six cents journalistes médusés. Séquence émotion.
Extrait de Mon voisin Totoro (1988).
L'homme, qui nous accueille trois mois plus tard dans son grand chalet de bois à un jet de pierre des studios Ghibli, n'a pourtant rien d'un vieillard chenu usé par le labeur. Alerte, un rien goguenard, affublé du sempiternel tablier blanc qu'il revêt pour accueillir les journalistes (son bleu de travail ?), le septuagénaire semble surtout préoccupé par sa chaudière à bois. Pendant l'entretien, il se lèvera plusieurs fois pour tisonner le foyer et régler l'appel d'air. Fichues bûches trop humides… A l'évidence, ce pois sauteur n'est pas mûr pour les thés dansants, les sorties en car ou de longues parties de Scrabble.
Sorti en juillet dernier au Japon, Le vent se lève… y a rencontré un énorme succès (plus de six millions d'entrées, 85 millions de dollars de recettes), un peu moins cependant que son film précédent, Ponyo sur la falaise. Surtout, fait très inhabituel, cette production Ghibli a créé la polémique. Le vent se lève… relate en effet une partie de la vie de Jiro Horikoshi, brillant ingénieur aéronautique, célèbre pour avoir conçu les plans du Zéro, redoutable avion de combat qui s'est illustré pendant la guerre du Pacifique, de Pearl Harbor aux kamikazes. Un sujet sensible et pas franchement destiné aux enfants, qui a valu à Miyazaki un tir croisé de critiques. Traité de « traître » et d'« anti-japonais » par la droite nationaliste nippone qui ne lui pardonne pas sa peinture au vitriol de l'armée impériale, le cinéaste a également subi l'ire des médias sud-coréens.
Au pays du Matin calme, le portrait avantageux du concepteur du Zéro, que certains considèrent comme un criminel de guerre, n'a pas fait recette. Difficile pourtant de soupçonner ce pacifiste de longue date d'avoir fait un film militariste. Tout son propos tient plutôt dans une question lancinante : artiste ou ingénieur, un créateur doit-il renoncer à son œuvre au gré des circonstances ou vivre sa passion, sans se préoccuper des conséquences ? Pour le cinéaste aux grosses lunettes d'écaille qui allume une énième cigarette, la réponse ne fait aucun doute. Et le vers de Paul Valéry qui donne son nom au film et qu'il déclame soudain en français, « Le vent se lève ! … Il faut tenter de vivre », prend alors tout son sens. Tenter d'être, d'avancer, d'accomplir, malgré un sort contraire.
Bande annonce du Vent se lève, il faut tenter de vivre, en salles en France le 22 janvier 2014.
Survenus pendant la genèse du film, le séisme de mars 2011 et la catastrophe de Fukushima y ont aussi laissé une empreinte profonde. Coincés dans cette banlieue au sud-ouest de Tokyo, sans électricité, transports ni moyens de communiquer, beaucoup d'employés des studios Ghibli ont campé plusieurs jours dans les locaux, sans rien pouvoir faire, choqués. Après s'être demandé si réaliser ce film avait encore un sens, Miyazaki a trouvé des raisons supplémentaires de le mener à terme. A l'écouter, le monde court à sa perte et il est urgent de vivre intensément ou bien de prendre la tangente, de s'évader dans l'imaginaire. On rêve beaucoup dans son film, mais la réalité a toujours le dernier mot.
Depuis Fukushima, Ghibli a rompu son contrat avec Tepco, la compagnie nationale qui gère les centrales. « Pas d'électricité nucléaire chez nous », clament des affiches ainsi qu'un drapeau sur le toit des studios. Miyazaki a pris sa plus belle plume pour dire dans Neppu, le magazine gratuit de Ghibli, tout le mal qu'il pense de la politique du gouvernement de droite actuel et particulièrement du Premier ministre, Shinzo Abe, dissimulateur et va-t-en-guerre. Une contestation certes marginale mais gênante pour les autorités nippones qui auraient préféré que le « trésor national vivant » reste dans son rôle de bon papa de la nation et continue à faire de jolis films pour les enfants. Pas de chance, Papy fait de la résistance.
Avant de tirer le rideau et de partir pour de longues randonnées en montagne, l'ours des studios Ghibli nous a accordé un entretien au long cours où il s'explique, tempête, sourit et baisse (un peu) la garde. Une première.
Pourquoi évoquer la vie de Jiro Horikoshi dans votre nouveau film ? Parce que c'était un ingénieur aéronautique particulièrement brillant dans le Japon des années 30, qui a réalisé le rêve de milliers de gamins : concevoir un avion exceptionnel.
Vous brossez de lui un portrait idéalisé… Comme beaucoup d'ingénieurs, Horikoshi parlait peu et n'a pas laissé beaucoup d'écrits, ni de livres de souvenirs. Pour étoffer son personnage, je me suis inspiré d'un roman de la même période, Le vent se lève. Son auteur, Tatsuo Hori, a écrit beaucoup de poèmes et de livres qui expliquent la mentalité et la façon de penser des Japonais des années 20-30. J'ai senti que l'ingénieur et le romancier venaient du même terreau, et ils se sont mêlés naturellement en moi.
“Il y a dans le Japon d’aujourd'hui le même genre d’atmosphère délétère que dans les années 20-30.”
Jiro Horikoshi a joué un rôle important pendant la Seconde Guerre mondiale. En faire un personnage de fiction, c'est prendre des libertés avec l'Histoire… Beaucoup d'ouvrages savants ont été écrits à son propos, mon film ne changera pas cette réalité historique. J'ai surtout voulu dépeindre le sentiment commun qu'avaient tous les jeunes à l'époque, qui voyaient leur pays se diriger tout droit vers la destruction. Il y a le même genre d'atmosphère délétère dans le Japon d'aujourd'hui, les ressemblances entre les deux périodes sont frappantes. En 1923, il y a eu le grand tremblement de terre du Kanto, quatre-vingt mille victimes, surtout dans les incendies qui ont suivi. Puis les bombardements américains pendant la guerre, deux cent mille morts. Ce genre de situation peut se reproduire au Japon d'ici quelques années.
Sur quoi vous appuyez-vous pour faire de telles prédictions ? Tout est déjà en place. Pendant cinquante ans, la population du Japon a augmenté et l'économie s'est développée en parallèle. Récemment la situation s'est brutalement inversée, nous ne savons pas où nous allons, la population vieillit, diminue et le gouvernement fait n'importe quoi pour relancer la croissance économique. Le pressentiment de cette chute fait naître un nationalisme de pacotille et toutes sortes d'idées négatives.
Dessin préparatoire de Hayao Miyazaki pour Le vent se lève.
Malheureusement cette tendance concerne peu ou prou tous les pays d'Asie orientale et porte en germe les conflits futurs. Sans parler de la dégradation alarmante de l'environnement, non seulement à cause de Fukushima, mais aussi de la pollution atmosphérique en Chine, dans beaucoup de grandes villes où l'air est irrespirable. Pour résoudre ce problème de pollution atmosphérique, la Chine se tourne vers le nucléaire, quelle ironie ! Tout ce que nous avons vécu dernièrement n'était qu'une sorte de prologue.
Comprenez-vous les polémiques qui ont suivi la sortie du Vent se lève… au Japon et en Corée du Sud ? Je savais que ce film ne passerait pas auprès des personnes qui ne raisonnent qu'en termes d'idéologie. On ne peut pas comprendre ce qui se passe dans le monde en étant manichéen, « pour » ou « contre ». Comme le disait Saint-Exupéry, « on ne voit bien qu'avec le cœur ».
Horikoshi ne mérite pas d'être condamné. Lorsque les autorités militaires lui ont demandé de créer un avion puissant, il a résisté à sa façon, en faisant traîner, en changeant les plans. Ce n'était pas un militaire, ni un homme d'affaires, il voulait juste, disait-il, « faire quelque chose de beau » et n'imaginait pas des conséquences aussi dévastatrices. Les avions sont avant tout de beaux rêves auxquels les ingénieurs donnent une forme. Jiro Horikoshi a fait de son mieux dans une période extrêmement difficile.
“Les gens qui pensent être très purs et vivre de manière innocente dans le monde actuel sont des sots ou des hypocrites.”
Vous êtes pacifiste, pourtant la guerre est très présente dans vos films… Sans doute ne suis-je pas aussi pacifiste que cela [rires]. L'humain est pétri de contradictions, les gens qui pensent être très purs et vivre de manière innocente dans le monde actuel sont des sots ou des hypocrites. La mécanique militaire, l'armement, les machines me fascinent depuis l'enfance. Mon regard a changé avec l'âge, mais j'aime toujours les étudier, les démonter pièce par pièce, comprendre leur mécanisme. Et je ne me lasse pas de les dessiner.
Auriez-vous aimé être pilote ? Quand on est myope comme moi ou Jiro Horikoshi dans le film, c'est « niet » dès le départ, on ne peut même pas en rêver. Le plus frustrant n'est pas tant de ne pouvoir voler que d'être bloqué tout jeune, de voir des routes qu'on ne pourra jamais prendre.
Dessin préparatoire pour Le vent se lève.
Vous êtes né en 1941. Gardez-vous un souvenir de la guerre ? J'étais très petit. Nous habitions alors une maison à Utsunomiya, à une centaine de kilomètres au nord de Tokyo. Un soir la ville a été bombardée. Je me souviens très bien de notre fuite. Nous avions entassé des affaires dans une carriole et mon père me portait sur son dos. Je me rappelle surtout les lumières, pas la peur. J'étais fasciné par le ciel nocturne illuminé, j'en garde de fortes impressions visuelles. Par chance, notre maison n'a pas été détruite, mais nous n'y sommes pas retournés. Quand mon père est allé récupérer quelques affaires le lendemain, il est tombé sur un gamin effrayé qui s'y était réfugié.
Il y a peu, j'ai reçu une lettre de ce « jeune » rescapé qui me raconte comment mon père l'a rassuré, lui a dit de rester autant de temps qu'il le voulait et lui a même donné une barre de chocolat ! Une rareté inouïe à l'époque : moi, je n'en avais jamais mangé ! Je me demande bien où il l'avait trouvée, sans doute se la réservait-il [rires]. L'enfant, lui, a pensé que c'était un dieu descendu sur Terre… Cette anecdote m'a fait un immense plaisir, comme une bulle venue du passé où j'ai pu entrevoir les jeunes années de mon père, un homme que je n'imaginais pas, bon et ouvert.
“Ce film est aussi une réconciliation. J’ai beaucoup pensé à mon père en le préparant.”
Vous semblez avoir mis beaucoup de votre histoire personnelle dans ce film. L'entreprise de votre famille paternelle fabriquait des pièces pour le Zéro… Oui, l'extrémité des ailes. C'était une petite usine régionale, mon père s'occupait de l'aspect commercial et s'est pas mal enrichi ainsi. Il travaillait pour les militaires, c'est pour cela qu'il avait du chocolat… Enfant, je détestais l'idée que ma famille ait prospéré grâce à la guerre, j'ai eu de longues et houleuses conversations avec mes parents pendant toute mon adolescence. Je trouvais mon père bien léger et assez irresponsable. Longtemps je n'ai pas eu une haute opinion de lui. En préparant Le vent se lève…, j'ai beaucoup pensé à lui ; je me suis aperçu à la lumière de différentes anecdotes que son détachement et sa gaieté cachaient une réflexion en profondeur. Ce film est aussi une réconciliation.
Vous avez minutieusement reconstitué le Japon des années 20-30. Eprouvez-vous de la nostalgie pour cette époque ? Je ressens un sentiment complexe. C'est le temps d'avant, celui de mes parents, des habits traditionnels, des salutations, de l'étiquette même entre frères et sœurs. Une époque sans bruits agressifs, ni néons criards, encore au contact de la nature, mais où le Japon était un pays pauvre et rural, ballotté par la crise économique. Un passé que nous avons rejeté en bloc lorsque nous étions jeunes. Ces usages, ces formules de politesse, ces cérémonials nous semblaient d'un autre âge ; ma génération a sciemment détruit tout cela. Nous prétendions que c'était à cause de ce genre d'esprit et de traditions que notre pays était entré en guerre… Mais nous ignorions qu'en détruisant tout cela le Japon deviendrait moins beau.
L'un des personnages de votre film affirme qu'une vie de créateur, que l'on soit artiste ou ingénieur, ne dure que dix ans. Qu'avez-vous fait des quarante années restantes ? J'ai commencé l'animation quand j'avais 22 ans, mais il a fallu quelques années avant qu'elle devienne réellement une extension de moi-même. Cette période de grâce, cette décennie créatrice a commencé lorsque j'avais 28 ans, après j'ai dû devenir réalisateur, c'est alors que les difficultés ont commencé [rires]. J'étais très heureux en tant qu'animateur. J'adorais dessiner et n'avais pas besoin de rester tard au studio. Je dessinais très vite.
Vous êtes désormais officiellement à la retraite, pourtant on a du mal à vous imaginer désœuvré… Tant que je pourrai conduire ma 2 CV, je viendrai tous les jours aux studios. La différence, c'est que j'arrive un quart d'heure plus tard le matin et que je repars une demi-heure plus tôt. Ce qui me laisse le temps de voir davantage mon épouse et de travailler sur d'autres projets. Maintenant que je suis libéré des contraintes de rentabilité, je dois profiter de cette liberté pour créer…
… un autre film ? Pas un long métrage en tout cas. Je ne veux pas faire de promesses que je ne pourrai pas tenir. Je travaille sur une bande dessinée, un manga qui raconte une grande bataille dans le Japon du XVIe siècle, mais je crains déjà d'avoir vu trop grand, je n'en vois pas le bout ! J'ai aussi en projet plusieurs petits films d'animation ainsi que des expositions temporaires pour le musée Ghibli. Un lieu qui m'est cher et où je finirai sans doute en vitrine.
Avez-vous des regrets ? Non, j'ai été très gâté, j'ai pu accomplir tout ce que je voulais. Evidemment sur certaines scènes je trouve encore des choses à améliorer. Mais même s'il y a quelques défauts, j'ai toujours fait de mon mieux.
Proposé par Carole Gaessler dans le cadre du Monde en face, ce documentaire raconte le combat que mène, pour sa survie, le peuple Awa, menacé par la déforestation toujours croissante de la forêt amazonienne où il habite et les intérêts des multinationales du bois et de l’agroalimentaire.
« Laissez nos arbres en paix ! C’est dans la forêt qu’on chasse nos tortues, des tapirs ou des singes hurleurs. Je ne veux pas voir ma forêt détruite. […] Nous n’arrivons plus à chasser, nous ne pouvons plus entendre le piétinement des animaux qui se rapprochent, il n’y a plus jamais de silence. Nous ne pouvons pas vivre sans la forêt. Où vivrions-nous sans elle ? Cette forêt est la nôtre. » Ainsi parle Irakatoa, l’aîné des quelque trois cent cinquante Awa recensés, habitant encore dans l’Amazonie brésilienne. Hormis cette tribu, répartie en quatre villages, il resterait une centaine de membres de ce peuple dans les profondeurs de la jungle et coupés de tout contact avec le monde extérieur. Ces Indiens, qui comptent parmi les derniers chasseurs-cueilleurs nomades de la planète, voient leur existence menacée depuis plusieurs décennies maintenant. Si rien n’est fait pour les protéger, ils sont amenés à disparaître dans un avenir très proche. Selon Carlos Medeira, juge fédéral (Etat du Maranhão), « les Awa se trouvent dans une situation très difficile du fait de leur nomadisme et parce qu’ils sont sous la pression des trafiquants de bois et des fermiers ».
Cette poignée d’indigènes gêne en effet les multinationales du bois et de l’agroalimentaire peu regardantes sur les lois. Car le territoire Awa est bien délimité et protégé par la Constitution brésilienne. Mais que pèsent les intérêts de trois cent cinquante Indiens face à des enjeux financiers absolument colossaux ? A elle seule, l’exploitation illégale des forêts dans le monde, dont celle d’Amazonie, rapporterait quinze milliards de dollars par an ! Alors, et malgré les contrôles de l’Ibama (Institut brésilien de l’environnement et des ressources naturelles), les bûcherons se cachent à peine et les scieries clandestines se multiplient. En moins de vingt-cinq ans, les Awa ont ainsi perdu 30 % de leur domaine. Ici, la coupe du bois n’est que la première étape de la déforestation. Ensuite viennent souvent les cultivateurs de soja qui allument des incendies pour « nettoyer » rapidement le terrain, afin d’y planter des semences à croissance rapide. Ailleurs, toujours sur le territoire indien, une autre société internationale exploite la plus grande mine de fer à ciel ouvert. Pour acheminer le minerai, une voie ferrée longue de 800 kilomètres a été construite à travers la forêt, avec le soutien de la Banque mondiale et de l’Union européenne… Aujourd’hui, pour faire valoir leurs droits, les Awa n’ont pas d’autre solution que d’attirer l’attention sur eux, aidés par des ONG. Pressé par ces dernières, le gouvernement brésilien a pris des mesures pour restituer leurs terres aux Indiens, dès le début 2014. Affaire à suivre !
Beatriz Loiseau
Documentaire Durée 52’ Réalisation Laurent Richard Production Premières Lignes, avec la participation de France Télévisions Année 2013
« Dernier noël capitaliste » lançait le journal Hara Kiri en décembre 1972… Visionnaire, non ? Mais ils n’avaient pas prévu entre autre le retour des tablettes (depuis le bon vieux temps de l’argile) et des téléphones plus intelligents que leurs utilisateurs… Flonflons, cotillons, soyons mignons, la même rengaine encore et toujours, joyeux naufrage et bonne bourre 2014 !?
Oh bien-sûr, ça n’empêche pas les vrais sentiments, les vœux vraiment les plus sincères, ça n‘empêchera pas non plus les gens de mourir de froid dans la rue, noyés en Méditerranée, bombardés par ci, découpés par là, balayés par les statistiques, ça n’empêchera pas les trafics en tout genre, d’influences ou d’organes, mais on se plie bon gré, malgré, à la tradition, à l’habitude, au désir aussi, toujours un peu suspect, de capter un peu de joie précieuse entre deux factures.
Et puis on peut aussi lire ce numéro. Il est sans flonflons, sans trompettes, il est même un peu triste, un peu noir, un peu trash… Et pourquoi pas ? S’exprimer c’est aussi ne pas laisser dans l’ombre ce qui pourrait déranger, c’est affronter le malaise, ouvertement, ça peut même en devenir libérateur. Être libre de flonflons et de trompettes, prêt à accueillir chaque instant qui passe, avant ou après minuit, sans vouloir changer hier, sans craindre de ne pouvoir changer demain, mais simplement être ici et maintenant, heureux ou malheureux, amer ou amoureux, en pleine forme ou sur les genoux, pessimiste ou optimiste, lâche ou courageux, gagnant ou perdant, qu’importe ! Juste être là, laisser les sourires se poser sur nos lèvres s’ils le veulent et repartir quand ils auront envie d’aller fleurir d’autres bouches, laisser nos mains s’ouvrir et se fermer comme des battements d’ailes, en attendant le printemps qui revient toujours, même si tout se détraque, même si les coutures craquent et patatrac !
Se dire que plus on prend de claques, plus le sang circule…et la vie va !
C.G.
Être libre, ce n’est pas seulement se débarrasser de ses chaînes,
c’est vivre d’une façon qui respecte et renforce la liberté des autres. Nelson Mandela
(18 juillet 1918- 5 décembre 2013)
AU SOMMAIRE
Délit de poésie : Carl Sonnenfeld, Stéphane Bernard, Murièle Modély, Jérôme Pergolesi, Thierry Roquet.
Délit-foutoir : quelques streets imaginaires, un poète, un prisonnier et des signes de vieillesse, le tout passé au shaker d’Éric Dejaeger.
Suivi d’un Déli(t)reau clavier de Léon Maunoury
Résonance : Le plancherde Perrine le Querrec aux Ed. Les doigts dans la prose, 2013.
Délits d’(in)citations quelques touches supplémentaire de féminin dans ce numéro qui se moque un peu de la parité. On n’en pense pas moins.
Vous trouverez le bulletin de complicité au fond en sortant et vous l’offrirez à vos meilleurs ami(e)s comme à vos pires ennemi(e)s, le commerce ne prend jamais parti, seulement la monnaie.
Illustrateur : Jean-Louis Millet
"jlmi ? Grand spécialiste en rien mais curieux de tout : dessin, peinture, photo, écriture, édition virtuelle, chasse aux alternatives… le tout mis en actions concrètes dans l'animation virtuelle de blogs et de sites :
Vos signatures et celles de vos proches sont toujours sollicitées ! 185 000 signatures ont été recueillies pour l'instant, et il ne reste que 15 jours pour aider à dépasser les 200 000. L’issue de cette initiative est sans illusion mais elle aura tout même permis de faire bouger les lignes. Trente parlementaires européens ont par exemple récemment soutenu la campagne et des groupes locaux se sont formés dans nombre de villes européennes. Prêts à repartir à la prochaine ICE avec une meilleure préparation et en même temps que le référendum suisse attendu d’ici deux ans ? Vous pouvez vous tenir informé sur la plateforme francophone www.revenudebase.info.
Précédé d’un avant propos de Jean L’Anselme et mis en forme par Pierre Soletti, doté d'une bonne cinquantaine de poèmes, le recueil est en préparation chez Gros Textes. Date de parution : 15 janvier. Ce sera le septième titre d'Eric Dejaeger chez cet éditeur.
Tirage limité à 110 exemplaires. Prix : 13 € (+ 2 € de port).