L’accident de l’usine Lubrizol à Rouen est peut-être symptomatique de la situation de notre pays, où, dans le domaine de l’environnement, ça ne s’arrange décidément pas.
Au-delà des propos voulus rassurants de la ministre Delphine Batho, le même genre de déclarations que nous avions entendu par d’autres voix, lors de la catastrophe de Tchernobyl, on peut tout de même s’interroger sur l’optimisme un peu béat des autorités qui affirment, droites dans leurs bottes, qu’il n’y a pas de danger pour les populations.
Quand des centaines de personnes sont prises de nausées, de vomissements, de mal de tête, n’est-il pas aventureux d’assurer que tout danger est écarté ?
Et si c’était le cas, pourquoi alors avoir annulé un match de foot qui devait se tenir à Rouen ?
La ministre invoque le « principe de précaution », mais celui-ci ne devait-il pas s’appliquer aussi aux populations de la ville et des environs ? lien
Qu’en est-il du Mercaptan ? À quelle dose est-il dangereux ?
D’après Wikipedia, ce gaz incolore, dont l’odeur rappelle celle du chou pourri, est un produit naturel émis par les déjections animales, ainsi que par la décomposition des matières organiques, d’où sa présence dans le gaz naturel.
Extrait : « Il est extrêmement inflammable, et nocif, toxique à hautes concentrations par inhalation et affecte le système nerveux central provoquant des maux de tête, des nausées et une irritation du système respiratoire (…) il peut provoquer une dermatose avec la peau, et il est donc recommandé de laver abondamment la peau et les yeux en cas de contact à de fortes concentration (…) plus dense que l’air, il a tendance à s’accumuler dans les endroits confinés ». lien
On pourrait donc conclure que, s’il y a eu de nombreux cas de nausées, et autres maux de tête, vomissement, les populations ont été soumises à de fortes concentrations de ce gaz toxique, et tout n’est peut-être pas si bénin.
Michelle Rivasi, l’une des fondatrices de la Criirad, et députée européenne d’EELV, (europe écologie les verts) reproche d’ailleurs aux autorités d’avoir failli dans l’application du principe de précaution, car s’il est possible que la valeur limite d’exposition ne devrait pas poser de problème pour les individus bien portants, quid des autres ?
Elle a déclaré : « je suis d’accord avec le fait qu’il ne faut pas provoquer des mouvements de panique injustifiés mais il faut aussi et surtout protéger les personnes les plus sensibles et notamment celles souffrant d’affections respiratoires et cutanées chronique ». lien
L’organisation Next-up va plus loin, affirmant qu’il s’agirait de supposé méthanethiol (CH3-SH) appelé de façon générique mercaptan ou méthymercaptan, ajoutant « nous ne connaissons pas la formule chimique exacte du gaz issue de la « réaction chimique en cours » qui n’est plus sous contrôle.
Next-up remarque qu’une certaine confusion existe dans les déclarations officielles, évoquant des « opérations de colmatage », mais aussi la « neutralisation », ce qui n’est pas la même chose, et conclut affirmant « il s’agit d’un produit toxique, voire neurotoxique puisqu’il y a un « ressenti » négatif du métabolisme humain, notamment du système nerveux central » ajoutant « dans ces conditions il ne fait aucun doute : son inhalation actuelle, même à faible dose qui provoque des effets sanitaires impacte toutes les personnes dites en état de faiblesse, mais aussi (…) directement les femmes enceintes avec des conséquences inconnues sur leurs futurs enfants, dit autrement, elle en sont actuellement les principaux cobayes ». lien
Il y a eu donc volonté de minimiser l’importance de l’accident, ce qui nous ramène à de bien mauvais souvenirs, lorsque la pollution radioactive avait poliment évité la France.
Restons dans le domaine de l’environnement : que se passe-t-il donc dans la centrale nucléaire du Bugey, à quelques encablures de Lyon ?
Le 15 octobre 2012, suite à un prélèvement, l’ASN était informée par la direction de la centrale de la présence de tritium dans la nappe souterraine proche du site.
La quantité de tritium mesurée dépassait la cote des 100 Bq/litre, largement au-delà du taux admis par la norme (8 Bq).
Plus grave, Il aura fallu attendre 2 mois, soit le 12 décembre 2012, pour connaitre l’origine de la fuite : « un circuit enterré dans un caniveau permettant de transférer les effluents entre divers bâtiments ».
La partie du caniveau incriminé se trouvait entre les réacteurs 2 et 3, et le Rhône.
On peut déjà se poser la question : pourquoi permettre ces transferts d’eau radioactive, et pourquoi ne pas les stocker dans des containers, au lieu de prendre le risque d’une fuite ?
EDF assure que la fuite à été colmatée, admettant qu’une partie de cette eau radioactive ait rejoint le fleuve et la nappe phréatique.
Sauf que depuis le 15 octobre les taux de radioactivité relevés jusqu’à aujourd’hui n’ont cessé d’augmenter.
Alain Cuny, membre du collectif « sortir du nucléaire » s’inquiète : « de 2 choses l’une, soit la première fuite était bien plus importante qu’annoncée, soit une seconde fuite est intervenue depuis le 15 octobre (…) les populations doivent savoir que la plaine de l’Ain alimente en eau les communes riveraines de la centrale, mais également Lyon ». lien
Pour information, cette centrale nucléaire est l’une des plus vieilles de France, et la prudence voudrait que le nouveau gouvernement français, désireux officiellement de tourner la page nucléaire, la ferme, en même temps que celle de Fessenheim, et de quelques autres.
Ce n’est pas une nouveauté de découvrir le manque évident de transparence dans tout ce qui touche le nucléaire, mais tout de même, lorsque la santé des populations est mise en danger, on pourrait s’attendre à un peu plus de sens des responsabilités.
La volonté de cacher, de dissimuler est toujours présente en matière nucléaire, et comme l’écrit Alain Corréa, sur le site de l’écologie, Reporterre, EDF a tenté de banaliser l’incident qui s’est produit le 5 avril 2012 à la centrale de Penly, ce qu’il démontre en reconstituant les circonstances qui l’ont produit, prouvant que c’est souvent suite à une erreur humaine, et une certaine inexpérience, que la plupart de ces accidents surviennent. lien
Restons dans le domaine nucléaire, notamment dans celui du transport des matières radioactives, puisque très discrètement, un convoi nucléaire vient de traverser la France, depuis l’Italie, empruntant la voie historique, qui, d’après les promoteurs du projet Lyon Turin serait dangereuse.
C’est l’un des arguments qu’utilisent ceux qui veulent imposer ce projet ferroviaire, et on essaye de comprendre : si cette ligne était dangereuse, il est irresponsable d’y faire circuler des convois de matières nucléaires. lien
D’ailleurs, le 21 janvier 2013, un convoi transportant 5 fûts de matières radioactives, a déraillé à proximité de St Rambert d’Albon, déraillement faisant suite à celui du 23 décembre 2012, et qui n’a pas fait l’objet d’une grosse médiatisation, le moins qu’on puisse dire. lien
Et bien sur, Areva et la Préfecture ont déclaré que « cet évènement était sans conséquence sur l’environnement et les populations », ce qui n’est pas l’avis de Sud Rail et d’Europe écologie, lesquels dénoncent l’exposition aux radiations des cheminots qui sont intervenus pour remettre le train sur les rails. lien
Sans y chercher quelconque malice, il est tout de même amusant de découvrir que les deux ministres de l’environnement portent des noms qui se télescopent : Batho, Duflot…l’environnement serait-il en train de prendre l’eau de toute part dans notre beau pays ?
Au Japon, la situation continue de se dégrader, et tout est fait, comme l’affirme un chercheur du CNRS, pour taire la vérité et domestiquer les masses.
Un habitant de Fukushima a comparé le ghetto de Varsovie et les zones contaminées de Fukushima, déclarant « les gens de l’extérieur savent que s’y trouve l’antichambre des camps de la mort, regardent ailleurs et continue de certifier que le nucléaire, c’est incontournable ». lien
Aujourd’hui les poissons que l’on pourrait pêcher au large des côtes japonaises atteignent des pics de radioactivité : avec 2540 fois la norme sanitaire autorisée, ils sont en train de battre de tristes records.
Un poisson, surnommé Mike, atteignait un nouveau sommet de pollution radioactive avec 254 000 Bq/kg, dépassant largement le taux de la rascasse mesurée en aout 2012 (25 400 Bq/kg) , alors que la norme autorisée est fixée à 100 Bq /kg. lien
Alors Tepco envisage de tendre des filets pour limiter le déplacement des poissons irradiés, mais comment pourrait-il prendre dans ces mêmes filets la radioactivité que la centrale dévastée rejette depuis bientôt 2 ans ? D’autant que l’arrivée imminente des eaux souterraines largement polluées provenant du site ne devrait rien arranger.
Comme dit mon vieil ami africain : « le maïs ne gagne jamais face à la poule ».
Olivier Cabanel
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